Intervention de Vincent Segouin

Réunion du 23 octobre 2019 à 15h00
Changement d'assurance emprunteur — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Vincent SegouinVincent Segouin :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis le 1er janvier 2018, les emprunteurs peuvent résilier l’assurance décès de leur crédit immobilier pour faire jouer la concurrence et diminuer les coûts.

Plus d’un an après, le résultat espéré n’est pas à la hauteur. Après analyse du marché, on s’aperçoit que les banques ont usé de tous les moyens possibles pour dissuader leurs clients de partir. Seul un public averti y a eu recours. Les moyens employés par ces mêmes banques n’ont d’ailleurs pas tous été loyaux…

Nous ne comprenons pas pourquoi les « bancassureurs » réclament, d’un côté, la loi Hamon sur les contrats d’assurance de particuliers, sous couvert du bien du consommateur, et, de l’autre, refusent l’amendement Bourquin sur les contrats emprunteurs.

Dès 2017, la fédération des banques s’est opposée en contestant, auprès du Conseil constitutionnel, la validité des mesures adoptées par la loi. Elle a aussi combattu les recommandations sur les bonnes pratiques à adopter fixées par l’ACPR. Ces démarches ont été infructueuses, mais elles auront permis aux banques de gagner du temps pour organiser la défense de leur portefeuille.

Assez vite, par le jeu de la concurrence, les clients ont compris qu’ils avaient souscrit un contrat groupe collectif avec un taux unique, quel que soit l’âge des souscripteurs, alors qu’ils pouvaient avoir un contrat individuel fondé sur l’âge des souscripteurs et sur leur situation.

Le contrat collectif est donc très lucratif pour les banques. Nous comprenons pourquoi ces dernières ont craint l’ouverture du marché.

Pour décourager les clients, mais aussi la concurrence, elles ont utilisé différentes méthodes : contestation de la date de résiliation, absence de réponse aux résiliations, demandes de garanties parfois injustifiées – perte d’emploi ou invalidité sur des prêts immobiliers locatifs –, chantage à la majoration des taux d’emprunt si l’assurance n’est pas adossée…

Toutefois, il faut le dire, c’est surtout l’incroyable méconnaissance de cette loi par les emprunteurs qui profite aux banques. Telle est la raison d’être de la proposition de loi de M. Bourquin.

Je ne puis qu’être favorable à son article 1er, qui fixe, comme pour tout contrat d’assurance, une date d’échéance à prendre en compte pour l’exercice du droit de résiliation. Cette disposition est indispensable pour éviter à l’avenir les litiges et contentieux sur les résiliations.

Sur l’article 2, j’ai émis de fortes réserves, considérant qu’il était compliqué pour l’assureur d’adresser un courrier spécifiant la date d’échéance, le délai et les modalités ; considérant, aussi, que c’était contraire au bon fonctionnement d’une société commerciale.

De fait, la mise en place de ces documents d’information va contraindre l’assureur à revenir chaque année sur le contrat, à renégocier les conditions et à augmenter ses frais de gestion, ce qui peut faire perdre une partie du bénéfice de la réduction des coûts attendue par les emprunteurs.

À mon avis, il aurait été plus opportun de prévoir un contrat d’assurance avec des conditions particulières, un contrat similaire à ceux qui existent déjà et que nous connaissons tous, avec une date d’échéance et un délai de préavis.

J’en viens à l’article 3 – le fameux name and shame... Autant je comprends la motivation de notre collègue Martial Bourquin, déçu par les résultats de la loi et les moyens employés pour la remettre en cause, autant je suis rassuré que le rapporteur ait supprimé cet article.

En tant que citoyen, en effet, je ne puis accepter qu’on inscrive sur un mur de la honte les noms des bancassureurs ou de tout autre professionnel ne respectant pas les règles.

Ces professions sont réglementées et surveillées ; les mauvais élèves doivent être sanctionnés en fonction de l’importance de leur faute et de leur mauvaise foi, mais en aucun cas ces sanctions ne doivent être étalées sur la place publique. Le name and shame, c’est ni plus ni moins que l’acceptation de la délation ! Nous n’avons surtout pas besoin de cela aujourd’hui.

Quant aux derniers articles du texte, je les trouve intéressants : ils fixent le délai d’application de la loi et permettront d’en évaluer l’impact par rapport à l’objectif fixé.

Pour ces raisons, je voterai la proposition de loi !

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