Intervention de Jérôme Bascher

Réunion du 29 octobre 2019 à 14h30
Neutralité religieuse des personnes concourant au service public de l'éducation — Discussion générale

Photo de Jérôme BascherJérôme Bascher :

… qu’il ne faut pas le traiter. Nous n’avons que trop tardé !

Car, par aveuglement – pour paraphraser Charles Péguy, il faut dire ce que l’on voit, mais il est plus difficile de voir ce que l’on voit –, par manque de courage, ce sont hélas les extrémistes de tous bords qui se sont emparés, non pas du débat, mais des failles dans les lois de notre République.

Lors du vote de la loi pour une école de la confiance, sur mon initiative et après que j’avais déposé en mars 2018 ce même texte, le Sénat avait adopté un amendement défendu par Jacqueline Eustache-Brinio et affirmant le principe de laïcité, y compris lors des sorties scolaires, ainsi qu’un amendement, déposé par mes soins, pour lutter contre le prosélytisme aux abords des écoles. Je tiens d’ailleurs à votre disposition, monsieur le ministre, une proposition de loi de même teneur pour les universités.

Du respect de la neutralité religieuse à l’école, certains n’ont voulu voir qu’un prétexte de racisme, voire de « haine contre les musulmans ». Mais nous sommes en vérité bien en dessous d’Atatürk !

Le sujet n’est pas du tout celui-là ; il est celui du risque de fracturation profonde de notre pays, laïque et républicain, et, au premier rang, de son école publique.

Voulons-nous abandonner notre modèle pour l’enseignement laïque, issu des lois de Jules Ferry et des décrets de Jean Zay ?

Voulons-nous abandonner le creuset de l’école républicaine, sans distinction de race, de sexe et, à la suite de Portalis, de religion ?

Voulons-nous abandonner les combats des féministes, chère Laurence Rossignol ?

Ou voulez-vous plutôt, mes chers collègues, un modèle communautariste, où chacun s’accommode de la République selon ce qui l’arrange, où, par exemple, la charia l’emporterait ?

Ne trahissons pas Aristide Briand !

Si cela devait être, préparons-nous à vivre, selon une expression redoutable de l’ancien ministre chargé des cultes, plutôt « face à face » que « côte à côte ».

Préparons-nous aussi à modifier l’article 1er de notre Constitution sur l’unité et l’indivisibilité de notre République.

Sans texte clair, sans cadre légal, les positions des uns et des autres seront inconciliables : là est le risque grave de fracture de la République ! Voilà pourquoi, quinze ans après la loi de 2004, trente ans après l’affaire du foulard de Creil, dans le département de l’Oise que je représente ici avec Olivier Paccaud et Laurence Rossignol, il est temps d’engager un nouvel acte.

Robert Badinter nous l’a dit, lui qui sans nul doute aura sa médaille sur nos travées : « Ce qui n’est pas illégal n’est pas forcément bienvenu. » Selon lui, le voile ne marque pas une « bonne volonté de vivre ensemble », étant rappelé que le port du voile n’est pas une prescription canonique.

1 commentaire :

Le 11/11/2019 à 14:32, aristide a dit :

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"Voulons-nous abandonner le creuset de l’école républicaine, sans distinction de race, de sexe et, à la suite de Portalis, de religion ?"

C'est une blague ? Vous passez votre temps à faire des distinctions de religion, et après vous en appelez à faire une école sans distinction de religion, revenez donc de votre contre-sens puisque vous abordez le sujet.

Une école sans distinction de couleur, (avant on disait race), c'est quoi pour vous ?

Une école où on ne pourra plus distinguer les noirs des blancs des jaunes, ou une école où les noirs les blancs les jaunes pourront venir sans que l'on s'intéresse à la couleur de leur peau pour mieux les exclure ?

Sans distinction de religion, ça veut dire qu'on peut voir la religion des élèves, comme on peut voir la couleur des élèves, mais qu'on ne va pas s'y attarder, on ne va pas en faire un élément de distinction pour en faire un élément d'exclusion, sinon on pourrait prendre en compte les couleurs des élèves pour les exclure de l'école.

La symétrie est parfaite, la loi impose de ne pas faire la distinction entre l'inné (la couleur) et l'acquis (la religion), le sans distinction de religion ou le sans distinction de couleur, c'est exactement la même chose. Tant que vous ne comprendrez pas ça, vous ferez du contre-sens qui vous projettera dans l'illégalité.

Il suffirait d'ailleurs à une femme voilée de porter plainte sur cette base, même à une jeune fille voilée qui voudrait contester la constitutionnalité de la loi de 2004 sur cette base, pour gagner aisément son procès, si les juges sont vraiment neutres et dépolitisés, parce que vraiment ne pas comprendre le sens constitutionnel du "sans distinction", c'est qu'il faut vraiment ne pas avoir envie.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

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