Intervention de Daniel Chasseing

Réunion du 24 octobre 2019 à 10h30
Pouvoir de dérogation aux normes attribué aux préfets — Adoption d'une proposition de résolution

Photo de Daniel ChasseingDaniel Chasseing :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’adoption par le Sénat à la quasi-unanimité du projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dont l’examen s’est achevé cette semaine, a été un signal fort quant aux souhaits d’évolution. La chambre des territoires est particulièrement attentive à la situation des collectivités locales, qui sont touchées par la multiplication des règles, l’inflation législative et la complexification des normes, comme l’ont montré les auditions que nous avons réalisées dans le cadre de la délégation présidée par Jean-Marie Bockel.

J’en veux pour preuves quelques exemples concrets qui remontent de nos territoires. Vous les connaissez tous.

Dans le secteur de l’urbanisme, la question de l’accessibilité peut, pour des questions financières, mettre en difficulté une petite commune. Elle a également des répercussions sur nos hôtels et restaurants de campagne pour lesquels il est complexe, au regard de la faible rentabilité, de se mettre en totale conformité avec l’ensemble de la réglementation.

Il en est de même de la question des logements sociaux prévus dans la loi pour un accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, qui mériterait d’être ajustée en fonction de la commune, de ses besoins et de ses capacités réelles.

Par ailleurs, la rigidité de l’avis conforme de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, la CDPENAF, pénalise les petites communes dans l’obtention d’un permis de construire.

On trouve d’autres exemples nombreux dans le secteur sportif, comme les toilettes accessibles aux personnes handicapées pour l’arbitre, ou encore dans le secteur agricole. Sans la mise en place de normes très contraignantes, des subventions peuvent être refusées aux collectivités.

L’expérimentation prévue par le décret du mois de décembre 2017 fut un exercice riche d’enseignements. Ce pouvoir utilisé environ une soixantaine de fois a montré que l’adaptation aux territoires était une nécessité rendant plus efficace l’application de la loi.

Le lien entre l’échelon local et l’échelon national doit continuer à se construire et cela passera par un lien plus fort entre les services de l’État et les collectivités territoriales. L’écoute des élus locaux est primordiale, notamment celle du maire, qui connaît son territoire et les besoins de ses administrés. Sur ce point, la création d’une instance départementale permettant d’interpréter la norme ou d’identifier les difficultés dans la mise en œuvre de la norme à l’échelle locale nous paraît essentielle.

La création d’un guide de bonnes pratiques et d’un processus d’information est tout aussi importante. Elle permettra une fluidification dans les échanges.

La mise en place d’un mécanisme de suivi et d’évaluation est également nécessaire. La pratique nous démontre que nous devons constamment veiller à ce que la réglementation reste adaptée aux spécificités locales.

La République est une et indivisible, mais ses territoires ne sont pas les mêmes. Cela constitue sans doute notre richesse, mais rend parfois contreproductive une administration trop centralisée, chaque territoire présentant des spécificités et des handicaps propres.

Il nous faut identifier le problème avec précision. Il me semble qu’il est double : inflation normative et inadaptation aux territoires. Partant de là, le pouvoir de dérogation des préfets, à l’écoute des maires et des acteurs du territoire, va dans le bon sens.

Mon groupe est convaincu qu’une plus grande décentralisation pourrait régler nombre de difficultés évoquées précédemment.

De plus, nous devrons mener des discussions sur les matières auxquelles ces dérogations pourront s’appliquer, ainsi que sur les objectifs et les conditions de celles-ci. Ce travail préalable est nécessaire et nous permettra d’offrir un cadre précis et une définition claire de la consolidation du pouvoir de dérogation.

En conclusion, mes chers collègues, oui à l’adaptation des normes aux territoires, oui à la simplification et à la souplesse normative, oui à la décision d’adapter la loi en fonction des territoires et des collectivités.

Le préfet nous paraît le bon niveau. Le groupe Les Indépendants est favorable à la consolidation de ce pouvoir de dérogation aux normes qui lui est attribué.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion