Intervention de Sylvie Robert

Réunion du 29 octobre 2019 à 14h30
Neutralité religieuse des personnes concourant au service public de l'éducation — Discussion générale

Photo de Sylvie RobertSylvie Robert :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a de grandes lois auxquelles il ne faudrait jamais toucher, tout du moins en ce qui concerne les valeurs qu’elles portent, comme la loi de 1905 dont les articles 1 et 2 posent les fondements de la laïcité. Selon ces articles, en effet, « la République assure la liberté de conscience » et « ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. »

Malheureusement, il y a aussi des lois opportunistes, mal faites et mal pensées, que l’on est contraint d’examiner : c’est le cas du présent texte.

Vous prétendez vouloir sortir du flou qui entourerait l’accompagnement des sorties scolaires par les mères voilées et combler ainsi un vide juridique qui serait devenu manifeste. C’est faux !

Aujourd’hui, la jurisprudence administrative est claire et limpide : les parents accompagnateurs sont des usagers du service public de l’éducation et, en tant que tels, ne sont pas soumis à l’obligation de neutralité qui incombe aux agents publics et qui dépasse, d’ailleurs, la seule sphère religieuse.

Seulement, ce postulat, pourtant d’une logique implacable, ne vous convient pas. Vous essayez donc de tripatouiller la loi, afin qu’elle entre en résonance avec votre idéologie – pardonnez-moi l’expression, mais je n’en trouve pas d’autres quand je vois le texte de la commission !

En définitive, vous vous retrouvez à élargir le périmètre de l’interdiction en matière de signes religieux ostensibles – qui prévaut en l’état pour les élèves – aux parents accompagnateurs, tout en tendant à les aligner sur le régime applicable aux agents publics, comme le prévoit le premier alinéa de l’article 1er.

Autrement dit, dans une forme de dualité qui s’apparente davantage à une double confusion, vous ne remédiez à aucun flou. En revanche, vous créez un authentique problème juridique.

Alors que vous prétendez venir en aide aux directeurs d’école pour soi-disant les protéger, ne pensez-vous pas qu’il serait préférable de leur proposer un véritable statut – parce qu’ils l’attendent – et de leur témoigner ainsi une reconnaissance légitime ? Il ne me semble pas que votre proposition de loi figure en haut de la liste de leurs priorités ; il me semble encore moins qu’elle faciliterait leur quotidien et leur permettrait d’organiser des sorties scolaires dans l’intérêt supérieur des enfants que, en l’espèce, vous semblez ignorer.

Au fond, les deux questions connexes que nous pose ce texte sont celles de la laïcité et de notre capacité à vivre ensemble.

S’agissant de la première, je souhaiterais d’abord répondre à notre rapporteur, qui, dans une dépêche, a estimé que nous étions un certain nombre à être partisans d’une laïcité « accommodante », alors qu’il représenterait quant à lui une laïcité « intransigeante ». Eh bien, j’affirme que je défends pleinement la laïcité, monsieur le rapporteur, et que je n’ai nul besoin de la qualifier d’« intransigeante » !

1 commentaire :

Le 16/05/2022 à 10:58, aristide a dit :

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"les parents accompagnateurs sont des usagers du service public de l’éducation et, en tant que tels, ne sont pas soumis à l’obligation de neutralité qui incombe aux agents publics et qui dépasse, d’ailleurs, la seule sphère religieuse."

De toute manière, une femme qui porte un voile ne sort aucunement d'une quelconque obligation de neutralité...

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

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