Intervention de Catherine Troendle

Réunion du 24 octobre 2019 à 14h30
Statut de citoyen sauveteur — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Catherine TroendleCatherine Troendle :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, l’arrêt cardiaque subit demeure une des causes de mortalité les plus importantes et méconnues du grand public. En France, entre 40 000 et 50 000 personnes décèdent d’un arrêt cardiaque chaque année, soit quinze fois plus que le nombre de morts sur les routes.

Or, en matière d’arrêt cardiaque, le pire est de ne rien faire, comme vous l’avez dit, monsieur le secrétaire d’État, puisque le délai d’intervention a un impact très significatif sur les chances de survie de la victime. Sans prise en charge immédiate, plus de 92 % des arrêts cardiaques sont fatals. Sept fois sur dix, ces arrêts surviennent devant témoins, mais seulement 40 % de ceux-ci font les gestes de premiers secours. La conséquence triste, mais logique, est qu’en France le taux de survie à un arrêt cardiaque ne dépasse pas les 8 %, ce taux étant quatre à cinq fois plus élevé dans les pays où les lieux publics sont équipés en défibrillateurs automatisés externes et où la population est formée aux gestes qui sauvent.

Face à ce constat, plusieurs mesures ont d’ores et déjà été prises. Je fais ici référence à la loi du 13 août 2004 rendant obligatoire l’apprentissage des gestes qui sauvent à l’école. Je fais également référence à la loi du 17 mars 2015 visant à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire, qui est issue d’une proposition de loi de notre collègue Jean-Pierre Leleux. Je fais enfin référence à la loi du 28 juin 2018 relative au défibrillateur cardiaque, issue quant à elle d’une proposition de notre collègue Jean-Pierre Decool.

C’est dans cette perspective que se situe la proposition de loi déposée par notre collègue député Jean-Charles Colas-Roy et adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale. Son objectif est à la fois clair et louable : porter l’attention sur ce sujet majeur et favoriser les interventions, d’une part, en formant la population aux gestes qui sauvent et, d’autre part, en modelant un régime de responsabilité favorable à l’intervention.

Partageant pleinement ces objectifs, la commission des lois a examiné le texte de l’Assemblée nationale au travers d’un crible rigoureux afin d’en garantir l’efficacité. Elle n’a donc pas hésité à écarter des dispositions qui ne relèvent pas du domaine que la Constitution confie à la loi, qu’elles fussent soit de nature réglementaire, soit dépourvues de portée normative.

Je me félicite d’ores et déjà que la méthode proposée ait reçu l’assentiment de notre assemblée, puisque les amendements déposés ne portent que sur des points techniques précis et ne tendent pas à ce que le texte retrouve son champ initial.

La commission des lois a tout particulièrement porté son attention sur l’article 1er de la proposition de loi qui tend à créer un statut de « citoyen sauveteur » afin de mieux protéger les personnes venant en aide de manière volontaire et bénévole aux victimes d’une urgence vitale.

Nous avons souhaité réécrire cette disposition afin de redéfinir les conditions d’intervention des sauveteurs dans des termes plus juridiques. Ainsi, la commission des lois a remplacé l’expression de « citoyen sauveteur » par celle de « sauveteur occasionnel et bénévole » qui est plus appropriée au concours apporté à l’exercice d’un service public.

La commission des lois a souhaité conserver du texte transmis la référence au régime jurisprudentiel de collaborateur occasionnel du service public, les atténuations de responsabilité pénale et le régime spécial de responsabilité civile applicable aux sauveteurs. Toutefois, elle a souhaité apporter une correction de nature à l’exonérer pour tous les préjudices qu’il pourrait causer lors de son intervention, sauf faute lourde ou intentionnelle, et pas seulement pour ceux causés à la personne secourue elle-même.

De plus, j’ai souhaité tenir compte d’une partie des remarques soulevées par l’amendement déposé par le groupe La République En Marche.

En ce sens, l’amendement que je vais vous présenter réintroduit les obligations d’appeler les secours et de prendre les premières dispositions pour toute personne, et non pas pour les seuls sauveteurs occasionnels. En revanche, il ne semble pas opportun d’élargir le champ de la proposition de loi à tous les acteurs de la sécurité civile, comme le prévoit l’amendement du groupe La République En Marche, puisque l’objectif est bien de consacrer un régime spécial pour les sauveteurs occasionnels et eux seuls.

Par ailleurs, la commission des lois a approuvé les dispositions de l’article 7 de la proposition de loi qui tendent à consolider la liste des personnes autorisées à accomplir les actes de sensibilisation au secourisme. Elle a seulement souhaité y inclure certains services des établissements de santé. En effet, beaucoup d’entre eux détiennent les compétences nécessaires pour assurer une formation au secourisme.

Enfin, la commission des lois s’est également montrée favorable aux dispositions de l’article 11 tendant à renforcer les sanctions pénales en cas de vol ou de dégradation de défibrillateurs. Les modifications qu’elle a apportées ont pour seul objet d’assurer la clarté et la précision de la loi pénale.

Vous le voyez, mes chers collègues, la commission des lois a souhaité ne garder dans ce texte que des dispositions efficaces et effectives. Par l’amendement que je vais vous présenter, elle a également souhaité faire un pas vers le consensus, monsieur le secrétaire d’État, dans l’espoir de voir cette proposition de loi adoptée rapidement.

Si des dispositions bien faites sont indispensables, elles ne sont toutefois pas suffisantes pour lutter contre les arrêts cardiaques. Je pense sincèrement que la nécessité de se former aux premiers secours découle d’une obligation morale et civique pour toute personne, notamment celles qui ont la charge d’en encadrer d’autres, dans quelque contexte que ce soit. Il devrait s’agir là d’un réflexe que nous devrions tous avoir.

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