Intervention de Jean-Marc Boyer

Réunion du 30 octobre 2019 à 15h00
Quel avenir pour l'enseignement agricole — Débat organisé à la demande du groupe communiste républicain citoyen et écologiste

Photo de Jean-Marc BoyerJean-Marc Boyer :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’enseignement agricole a une véritable histoire, avec des missions qui lui sont propres. Enseignement général et technique, il comprend à la fois des stages en exploitation et une ouverture socioculturelle. L’enseignement agricole privé occupe une place importante dans le dispositif et l’offre éducative. Quant aux maisons familiales rurales, elles sont une vraie spécificité, avec des formations par alternance.

L’enseignement agricole a su montrer ses facultés d’adaptation à l’évolution de l’agriculture, à la modernisation de celle-ci au long du XXe siècle. Il a évolué avec la révolution technique et le passage du travail avec cheval et attelage à une mécanisation poussée, parfois exagérée.

Or, depuis une vingtaine d’années, un décalage, une fracture sépare l’évolution de la société et l’adaptation de l’enseignement agricole. La société est téléguidée vers une image de l’agriculteur pollueur, voire criminel, notamment via l’utilisation des réseaux sociaux comme canal de communication au service d’une définition outrancière du bien-être animal et d’une alimentation bio et durable.

Si certains médias mettent l’accent sur les dérives et dénoncent les abus, l’agriculteur aime son travail et ses animaux ; il est passionné par son métier. L’agri-bashingdéveloppé par notre société porte aujourd’hui un vrai préjudice à la profession agricole, ainsi stigmatisée.

L’enseignement agricole s’en trouve modifié et dogmatisé vers des filières environnementalistes en décalage avec une grande partie de la profession. Or, pour rester attractif, il doit rester ouvert à tous les types d’agriculture.

Voilà une trentaine d’années, 90 % des élèves étaient d’origine agricole et rurale et avaient un véritable projet d’installation ; aujourd’hui, ils ne sont plus que 30 % environ dans ce cas. Bien sûr, les autres 70 % sont sensibilisés aux notions agricoles, mais pas au milieu agricole et à son environnement naturel. L’enseignement agricole a formé ces dernières années des jardiniers de la nature qui viennent malheureusement gonfler les chiffres des demandeurs d’emploi…

L’agriculture dite conventionnelle doit reprendre sa place dans le dispositif éducatif, tout en intégrant, bien sûr, les éléments du développement durable. C’est ainsi que l’enseignement agricole retrouvera ses lettres de noblesse en conduisant à l’installation de jeunes agriculteurs pour toutes les agricultures, en formant de jeunes agriculteurs qui soient de véritables chefs d’exploitation, des chefs d’entreprise compétents en gestion et en technologie.

Par ailleurs, les établissements agricoles, lycées professionnels publics ou privés et maisons familiales rurales, sont de véritables outils d’aménagement du territoire. Leurs objectifs pédagogiques sont centrés sur les productions et spécificités régionales. Je pense aux filières viticoles dans le Bordelais et en Alsace et aux filières laitières, fromagères et productions animales dans le Massif central et les Alpes. Ce potentiel de richesse pédagogique régionale et locale doit être renforcé, valorisé et ainsi offrir une véritable plus-value à l’enseignement agricole.

Il est devenu indispensable de revoir les fondamentaux de l’enseignement agricole, afin de lui donner un avenir adapté aux réalités. Notre agriculture a vocation à nourrir la planète : il faut donc valoriser les filières essentielles – laitière, fromagère, bovine, ovine – et les circuits courts, sans oublier la filière viticole.

Notre agriculture est une des meilleures au monde, voire la meilleure.

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