Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, sur l’initiative du groupe socialiste et républicain, le Sénat s’est doté d’une mission d’information sur la prévention et l’indemnisation des risques climatiques, que j’ai eu l’honneur de présider et dont ma collègue Nicole Bonnefoy a été la rapporteure.
De janvier à juin derniers, la mission a entendu plus d’une trentaine de représentants d’organismes, des sinistrés, des élus locaux, des administrations, des experts ou encore des assureurs. Nous avons également procédé à une large consultation du public par internet et fait deux déplacements, en Charente et dans l’Aude.
Les attentes de nos territoires sont très fortes et l’on observe une grande détresse des victimes de catastrophes naturelles, laissées pour compte par le système actuel d’indemnisation – c’est notamment le cas pour les sécheresses.
Le constat général est clair : notre modèle français de prévention des risques climatiques n’a pas pris la mesure du changement climatique auquel notre pays doit faire face, et son fonctionnement est d’une grande opacité. Il existe donc un vrai décalage entre l’ampleur des défis climatiques et la pesanteur des décisions publiques.
Je pense tout d’abord aux difficultés pour conclure et mettre en œuvre des programmes d’actions de prévention des inondations et les plans de prévention des risques naturels, les PPRN, pour les collectivités locales.
Madame la ministre, je pense également aux atermoiements constatés à propos de la problématique du recul du trait de côte : le Gouvernement n’a toujours rien proposé aux élus du littoral, alors même que les parlementaires formulent des préconisations concrètes depuis de nombreuses années.
Je pense enfin aux prélèvements effectués sur le Fonds national de gestion des risques agricoles, le FNGRA, en 2015 ou sur le fonds Barnier en 2016 et en 2017. Ils reviennent à faire abonder le budget de l’État par les assurés, alors que ces fonds jouent un rôle indispensable pour renforcer la prévention des risques et protéger les populations. En plafonnant les ressources de ces mêmes fonds, on a envoyé un très mauvais signal, alors qu’il faut rehausser le niveau des politiques publiques pour faire face au changement climatique.
Notre mission d’information a donc proposé de corriger ces dysfonctionnements en adoptant, à l’unanimité, plus de cinquante propositions concrètes applicables rapidement, si le Gouvernement en a la volonté.
Si la prévention ne supprime pas complètement le risque, elle permet d’en limiter considérablement les conséquences humaines et matérielles. Il est indispensable d’accentuer les efforts de prévention. Nous sommes convaincus que nous devons changer d’approche face au risque, en passant du « lutter contre » au « vivre avec ».
L’information et la connaissance doivent être au cœur de ce changement et tous les outils doivent être mobilisés : les outils numériques, les réunions de terrain ou l’expérimentation d’un diagnostic « Catnat » lors de l’acquisition d’un bien immobilier, par exemple.
Bien entendu, nous ne relèverons ce défi qu’avec les collectivités territoriales. Or nombre d’élus sont démunis face à la survenance de catastrophes naturelles. La formation, la prise en compte des retours d’expérience, l’assistance des maires par les préfets sont des impératifs.
Tous les efforts de réduction de la vulnérabilité doivent être soutenus : efforts des collectivités territoriales et de l’État, efforts de nos concitoyens eux-mêmes pour réduire la vulnérabilité de leurs habitations. Or le fonds Barnier ne leur profite que partiellement. Il convient donc de rendre le fonds Barnier aux assurés et d’étudier la mise en place d’un crédit d’impôt spécifique afin de réduire le reste à charge pour les travaux de prévention des aléas climatiques.
Madame la ministre, comment expliquer à des milliers de victimes que l’état de catastrophe naturelle n’a pas été reconnu pour leur commune alors qu’il l’a été pour leurs voisins, touchés de la même manière et parfois à quelques mètres de distance seulement ?