Intervention de Jacqueline Eustache-Brinio

Réunion du 29 octobre 2019 à 14h30
Neutralité religieuse des personnes concourant au service public de l'éducation — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jacqueline Eustache-BrinioJacqueline Eustache-Brinio :

Il est primordial de veiller au respect de la liberté de conscience des élèves, principe fondamental reconnu par les lois de la République, affirmé par l’article 1er de la loi du 9 décembre 1905, et de tout faire pour éviter qu’ils ne soient, du fait de leur vulnérabilité, des proies pour tous les prosélytismes. Comme le faisait observer Lionel Jospin, alors ministre de l’éducation nationale, dans une circulaire de 1989, « rien n’est plus vulnérable qu’une conscience d’enfant ». Et de préciser : « Les scrupules à l’égard de la conscience des élèves doivent amplifier, s’agissant des enseignants, les exigences ordinaires de la neutralité du service public et du devoir de réserve de ses agents. »

Il convient de rappeler que les sorties scolaires constituent des temps d’activités pédagogiques destinés aux élèves et non à leurs parents, qui n’ont en aucun cas l’obligation d’y participer. De fait, l’accompagnement des sorties scolaires est proposé aux parents, sur la base du bénévolat ; il doit, dès lors, s’inscrire dans le respect des principes régissant le service public de l’éducation. Tout parent désireux d’accompagner une classe dans le cadre d’une sortie doit donc se soumettre au principe de neutralité déjà imposé par la loi aux enseignants et aux enfants.

Devant le vide juridique auquel nous nous trouvons confrontés, mais surtout face aux graves menaces pesant sur notre unité et le respect d’un des principes qui la fondent, la laïcité, le législateur ne peut pas rester passif. C’est la raison pour laquelle Jérôme Bascher, Bruno Retailleau et moi-même avions déposé, avec 103 de nos collègues, un amendement au projet de loi pour une école de la confiance visant à interdire aux parents d’élèves accompagnant des sorties scolaires le port de signes religieux ostentatoires. Cette disposition de bon sens, largement adoptée par le Sénat, n’a malheureusement pas été retenue par la commission mixte paritaire.

Par ailleurs, la Fédération des délégués départementaux de l’éducation nationale elle-même, à l’occasion de son congrès de juin dernier, a adopté une motion demandant la reconnaissance de la fonction d’auxiliaire bénévole du service public de l’éducation pour les personnes accompagnant les sorties scolaires, ce qui entraînerait pour ces personnes une obligation de neutralité et de respect de la liberté de conscience des enfants.

Voilà pourquoi j’ai déposé, le 9 juillet dernier, en dehors du contexte médiatique actuel et de toute polémique, une proposition de loi, cosignée par un certain nombre de nos collègues, tendant à assurer la neutralité religieuse des personnes concourant au service public de l’éducation.

Ce texte réaffirme les principes de laïcité et de neutralité religieuse aux articles L. 111-1 et L. 141-5-1 du code de l’éducation et les étend aux parents d’élèves accompagnant les sorties scolaires. Les collaborateurs occasionnels du service public étant, pour l’heure, considérés comme de simples usagers de celui-ci, l’adoption de cette proposition de loi permettra d’étendre à ces personnes l’exigence de neutralité religieuse dans l’exercice de leur mission bénévole auprès des élèves.

Mes chers collègues, il nous appartient aujourd’hui de marquer notre attachement à la République, à ses valeurs et, singulièrement, à la laïcité, sans laquelle l’unité de la Nation est impossible et l’indivisibilité de la République, illusoire. Il nous revient aujourd’hui, dans cet hémicycle, de défendre l’héritage de Jules Ferry et de Jean Zay, en affirmant haut et fort notre détermination à protéger l’innocence et la liberté de conscience des enfants dans un pays secoué par des tensions politico-religieuses.

Il s’agit non pas d’un combat entre la droite et la gauche, mais d’un combat républicain, rien d’autre. Car, comme l’a souligné Robert Badinter, la laïcité est « une grande barrière contre le poison du fanatisme ». Tous les enfants que nous accueillons dans nos écoles sont des enfants de la République, qui doivent pouvoir vivre et s’épanouir en dehors de toute tentative d’influence, sans être les otages de pressions politiques ou religieuses.

Nous avons à former les citoyens de demain dans une école où ils doivent être accueillis avec sérénité et apaisement, sur un socle commun : la République une et indivisible !

4 commentaires :

Le 07/11/2019 à 21:03, aristide a dit :

Avatar par défaut

"Il s’agit non pas d’un combat entre la droite et la gauche, mais d’un combat républicain, rien d’autre."

Et c'est bien au nom de la défense de la République et de ses valeurs fondamentales de non discrimination entre les citoyens que les vrais républicains s'opposent à cette loi.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Le 14/05/2022 à 19:27, aristide a dit :

Avatar par défaut

"Cette disposition de bon sens"

On a le bon sens qu'on peut...

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Le 14/05/2022 à 19:28, aristide a dit :

Avatar par défaut

"Nous avons à former les citoyens de demain dans une école où ils doivent être accueillis avec sérénité et apaisement, sur un socle commun : la République une et indivisible !"

Ils vont être bien accueillis avec tous ces contresens sur la laïcité et la neutralité...

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Le 14/05/2022 à 19:31, aristide a dit :

Avatar par défaut

"Tous les enfants que nous accueillons dans nos écoles sont des enfants de la République, qui doivent pouvoir vivre et s’épanouir en dehors de toute tentative d’influence, sans être les otages de pressions politiques ou religieuses."

C'est raté alors, avec tous ces politiques qui entretiennent tant et plus la confusion et l'erreur sur la laïcité.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Inscription
ou
Connexion