Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux bien aller vite, mais il faut tout de même prendre le temps de dire les choses !
J’ai aujourd’hui le plaisir de défendre un texte qui non seulement semble emporter l’adhésion du Sénat, mais qui, surtout, parle aux Français, plus particulièrement à ceux qui sont engagés ou vont s’engager dans un prêt immobilier.
La souscription d’un prêt immobilier est un moment important, car il matérialise le choix d’un lieu de vie d’une famille, mais aussi parce qu’il engage financièrement pour de longues années.
Si, aujourd’hui, les taux de crédits immobiliers sont historiquement bas, avec 1, 25 % en moyenne hors assurance, les prix d’achat sont de plus en plus élevés. Cette situation amène les ménages à emprunter beaucoup d’argent. La Banque de France, d’ailleurs, s’en inquiète. Le taux d’effort des ménages a connu une augmentation importante ces dernières années, avec un peu plus de 30 % des revenus consacrés, en moyenne, au remboursement des échéances.
J’en viens au sujet qui nous réunit aujourd’hui : la renégociation de l’assurance emprunteur.
La souscription d’une assurance emprunteur est obligatoire lors de la conclusion d’un prêt immobilier. Elle protège l’emprunteur et sa famille contre les accidents de la vie et garantit le remboursement du capital à la banque. C’est donc une assurance extrêmement importante pour de nombreux ménages qui se sont engagés ou qui vont s’engager dans un prêt immobilier pour quinze, vingt, voire vingt-cinq ans.
Je ne reviens pas sur les propos tenus par notre collègue Martial Bourquin, que je remercie de sa ténacité. Il nous a rappelé l’histoire législative des dix dernières années sur le sujet.
Le prix de l’assurance emprunteur peut représenter jusqu’à 30 % du coût total du crédit. Comme nous l’avons constaté lors de nos auditions, le changement d’assurance emprunteur peut représenter une économie sur le coût d’un crédit allant jusqu’à 1 000 euros en moyenne par an. Ce gain peut donc être très important quand on sait que l’endettement des ménages français bat des records.
La négociation de l’assurance emprunteur doit permettre un véritable gain de pouvoir d’achat pour les emprunteurs. Elle est même souvent la variable d’ajustement pour réussir à boucler un plan de financement dans un contexte où l’accession à la propriété est de plus en plus difficile pour les classes moyennes.
Madame la secrétaire d’État, ce gain de pouvoir d’achat est particulièrement bienvenu, alors que le Gouvernement, après avoir supprimé l’APL accession, s’apprête à faire de même pour le prêt à taux zéro, le PTZ, dans les zones B2 et C. Nous regrettons sa suppression dans ces zones, les dernières où les familles modestes peuvent encore acheter leur logement ! Sans le PTZ, elles ne pourront plus réaliser leur projet.
Je profite de l’occasion qui m’est donnée de m’exprimer devant vous pour demander au Gouvernement de revenir sur la suppression du PTZ, cet outil si précieux, qui aide les jeunes ménages à acquérir leur premier logement. La suppression du PTZ sera vécue comme une nouvelle injustice pour les familles qui vivent dans les zones périurbaines et dans nos campagnes.
J’en reviens à ce qui nous rassemble aujourd’hui.
Oui, les marges sur les assurances emprunteur sont énormes. Oui, ce marché reste capté par les banques.
Un tiers des ménages ont un prêt immobilier en cours et 80 % d’entre eux disposent d’une assurance souscrite auprès de leur banque. Nous arrivons à un point de bascule, le coût de l’assurance emprunteur devenant plus élevé que celui du crédit lui-même. Par exemple, pour un crédit de 250 000 euros sur vingt ans, un couple d’emprunteurs âgés de quarante ans versera 35 000 euros d’intérêts, mais 36 000 euros pour l’assurance emprunteur.
Or le marché de l’assurance emprunteur rapporte près de 9 milliards d’euros, compte tenu de la dynamique des prix de l’immobilier. L’encours total des prêts liés à l’habitat a, en effet, franchi le seuil symbolique de 1 000 milliards d’euros en fin d’année dernière.
Depuis dix ans, trois lois ont été votées pour tenter d’ouvrir ce secteur à la concurrence et faire baisser les prix.
Dès lors, pourquoi le secteur ne s’ouvre-t-il pas à la concurrence ? Pourquoi proposons-nous de légiférer encore ? Il faut que ce soit clair : certaines banques – nous ne les citerons pas, mais nous les avons identifiées – recourent à des pratiques dilatoires, afin de priver leurs clients de leur droit au libre choix de l’assurance emprunteur, en contradiction avec l’objectif d’accroissement des possibilités de mise en concurrence qui est celui du législateur, malgré les rappels à l’ordre de l’ACPR, qui a mis le secteur bancaire en garde vis-à-vis de ces pratiques commerciales voilà tout juste un an, et en dépit de l’intervention du CCSF, qui a tenté de clarifier les modalités de résiliation.
L’objectif de la présente proposition de loi est d’assurer l’effectivité du droit au changement d’assurance emprunteur. Nous sommes arrivés à un accord avec Mme le rapporteur, que je remercie de son travail de précision, lequel a permis de conserver l’esprit et l’ambition de notre proposition de loi initiale.
Le texte que nous examinons aujourd’hui a un objectif de clarification, pour éviter que les assurés soient embrouillés, à l’avenir, sur la date de résiliation de leur contrat. Ce point devrait faire consensus, Mme le rapporteur ayant proposé de reprendre la liste que le CCSF avait négociée avec les banques, les assureurs et les associations de consommateurs.
En outre, l’information du consommateur sera renforcée. Tout d’abord, la date de résiliation sera précisée dans la notice que le prêteur est obligé de fournir à l’assuré au moment des premières simulations. L’emprunteur aura connaissance de ses droits dès le début du processus de souscription d’un prêt. Ensuite, et c’est là un point essentiel, nous créons une obligation annuelle d’information du client sur son droit à résiliation et les modalités d’exercice de ce droit.
Nous avions également proposé que la fiche standardisée d’information, la FSI, puisse être envoyée sans frais par la banque, dans un délai de dix jours maximum, pendant toute la durée du prêt. Madame la secrétaire d’État, vous avez déposé un amendement tendant à supprimer cette mesure, au motif qu’elle relèverait du pouvoir réglementaire. Nous en prenons acte, mais nous souhaiterions que le Gouvernement s’engage à faire évoluer le dispositif existant.
La FSI indique les garanties d’assurance que le prêteur exige en cas de substitution d’assurance. C’est donc un document essentiel, dont l’emprunteur doit disposer s’il souhaite engager une démarche de renégociation de son contrat.
Sur proposition de Mme le rapporteur, l’article 2 met en place un régime de sanctions administratives plus efficace, voire dissuasif : la DGCCRF pourra appliquer des amendes allant jusqu’à 15 000 euros par manquement constaté, soit cinq fois plus que l’amende actuelle.
Ce qui est très important également, la DGCCRF aura la possibilité de rendre publiques ces sanctions, le fameux name and shame qui fait souvent plus peur aux entreprises que les amendes.
Enfin, je tiens à rappeler que les mesures adoptées ont vocation à s’appliquer aux contrats en cours.
Voilà un texte qui parle aux Français et qui est susceptible de redonner, comme l’a souligné Martial Bourquin, 3 milliards d’euros à nos concitoyens. Je vous invite donc, mes chers collègues, à le voter, et vous, madame la secrétaire d’État, à le soutenir à l’Assemblée nationale, pour une adoption rapide et définitive.