Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le 13 juin dernier, dans sa déclaration de politique générale devant notre Haute Assemblée, le Premier ministre, M. Édouard Philippe, avait annoncé que ce PLFSS serait « une première étape » de la grande réforme de la prise en charge du grand âge, elle-même « grand marqueur social » du quinquennat.
La volonté politique est manifeste. Elle est en outre soutenue par la société civile et alimentée par les réflexions de l’administration. La mission confiée à Mme Myriam El Khomri sur l’attractivité des métiers du grand âge vient de rendre ses conclusions ; elles se situent dans la lignée du rapport rendu par M. Dominique Libault en conclusion de la concertation « Grand âge et autonomie », rapport qui avait été unanimement salué en mars dernier.
Or les unanimités sont souvent louches et inquiétantes. Ce n’est pas que les préconisations du rapport Libault soient contestables. Au contraire ! Nous en approuvons largement les grandes orientations, comme la nécessité du virage domiciliaire, la baisse du reste à charge ou la hausse du taux d’encadrement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). D’ailleurs, nous avions déjà en grande partie préconisé de telles mesures, voire voté certaines d’entre elles, comme l’indemnisation du congé de proche aidant.
Non, je crains plutôt que l’accord sur les préconisations ne soit lié au fait que l’on ne parle pas encore de l’essentiel, c’est-à-dire du financement d’une véritable politique de prise en charge des bientôt 2, 5 millions de personnes dépendantes dans notre pays.
C’est d’abord cela et, en conséquence seulement, la restructuration de l’offre de service à destination de nos concitoyens qu’il faudrait évoquer en loi de financement de la sécurité sociale. Hélas, je n’ai que cinq minutes ! Mais il paraît que nous y reviendrons bientôt.
La minceur du volet médico-social du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale conduirait à considérer le teasing législatif comme un des beaux-arts.
Au titre de 2019, il faut, certes, saluer le renfort inédit de 130 millions d’euros pour l’Ondam médico-social, qui correspond à la sous-exécution attendue des soins de ville, même si c’est à peu près ce qui avait été gelé par précaution en début d’année, comme chaque année.
Au titre de 2020, la plupart des mesures nouvelles censées engager le virage domiciliaire sont curieusement consacrées aux établissements. Il s’agit pour l’essentiel de la poursuite de la convergence tarifaire. Un seul signal financier est envoyé aux métiers du grand âge : la revalorisation de la prime d’assistant de soins en gérontologie, pour un montant de 15 millions d’euros. Toutefois, cela ne représente en moyenne que 150 000 euros par département !
J’en viens à l’aide à domicile. L’enveloppe de 50 millions d’euros de l’an dernier est reconduite en 2020, alors que le rapport Libault estimait les besoins de l’aide à domicile à 550 millions d’euros d’ici à 2024 et qu’il faudrait environ cinq fois plus pour seulement hisser tous les professionnels du secteur au niveau du SMIC !
Je ne dirai pas grand-chose à ce stade de l’indemnisation du congé de proche aidant par une section du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), chaque année en déficit, puis par les réserves de la Caisse, et moins encore du financement des établissements médico-sociaux par le surplus du produit tiré des amendes radars avec l’abaissement de la vitesse sur les routes à 80 kilomètres par heure. Nous aurons ces débats en temps utile.
La commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l’adoption des dispositions médico-sociales de ce PLFSS, celles-ci valant mieux qu’une absence totale de mesures. Toutefois, nous regrettons de devoir attendre la réforme promise pour travailler à clarifier les compétences, à unifier la gouvernance et le pilotage de la politique du grand âge et, surtout, à pérenniser son financement pour les générations à venir.