Vous avez évoqué le logiciel Louvois et son remplacement. Nos militaires en OPEX reçoivent des traitements différents de ceux qui demeurent sur le territoire national. Quel effet cela a-t-il sur le prélèvement à la source ?
Général François Lecointre. - Madame Conway-Mouret, les H160 civils serviront essentiellement au secours en mer et à la sauvegarde maritime. Cela permettra de remettre plusieurs NH90, hélicoptères mieux militarisés, sur les frégates.
Monsieur Guerriau, concernant la ressource humaine, nous nous préoccupons évidemment de la fidélisation, et bien au-delà de la prime de lien au service. Cette réflexion sera incluse dans les travaux que nous conduisons sur la nouvelle politique de rémunération des militaires. Celle-ci s'articule autour de trois grands volets : un premier qui sera celui qui permettra de prendre en compte la singularité militaire, un second qui prendra en compte l'engagement, c'est-à-dire la capacité à produire de l'effet militaire, et un dernier volet qui traitera de la performance. Concernant la singularité militaire, il s'agit de compenser les effets de la mobilité : je pense en particulier à l'accès à la propriété, ou à l'emploi du conjoint. Nous travaillons à réduire les contraintes liées aux exigences du métier militaire et de la mobilité, de façon à rendre ce métier plus attractif et supportable. Mon souci porte particulièrement sur les officiers supérieurs et les jeunes officiers généraux. C'est rarement un souci politique, mais le système pourrit par la tête. Aujourd'hui, le chômage des cadres est nul : on a donc de plus en plus de difficultés à conserver les éléments brillants dont nos armées ont besoin.
Monsieur Allizard, autant que je sache, il n'est pas question d'annulations de crédit à hauteur de 500 millions d'euros. Une réserve existe pour le programme 178 : il est impératif que ces 240 millions d'euros soient dégelés le plus rapidement possible, en tous cas avant la mi-novembre car nous en avons absolument besoin pour ne pas obérer les activités programmées des armées. Il faudra que le projet de loi de finances rectificative prenne en compte les surcoûts des OPEX.
Madame Raimond-Pavero, vous avez raison au sujet du cyber-terrorisme. Beaucoup d'efforts ont été faits en matière d'investissements ; seulement, la ressource humaine est là aussi difficile à conquérir, mais de nouveaux recrutements sont encore prévus. Nous avons aussi refondé notre doctrine, en lui intégrant un volet offensif, et nous l'assumons.
Messieurs Poniatowski et Cigolotti, je voudrais revenir sur la force conjointe G5 Sahel. Elle n'a pas été conçue comme une sortie de crise, comme un moyen de retirer les éléments français et européens présents dans cette zone, mais pour créer une forme de synergie entre pays concernés et traiter du problème spécifique des mouvements transfrontaliers des groupes terroristes, qui basculent d'un pays à l'autre de manière à échapper aux poursuites. Pour y faire face, des partenariats militaires bilatéraux ont été conclus entre chacun de ces pays, sous le parrainage de la France ; s'y ajoute la force conjointe G5 sous commandement unique, qui est dédiée à ce travail frontalier.
Le nouveau général commandant la force a relancé les opérations. Cela prend du temps, mais il faut continuer à équiper cette force et à la faire monter en gamme, car le problème demeurera. Les implantations des forces armées maliennes et de la force conjointe dans le fuseau centre, c'est-à-dire la zone où se rejoignent les frontières du Mali, du Burkina Faso et du Niger, font l'objet d'attaques de plus en plus violentes et fréquentes, ce qui tend à prouver que les terroristes veulent éviter que nous nous y installions.
Il faut continuer de conforter cette force, mais elle ne résoudra pas seule le problème. Les mouvements djihadistes, dont le berceau est au nord du Mali, déplacent aujourd'hui leurs attaques vers le centre, de manière à détourner notre attention du nord et à s'y livrer à tous les trafics qu'ils souhaitent ; ils profitent des tensions ethniques importantes du fuseau centre, où les États sont absents depuis des années. La crise évolue dans sa géographie et dans ses formes ; elle devient toujours plus complexe et requiert une approche toujours plus globale. Nous ne devons donc pas relâcher l'effort.
Certains se demandent si nous ne porterons pas un jour la responsabilité de cette crise, au simple prétexte de la présence des forces françaises, qui exonéreraient les dirigeants de ces États de faire les efforts nécessaires. J'en doute, mais j'estime que nous devons persévérer dans notre stratégie tout en exerçant une pression forte sur les pouvoirs politiques de ces États, et tout en ayant une action plus globale sur le développement et la gouvernance. L'action de nos armées est bénéfique : au contraire du président Trump, nous estimons que ces « guerres tribales » nous concernent !
Monsieur Le Gleut, l'élargissement de l'IEI n'a pas eu de conséquences, mais je souhaite qu'on en reste au club tel qu'il est aujourd'hui constitué. Pour créer une culture commune, il faut éviter de la diluer. Un noyau réduit permettra d'atteindre des résultats, et l'organisation actuelle porte déjà ses fruits. C'était inimaginable il y a deux ans encore.
Monsieur Le Nay, il n'y a pas de problème autour du prélèvement à la source. L'indemnité de sujétions pour service à l'étranger, versée aux militaires engagés dans les OPEX, est en effet non fiscalisée. La bascule de Louvois vers le nouveau système semble s'être bien passée dans la Marine ; nous en aurons la confirmation en novembre lors du prochain point avec la Ministre. Je ne vois pas de difficulté à ce stade.