Intervention de François Clavairoly

Commission spéciale sur la bioéthique — Réunion du 30 octobre 2019 à 16h35
Audition de représentants des cultes

François Clavairoly, président de la Fédération protestante de France :

J'aimerais revenir sur les remarques qui viennent d'être faites sur les apparentes contradictions entre le naturel et le contractuel, le biologique et le culturel, etc. C'est justement dans ces ambivalences, dans ces tensions, que s'inscrit le travail du législateur. La société des hommes n'est pas exactement celle des fourmis ou des abeilles, elle ne reproduit pas à l'identique, de génération en génération, la même sociabilité ; les choses évoluent.

Nous sommes des héritiers - je rejoins les propos de Mgr d'Ornellas -, nous ne commençons pas le monde, mais nous sommes aussi des pionniers. La loi de la République nous déplace et elle contient finalement une forme de déracinement - j'ai entendu ce mot hier soir dans la bouche du Président de la République à l'occasion de l'inauguration du centre européen du judaïsme -, car elle est toujours en train de se chercher. En l'espèce, nous construisons par la loi le cadre de nouvelles formes de parentalité qui sont effectivement décalées par rapport à celles du code Napoléon... Alors, adaptons-nous ! La vie des hommes et des femmes est ainsi faite qu'elle ne reproduit jamais les choses à l'identique.

En ce qui concerne le don d'organes, le cadre proposé par le projet de loi est plus large, plus efficient. Et si la question se pose, c'est qu'il existe aujourd'hui une carence. J'entends les propos de Mgr d'Ornellas, il faut apprendre à donner, le don est une belle responsabilité, mais la loi doit l'encadrer. Je rejoins ce que disait M. Karoutchi, on peut ne pas être d'accord avec les termes de la loi, mais le cadre qu'elle fixe est général et s'applique à tous. Lors des débats, anciens maintenant, sur la loi dépénalisant l'avortement, beaucoup de femmes protestantes - je pense à ma mère par exemple - disaient en même temps qu'elles n'avorteraient pas elles-mêmes, mais qu'il fallait mettre un terme aux situations insupportables que nous connaissions alors, que ce soit la clandestinité ou la nécessité d'aller à l'étranger.

Les débats éthiques sont toujours compliqués, mais ce sont des sujets qui concernent l'ensemble de la société. Je crois avoir lu que 3 % des enfants naissent aujourd'hui grâce à à l'AMP et l'élargissement qui est prévu dans le projet de loi ne changera pas fondamentalement cet ordre de grandeur. L'enjeu sociétal est réel, mais limité. En revanche, pour les femmes qui seront concernées, c'est très important. L'attention à l'humain doit être au coeur de nos préoccupations.

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