Je redoute le climat dans lequel nous allons légiférer sur ce sujet. Il est habituel que le législateur reçoive des injonctions, et que celles-ci soient appuyées par l'exploitation d'un climat émotionnel. C'est le cas. On nous adresse des exigences immédiates et absolues, quand notre rôle est de légiférer avec mesure et de manière évaluable.
L'idée est d'instaurer un système amplifié de mesures individuelles contraignantes. À mon avis, la contrainte n'est pas disproportionnée par rapport à l'objet de la mesure, et la victime ne formulera pas d'objection à la nécessité de porter sur soi un appareil électronique. Mais sur les conditions dans lesquelles s'engage cette contrainte, la réflexion a besoin de se poursuivre. En effet, dans les cas d'urgence, il n'y a pas d'enquête. On se trouve face au risque du mensonge - même s'il est marginal. Vous me direz qu'on demande l'assentiment du présumé auteur. Mais à quoi s'expose-t-il s'il refuse ? De la détention ? Ce serait contraire à l'habeas corpus. Cette mesure, qui ressemble autant à de la police administrative qu'à un acte judiciaire, doit au moins être assortie d'un délai minimal, et prise pour un temps très limité - elle ne pourra être maintenue au-delà que si le travail d'enquête, contradictoire, démontre que le danger est constitué.
Nous ne voterons pas ce texte conforme : ce serait renoncer à notre travail de législateur. Nous recevrons des critiques, pour avoir demandé à réfléchir plus longuement à un système viable. Mais ce délai nous permettra d'entrer en convergence avec le travail du Gouvernement, lui aussi réalisé dans un climat émotionnel, ce qui génère de la fébrilité. Pour ma part, je ne crois pas que nos systèmes publics soient en mesure de garantir une réponse certaine. Il faudra se reposer, sur le terrain, sur un commissariat de police ou une brigade de gendarmerie - unités qui ne sont pas toujours totalement opérationnelles 24 heures sur 24, ayons le courage de le reconnaître. Notre mission est d'en faire le maximum, sans faire de fausses promesses.