Séance en hémicycle du 12 novembre 2019 à 16h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2020 (projet n° 98, rapport n° 104, avis n° 103).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalien
Agnès Buzyn

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) est un instrument majeur pour la conduite de nos politiques publiques. C’est avec honneur et dans un esprit de grande responsabilité que je reviens pour la troisième fois devant vous pour présenter les grands axes que nous avons retenus.

Ce PLFSS pour 2020 est un budget responsable. L’avenir ne peut être envisagé sereinement sans un esprit de responsabilité financière. Nous ne pouvons hypothéquer l’avenir de notre protection sociale. Les générations futures auront bien des défis à relever et notre devoir est de leur épargner le poids d’une dette insoutenable. À ce titre, je le rappelle fermement ici, nous ne faisons pas des économies à tout prix. Nous ne pouvons faire des économies dans des secteurs en souffrance qui, pendant des années, ont été un angle mort des politiques publiques, et qui aujourd’hui nous interpellent et nous alertent.

Construire la protection sociale du XXIe siècle, c’est à la fois pérenniser un système universel et public offrant un haut niveau de protection et créer de nouveaux droits pour faire face à de nouveaux risques. La protection sociale s’adapte, se transforme et devra offrir demain de nouvelles sécurités.

L’actualité nous le rappelle parfois brutalement, des risques nouveaux apparaissent, comme les risques technologiques, industriels ou phytosanitaires. À ce titre, je suis heureuse de voir inscrire dans la loi la création d’un fonds d’indemnisation des victimes des produits phytosanitaires. Proposée par le groupe socialiste et républicain du Sénat, cette mesure permettra de protéger tous ceux qui ont été exposés dans le cadre de leur travail à des substances dangereuses et en ont été affectés.

Nous devons aussi appréhender les risques liés aux évolutions démographiques. En 2050, près de 5 millions de Français auront plus de 85 ans, et le nombre de personnes âgées en perte d’autonomie aura presque doublé. Les travaux portant sur ce sujet sont attendus et le PLFSS engage le premier volet de la réforme de la dépendance.

L’indemnisation du congé de proche aidant permettra d’indemniser pour une durée de trois mois toutes celles et tous ceux qui, à un moment donné de leur vie, doivent aider un proche en perte d’autonomie. Je tiens ici à adresser mes remerciements sincères aux sénateurs qui avaient soumis, il y a déjà plusieurs mois, ce sujet au débat parlementaire et, en particulier, au groupe Union Centriste.

Au-delà des nouveaux risques que j’ai évoqués, je pense qu’envisager l’avenir de notre protection sociale, c’est aussi savoir faire évoluer notre méthode : nous devons être capables de prévenir l’apparition des risques en assurant le passage d’une protection sociale curative à une protection sociale préventive, de prendre en compte des trajectoires individuelles et des risques de parcours de vie et de sortir d’une approche historique fondée sur les statuts.

Intervenir avant que les risques ne se manifestent, c’est ce que prévoit ce PLFSS et c’est ce qu’attendent les Français.

Je pense, en particulier, aux familles monoparentales et au scandale des pensions alimentaires non versées. Il était temps d’en finir avec un système qui faisait de la négligence des uns la détresse des autres. Christelle Dubos et moi-même sommes fières d’avoir créé un dispositif qui sécurise efficacement les familles monoparentales.

Prévenir l’apparition des risques sociaux, c’est aussi, évidemment, démultiplier nos efforts auprès des plus fragiles. Je pense ici aux enfants entrant à l’aide sociale à l’enfance (ASE). Avec Adrien Taquet, nous allons systématiser un bilan de santé et, si besoin, l’orientation dans un parcours de soins.

Notre protection sociale doit aussi s’attacher toujours plus aux individus, aux parcours et aux transitions. Nous devons moderniser un système dont la complexité ne doit plus être subie par nos concitoyens et lutter ainsi contre les ruptures de droits, conséquence directe de cette complexité.

Simplifier le système, c’est porter nos efforts sur l’articulation entre les aides sociales et sur le passage d’une aide à l’autre. Ainsi ce système s’adapte-t-il aux trajectoires, au lieu que les Français soient obligés de s’adapter à ses contraintes de gestion.

Il s’agit, par exemple, d’automatiser la bascule du revenu de solidarité active (RSA) ou de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) vers les droits à la retraite, afin d’éviter des ruptures de droits. Cette préoccupation est aussi l’objet d’amendements adoptés par l’Assemblée nationale, qui ont permis d’enrichir le texte s’agissant de l’information donnée aux bénéficiaires de l’AAH pour l’accès à la nouvelle « complémentaire santé solidaire » – je sais que vous entendez l’enrichir encore dans le cadre de la navette parlementaire, ce dont je me réjouis.

Un autre exemple de simplification est l’allégement des procédures pour s’assurer de l’aptitude à la pratique sportive pour les mineurs, sans renoncer aux garanties médicales existantes. Je sais que cette mesure, qui est très attendue, suscite aussi des questions. J’aurai à cœur d’y répondre pour vous garantir l’équilibre de cette disposition.

Nous étoffons, parce que c’est indispensable, les parcours de soins post-cancers, adaptés à chacun et pris en charge par l’assurance maladie, qu’il s’agisse de la nutrition, de l’aide psychologique ou encore de l’activité physique adaptée.

Nous regardons également en face les inégalités territoriales, avec la mise en place d’un nouveau droit pour les femmes enceintes habitant loin d’une maternité, incluant le transport et l’hébergement en amont de l’accouchement.

Ces inégalités territoriales, qui ont très largement inspiré la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, nous ne les esquivons pas dans ce PLFSS.

Notre ambition est d’aller vers les populations fragiles, de ne laisser personne de côté. Tel c’est le sens de la réforme du financement de la psychiatrie, pour mieux répartir les ressources en fonction des besoins évalués au niveau des territoires.

Tel est le sens aussi de la poursuite des mesures de lutte contre les déserts médicaux, avec les contrats d’installation et les exonérations de cotisations. Cette mesure est la traduction d’un engagement que j’avais pris lors des débats qui ont eu lieu dans cet hémicycle sur le projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé.

Un autre article traduit un engagement pris en juin, celui relatif aux modalités de financement des hôpitaux de proximité.

Transformer notre système de santé, qui est à un tournant de son histoire, c’est redonner du sens et de la confiance. Je connais la situation de l’hôpital public dans notre pays : j’y ai exercé durant toute ma carrière, je suis sur le terrain, et j’ai connaissance par votre intermédiaire de nombreuses situations locales difficiles.

Les causes, vous le savez, sont multiples, et je pense que les responsabilités sont partagées, mais la situation que nous vivons aujourd’hui est le résultat d’années de régulation extrêmement violente, qui a conduit à une crise de l’investissement et, j’ose le dire, à une crise existentielle. Nos échanges, cette semaine, seront largement marqués par ce sujet. Cela est légitime parce que l’hôpital public est un trésor national, qui doit avoir la place qu’il mérite devant les représentants de la Nation.

Nous avons donc déjà commencé à agir pour redonner à l’hôpital public des perspectives et des ambitions.

Je pense, en particulier, au dégel 2018 et à la restitution de la sous-exécution de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) 2018, à la campagne tarifaire de 2019, qui est la plus favorable depuis dix ans, avec un Ondam rehaussé à 2, 5 % pour cette année-là, au pacte de refondation des urgences, annoncé à la suite de la mission confiée à M. le député Thomas Mesnier et à M. Pierre Carli, pour apporter des réponses immédiates et redonner du sens aux urgences – un amendement a été adopté par l’Assemblée nationale pour réformer le financement de nos services d’urgence et aller dans le bon sens.

Je pense, par ailleurs, au chantier ouvert sur l’attractivité des métiers du vieillissement et des professions hospitalières, qui devra lui aussi concourir au choc de confiance dont le système de santé et médico-social a bien besoin.

L’Ondam 2020 est construit sur l’hypothèse d’une progression des dépenses de 2, 3 %, l’une des progressions les plus importantes de ces dix dernières années, ce qui se traduit par 1, 7 milliard d’euros de ressources supplémentaires pour l’hôpital.

Sur l’initiative du Gouvernement, un amendement a été adopté à l’Assemblée nationale pour donner une vision pluriannuelle aux établissements de santé. C’était une demande légitime et je suis heureuse que nous ayons pu y répondre.

Je veux enfin citer la réforme des modes de financement pour inciter davantage les acteurs à développer la prévention, s’assurer d’un standard élevé de qualité, rechercher une plus grande pertinence des soins et prendre le temps d’une meilleure coordination entre les professionnels.

Je rencontre depuis plusieurs semaines, de manière quotidienne, les acteurs du monde de l’hôpital. J’échange avec eux sur leurs priorités et la construction de solutions de long terme, fondées sur des engagements mutuels ambitieux au bénéfice du service public de la santé, en assurant que les moyens débloqués, financiers ou non, sont des outils de transformation réels. Je dialogue également avec les élus et avec les représentants des usagers.

J’ai déjà fait des annonces sur les urgences. Je poursuis les réflexions sur l’attractivité, sur la prochaine campagne tarifaire et sur les investissements hospitaliers.

Des annonces seront faites dans ce cadre lors des prochains jours. Je sais qu’elles sont attendues ici aussi, dans cet hémicycle. Le plan global que je suis en train d’établir prendra en compte nos échanges.

Je comprends l’impatience et la difficulté de discuter d’un texte sans que l’ensemble des mesures envisagées aient pu être annoncées. Il y va de la clarté et de la sincérité des débats, qui me tiennent particulièrement à cœur car, plus que tout, je respecte le rôle du Parlement, garant de notre démocratie sociale.

La commission des affaires sociales a adopté une motion de renvoi à la commission. Il s’agit d’un acte fort, que nous avons entendu. Je crois pourtant que l’hôpital mérite un débat. L’Ondam est une chose et, je vous le dis en toute transparence, des discussions sont en cours sur son niveau.

Ces discussions sont lourdes de conséquences. Elles nécessitent des arbitrages difficiles. C’est aussi l’honneur du Gouvernement d’exercer son rôle de proposition législative sur la base d’un travail approfondi, et non sur de simples projets de mesures.

Les parlementaires seront naturellement associés à ces travaux, qui se déroulent dans des circonstances exceptionnelles. Ces travaux ne s’arrêtent d’ailleurs pas à l’Ondam : ils concernent la campagne tarifaire, de niveau réglementaire, les règles de gestion des ressources humaines, ou encore l’accompagnement des établissements.

Dans ces circonstances exceptionnelles, il me semble qu’il ne faudrait pas se fourvoyer dans des prises de position qui nous priveraient d’un débat démocratique sur de nombreuses mesures contenues dans ce PLFSS, mesures qui concernent le financement de l’hôpital, mais plus encore la sécurité sociale dans son ensemble.

En effet, mesdames, messieurs les sénateurs, le présent PLFSS n’est pas seulement un acte de responsabilité budgétaire ; avec ce texte, nous nous donnons les moyens de l’avenir et du maintien d’un système de protection et de droits sociaux qui fait la fierté de notre République.

Applaudissements sur les travées du groupe LaREM, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt

Monsieur le président, madame la ministre, mesdames, messieurs les sénateurs, la discussion qui s’ouvre au Sénat à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 sera, comme chaque année, l’occasion de confronter nos visions des orientations que le Gouvernement a prises et qu’il défendra devant vous.

Mme Agnès Buzyn vient de vous présenter ce que ce texte prévoit en matière d’accès aux droits et aux prestations pour nos concitoyens. Je concentrerai donc mon propos sur les équilibres généraux et les articles relatifs aux recettes.

Disons-le d’emblée, la question de la non-compensation de certaines exonérations de cotisations sociales cristallisera certainement les critiques et, sans doute, une part des oppositions qui pourront s’exprimer sur ce texte. J’y reviendrai bien évidemment ; nous aurons ce débat lors de la discussion de l’article 3.

Néanmoins, pour avoir bien suivi les travaux de la commission des affaires sociales du Sénat et échangé avec elle le 15 octobre dernier, je crois aussi pouvoir souligner, en ouverture de cette discussion, que les points d’accord sont souvent plus importants que ceux sur lesquels nous sommes divisés.

Je souhaiterais, pour commencer, mettre l’accent sur ces points de convergence, avant de revenir sur la question de la compensation.

C’est d’abord un objectif, dont je sais qu’il est partagé sur ces bancs : poursuivre la maîtrise des dépenses sociales afin d’en assurer la soutenabilité financière tout en permettant la protection des plus vulnérables. Cet objectif se retrouve dans le solde de la sécurité sociale pour 2020, plus dégradé que prévu, puisque le déficit s’élève à 5, 1 milliards d’euros.

Vous savez que deux éléments expliquent ce résultat : d’abord, des hypothèses macroéconomiques moins favorables, qui affectent principalement les recettes ; ensuite, les réponses d’ampleur apportées par le Gouvernement à l’urgence économique et sociale dont la crise de l’automne et de l’hiver derniers a été le révélateur.

Nous assumons – je l’ai dit devant votre commission – le fait que la réponse à cette crise a conduit à dégrader, temporairement, nos comptes sociaux, mais ce déficit ne signifie nullement que nous ayons abandonné nos objectifs de finances publiques, bien au contraire.

Nous poursuivons la politique budgétaire sérieuse et efficace que nous conduisons depuis deux ans pour soutenir la croissance et l’emploi, car cette politique a permis d’obtenir des résultats.

Si l’on considère l’ensemble du champ des administrations publiques, nous sommes parvenus à la fois à maîtriser la dépense publique dans son ensemble – 40 milliards d’euros de dépenses ont été évités depuis 2017, soit autant d’économies tendancielles –, à réduire les déficits de 20 milliards d’euros entre 2019 et 2020, pour atteindre en 2020 le déficit le plus bas depuis 2001, et à baisser les prélèvements obligatoires de 40 milliards d’euros sur l’ensemble du quinquennat, dont 27 milliards d’euros en faveur des ménages, tout en stabilisant notre endettement, ce qui n’était pas arrivé depuis plusieurs années.

La sécurité sociale a pris sa part à cet effort et continuera bien évidemment de le faire : ses dépenses demeurent maîtrisées et des efforts sont demandés à tous pour permettre à la sécurité sociale de revenir à l’équilibre d’ici à 2023. Ces efforts sont notamment demandés aux entreprises : ainsi, en 2020, elles connaîtront un encadrement de la déduction forfaitaire spécifique, qui est un dispositif ancien aux effets mal maîtrisés, puisqu’il amplifie le gain des allégements généraux. Cette déduction sera plafonnée à 130 % des allégements généraux de droit commun, ce qui contribuera au financement de nouvelles mesures en faveur du pouvoir d’achat.

Par ailleurs la dette sociale portée par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) sera apurée d’ici à 2024. En 2019, deux tiers de cette dette auront déjà été apurés, soit 171 milliards d’euros sur un total de 260 milliards.

Dans ce contexte, vous comprendrez que le Gouvernement émette un avis défavorable sur l’ensemble des amendements qui visent à étendre ou à renforcer des niches sociales nouvelles.

Il en sera ainsi de la proposition visant à encourager les employeurs à prendre en charge les abonnements de transports publics de leurs salariés, ou d’autres qui tendent à créer des niches catégorielles. Toutes ces propositions procèdent de préoccupations qui sont légitimes – la question ne porte pas sur cette légitimité –, mais elles partent de l’idée que la baisse des prélèvements serait la seule solution à tous les problèmes. Surtout, elles ont un coût que nous ne pouvons pas assumer à ce stade. Ces mesures ne sont en effet pas financées et sont par ailleurs contradictoires avec la volonté de limiter au maximum les niches fiscales et sociales.

Ce texte comporte également un certain nombre de dispositions importantes sur lesquelles nous devrions nous retrouver.

Nous reconduisons en 2020 la prime exceptionnelle entièrement désocialisée et défiscalisée que le Sénat avait adoptée l’année dernière. En 2019, cette prime a permis de distribuer 2, 2 milliards d’euros de pouvoir d’achat à 5 millions de salariés ; son montant moyen s’élève à environ 400 euros. Pour 2020, son versement sera conditionné à la négociation ou à la conclusion d’un accord d’intéressement dans l’entreprise ; les conditions seront assouplies pour les TPE. En effet, nous voulons encourager le partage de la valeur au sein de l’entreprise, entre les travailleurs et les employeurs.

J’ai bien noté, monsieur le rapporteur général, votre vigilance : vous souhaitez que cette prime, qui est une mesure de pouvoir d’achat, demeure exceptionnelle. Ce souci est partagé par le Gouvernement : si cette prime devait perdurer, cela créerait le risque d’une substitution de la prime au salaire, ce qui ne serait pas profitable pour les salariés en fin de compte, mais serait dangereux pour nos comptes sociaux.

C’est pourquoi nous avons inscrit ce dispositif dans la continuité de l’action que nous avons entamée au travers de la loi Pacte pour favoriser, de manière durable, le partage de la valeur dans l’entreprise grâce aux accords d’intéressement.

Le volet « simplification » de ce PLFSS rejoint également les travaux du Sénat et, en particulier, ceux qu’il a menés en faveur des travailleurs indépendants.

Dans le prolongement de nos engagements pris lors de la suppression du régime social des indépendants (RSI) en matière de simplification du recouvrement des cotisations sociales, nous allons, d’ici à 2021, fusionner les déclarations fiscales et sociales des travailleurs indépendants. Ils pourront ainsi effectuer en une seule formalité trois déclarations qu’ils adressent aujourd’hui à des interlocuteurs différents et à des dates distinctes. Cette mesure rejoint une proposition formulée de longue date par le président de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat, M. Jean-Noël Cardoux, et par M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.

Nous proposons également de mener à son terme l’unification du recouvrement social autour des Urssaf pour que notre action publique soit plus efficace et que les entreprises n’aient plus qu’un seul interlocuteur pour leurs cotisations. Ce chantier fait écho à celui que nous conduisons dans le champ fiscal et qui sera discuté dans le projet de loi de finances pour 2020.

Un autre point d’accord, me semble-t-il, concernera la simplification de l’accès aux droits, grâce à la contemporanéisation du crédit d’impôt et des aides financières, pour les personnes dépendantes et les personnes handicapées.

Grâce à une expérimentation menée à Paris et dans le Nord, 1, 1 million de personnes bénéficieront à terme de cette mesure de simplification et de pouvoir d’achat pour l’accès à des services essentiels.

Il en sera de même pour l’exonération de cotisations sociales de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle dans la fonction publique, rupture créée par la loi du 6 août 2019. Cette exonération permet d’aligner le régime social de la fonction publique sur celui du secteur privé. Le Gouvernement est très attaché à ce que la mobilité soit favorisée au sein la fonction publique, mais aussi entre le secteur public et le secteur privé. Cette mesure de cohérence doit y contribuer.

Tels sont donc les points de convergence sur lesquels nous devrions nous retrouver ; vous pouvez constater qu’ils sont importants. Ils participent, à mon sens, à une large amélioration de notre système de protection sociale.

J’en viens maintenant au débat relatif à la compensation des exonérations de cotisations sociales.

Plusieurs mesures sont concernées, au premier rang desquelles l’exonération des heures supplémentaires que la loi portant mesures d’urgence économiques et sociales a avancé du 1er septembre au 1er janvier 2019.

Nous avions eu un premier débat, l’année dernière, lors de l’examen du PLFSS pour 2019, au sujet du choix de la non-compensation ; ce débat s’était poursuivi lors de l’examen de ces mesures d’urgence. L’article 3 du présent PLFSS prolonge le choix fait par le Gouvernement et adopté par l’Assemblée nationale, choix qui figurait déjà dans le programme de stabilité que nous avons présenté au printemps et qui a déjà fait l’objet de débats parlementaires.

Sur la question de principe, les termes du débat sont connus. Ils peuvent paraître byzantins aux non-initiés.

Du point de vue du contribuable, il n’y a pas, d’un côté, des impôts et des taxes d’État et, de l’autre, des impôts et cotisations : il y a seulement ce que l’État demande à chacun au bénéfice de la collectivité. Il en va de même s’agissant des dépenses : pour les Français, une dépense est une dépense, qu’elle relève du budget de l’État ou de celui de la sécurité sociale.

D’ailleurs, je tiens à préciser d’emblée que, sur les 16, 8 milliards d’euros auxquels est estimé le coût des mesures d’urgence économiques et sociales, 14 milliards d’euros sont à la charge du budget de l’État, contre 2, 8 milliards d’euros à la charge du budget de la sécurité sociale, ce qui démontre que celle-ci n’est pas mise à contribution pour financer l’intégralité des mesures, comme on peut le lire parfois.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt

Plus largement, nous avons collectivement souhaité que la rénovation des relations financières entre l’État et la sécurité sociale passe par une clarification et une responsabilisation de chaque sphère.

Cette clarification est d’autant plus nécessaire que ce n’est pas la première fois que des mesures décidées par le Gouvernement et par le Parlement et financées par la sécurité sociale ne sont pas compensées.

Je rappelle enfin que toutes les administrations publiques sont engagées dans un effort pour redresser nos comptes, nous désendetter et redonner aux Français les fruits de leur travail. Par conséquent, la sécurité sociale n’est évidemment pas le seul secteur pour lequel l’équilibre compte : nous gardons de cela une vision globale.

L’essentiel me paraît par ailleurs préservé puisque, avec ou sans compensation, ce PLFSS contient des mesures fortes en faveur des Français, mesures que Mme Agnès Buzyn vous a présentées il y a un instant. Je pense notamment au soutien au pouvoir d’achat des retraités, avec la réindexation sur l’inflation des pensions inférieures à 2 000 euros par mois, ce qui concernera 77 % des retraités, à la protection des Français contre les nouveaux risques, avec l’indemnisation du congé de proche aidant et la création d’un fonds d’indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques, ou encore aux engagements déjà pris par Mme la ministre lors de l’examen de ce texte à l’Assemblée nationale concernant l’hôpital et, notamment, à la visibilité pluriannuelle que nous voulons donner aux établissements.

Cette liste de mesures traduit la volonté du Gouvernement de répondre à la demande de justice sociale, de protection des plus vulnérables et de prise en compte des nouveaux risques.

Ce texte s’inscrit dans la continuité de la politique que nous menons pour baisser les impôts et soutenir le pouvoir d’achat des Français. Si nous vous le présentons, c’est parce qu’il nous paraît responsable et cohérent avec nos objectifs de finances publiques et de redressement des comptes sociaux.

N’oublions pas cette réalité : seuls des comptes sociaux maîtrisés dans le cadre d’une soutenabilité financière permettent de préparer l’avenir et de préserver la force de notre modèle social.

Je partage évidemment l’intégralité des propos de Mme la ministre concernant la motion de renvoi à la commission déposée au nom de votre commission des affaires sociales, et je forme à mon tour, dans le respect du Parlement, le souhait que nous puissions, au cours des prochaines heures et des prochains jours, discuter des mesures que nous vous présentons et des propositions d’amélioration que vous nous soumettrez.

Applaudissements sur les travées du groupe LaRE M. – Mme Évelyne Perrot applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avant d’entreprendre une rapide lecture de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, je voudrais exprimer combien, après la lecture des annonces publiées par le Journal du dimanche, les parlementaires que nous sommes sont irrités – c’est peu dire ! –, mais aussi inquiets quant au rôle du Parlement.

Nous sommes irrités, car cet article, dont vous dites qu’il n’est pas une interview, annonce tout de même que vous avez réussi votre négociation – je vous en félicite ! – et que le Président de la République a tranché. Des moyens nouveaux seront accordés à l’hôpital – nous nous en réjouissons ! –, les carrières seront revalorisées – je l’ai lu en toutes lettres, et c’est très bien ! –, et la dette pourrait être reprise par l’État : 30 milliards d’euros, ce n’est pas négligeable. Ce souhait était déjà formulé depuis fort longtemps par notre commission.

Madame la ministre, tout cela est très bien, et je vous félicite encore d’avoir pu en obtenir autant au cours de vos négociations, mais vous n’en révélerez la teneur exacte que le 20 novembre prochain ! Autrement dit, nous allons attendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. C’est là que nous sommes inquiets : à quoi sert le Parlement ?

Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, SOCR et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe RDSE. – On s ’ exclame : « À rien ! » sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

À quoi sert notre débat sur ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, ce débat que nous ouvrons aujourd’hui, si tout se passe en dehors de cette enceinte ?

Mêmes exclamations.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Nous allons voter sur un texte dont nous savons que, sitôt ce vote, il sera obsolète…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Je ne dirais pas « insincère », mais il sera du moins obsolète.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Nous allons adopter un Ondam, mais nous savons qu’il faudra le revoir ; vous l’avez vous-même laissé entendre en affirmant que vous aviez bien l’intention de déposer un projet de loi relatif à l’hôpital, comprenant des mesures nouvelles.

Alors, ces mesures n’étaient-elles pas prévisibles ? Elles sont pourtant nécessaires : tout le monde en est d’accord ! Il était donc très facile de faire adopter ce nouvel Ondam par notre assemblée.

J’ose encore espérer que, lors de l’examen de l’article 59, qui se tiendra vraisemblablement vendredi ou samedi, en fonction de l’allure de nos débats, vous pourrez nous en dire plus sur les mesures que vous entendez prendre à l’avenir. Ainsi, tout simplement, ce débat et ce vote verraient les droits du Parlement respectés.

Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

J’en viens à ce projet de loi de financement de la sécurité sociale tel qu’il nous est présenté. Vous venez de rappeler, monsieur le secrétaire d’État, que le Gouvernement va proposer au Sénat d’adopter un exercice 2019 en déficit de 5, 4 milliards d’euros ; un déficit presque équivalent, de 5 milliards d’euros, nous est présenté pour l’année 2020. La trajectoire présentée en annexe B du PLFSS n’envisage plus qu’un timide retour à l’équilibre à l’horizon de 2023 ; entre-temps, si tout va bien, la sécurité sociale aura accumulé quelque 17 milliards d’euros de nouveau déficit.

Alors, que s’est-il passé depuis l’année dernière ? Tout d’abord, la conjoncture a été moins bonne que prévu ; en particulier, la masse salariale hors primes exceptionnelles n’a progressé que de 3 %. En conséquence, la sécurité sociale a perdu 1, 6 milliard d’euros par rapport à la prévision de progression de 3, 5 %. Ensuite, certaines dépenses des branches maladie et vieillesse ont un peu dérapé, à hauteur de 1, 2 milliard d’euros. La conjugaison de ces deux facteurs explique la moitié environ de la dégradation du solde de l’année 2019.

Quant à l’autre moitié, elle résulte d’un choix du Gouvernement, tiré de la conclusion d’un rapport remis au Parlement à l’été 2018 : ne plus compenser à la sécurité sociale les nouvelles mesures entraînant des pertes de recettes. Désormais, comme vous le dites, c’est « chacun chez soi ». À l’État, d’une part, et à la sécurité sociale, d’autre part, d’assumer le coût de la diminution de leurs recettes.

À l’évidence, notre commission ne peut suivre cette logique, et ce pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, elle méconnaît la vraie nature de la sécurité sociale. À l’inverse du budget de l’État, il n’y a pas, à la sécurité sociale, de grand pot commun ; au contraire, des ressources précises sont affectées à des dépenses précises. « De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins » : ce principe fondateur reste complètement d’actualité.

« À quoi bon ces subtilités, nous dit-on : après tout, l’argent sort de la même poche ! » Certes, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mais quand je paie mon assurance habitation et mon abonnement de téléphone, ces deux paiements sortent aussi de la même poche. Pour autant, dans les deux cas, je sais pour quoi je paie ! De même, les Français savent pour quoi ils paient leurs cotisations, la CSG, la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) – du moins, j’ose l’espérer – : c’est pour pouvoir faire face à la maladie, aux accidents du travail et aux charges de famille, et un jour vivre leur retraite. C’est par nature plus clair que dans le cas de l’État, dont les recettes et les dépenses sont universelles.

En outre, le principe de non-compensation repose sur un postulat qui n’existe plus. MM. Christian Charpy et Julien Dubertret, dans leur rapport, tablaient sur des excédents qui n’existent malheureusement plus. Nous devons donc constater ensemble que, s’il n’y a plus d’excédent, la situation ne justifie plus l’absence de compensation. Comme nous le disions l’année dernière, l’État impécunieux s’est précipité pour « faire les poches » de la sécurité sociale avant qu’elles ne soient pleines !

Pour l’ensemble de ces raisons, de ces principes de bonne gestion des finances publiques, nous défendrons au nom de la commission plusieurs amendements visant à refuser les nouvelles entorses à la loi Veil du 25 juillet 1994 qui figurent dans ce PLFSS.

Toutefois, mes chers collègues, que nous adoptions ou non la recompensation des mesures de la loi portant mesures d’urgence économiques et sociales, soyons conscients qu’il faudra maîtriser l’évolution des dépenses de la sécurité sociale, cette année, bien sûr, mais aussi les années à venir.

En effet, même si l’État compense, les comptes risquent de rester dans le rouge encore très longtemps. Au vu des masses en jeu, cela concernera au premier chef les branches maladie et vieillesse, qui pèsent à elles seules 470 milliards d’euros de dépenses en 2020.

Nous proposerons nos propres solutions, plus structurelles qu’un énième coup de rabot. Elles seront difficiles, sans doute, mais compréhensibles par les Français et de nature à garantir le pouvoir d’achat de tous les retraités et des familles.

Quant à l’hôpital, madame la ministre, à l’évidence, les plans d’économie ne suffisent plus, même s’ils sont nécessaires. La réorganisation tarde à produire ses effets. Il faudra donc bien des mesures nouvelles.

Alors, respect du principe de compensation, vigilance sur les recettes de la sécurité sociale, maîtrise de ses dépenses : la commission des affaires sociales proposera au Sénat une gestion sérieuse et capable de ramener la sécurité sociale au plus vite sur la voie des excédents et de l’apurement total de sa dette.

Au bout du compte, mes chers collègues, la question est de savoir si nous pourrons léguer à nos enfants une sécurité sociale enfin délestée de sa dette. Or si nous laissons les comptes glisser sur la pente que le Gouvernement nous invite à emprunter, quelque 47, 5 milliards d’euros de dette, gérés sous forme de découverts, auront été accumulés d’ici à 2023 par les différentes branches. Bref, à l’heure où s’éteindra la Cades, en 2024, la sécurité sociale sera plus endettée que lorsque cette caisse a été créée. Sisyphe sera en quelque sorte revenu au pied de la montagne, au moment même où il pensait avoir achevé son ouvrage.

Marques d ’ approbation sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Alors, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, convenons que cela n’est tout simplement pas possible. Nous ne pouvons pas nous contenter de balayer la question de la dette de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), comme vous l’avez fait devant notre commission en considérant que les taux d’intérêt ne devraient pas augmenter dans les douze prochains mois.

Il est d’ailleurs fort possible que, à l’approche de l’échéance de 2024, le Conseil constitutionnel nous rappelle à l’ordre. En effet, dans ses décisions de 2010, il a imposé aux pouvoirs publics l’extinction, cette année-là, de la dette sociale, et non de la seule Cades.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Au-delà de ces considérations juridiques, il nous faut revenir à l’essentiel et réaffirmer en conclusion quelques vérités simples.

La sécurité sociale n’est pas une sous-branche de l’État : elle constitue une entité autonome. Elle répartit les sommes qu’elle perçoit et ne devrait donc ni connaître de déficit ni, a fortiori, creuser de trou à la charge des générations futures, ce qu’une règle d’or inscrite dans une loi organique devrait rappeler. Mais puisque le trou de la sécurité sociale existe toujours, consacrons toutes les ressources destinées à le reboucher à ce seul usage tant que cela ne sera pas fait !

Voilà, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, l’esprit qui guidera les propositions que, avec mes collègues, nous formulerons au nom de la commission des affaires sociales tout au long de l’examen de ce PLFSS.

Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, adoptée à l’été dernier, exprimait une ambition de transformation de notre système de soins que nous avons été nombreux à soutenir, en dépit de divergences ou de certains regrets. La crise que traverse l’hôpital rend cette transformation plus nécessaire, mais aussi plus pressante que jamais.

Nous sommes nombreux à entendre, dans nos territoires, les inquiétudes de nos concitoyens comme les signaux d’épuisement des professionnels du soin, dont nous saluons l’engagement.

Si nous reconnaissons dans ce PLFSS des avancées que nous soutiendrons, il nous laisse cependant un goût d’inachevé au regard des enjeux inédits auxquels fait face notre système de santé.

Vous avez donné, madame la ministre, un certain nombre de gages aux acteurs hospitaliers : au-delà de vos engagements sur le dégel des crédits et la hausse des tarifs, auxquels nous serons attentifs, la voie ouverte par ce texte vers une meilleure visibilité sur les ressources des établissements de santé répond à des attentes fortes.

Cela rejoint certaines des conclusions d’un rapport sur l’Ondam que j’ai présenté avec René-Paul Savary. La pluriannualité est un enjeu majeur pour nourrir une vision plus prospective des besoins en santé. Elle est aussi une réponse concrète à l’incertitude permanente qui obère la capacité des établissements à décider de projets structurants. Le fait que l’investissement soit en berne depuis dix ans affecte les conditions de travail des personnels comme la prise en charge des patients.

Vous en avez pris en partie la mesure, madame la ministre, en annonçant dans les médias un plan de soutien ciblé sur l’investissement courant et l’attractivité des métiers à l’hôpital. C’est un engagement lourd de sens.

Mais, pour faire écho à M. le rapporteur général, quelle est la portée des discussions que nous engageons sur ce PLFSS, dès lors que nous n’avons pas connaissance de l’ensemble des moyens qui seront déployés ?

Permettez-moi de vous rappeler que l’exigence de visibilité que je viens d’évoquer s’applique aussi en direction du Parlement. C’est pour cette raison de principe que la commission, comme je le défendrai, proposera de surseoir à l’adoption de l’Ondam pour 2020.

Sur les dispositions disparates intéressant la branche maladie, que je ne peux évoquer in extenso, nous soutiendrons, moyennant des ajustements, les maillons posés concernant les réformes attendues du financement de la psychiatrie ou des urgences.

Il en est de même des mesures incitatives à l’installation des médecins dans les zones sous-dotées qui reprennent, quoiqu’avec moins d’ambition, un dispositif déjà voté au Sénat. En la matière, c’est l’exigence de souplesse qui guidera mes propositions.

Nos principales divergences porteront sur le volet relatif aux produits de santé.

En réponse aux légitimes préoccupations qu’ont suscitées les propositions du Gouvernement sur la régulation de la distribution de certains dispositifs médicaux, nous apporterons des aménagements. Nous nous montrons particulièrement circonspects quant à la procédure de référencement sélectif des fauteuils roulants ; nous sommes attachés à ce que les garanties des bénéficiaires soient renforcées afin qu’ils ne pâtissent pas de leur remise en bon état d’usage.

La fixation des prix de certains médicaments nous paraît par ailleurs prendre un virage assez peu compatible avec les principes que la commission des affaires sociales a toujours défendus. La mobilisation du mécanisme du tiers payant en cas d’égalité entre princeps et générique n’a pas fait l’objet d’une discussion suffisamment approfondie pour être acceptée en l’état. De façon plus générale, ce PLFSS porte trop manifestement atteinte à la négociation conventionnelle pour la fixation du prix de certains produits de santé.

L’accès précoce aux médicaments connaît par ailleurs des restrictions que nous jugeons préoccupantes.

Les travaux que j’ai menés avec Yves Daudigny et Véronique Guillotin ont montré l’urgence d’adapter nos procédures au nouveau paradigme en matière d’innovation. Je vous proposerai un dispositif expérimental en ce sens, mais c’est vers la stratégie globale du Gouvernement sur ce domaine crucial que nos interrogations vont aussi se porter.

C’est donc sous réserve de ces observations, ainsi que de l’adoption des amendements que je présenterai au nom de la commission, que celle-ci vous demandera d’adopter les dispositions relatives à la branche maladie de ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Bonne

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le 13 juin dernier, dans sa déclaration de politique générale devant notre Haute Assemblée, le Premier ministre, M. Édouard Philippe, avait annoncé que ce PLFSS serait « une première étape » de la grande réforme de la prise en charge du grand âge, elle-même « grand marqueur social » du quinquennat.

La volonté politique est manifeste. Elle est en outre soutenue par la société civile et alimentée par les réflexions de l’administration. La mission confiée à Mme Myriam El Khomri sur l’attractivité des métiers du grand âge vient de rendre ses conclusions ; elles se situent dans la lignée du rapport rendu par M. Dominique Libault en conclusion de la concertation « Grand âge et autonomie », rapport qui avait été unanimement salué en mars dernier.

Or les unanimités sont souvent louches et inquiétantes. Ce n’est pas que les préconisations du rapport Libault soient contestables. Au contraire ! Nous en approuvons largement les grandes orientations, comme la nécessité du virage domiciliaire, la baisse du reste à charge ou la hausse du taux d’encadrement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). D’ailleurs, nous avions déjà en grande partie préconisé de telles mesures, voire voté certaines d’entre elles, comme l’indemnisation du congé de proche aidant.

Non, je crains plutôt que l’accord sur les préconisations ne soit lié au fait que l’on ne parle pas encore de l’essentiel, c’est-à-dire du financement d’une véritable politique de prise en charge des bientôt 2, 5 millions de personnes dépendantes dans notre pays.

C’est d’abord cela et, en conséquence seulement, la restructuration de l’offre de service à destination de nos concitoyens qu’il faudrait évoquer en loi de financement de la sécurité sociale. Hélas, je n’ai que cinq minutes ! Mais il paraît que nous y reviendrons bientôt.

La minceur du volet médico-social du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale conduirait à considérer le teasing législatif comme un des beaux-arts.

Au titre de 2019, il faut, certes, saluer le renfort inédit de 130 millions d’euros pour l’Ondam médico-social, qui correspond à la sous-exécution attendue des soins de ville, même si c’est à peu près ce qui avait été gelé par précaution en début d’année, comme chaque année.

Au titre de 2020, la plupart des mesures nouvelles censées engager le virage domiciliaire sont curieusement consacrées aux établissements. Il s’agit pour l’essentiel de la poursuite de la convergence tarifaire. Un seul signal financier est envoyé aux métiers du grand âge : la revalorisation de la prime d’assistant de soins en gérontologie, pour un montant de 15 millions d’euros. Toutefois, cela ne représente en moyenne que 150 000 euros par département !

J’en viens à l’aide à domicile. L’enveloppe de 50 millions d’euros de l’an dernier est reconduite en 2020, alors que le rapport Libault estimait les besoins de l’aide à domicile à 550 millions d’euros d’ici à 2024 et qu’il faudrait environ cinq fois plus pour seulement hisser tous les professionnels du secteur au niveau du SMIC !

Je ne dirai pas grand-chose à ce stade de l’indemnisation du congé de proche aidant par une section du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), chaque année en déficit, puis par les réserves de la Caisse, et moins encore du financement des établissements médico-sociaux par le surplus du produit tiré des amendes radars avec l’abaissement de la vitesse sur les routes à 80 kilomètres par heure. Nous aurons ces débats en temps utile.

La commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l’adoption des dispositions médico-sociales de ce PLFSS, celles-ci valant mieux qu’une absence totale de mesures. Toutefois, nous regrettons de devoir attendre la réforme promise pour travailler à clarifier les compétences, à unifier la gouvernance et le pilotage de la politique du grand âge et, surtout, à pérenniser son financement pour les générations à venir.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les excédents cumulés de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), qui culmineront à 4, 8 milliards d’euros en 2020, sont en passe de se transformer en cagnotte. Le Gouvernement ne souhaitant pas poursuivre la baisse du taux de cotisation AT-MP, le solde de la branche s’établira à 1, 4 milliard d’euros en 2020 et se maintiendra à ce niveau jusqu’en 2023 ; de quoi alimenter, paraît-il, la trésorerie des autres branches.

Le gonflement des capitaux propres de la branche, de même que le transfert, au bénéfice de l’assurance maladie, d’un milliard d’euros pour la sixième année consécutive, amène à s’interroger sur les fondements assurantiels de la branche AT-MP.

Au titre de la solidarité « interbranches » – c’est un terme qui vient de sortir ! –, les cotisations AT-MP, qui sont pourtant censées responsabiliser les employeurs sur la sinistralité de leurs établissements, sont en partie détournées au profit du rééquilibrage d’une branche maladie toujours en difficulté. Dans le même temps, quand bien même la branche AT-MP dispose d’une cagnotte qui dépassera rapidement les 5 milliards d’euros, les rentes AT-MP resteront sous-revalorisées, à hauteur de 0, 3 % en 2020, bien en deçà de l’inflation.

De même, les excédents de la branche ne seront pas mobilisés pour le développement de la prévention au sein des entreprises. Les moyens du Fonds national de prévention des AT-MP ne représenteront que 2, 7 % des dépenses en 2020. Le Gouvernement préfère ne pas toucher aux excédents qui dorment confortablement en trésorerie à l’Acoss.

Parmi les mesures relatives aux AT-MP, je me concentrerai sur le fonds d’indemnisation des victimes des pesticides. Nous nous félicitons effectivement de la création de cet outil, que notre collègue Nicole Bonnefoy – vous l’avez rappelé, madame la ministre – avait défendue en présentant sa proposition de loi dans cet hémicycle. Mais les avancées du nouveau fonds sont, en définitive, très limitées. La réparation reste forfaitaire et le niveau d’indemnisation des salariés agricoles ne changera pas par rapport à ce qu’ils peuvent aujourd’hui espérer de la Mutualité sociale agricole.

Seul un effort est réalisé en faveur des travailleurs agricoles non-salariés, notamment les chefs d’exploitation retraités avant 2002, avec un alignement de leurs conditions d’indemnisation sur celles des salariés agricoles et le versement d’un complément d’indemnisation. En outre, les enfants exposés en période prénatale pourront être indemnisés au titre de la solidarité nationale, mais à la condition que l’un des parents ait été exposé professionnellement.

Si la création d’un fonds apparaît généreuse, notre commission ne peut que regretter que le Gouvernement en fasse intégralement reposer le financement sur les agriculteurs et les employeurs. Ces derniers supporteront le coût des transferts des branches AT-MP des différents régimes et du relèvement de la taxe sur les pesticides.

Or – faut-il le rappeler ? – c’est l’État qui autorise l’usage des pesticides. C’est lui qui a permis l’utilisation du chlordécone, qui a durablement contaminé les sols antillais et dont le lien avec les récidives de cancer de la prostate est de plus en plus étayé par la science. Pourquoi ne pas avoir retenu une participation de l’État au financement du fonds au titre de sa responsabilité, comme cela avait été le cas pour l’amiante ou les contaminations transfusionnelles ? Notre commission a adopté plusieurs amendements pour améliorer le dispositif d’indemnisation.

Au final, étant donné qu’il y a un excédent global, et eu égard à l’avancée que constitue une telle compensation pour les victimes, la commission vous demande d’adopter, sous les réserves que je viens d’énoncer, les dispositions du PLFSS relatives à la branche AT-MP.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme l’indiquait M. le rapporteur général, le compte n’y est pas !

Mêmes causes, mêmes effets ! L’année dernière, je profitais de la discussion générale pour indiquer aux membres du Gouvernement que la commission des affaires sociales du Sénat avait adopté deux amendements relatifs à la branche vieillesse.L’un visait à supprimer l’article qui sous-revalorisait les prestations sociales par rapport à l’inflation ; l’autre tendait à reculer l’âge minimum légal de départ à la retraite de 62 ans à 63 ans pour apporter une première réponse durable au déséquilibre de la branche, qui se profilait déjà ; c’était dans l’annexe B du PLFSS pour 2019.

Mêmes causes, mêmes effets ! Cette année, notre commission a adopté deux amendements similaires à ceux de l’année dernière. Le premier vise à supprimer l’article 52, qui prévoit un mécanisme complexe de revalorisation différenciée des prestations sociales, et singulièrement des pensions, dont la constitutionnalité est douteuse. Le deuxième tend à décaler, cette fois-ci, l’âge minimum légal de 62 ans à 64 ans à compter du 1er janvier 2025 pour les assurés nés à partir du 1er janvier 1963. Je le rappelle, l’âge moyen de départ à la retraite à taux plein est actuellement de 63, 1 ans, hors départs anticipés.

Que s’est-il passé entre-temps ?

D’abord, il y a eu une crise sociale majeure qui a placé la question du pouvoir d’achat, en particulier des retraités, au centre des revendications. Cette crise a conduit le Gouvernement à revenir en partie sur deux décisions dont le Sénat avait souligné l’an dernier le risque quant à leur effet cumulatif : d’une part, le retour à un taux de CSG de 6, 6 % pour les retraités dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 2 000 euros, prévu dans le cadre de la loi du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales (MUES) ; d’autre part, le maintien, prévu dans ce PLFSS, d’une sous-revalorisation à 0, 3 % en 2020 pour les seules pensions de retraite dont les assurés perçoivent un montant total, base et complémentaire, supérieur à 2 000 euros, l’ensemble des allocations familiales étant concernées par cette sous-revalorisation.

L’autre changement, c’est la sévère dégradation de la trajectoire financière de la branche vieillesse, qui accuserait un déficit de 4, 6 milliards d’euros en 2020. Ce déficit se dégraderait jusqu’en 2023 pour atteindre 6, 6 milliards d’euros.

À la fin du mois, le Conseil d’orientation des retraites devrait rendre son diagnostic sur les perspectives financières du système dans son ensemble, mais certains estiment que son déficit pourrait avoisiner 10 milliards d’euros à 15 milliards d’euros par an vers 2025 ! Et ce n’est pas la réforme envisagée qui va résorber un tel déficit : dans les propositions du haut-commissaire, le mode de calcul différentiel se fonde sur la même trajectoire financière !

C’est à la lumière de ces deux changements qu’il faut examiner les propositions qui vous seront soumises par le Sénat cette semaine, madame la ministre. Je vous invite à nous écouter. En supprimant l’article 52, notre Haute Assemblée réaffirme sa conviction que la baisse des pensions n’est pas le levier souhaitable pour rééquilibrer financièrement la branche vieillesse.

La sous-revalorisation, parce qu’elle emporte des effets de base qui se répercutent d’année en année, est une rupture fondamentale avec le principe contributif au cœur du système des retraites, mais aussi avec le contrat social implicite de notre pays, selon lequel, une fois liquidée, la retraite évolue en fonction de l’inflation pour garantir le pouvoir d’achat des retraités. Cette question est également au centre de la confiance que les jeunes générations peuvent avoir en leur retraite.

Notre amendement tendant à porter l’âge minimum légal à 64 ans ne doit pas être balayé d’un revers de main, comme ce fut le cas l’an dernier : il pose en toute transparence la question du recul de l’âge effectif de départ à la retraite. C’est le moyen le plus efficace de garantir l’équilibre, donc de donner confiance à nos concitoyens, notamment les plus jeunes.

Oui, il faut assumer le fait qu’avec l’allongement de l’espérance de vie, donc du temps passé à la retraite, et alors que la France accuse un retard important en matière de taux d’emploi des 60-64 ans, les Français, comme les habitants des autres pays européens, devront travailler plus longtemps pour financer un bon niveau de retraite, sachant que la retraite sera plus longue. D’ailleurs, le rapport entre cotisants et retraités devient de plus en plus inquiétant.

Le recul de l’âge doit être assumé, afin d’envisager sereinement la question de ce qu’un rapport récent du Sénat a appelé « le défi des fins de carrière ». Je souhaite que le Gouvernement puisse examiner la pertinence du dispositif de retraite anticipée pour carrière longue pour le recentrer sur les carrières pénibles.

Madame la ministre, n’hésitez pas à suivre nos propositions.

Sourires sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mmes Élisabeth Doineau, Françoise Gatel et Sophie Joissains applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Sinon, mêmes causes, mêmes effets ! Quand ce n’est pas le Parlement qui est écouté, c’est la rue qui parle, et c’est le Gouvernement qui capitule !

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Le présent projet de loi comporte des avancées pour les familles, que nous avons approuvées, mais il ne permet pas, à notre grand regret, de relancer une politique familiale victime de trop nombreux renoncements, et ce depuis de nombreuses années.

Après dix ans de déficits, la branche famille a retrouvé un solde excédentaire en 2018 et pourrait donc apurer sa dette à l’horizon de 2022. Cette situation financière pourrait être l’occasion de renforcer la politique familiale. Pourtant, le PLFSS demande encore des efforts aux familles.

En effet, le Gouvernement a engagé l’année dernière un quasi-gel de l’ensemble des prestations familiales alors que l’inflation serait de 1 % en 2019. Cette économie de 260 millions d’euros pour la branche représente une perte de pouvoir d’achat équivalente pour les bénéficiaires de prestations familiales, en particulier pour les parents isolés. Pour une famille monoparentale avec deux enfants, aux revenus compris entre un et deux SMIC, cela représente 140 euros de moins pour cette année.

Le Gouvernement nous propose de reconduire cette sous-revalorisation des prestations familiales à 0, 3 % en 2020, pour une économie de 100 millions d’euros environ, alors que l’inflation devrait atteindre 1 % l’année prochaine. Comme l’an dernier, la commission s’est opposée à cette mesure, ainsi que mon collègue René-Paul Savary vient de l’exposer.

Je le rappelle, sur l’initiative de Gérard Dériot, la commission a aussi souhaité maintenir la majoration des indemnités journalières au bénéfice des familles nombreuses, qu’il est proposé de supprimer à l’article 56. Il est temps de mettre un terme à ces mesures d’économies sur les familles et de se donner les moyens de relancer une politique familiale ambitieuse, alors que le nombre de naissances a baissé de 8, 5 % en dix ans.

Le premier objectif assigné à la branche famille est de compenser les charges de famille, selon une logique de redistribution horizontale. Or, depuis quatre ans, la modulation des allocations familiales permet une économie de 770 millions d’euros par an. Les bénéficiaires de la prestation partagée d’éducation de l’enfant ne cessent de diminuer depuis sa création, car ses conditions de recours sont trop rigides et son montant trop faible. Il faut tirer les conséquences de l’échec d’une telle réforme.

Le développement des modes de garde devrait être davantage soutenu : actuellement, pour deux places de crèche qui s’ouvrent, une place se ferme. La mise en place des bonus « inclusion handicap », « territoire » et « mixité sociale » va dans le bon sens. Nous serons attentifs à leur déploiement dans les mois à venir pour vérifier qu’ils permettent effectivement de développer des places d’accueil sur tous les territoires.

D’autres mesures de ce PLFSS présentent des avancées pour les familles. Je mentionnerai la mise en place d’une intermédiation financière pour le recouvrement et le versement des pensions alimentaires par les caisses d’allocations familiales (CAF), qui permettra de réduire les taux d’impayés de pension, encore trop élevés. Saluons à cet égard les moyens supplémentaires, notamment en effectifs, qui seront attribués aux CAF pour la mise en œuvre du dispositif.

Le fameux article 49 fait couler beaucoup d’encre et suscite beaucoup d’amendements.

L’affichage de la disponibilité des places dans les crèches et chez les assistants maternels sur le site internet monenfant.fr facilitera l’accès aux modes de garde pour les familles ; vous le savez, aujourd’hui, les jeunes parents sont sur leur iPhone et regardent les disponibilités. Cela permettra de répondre aux besoins des parents pour des gardes ponctuelles et s’adaptera au développement des plateformes de services en ligne, alors que de nombreux sites promeuvent déjà les modes de garde privés. Un tel mécanisme renforcera ainsi l’attractivité des différents modes de garde, en particulier des assistants maternels, en leur offrant davantage de visibilité.

En revanche, les assistants maternels, dont j’ai reçu plusieurs représentants, s’inquiètent – et je les comprends – de la mesure prévue à l’article 49, en raison des contraintes qui découleront de cette obligation et du risque de retrait d’agrément qui pèserait sur ceux qui ne la respecteraient pas. C’est pourquoi la commission a adopté un amendement tendant à préciser que le manquement à ces obligations de déclaration ne pourra pas constituer à lui seul un motif de retrait d’agrément. Cela permet de lever les inquiétudes exprimées sans renoncer à cette offre de services proposée aux familles ; celle-ci est soutenue par les associations familiales que j’ai rencontrées.

Au total, la commission regrette que ce PLFSS ne consacre pas davantage de moyens à la politique familiale, qui devrait être vue comme une politique d’investissement dans l’avenir face au vieillissement de notre population. Elle vous proposera donc de vous opposer à la sous-revalorisation des prestations familiales et d’adopter les autres articles relatifs à la branche famille sous réserve des amendements évoqués.

Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Joyandet

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, lors de la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, le Gouvernement nous avait annoncé la fin du déficit de la sécurité sociale dès 2019. Le présent projet de loi de financement en apporte un cruel démenti.

L’exercice 2019 marque une vraie rupture avec la trajectoire de retour à l’équilibre annoncée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2019. Le déficit cumulé du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) devrait atteindre 5, 4 milliards d’euros, alors qu’un excédent de 0, 1 milliard d’euros était espéré en début d’exercice.

Nous allons évidemment débattre de la non-compensation des mesures d’urgence économiques et sociales. Leur impact est estimé à 2, 8 milliards d’euros. La sécurité sociale a donc été utilisée pour répondre à des impératifs politiques d’augmentation du pouvoir d’achat, en contradiction avec ses missions originelles. Le traitement de la crise des « gilets jaunes » a en fait été financé par la sécurité sociale.

Cependant, de telles mesures ne peuvent pas justifier à elles seules le creusement du déficit des comptes sociaux, qui résulte pour moitié d’un défaut de pilotage. Le ralentissement de la croissance économique était en effet prévisible. La progression des dépenses aurait pu être mieux contenue. Un tel retournement trahit un manque de crédibilité des prévisions soumises au Parlement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Venons-en désormais aux perspectives pour 2020. Le projet de loi de financement prévoit un déficit cumulé du régime général et du FSV établi à 5, 1 milliards d’euros et diffère donc le retour à l’équilibre à l’horizon de 2023. D’ailleurs, une telle perspective peut apparaître optimiste compte tenu des hypothèses retenues en matière de progression de la masse salariale et en l’absence de mesures structurelles visant les dépenses de l’assurance maladie. Je pense en particulier aux indemnités journalières, plus de 11 milliards d’euros chaque année hors congés de maternité, ou au transport médicalisé, qui représente une dépense de plus 5 milliards d’euros chaque année. L’Ondam annoncé sera-t-il par ailleurs tenu face à la crise constatée au sein des hôpitaux ? Ce sera bientôt, me semble-t-il, l’actualité de la commission des affaires sociales.

Le texte confirme la non-compensation par l’État d’un certain nombre de dispositions ayant un impact sur les comptes sociaux, dont les mesures d’urgence économiques et sociales. Certaines de ces dérogations à la loi Veil, si modestes soient-elles – je pense notamment aux exonérations visant les jeunes entreprises innovantes ou les indemnités de rupture conventionnelle des fonctionnaires –, démontrent bien que la logique sur laquelle reposent ces transferts de financement reste confuse et se révèle inadaptée aux difficultés que rencontrent par ailleurs les comptes sociaux. Elles traduisent une lecture à géométrie variable par le Gouvernement de sa propre doctrine, telle qu’il l’avait définie en loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.

La volonté affichée de clarifier les relations financières entre l’État et la sécurité sociale ne résiste pas à celle de minorer l’effet pour le budget de l’État de nouveaux dispositifs plus ou moins coûteux. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 privilégie de fait la confusion et la gestion à vue par rapport à la rationalisation, qui avait pu susciter un certain consensus.

Je ne suis bien entendu pas hostile à l’idée que l’État puisse bénéficier du retour à meilleure fortune de la sécurité sociale et limite donc les compensations. Cependant, si cette option pouvait s’entendre en 2018, elle est aujourd’hui à rebours de la réalité des comptes sociaux. Faute de recettes nouvelles, le PLFSS table sur une stabilisation de leur montant en 2020. Celle-ci relève cependant pour partie du faux-semblant, en se cantonnant à supprimer les rétrocessions à l’État de fractions de TVA et de CSG d’un montant de 3, 1 milliards d’euros votées l’an dernier et à majorer la fraction de TVA versée à la sécurité sociale, qui atteindra plus de 50 milliards d’euros. Aucune réflexion n’est véritablement engagée pour réduire le coût des niches fiscales, estimé à 90 milliards d’euros.

Je relève en outre que le financement de la sécurité sociale ne repose plus aujourd’hui que pour moitié sur les cotisations sociales. De fait, madame la ministre, je m’interroge à titre personnel – mes propos n’engagent pas la commission des finances – sur la pertinence du maintien d’une loi spécifique pour le financement de la sécurité sociale : aujourd’hui, on ne sait plus très bien qui doit quoi et à qui. À mon sens, une réflexion pourrait être engagée pour n’avoir plus qu’une seule loi de finances, avec – pourquoi pas ? – un grand ministère de la sécurité sociale et de la santé.

M. Gérard Dériot, rapporteur, s ’ exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Joyandet

Je souhaite également évoquer la Cades.

Le creusement du déficit du régime général et du FSV ne remet pas en cause l’extinction de la dette sociale, gérée par la Cades, à l’horizon de 2024. Il devrait rester 89, 3 milliards d’euros de dette à amortir à la fin de l’année 2019. Le déficit conduit cependant le Gouvernement à renoncer au transfert d’une fraction de CSG vers la Cades, soit 5 milliards d’euros d’ici à 2022, en vue d’un apurement de la dette de l’Acoss à partir de 2020.

Le déficit des comptes sociaux devrait conduire la dette de l’Acoss à progresser pour atteindre 46 milliards d’euros à l’horizon de 2022, cette dette étant par ailleurs très exposée à un risque de retournement des marchés financiers.

L’apurement de la dette de l’Acoss doit donc être envisagé à partir de 2024 via une réaffectation de la CRDS, ce qui rend illusoire sa suppression à cette date et écarte une baisse des prélèvements obligatoires.

Reste enfin la question du financement à long terme de la dépendance. Le rapport Libault table sur un recours au financement public et à la mobilisation de la CRDS. Je tiens à le rappeler – là, je m’exprime bien au nom de la commission des finances –, l’affectation d’une ressource initialement dédiée à l’apurement d’une dette, qui n’est plus une dépense, à une nouvelle charge dégraderait, au sens de la comptabilité nationale et des critères de Maastricht, le solde public. Le cinquième risque devrait plutôt conduire à accélérer les réformes structurelles au sein des régimes sociaux, afin de réduire leurs dépenses et d’améliorer leurs recettes.

Compte tenu de ces observations, mais aussi de vos déclarations depuis l’adoption du rapport pour avis, madame la ministre, la commission des finances s’en remet à la position que la commission des affaires sociales défendra in fine.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, dont nous entamions l’examen voilà exactement un an, et sa promesse du retour à l’équilibre des comptes sociaux auront donc vécu moins de deux semaines, le temps que les mesures d’urgence « gilets jaunes » ne mettent à mal à la fois l’équilibre de la sécurité sociale et le sérieux du Gouvernement en matière de finances publiques !

Avant même ces événements, nous alertions sur les limites de la politique du « en même temps ». Pouvait-on « en même temps » baisser les recettes, tenir l’équilibre et résorber la dette ? Nous en doutions, et l’expérience nous a montré que l’équation était pour le moins difficile.

Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, on nous propose une expérience plus originale encore que celle de 2019, puisque, cette fois, il ne s’agit pas d’un texte dont la date de péremption est proche, mais d’un texte frappé d’emblée de caducité.

Nous avons appris, ce dimanche, dans la presse, que le niveau de l’Ondam hospitalier serait augmenté pour financer, notamment, des mesures d’attractivité pour le début de carrière des personnels hospitaliers et que la dette des hôpitaux serait reprise par l’État pour faciliter le financement des investissements. Pour autant, il n’y a pas eu pour le moment d’amendement du Gouvernement, que ce soit dans le PLF ou dans le PLFSS.

On nous annonce des précisions le 20 novembre, au lendemain du vote solennel au Sénat !

Il est permis de s’interroger sur la conformité d’un tel texte à la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale et, au-delà des questions juridiques, sur la considération portée à la représentation nationale.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

La commission des affaires sociales avait pris, à titre conservatoire, la décision de ne pas adopter un Ondam provisoire. Nous confirmerons donc cette position. Je mets simplement en garde : à trop vouloir se passer du Parlement et des corps intermédiaires, le Gouvernement se trouvera bien seul face aux mouvements sociaux en cours ou à venir, …

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

… un face-à-face dangereux, soumis au risque des mouvements de la rue, pouvant conduire à la paralysie et à l’abandon des réformes, mais peut-être à pire encore.

Or notre pays a besoin de réformes. Dans l’intérêt même de notre protection sociale, nous devons la faire évoluer. Dans ses différentes composantes – un système de santé tout à la fois de pointe et solidaire, des retraites décentes et une politique de soutien aux familles –, la protection sociale appartient à l’identité même de notre pays. Laisser filer les déficits revient à la mettre en péril.

Ce qui se passe aujourd’hui à l’hôpital est le produit d’une absence de réformes structurelles. À passer le budget des hôpitaux sous la toise à grand renfort de mesures de régulation pour tenir l’Ondam, c’est tout le système qui craque, et il est déjà trop tard. Le temps que les mesures d’organisation portent leurs fruits, il faut réarmer l’hôpital. Le Gouvernement n’a pas d’autre choix.

Des choix, il faudra pourtant en faire en matière de santé si nous voulons maintenir un système solidaire, faire de la place à l’innovation et assumer les charges liées au vieillissement et aux pathologies chroniques.

C’est ainsi que, s’agissant des retraites, il faut agir, sans attendre une réforme très ambitieuse qui, peut-être, ne viendra pas. Au motif de l’injustice des régimes spéciaux, le Gouvernement s’est lancé dans une vaste entreprise qui pourrait conduire à réformer tout le reste, en laissant de côté ces mêmes régimes qui ne rentreraient qu’un jour peut-être dans le système universel. Or nous sommes tout près des années les plus difficiles en matière de financement des retraites, René-Paul Savary en a parlé. Nous ne pouvons attendre quarante ans les fruits d’une hypothétique réforme. La commission des affaires sociales invite donc le Sénat à prendre ses responsabilités sans tarder, et le Gouvernement à en faire autant.

Nous avons alerté sur la question de la dette de la sécurité sociale. Pour ce qui est de la partie transférée dans le mécanisme d’amortissement de la Cades, l’extinction est programmée. Quant au reste, évalué par notre rapporteur général à près de 50 milliards d’euros en fin de période couverte par le présent texte, rien n’est moins sûr. Nous avons du mal à comprendre le choix, clairement assumé par le Gouvernement, de laisser perdurer cette dette. Est-elle un aiguillon pour inciter à la vertu budgétaire ?

C’est la logique même de la sécurité sociale qui se trouve ainsi mise à mal, le sens même des cotisations sociales et, à la suite, le consentement à les payer. Le rapporteur général a évoqué Sisyphe, les références mythologiques sont riches et, pour les Français, ce « trou de la sécurité sociale » pourrait bien évoquer le tonneau des Danaïdes.

La vocation de la sécurité sociale est la redistribution ; la redistribution des bien-portants vers les malades, des actifs vers les personnes âgées, des célibataires vers les familles. Cette redistribution passe par les prestations et non par les prélèvements. En d’autres termes, l’objet de la sécurité sociale n’est pas de financer des mesures de pouvoir d’achat.

Il a beaucoup été question dans nos débats de la non-compensation des mesures « gilets jaunes ». L’objectif de la loi Veil, au moment où s’amorçait une diversification des recettes de la sécurité sociale, était de garantir que le remplacement des cotisations serait bien pérenne et que la baisse des cotisations ne se traduirait pas par des déficits. La tentation est grande, nous l’observons chaque année, de « miter » ces recettes. Pour les ministères, les allégements de cotisations, s’ils peuvent être laissés à la charge de la sécurité sociale, sont un outil commode en période de disette sur les crédits. Un amendement de Jean-Pierre Door à l’Assemblée nationale a opportunément remédié à une première tentative dans ce sens, qui contrevenait même aux principes du rapport Charpy-Dubertret sur lequel le Gouvernement s’appuie pour justifier les non-compensations.

La non-compensation ne change rien à l’échelle des finances publiques. Elle n’est qu’un moyen de loger un « bout de déficit » en dehors du budget de l’État. Il convient de corriger cette anomalie et, puisque le texte que nous examinons aujourd’hui semble provisoire, il reste une occasion à saisir pour le Gouvernement !

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je suis saisi, par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, d’une motion n° 792.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 2, du règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2020 (98, 2019-2020).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 7, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion, l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’an dernier, à l’occasion de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, redoutant que ce ne soit le dernier budget de la « Sécu » dont la représentation parlementaire ait à discuter, nous avions déjà déposé une motion d’irrecevabilité constitutionnelle.

Le projet de réforme constitutionnelle prévoyait, en effet, l’examen commun du budget de l’État et de celui de la sécurité sociale avec, en filigrane, l’idée de transférer les excédents potentiels de la sécurité sociale vers le budget de l’État. Mais vous avez été contraints de repousser cette réforme constitutionnelle devant le fort mécontentement qui s’est exprimé dans la rue durant de très longs mois, et quinze jours après le vote du PLFSS 2019, le Président de la République annonçait les mesures d’urgence économiques et sociales pour répondre aux revendications des « gilets jaunes ».

Si la réforme constitutionnelle ne semble plus à l’ordre du jour, les intentions du Gouvernement de remettre en question l’autonomie de la sécurité sociale sont plus que jamais d’actualité. Pourtant, madame la ministre, comment ne pas adhérer aux propos que vous avez tenus avec conviction à l’Assemblée nationale lors de l’examen en première lecture du budget de la sécurité sociale ?

Permettez-moi de vous citer : « Le PLFSS n’est pas seulement un acte de responsabilité budgétaire. En faire une lecture strictement comptable, c’est passer à côté de ce qu’il est vraiment. Il est avant tout un instrument politique. Nous sommes en train de repenser la protection sociale dans son ensemble : dans sa méthode comme dans ses finalités, pour la rendre plus universelle, plus juste et plus efficace. Notre objectif consiste à réaffirmer la présence de l’État social à chaque étape de la vie. »

Une question me taraude, madame la ministre, comment justifiez-vous, pour ce nouveau PLFSS, cette envolée des exonérations patronales non compensées par l’État, faisant fi de la loi Veil du 25 juillet 1994 ? Le groupe CRCE auquel j’appartiens n’a manifestement pas la même conception que vous de ce que vous appelez « l’État social à chaque étape de la vie » !

La baisse des taux de cotisations patronales et l’exonération totale des cotisations, désormais non compensées par l’État, créent un déficit artificiel des comptes de la sécurité sociale. C’est donc la double peine pour les assurés sociaux qui financent deux fois, par l’impôt et par les cotisations, un déficit dû aux choix politiques du Gouvernement. C’est d’autant plus insupportable quand on sait que près de 9 millions de personnes vivent avec moins de 1 000 euros par mois et que 34 % de nos concitoyens ont dû renoncer à un ou plusieurs soins, ce chiffre pouvant atteindre 64 % pour les familles les plus modestes !

Chaque année, la sécurité sociale se voit contrainte d’assumer des choix qui ne dépendent pas d’elle. Elle doit notamment rembourser à marche forcée la dette qui pèse sur elle depuis la crise financière. En 2019, la sécurité sociale, Cades comprise, a réduit son endettement de 11, 7 milliards d’euros. Cela relativise encore un peu plus son pseudo-déficit de 5, 4 milliards d’euros pour 2019 !

Madame la ministre, vous nous parlez avec M. Darmanin de dépenses de santé trop élevées, qui videraient les caisses de notre système de protection sociale. Mais de quoi parlez-vous ? Les dépenses de la sécurité sociale ont augmenté de 2, 1 %, soit nettement moins que le PIB, dont la croissance est de 2, 7 %. La sécurité sociale ne souffre donc pas d’une explosion de ses dépenses, mais d’un manque de financement. Cela rend plus dogmatique que jamais votre refus d’accepter nos amendements qui apporteraient de nouveaux financements pour notre protection sociale. Mais force est de reconnaître qu’agiter le spectre du « trou de la sécurité sociale » permet de justifier la baisse des prestations et de préparer le terrain pour réduire les pensions de retraite lors de la future réforme Delevoye !

Vous me direz, sans doute, que cette remise en cause du principe de compensation intégrale par l’État n’est pas une nouveauté. Certes, mais son ampleur est sans précédent. L’ensemble des allégements généraux de cotisations et d’exonérations ciblées représenteront 66, 4 milliards d’euros en 2020. Selon la Cour des comptes, les niches sociales seraient, en réalité, proches de 90 milliards d’euros si l’on ajoute les nombreuses déductions sectorielles, dont 52 milliards d’euros d’allégements généraux de cotisations sociales.

Si bien que nous sommes aujourd’hui à un tournant, puisque les allégements et les exonérations ont explosé au point de dépasser le montant des recettes de la branche famille. C’est un tournant pour la sécurité sociale en raison du volume que représentent les cotisations non acquittées, principalement par les employeurs, puisque, depuis 2013, le CICE a amputé de près de 100 milliards d’euros les cotisations sociales à la Sécu pour un effet en termes de création d’emplois quasi nul ! C’est aussi un tournant en raison du niveau des cotisations fictives des employeurs, puisque, en dessous du Smic, ils ne cotisent pas un euro ! Nous sommes bien là face à une remise en cause du système paritaire.

Comment ne pas rappeler ici que, en 2020, la part des cotisations sociales dans le budget de la sécurité sociale ne représente plus que 50, 7 % des recettes ?

Le principe même des exonérations de cotisations sociales doit être abandonné, pour des raisons fondamentales : c’est une catastrophe pour notre système de protection sociale, mais également pour notre économie. En effet, selon le Comité de suivi et d’évaluation des aides publiques aux entreprises et des engagements (Cosape), les exonérations de cotisations patronales, dont le coût est élevé pour les finances publiques, ne vont pas vers les salaires ou l’investissement, mais vers l’augmentation des marges et la part des dividendes dans la valeur ajoutée qui a fortement augmenté.

Nous ne sommes pas les seuls à refuser la remise en cause de l’autonomie budgétaire de la sécurité sociale ; au Sénat comme à l’Assemblée nationale, de la part de la gauche, mais également d’une partie de la droite jusqu’à votre propre majorité, puisque des députés de La République En Marche ont émis des réserves, plusieurs amendements s’en font l’écho ! Je pense à celui de notre rapporteur, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, sur l’article 17, qui refuse les nouvelles non-compensations de l’État, et que nous voterons si notre motion n’est pas adoptée.

En fait, madame la ministre, jamais budget de la sécurité sociale n’a été autant contesté. Au-delà des parlementaires, ce sont les organisations syndicales, les associations d’usagers, des fédérations hospitalières, les conseils d’administration des caisses de la sécurité sociale ainsi que la Mutualité française qui se sont publiquement prononcés contre ce budget.

Par ce PLFSS 2020, vous bafouez le principe d’autonomie organique et financière reconnu par notre législation républicaine. Je pense, notamment, à l’article XIII de la Déclaration de 1789 et au huitième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, sans oublier la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale de 2005, qui a reconnu le principe de la compensation systématique de toute perte de recettes pour la sécurité sociale. Notre groupe a donc déposé cette motion tendant à opposer l’irrecevabilité constitutionnelle, afin de dénoncer la mise en cause du principe constitutionnel d’autonomie des finances sociales.

Mes chers collègues, l’heure est grave. Il n’est pas possible de laisser passer ce PLFSS qui ne tient pas compte de l’état réel de notre système de santé, de la situation dramatique des hôpitaux, de l’état d’épuisement et de colère des personnels soignants, administratifs et techniques.

Madame la ministre, ne pas rompre avec des choix de restrictions budgétaires qui ont prouvé leur nocivité depuis des décennies, vouloir faire taire le malaise en pratiquant des transferts de financements à moyens constants, nous parler de mesures en préparation pour remédier à la crise des urgences, que vous ne dévoilerez que le 20 novembre prochain – après, donc, le vote sur le budget de la sécurité sociale et sur celui de l’État –, c’est au mieux prendre les parlementaires que nous sommes ainsi que toutes celles et tous ceux qui luttent depuis des mois pour de doux naïfs, au pire pour des imbéciles !

Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Madame la ministre, c’est votre troisième PLFSS et, cette année encore, malgré les mobilisations, les grèves, les pétitions, les tribunes du monde de la santé, vous persistez à programmer 4, 2 milliards d’euros de moins pour la santé, dont plus d’un milliard pour l’hôpital. Vos choix vont encore durcir l’accès aux soins des patients et les conditions de travail des personnels dans les hôpitaux, les Ehpad, les établissements médico-sociaux, sans régler en rien la désertification médicale.

Malgré vos promesses, comment, sans moyens supplémentaires, répondre à la situation dramatique vécue par le secteur psychiatrique, et singulièrement la pédopsychiatrie ? Comment résoudre l’urgence sanitaire des services d’aide et de maintien à domicile ? Quel sera le contenu de la loi sur la dépendance et le grand âge, que vous nous annoncez pour le printemps ? Allez-vous répondre aux attentes des personnels et des usagers qui, exaspérés par le vote de nos collègues députés en première lecture de ce budget provocateur, manifesteront le 14 novembre devant le Parlement et dans toute la France ?

Ce mouvement ample, qui dure et réunit syndicats, collectifs Inter-Urgences, Inter-Hôpitaux, personnalités médicales de tous horizons, trouve une très large adhésion de la population : nous serons à leurs côtés. Et parce que la réforme des retraites fait aussi partie de notre système de protection sociale et qu’elle est fort injuste, nos concitoyens seront à nouveau dans la rue le 5 décembre prochain : nous y serons aussi !

Alors, oui décidément, ce PLFSS n’est pas à la hauteur des besoins et des exigences ! C’est la raison pour laquelle nous vous proposons cette motion. Il ne s’agit plus, mes chers collègues, de penser qu’il sera possible de limiter les dégâts par quelques amendements. C’est toute la logique de ce projet qu’il faut revoir, car elle remet totalement en question notre système de solidarité, conçu par Ambroise Croizat, ministre communiste, et Pierre Laroque, haut fonctionnaire, et soutenu par le général de Gaulle.

Voter en faveur de notre motion n’est pas empêcher le débat, mais dénoncer les limites à ne pas franchir pour éviter que notre système de santé et de protection sociale ne s’effondre. N’attendez pas la nouvelle lecture pour voter une motion de renvoi, comme vous avez coutume de le faire. Battons-nous ensemble contre la disparition de notre modèle de protection sociale plutôt que de débattre sur ses cendres !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Personne ne demande la parole contre la motion ?…

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Pour regrettables que soient les entorses au principe de compensation figurant dans ce texte, madame Cohen, elles ne contreviennent pas à la Constitution ni à une loi organique. La commission aura, vous l’avez souligné, des propositions à formuler sur le fond au cours de ce débat. Encore faut-il que celui-ci ait lieu ! Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Ce PLFSS 2020 opère une triple rupture.

La première est une rupture avec les principes fondateurs de la sécurité sociale, notamment avec celui de son autonomie budgétaire, déjà malmené par le passé. Mais là où, auparavant, il y avait une corde avec quelques fils tirés, vous donnez le coup de couteau, le coup de sécateur, pour rompre cette corde qui lie le pays à son système de protection sociale.

La deuxième rupture est celle qui s’opère avec le principe respecté par les gouvernements successifs au cours des dix dernières années, à savoir celui du rétablissement des comptes publics de la sécurité sociale. Vous présentez, en effet, cette année, un déficit qui est presque artificiel. C’est un déficit punitif que vous infligez à la sécurité sociale !

La troisième est la rupture du contrat de confiance liant le Gouvernement et le Parlement. Ce contrat de confiance suppose, tolère l’exercice normal du dialogue entre une opposition et un gouvernement. Comment qualifier le fait de faire des annonces dans un journal, le dimanche, alors que le Gouvernement sait pertinemment que, le mardi suivant, il rencontre le Sénat pour discuter de ce que pourraient être ces annonces et leur financement, pour finalement ne pas en discuter avec le Sénat ce même jour ?

En fait, depuis deux ans déjà, nous savons que le passage par le Parlement est perçu par le Gouvernement comme une formalité encombrante. Encore récemment, lors de l’examen d’un autre texte, nous avons connu des moments qui nous ont mis face au point de vue du Gouvernement quant à son rapport avec le Parlement. Mais quand on approche dans son ensemble la politique que vous conduisez, qu’il s’agisse de l’indemnisation du chômage ou de votre projet de loi qui, demain matin, devrait passer en conseil des ministres, pour affaiblir les protections des salariés qui travaillent de nuit, qu’il s’agisse de la santé, la seule conclusion que nous pouvons en tirer est que, dans le nouveau monde, il vaut mieux être riche et en bonne santé que pauvre et malade !

C’est la raison pour laquelle nous voterons cette motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.

Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je mets aux voix la motion n° 792, tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.

Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Je rappelle, en outre, que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 29 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Guillaume Arnell.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Arnell

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’automne dernier, le Gouvernement promettait un retour à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale, ce dont nous nous réjouissions collectivement. Cette annonce était la bienvenue après dix-huit ans de déficit.

Mais aujourd’hui, nous est présenté un PLFSS 2020 avec des comptes dégradés, en déficit de 5, 4 milliards d’euros, et la promesse d’un retour à l’équilibre des comptes pour 2023, en raison notamment des mesures « gilets jaunes ». Si nous pouvons, bien évidemment, saluer les mesures prises pour répondre aux revendications sociales, nous sommes quelques-uns à regretter la non-compensation de ces mesures par l’État, qui nous semble contraire à l’esprit de la loi du 25 juillet 1994.

Mme Simone Veil avait d’ailleurs déclaré à l’époque devant notre Haute Assemblée : « L’État ne peut prétendre jouer un rôle majeur dans la conduite du système de sécurité sociale que s’il est irréprochable dans les relations financières qu’il entretient avec celle-ci. Il en va de la crédibilité de la politique de redressement financier de la sécurité sociale. » C’est dans cet esprit que plusieurs sénateurs du RDSE ont déposé des amendements tendant à revenir sur la non-compensation.

La situation de l’hôpital public nous préoccupe tout particulièrement. Deux nombres sont très parlants : d’une part, celui de 10 %, soit le pourcentage d’entités hospitalières ayant fermé entre 2008 et 2018 ; d’autre part, celui de 834 380, soit le nombre de séjours hospitaliers supplémentaires sur la même période. Il semble difficile d’améliorer la performance de nos hôpitaux en ayant moins d’établissements et plus de soins à prodiguer, même si, j’en conviens, madame la ministre, vous n’êtes pas responsable d’une situation dont vous avez hérité.

Le RDSE a toutefois relevé un certain nombre de mesures positives, comprises dans le texte du Gouvernement ou ajoutées par l’Assemblée nationale. Je citerai notamment la pérennisation de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, bien qu’elle soit désormais conditionnée à un accord d’intéressement. Je crains que cette condition, sans doute légitime pour les grandes entreprises, ne nuise aux TPE et aux PME et, par conséquent, à leurs salariés.

Autre sujet, la situation des urgences est et demeure préoccupante. Aussi sommes-nous particulièrement attentifs à la proposition de réforme du financement des urgences du député Thomas Mesnier, ancien médecin urgentiste, qui mérite d’être expérimentée.

Dans un autre registre, mais avec une finalité similaire, l’expérimentation du cannabis thérapeutique doit être engagée. Je pense notamment aux personnes souffrant de maladies incurables ou chroniques telles que la sclérose en plaques, pour lesquelles la morphine ne fait parfois plus effet. En plus d’être davantage soulagées de leurs douleurs, ces personnes n’auraient plus besoin de se rendre aux urgences, ce qui aurait pour effet de contribuer à les désengorger.

J’aimerais enfin aborder un sujet qui me tient particulièrement à cœur, celui des proches aidants, dont notre Haute Assemblée s’était saisie l’année dernière, à la suite d’une proposition de loi de notre collègue Jocelyne Guidez, promulguée en mai dernier.

Le Gouvernement met en place le congé de proche aidant, que nous avions proposé, et qui concrétise une attente forte. Des amendements du groupe RDSE tendaient à allonger la durée de ce congé, mais, malheureusement, comme ceux qui avaient été déposés par les différents groupes, ils ont été déclarés irrecevables.

À ces sujets de préoccupation majeure s’ajoute bien entendu la création du parcours post-cancer, que nous saluons. Les membres du groupe du RDSE prendront toute leur part aux débats en proposant de nombreux amendements.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.

Mme Catherine Troendlé remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Amiel

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’élaboration du budget de la sécurité sociale nous rappelle le supplice de Sisyphe : au moment crucial où l’on arrive au point culminant, c’est-à-dire à l’équilibre budgétaire, le rocher dévale et tout est à recommencer…

Cette dégradation des comptes, qui se solde par un déficit prévisible de 5, 1 milliards d’euros, est liée aux mesures « gilets jaunes », aux mesures d’indexation des retraites inférieures à 2 000 euros, mais aussi à une dynamique moins favorable de la masse salariale. Rappelons que les mesures sociales, prises dans l’urgence, furent approuvées à l’unanimité, montrant, s’il en est besoin, que la vie de nos concitoyens ne peut se réduire à une logique comptable. « En même temps », la dette sociale n’est pas une fatalité à laquelle on peut se résigner.

Selon les projections, le déficit global devrait être de 1, 1 milliard d’euros pour 2023, avec retour à l’équilibre du régime général. La fin de la Cades, prévue par la loi pour 2024, ne sera pas synonyme de fin de la dette sociale, puisque 47 milliards d’euros de dette seront cette même année portés par l’Acoss.

Je ferai deux remarques à ce moment de mon intervention.

Premièrement, ces chiffres ne tiennent pas compte du financement de l’innovation, dont les montants deviennent vertigineux – songez que le prix des dernières immunothérapies pour traiter une maladie, hélas ! courante, le cancer, peut atteindre 500 000 euros par patient et par an –, ni de la prise en charge du grand âge, qui devait – j’espère que la priorité demeure – être le marqueur social du mandat.

Deuxièmement, si l’on voulait prolonger l’existence de la Cades pour éponger les 47 milliards d’euros de dette restants, cela procéderait d’une loi organique, ce qui rend l’idée de financer le grand âge par les ressources de la Cades pour le moins fragile. Nul doute que des financements spécifiques seront nécessaires.

Il faudra sans doute une dizaine d’années, madame la ministre, pour que votre loi de réorganisation de notre système de santé porte ses fruits et se traduise aussi dans le domaine financier. Mais sans doute faudra-t-il aller encore plus loin, en particulier dans le contrôle de la pertinence des soins et des actes médicaux, dont le dérapage, selon des chiffres de l’OCDE, certes difficiles à vérifier, représenterait 25 % du budget. Ce constat est partagé par la Cour des comptes comme par la Caisse nationale d’assurance maladie.

Peut-être faudra-t-il faire des choix, certes politiquement difficiles, mais dont la portée est à relativiser si l’on songe que le reste à charge, autour de 7 %, reste parmi les plus bas de l’OCDE. Veut-on, oui ou non, sauvegarder un système solidaire, mais aussi responsable ?

Quant à la non-compensation de la dette sociale par l’État, n’est-ce pas le début de la mainmise de ce dernier sur les comptes et la substitution définitive de l’impôt à un système de cotisations ? Il faudra y réfléchir à deux fois, car l’on toucherait aussi à la gouvernance du système, le paritarisme étant remplacé par l’État. Il est vrai que, pour le citoyen lambda, ce débat peut relever d’une querelle byzantine.

Au-delà de ces constats très factuels sur ce PLFSS, je relèverai quelques articles marquants.

Pour la branche maladie, l’article 25 rassemble les acteurs publics et privés de la psychiatrie dans un modèle de financement commun reposant sur une dotation populationnelle complétée par des financements prenant en compte des critères qualitatifs.

L’article 26 bis applique peu ou prou le même principe pour les urgences. Sans doute faudra-t-il consentir un effort tout particulier pour ce secteur, et pour l’hôpital public en général, si l’on veut conserver à ce dernier son attractivité, en particulier à l’hôpital de proximité, visé à l’article 24, qui devrait renforcer l’offre de soins primaires et favoriser le décloisonnement ville-hôpital. Nous saluons le financement de l’article 24 sur la base de trajectoires pluriannuelles – nous avions formulé une telle demande les années précédentes.

L’article 37 prend en compte l’éloignement des femmes des maternités provoqué par le regroupement des services de maternité répondant à des critères de qualité et de sécurité. Il met en place un forfait transport-hébergement pour des femmes résidant à plus de quarante-cinq minutes d’une maternité.

Pour la branche AT-MP, excédentaire cette année encore, je retiendrai surtout, à l’article 46, la création du fonds d’indemnisation des victimes des pesticides – il ne s’agit pas seulement de professionnels – sous forme d’un guichet unique géré par la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole. Nous suivrons particulièrement la situation aux Antilles, avec ce que je n’hésite pas à appeler le scandale du chlordécone.

Pour la branche vieillesse, l’article 52 prévoit l’indexation sur l’inflation des retraites inférieures à 2 000 euros par mois. Celles qui sont supérieures à 2 014 euros seront revalorisées à hauteur de 0, 3 %, avec mesure de lissage dans l’intervalle.

L’article 53 devrait permettre d’éviter les ruptures de ressources lors du passage d’un minimum social à la retraite.

Pour la branche famille, l’article 45, à la suite des propositions de plusieurs parlementaires et du rapport de Dominique Libault sur le grand âge et l’autonomie, prévoit la mise en place d’un congé indemnisé pour le proche aidant d’un montant avoisinant les 50 euros par jour pour une durée de trois mois, à l’instar du congé de présence parentale et du congé de soutien d’un proche en fin de vie. Ce n’est, bien sûr, qu’une première étape sur le chemin d’une loi sur le grand âge.

L’article 48 crée un service public de versement des pensions alimentaires via une agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires jouant le rôle d’intermédiaire financier.

Voilà, en quelques mots, un rapide survol de ce PLFSS. Cette année encore, il s’agit de limiter le déficit afin de ne pas alourdir la dette sociale, dont l’extinction, je le rappelle, est prévue en 2024 avec la disparition légalement annoncée de la Cades. Si je comparais cette tâche au supplice de Sisyphe en commençant mes propos, permettez-moi de les conclure en citant Albert Camus : « Il faut imaginer Sisyphe heureux. »

M. Martin Lévrier applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Cathy Apourceau-Poly

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 était très attendu par les professionnels de santé et paramédicaux mobilisés et en grève depuis six mois. Ils seront d’ailleurs de nouveau dans la rue le 14 novembre.

Mes collègues du groupe CRCE et moi-même serons à leurs côtés, car leurs revendications sont légitimes.

Mais voilà, madame la ministre, vous refusez d’affronter Bercy et de changer de cap ! Vous poursuivez les exonérations de cotisations et remettez ainsi en cause les fondamentaux de notre protection sociale, née du programme du Conseil national de la Résistance.

Nous craignions les attaques de la réforme des retraites, mais finalement vous n’en avez jamais assez, surtout quand il faut prendre aux familles, aux salariés, aux retraités, aux jeunes et aux plus fragilisés. On pourrait parler de boulimie !

Vous avez décidé de vous attaquer comme jamais au secteur de la santé, bien que celui-ci ait déjà souffert ces dernières années. Là, pour 2020, c’est le coup de massue : l’hôpital public va servir de variable d’ajustement à votre budget, avec un objectif de croissance de l’Ondam à 2, 3 % en 2020, alors que vous savez pertinemment que celui-ci devrait être à 4, 5 %.

Les services d’urgence et de nombreux SAMU traversent une crise grave, très grave. Ils multiplient les grèves et les 4, 2 milliards d’euros d’économies sont la goutte d’eau qui fait déborder le vase pour les personnels hospitaliers. Ils sont en souffrance, en raison du manque de moyens en personnel ; ils ne veulent plus travailler dans des conditions indignes, pour eux-mêmes, mais surtout pour la qualité des soins aux patients.

Et votre seule réponse, madame la ministre, est de fixer une progression de l’Ondam à 2, 1 % pour l’hôpital, en dessous de l’évolution naturelle des dépenses de santé. Décidément, quand on veut noyer son chien, on dit qu’il a la rage !

Et ce n’est pas votre réforme du financement des hôpitaux de proximité qui va changer la donne. Vous aurez beau jeu de déplacer les services pour mutualiser toujours davantage les moyens. Les malades, eux, ne déménagent pas avec les hôpitaux !

Vous allez donc éloigner encore davantage les services de santé des populations, qui n’arrivent déjà plus à trouver un médecin de ville et des médicaments.

L’obligation pour les industriels de constituer un stock de sécurité de deux à quatre mois sur les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur et les sanctions contre les laboratoires pharmaceutiques en cas de pénurie du médicament, prévues par ce PLFSS, vont dans le bon sens, mais elles arrivent trop tardivement par rapport à la crise que connaissent les malades.

Il n’est pas normal que, en France et en Europe, la puissance publique ne soit plus en capacité de produire des médicaments, d’autant que nous disposons, dans les pharmacies des hôpitaux, notamment à l’AP-HP, d’un savoir-faire à valoriser. Les hôpitaux ont tendance à délaisser leurs pharmacies pour assurer d’autres financements essentiels comme les investissements et les travaux de rénovation.

Sur ce sujet, vous avez fait adopter à l’Assemblée nationale un amendement visant à offrir aux établissements de santé une visibilité pluriannuelle, et non plus seulement annuelle, sur l’évolution de leurs ressources financières. Mais si c’est pour leur dire que les caisses resteront vides pendant trois ans, à quoi cela sert-il ?

L’État doit arrêter de se défausser sur la sécurité sociale et assumer les travaux de rénovation et de modernisation des hôpitaux publics.

L’État doit également assumer ses dépenses lui-même ! Les « gilets jaunes » se sont mobilisés, exprimant la colère populaire et le ras-le-bol face à la fin des services publics, aux fins de mois difficiles et aux petits salaires. Le président Macron a fait des annonces et mis en place des aides d’urgence pour répondre à cette colère, mais ce n’est pas au budget de la sécurité sociale de les supporter ! C’est au budget de l’État que doivent être imputées les dépenses légitimes liées aux « gilets jaunes ».

Ce sont 3 milliards d’euros que vous prenez à tous les services de santé pour les donner aux autres salariés. La colère des uns ne peut pas se régler par un tour de passe-passe qui consiste à déshabiller les infirmiers, les aides-soignantes, les aides à domicile et les retraités, tous en lutte, pour habiller, très légèrement, certaines catégories de travailleurs pauvres.

Ce PLFSS est truffé de contradictions. Alors que, chaque année, 60 000 femmes doivent faire plus de quarante-cinq minutes de trajet pour se rendre à la maternité, plutôt que de maintenir les maternités de proximité et les services de maternité dans les hôpitaux de proximité, vous préférez les éloigner davantage et payer l’hôtel aux mères concernées.

Ce mécanisme est un non-sens pour les femmes enceintes, qui devront se rapprocher de la maternité quelques jours avant la date prévue de l’accouchement, alors que nous savons toutes que les accouchements ne se déclenchent pas quand on fait la réservation de sa chambre d’hôtel !

Ces contradictions sont trop nombreuses pour ne pas penser qu’il s’agit en réalité d’une volonté délibérée de faire des économies sur le dos des plus précaires, en réduisant les indemnités journalières pour les parents de familles nombreuses, ou encore en refusant de réindexer les pensions de retraite de 4 millions de retraités qui dépassent 2 000 euros par mois.

Nous savons que vous préparez le prochain mauvais coup avec la réforme des retraites. Si le PLFSS 2020 ne prévoit finalement aucune mesure s’y rapportant, la fusion des caisses au sein des Urssaf s’apparente bien à un test pour préparer la fusion des régimes dans le système de retraite par points.

En attendant votre future loi sur la dépendance, dont nous ne connaissons même plus la date, à force de la voir reportée, ce PLFSS prévoit pour 2020 une enveloppe de 405 millions d’euros pour les Ehpad. Je voudrais relativiser ces chiffres par rapport aux besoins actuels et à venir de nos aînés. Madame la ministre, nous avons déposé plusieurs dizaines d’amendements visant à supprimer la taxe sur les salaires ou à instaurer un moratoire sur les fermetures de lits et de services, etc.

En conclusion, votre projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 est très dangereux. Vous faites le choix de l’austérité contre l’humain et la santé. Vous faites le choix du libéralisme contre celui du service public.

L’argent existe, vous le savez, il est dans la poche de ceux que vous avez décidé de privilégier, ceux à qui vous faites des cadeaux depuis plusieurs mois et qui n’ont nullement besoin de plus pour l’hôpital public, puisqu’ils ne le fréquentent pas.

En plus d’être dangereux en l’état, votre projet de loi n’est pas fiable. Surprise de dernière minute : vous annoncez vouloir présenter, le 20 novembre, des mesures qui ne figurent pas dans le projet de loi. Nous nous apprêtons donc à discuter un budget incertain et donc insincère !

Pour toutes ces raisons, madame la ministre, nous ne voterons pas votre budget !

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, qui réalise le difficile exercice de concilier maîtrise des dépenses et financement des réformes prioritaires pour améliorer le niveau de santé des Français et la couverture des risques sociaux.

Je voudrais tout d’abord saluer le travail réalisé par les rapporteurs.

Cette année, le Gouvernement a fait le choix de faire porter sur les comptes sociaux, pour 2, 7 milliards d’euros, une partie des mesures d’urgence votées en décembre dernier en réponse à la grave crise sociale que traversait la France. Nous pouvons essayer de comprendre cette décision, dans le sens où il n’est pas souhaitable de mettre la France en porte-à-faux au regard de ses engagements européens.

Toutefois, le retour à l’équilibre des comptes est ainsi reporté de 2020 à 2023 et le déficit du régime général et du FSV est porté à 5, 4 milliards d’euros cette année, et 5, 1 milliards d’euros l’année prochaine. Les branches famille et accidents du travail restent les seules excédentaires.

L’Ondam – c’est-à-dire la branche maladie, dont la situation a été exposée par Mme Deroche – sera tenu cette année et l’année suivante, avec un objectif de croissance des dépenses limité à 2, 3 % en 2020, bien en deçà du rythme d’évolution structurelle – je reconnais toutefois que l’Ondam est plus élevé qu’avant votre arrivée, madame la ministre.

L’effort demandé sera particulièrement difficile à tenir pour la médecine de ville et la dépense hospitalière. Les urgences sont sous tension à l’hôpital et, depuis longtemps, l’hôpital est en difficulté d’investissement et de fonctionnement.

Je regrette la décision du Gouvernement de reconduire cette année la sous-revalorisation des prestations sociales à 0, 3 %, soit moins que l’inflation. Certes, les retraites inférieures à 2 000 euros seront épargnées, une mesure de justice sociale que notre groupe avait déjà proposée l’année dernière. Pour les familles, nous soutiendrons l’amendement d’Élisabeth Doineau.

Nous voyons aussi que la branche retraite se dégrade, et que cette tendance devrait s’amplifier dans les années à venir, comme l’indique le rapporteur René-Paul Savary.

Nous devons donc agir dès à présent, en proposant des solutions pour développer l’activité des seniors après 62 ans. Nous conservons cependant la même position que l’an dernier : sur ce sujet, il nous semble préférable de développer la concertation entre le Gouvernement et les syndicats pour parvenir à une solution durable, en dépit de l’urgence.

En dehors de ces trois points de clivage, le PLFSS pour 2020 contient des avancées majeures pour valoriser le travail, simplifier la vie des entreprises, renforcer la justice sociale, améliorer la couverture des risques et l’accès aux soins, réformer le financement du système de santé.

Tout d’abord, nous saluons la reconduction, l’an prochain, de l’exonération des charges sur le versement exceptionnel d’une prime pour le pouvoir d’achat, à l’article 7 du PLFSS. Si nous comprenons la volonté du Gouvernement d’utiliser ce dispositif pour promouvoir les accords d’intéressement, nous souhaitons toutefois que les petites entreprises soient dispensées de cette condition, la rédaction de cet accord pouvant constituer un obstacle au versement de la prime dans les très petites entreprises.

Le texte comporte ensuite d’importantes avancées en matière de justice sociale et d’accès à la santé, notamment la création d’une plateforme d’intermédiation du versement des pensions alimentaires, à l’article 48. C’est une avancée majeure pour les familles monoparentales victimes d’impayés.

Plusieurs mesures contribuent à lutter contre les inégalités d’accès à la santé et aux soins : l’accès à la complémentaire santé, le projet pour l’enfant, la création d’un droit à l’hébergement et la prise en charge du transport pour les femmes enceintes éloignées d’une maternité, la prise en charge des cotisations sociales pour les jeunes médecins qui s’installent en zone sous-dense pour une durée de deux ans – article 36 du texte. Je n’oublie pas non plus la création d’un congé indemnisé pour les proches aidants, à la suite de la proposition de loi de Jocelyne Guidez : c’est une attente forte de la société, et nous pensons d’ailleurs que la durée de trois mois, répartis sur l’ensemble de la carrière, est trop restrictive.

Nous saluons la création d’un fonds d’indemnisation pour les victimes de maladies professionnelles liées aux pesticides, ainsi que son extension aux riverains victimes de l’exposition, proposée par Gérard Dériot en sa qualité de rapporteur.

Nous sommes très favorables aux mesures prises par le Gouvernement et aux propositions de la commission des affaires sociales pour lutter contre la pénurie de médicaments, à l’article 34 du texte, en écho aux propositions de la mission d’information créée sur l’initiative de mon collègue Jean-Pierre Decool et le groupe Les Indépendants, tout comme à celles qui visent à combattre la fraude sociale à la carte Vitale.

Le Gouvernement souhaite accompagner la transformation des hôpitaux de proximité, madame la ministre. Dans certains cas, ces établissements devront offrir un système d’urgence, au moins de jour, car la distance peut être trop grande entre ces territoires isolés et les CHR.

Le Gouvernement souhaite également repenser et augmenter le financement de la psychiatrie. Cela est très attendu dans les territoires, pour les adultes, mais aussi pour les enfants. En effet, dans certains départements, il n’y a pas de lits de pédopsychiatrie, ce qui entraîne des difficultés énormes pour des enfants pris en charge par les centres départementaux de l’enfance (CDE) ou les maisons d’enfants à caractère social (MECS) présentant des troupes du comportement, qui épuisent les équipes de ces établissements. Une équipe mobile par département serait souhaitable.

Enfin, en matière de financement de la santé, nous sommes particulièrement sensibles à la situation des Ehpad, dont les besoins en personnels sont estimés par le rapport Libault à 80 000, comme l’a rappelé Bernard Bonne, pour un montant minimal de 1, 2 milliard d’euros, mais qui représente, selon nous, une charge réelle de 3, 2 milliards d’euros.

La dotation de 450 millions d’euros pour la période 2020-2021 accordée par le Gouvernement n’est pour nous qu’un début. Il y a 7 500 Ehpad en France, et ce montant ne permettrait de créer qu’un emploi et demi par établissement, trop peu pour améliorer la prise en charge effective de la dépendance. Il serait souhaitable également d’augmenter les moyens consacrés au maintien à domicile et à la formation des aides-soignantes et des infirmières.

Madame la ministre, nous regrettons la non-compensation des exonérations et la sous-revalorisation de certaines prestations. Toutefois, le PLFSS 2020 que vous proposez apporte incontestablement des avancées dans de nombreux domaines et nous souhaitons, comme vous, un retour à l’équilibre de la sécurité sociale en 2023. Malgré les difficultés, nous attendons un engagement nouveau, plus fort, du Gouvernement pour les urgences, les établissements hospitaliers et la dépendance.

Nous espérons que les débats au Sénat amélioreront ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants.

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en ce début d’examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, le contexte écrase presque le texte lui-même.

Le contexte, c’est la grande manifestation du 14 novembre, qui mobilisera médecins, chefs de service, infirmiers, internes, après l’émergence du collectif Inter-Hôpitaux dans le sillage du collectif Inter-Urgences. Le contexte, ce sont aussi les énièmes annonces du Journal du dimanche, qui interrogent vraiment sur le fonctionnement de l’exécutif, en particulier dans son rapport avec le Parlement.

Le 28 octobre dernier, le Président de la République se déclare bouleversé par la « souffrance au travail » de « nos infirmières, nos aides-soignantes et nos médecins, qui sont d’un dévouement incroyable ». Il promet une « réponse d’urgence » et précise : « Soyons clairs, il faut qu’on remette des moyens ! »

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, tout est dit, en matière de constat : des personnels médicaux et non médicaux désabusés et épuisés, qui quittent de plus en plus nombreux l’hôpital, une dégradation de la qualité des soins, une sécurité des patients menacée, une crise de l’hôpital public qui atteint un paroxysme insupportable. Est conforté le jugement d’une loi de financement « hors du temps », qui, avec une progression de 2, 1 % des crédits des établissements, ne répond pas aux exigences immédiates – vous le dites vous-même, madame la ministre.

Alors que l’hôpital traverse une crise sans précédent, le projet approuvé à l’Assemblée nationale accentue son asphyxie : ces dix dernières années, l’hôpital public, devenu depuis 2003 « l’hôpital-entreprise », a réduit de 8 milliards d’euros ses coûts, tout en augmentant de 14 % ses activités.

Vous annoncez, madame la ministre, un plan à venir, doté de moyens. La méthode interroge vraiment sur l’intérêt et la pertinence de nos débats à venir. Nous partageons bien évidemment les propos initiaux du rapporteur général.

Pour l’hôpital, le groupe socialiste et républicain proposera de réfléchir, dans le cadre de la discussion, à la présentation, dès le premier trimestre de 2020, d’une loi d’orientation et de programmation pour l’hôpital et notre système de santé garantissant des moyens pluriannuels pour stopper la crise sanitaire, répondre aux attentes des personnels et relancer un plan d’investissement massif.

« Ils vont tuer la Sécu » : cette phrase qualifie le plus simplement possible la décision de remise en cause du principe majeur d’autonomie, qui assure la pérennité du système social. L’État se doit de compenser à la sécurité sociale tous les allégements de cotisations sociales qu’il décide. Le Gouvernement fabrique et affiche ainsi un « déficit politique » qui rompt la trajectoire de rétablissement des comptes maintenue par tous les gouvernements depuis 2008. Il crée les conditions de discours inquiets, nourris d’idées reçues et de poncifs sur la viabilité de notre protection sociale.

La loi de programmation des finances publiques, dès 2017, annonçait le pillage des futurs et potentiels excédents de la sécurité sociale pour venir combler le déficit de l’État. En 2019, la sécurité sociale prend à sa charge une part du financement des mesures d’urgence, mais l’État ne compense plus les déficits liés à ses décisions politiques. Tous les efforts consentis depuis plusieurs années par les assurés sociaux ne serviront donc pas à dégager de nouveaux moyens pour l’hôpital, les personnes âgées et le maintien de l’autonomie ou encore l’accueil de la petite enfance. C’est une injustice totale. La dette portée par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale pourrait atteindre 47, 5 milliards d’euros en 2024.

Appelle encore une vive opposition le maintien d’une augmentation de 0, 3 %, bien en deçà de l’inflation, des pensions de retraite et d’invalidité supérieures à 2 000 euros bruts et des allocations familiales. Les familles et des retraités qui ne sont pas des nantis de notre pays verront leur pouvoir d’achat affecté, avec ce paradoxe que la sécurité sociale doit porter les conséquences des mesures « gilets jaunes », en n’assurant pas dans sa fonction fondamentale, assurantielle et de solidarité, le maintien du pouvoir d’achat de celles et ceux à qui elle s’adresse : les retraités et les familles.

Madame la ministre, nous approuverons plusieurs éléments du texte que vous nous présentez : l’indemnisation du proche aidant, le bilan de santé obligatoire pour les entrées dans l’aide sociale à l’enfance, l’usage médical expérimental du cannabis ou encore le forfait pour un parcours global post-traitement aigu du cancer.

Nous avons déposé des amendements dans le champ du médicament et des dispositifs médicaux, sur l’article 46 élargissant l’indemnisation des victimes de pesticides, ainsi que sur les missions des hôpitaux de proximité, dont la définition par étapes ne facilite pas vraiment la compréhension globale.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le constat est dur : un texte qui renonce à l’équilibre des comptes sociaux, une frilosité des moyens donnés à la mise en œuvre de la feuille de route « Ma santé 2022 », un objectif de dépenses en total décalage avec la réalité de la crise de l’hôpital, une interrogation sur la dévalorisation du rôle du Parlement. Pourtant, 82 % des Français jugent tout à fait prioritaire le thème de la santé – c’est le résultat d’un sondage publié récemment dans le Journal du dimanche.

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Henno

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les PLFSS se suivent, mais ne se ressemblent pas, même si les fondamentaux restent les mêmes…

Pour le PLFSS 2018, l’essentiel du débat portait sur l’augmentation de la CSG ou de la TVA sociale pour compenser une baisse des cotisations sociales. Pour le PLFSS 2019, le débat, essentiel, portait sur le niveau des pensions, leur indexation, l’effort demandé aux retraités ou l’âge de la retraite.

Le PLFSS 2020 est différent, car les questions posées sont nombreuses et les débats complexes. Le groupe centriste aborde ce texte avec la volonté de l’améliorer, grâce à des amendements, comme de coutume, mais surtout avec celle d’ouvrir des champs de réflexion : l’équilibre des comptes sociaux, la maîtrise de la dépense sociale ou encore la compensation – cette question a été très bien abordée par le rapporteur général, je n’y reviendrai pas.

L’année dernière, le vote d’un budget de la sécurité sociale pour 2019 à l’équilibre, pour la première fois depuis plus de dix-huit ans, semblait être non seulement une perspective bienvenue, mais surtout un retour à l’éthique de responsabilité – je ne reviens pas sur le mythe de Sisyphe qui a été évoqué à de multiples reprises, mais à coup sûr, l’expression est tout à fait juste.

Trois facteurs expliquent le déficit final de 5, 4 milliards d’euros : une diminution conjoncturelle de nos recettes, des dépenses plus élevées que prévu et, bien sûr, les mesures adoptées dans le cadre de la loi MUES du 24 décembre 2018.

À l’avenir, mes chers collègues, nous devrons être capables de prévoir des marges d’action pour répondre aux besoins qui peuvent intervenir dans l’année et aller plus loin que le vote d’un PLFSS seulement à l’équilibre. Devons-nous aller vers un PLFSS glissant ? La situation actuelle y ressemble et c’est en tout cas l’objectif vers lequel nous devons tendre.

Les projections gouvernementales sont aussi très optimistes en fin de programmation ; nous espérons qu’elles se réaliseront… Il est maintenant nécessaire de tenir le cap de l’amélioration des comptes sociaux. Nous devons maintenir un objectif réaliste dans le cadre d’une nouvelle loi de programmation pour maîtriser l’évolution de nos dépenses, en particulier pour les branches maladie et vieillesse. La part des dépenses d’assurance maladie dans le PIB augmente année après année – ce n’est pas tout à fait illogique, mais il faut quand même y prendre garde – jusqu’à représenter 8 % aujourd’hui.

La maîtrise des dépenses de santé et la question de la dette sociale représentent des enjeux majeurs pour notre pays. J’ai la conviction que, lorsque les historiens étudieront cette période, ils seront sévères avec notre génération : reporter les coûts de notre santé et de notre sécurité sociale sur d’autres générations et les financer par l’emprunt apparaîtront comme une aberration.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Henno

Peut-être une lâcheté, en effet, mon cher collègue !

Au-delà du spectre de l’équilibre budgétaire, ce PLFSS comporte, comme chaque année, des dispositions techniques qui n’appelleront pas de commentaires de notre part, mais il inclut aussi des choix forts, dont nous discuterons au cours de nos échanges.

Ainsi, des débats nourris ont eu lieu à l’Assemblée nationale sur plusieurs mesures : l’article 52 sur la fin de l’indexation des prestations familiales – j’espère que l’amendement d’Élisabeth Doineau sera voté –, l’article 7 et le nécessaire accord d’intéressement pour le versement d’une prime exceptionnelle dans les entreprises ou encore la non-compensation de la loi MUES. Je voudrais d’ailleurs revenir sur cette question du « chacun chez soi » ; il me paraît tout de même paradoxal de défendre cette idée, au moment où l’assurance maladie et la sécurité sociale sont nettement moins financées par des cotisations qu’avant.

Mes chers collègues, aujourd’hui, notre sécurité sociale, parce qu’elle est coûteuse, complexe et parfois inéquitable, n’est pas toujours comprise par nos concitoyens, alors même qu’elle est la racine de notre solidarité nationale, cette solidarité qui accompagne chacun, peu importe sa condition ou ses revenus.

Pour qu’elle reste un patrimoine commun, l’expression d’une solidarité qui ne se dément pas depuis des décennies et qui fait partie intégrante de notre identité, notre protection sociale doit rester viable et ne pas devenir un gouffre sans fond pour les finances de notre pays. Nous devons donc en finir avec la dette de la sécurité sociale ; c’est le grand enjeu des dix prochaines années.

Soyez certains que le groupe centriste n’est pas du tout dans le « y-a-qu’à, faut-qu’on » ! Nous avons clairement conscience de la complexité du débat sur le retour à l’équilibre, car parallèlement les hôpitaux sont en crise, l’augmentation de l’Ondam apparaît légitime, le financement des thérapies innovantes – cela a été dit par Michel Amiel – n’est pas encore assuré, des propositions plus génératrices de surcoûts que d’économies – je pense par exemple à la psychiatrie – arrivent de partout et le grand âge pose des questions essentielles – ma collègue Jocelyne Guidez évoquera notamment le statut des proches aidants.

Et il ne faut pas oublier le déficit de prévention qui est l’une des caractéristiques de notre système de santé – le président Alain Milon me rappelait à juste titre lors de nos débats en commission que tel n’a pas toujours été le cas, ce que nous avons tendance à oublier. En tout cas, le développement de la prévention doit constituer l’un de nos objectifs. Sans doute sommes-nous au bout de cette forme de non-choix, qui ne date pas d’aujourd’hui, ou d’hésitation sur les choix.

Je voudrais conclure, madame la ministre, sur les propositions que nous avons découvertes, en lisant le Journal du dimanche : elles sont loin d’être illégitimes, celles sur la reprise de la dette des hôpitaux ou sur l’augmentation de l’Ondam sont même nécessaires, mais sincèrement il aurait été souhaitable et plus respectueux que ces propositions soient connues et sur la table avant l’ouverture des débats parlementaires, sous peine que ceux-ci soient décalés, voire brumeux. Je voudrais d’ailleurs terminer mon propos par une citation de Jules Renard : « La brume, cela rend brumeux et ne génère jamais la confiance ! »

Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous entamons aujourd’hui l’examen du premier PLFSS d’une nouvelle décennie. C’est l’occasion de regarder dans le rétroviseur et de constater que, lors des dix dernières années, le régime général de la sécurité sociale a constamment été déficitaire.

Mais si l’on se fie à vos prévisions antérieures de retour à l’équilibre, alors seuls les regrets peuvent être de mise. En effet, ces excédents auraient peut-être permis de faire face à la situation catastrophique que traverse actuellement l’ensemble des services d’urgence du pays ou encore de pouvoir apporter des solutions aux évolutions démographiques que nous connaissons.

Pour comprendre cette situation, il convient de rappeler la chronologie des événements. La fin de l’année 2018 a été marquée par un mouvement social inédit connu sous la dénomination de mouvement des « gilets jaunes ». Face à cette situation, le Gouvernement a décidé une série de mesures en faveur du pouvoir d’achat pour répondre à une partie des revendications.

La discussion d’aujourd’hui n’a pas pour objectif de commenter ces choix politiques. Toutefois, ces mesures ont un impact financier sur les comptes actuels de la sécurité sociale. Et tout le problème est là ! En effet, la loi du 25 juillet 1994 dite loi Veil précise, entre autres choses, que dans ce cas précis l’État doit compenser le manque à gagner pour la sécurité sociale.

Madame la ministre, nous pouvons avoir des divergences d’appréciations concernant les choix politiques et les priorités qui sont déterminées par l’exécutif, mais à aucun moment nous ne pouvons tolérer que ce principe qui garantit l’autonomie de la sécurité sociale vis-à-vis de l’État soit bafoué.

Nous connaissons l’appétence du Président de la République pour le modèle anglo-saxon, mais, je le dis très solennellement, la France n’a pas vocation à s’aligner sur un tel modèle. La sécurité sociale à la française est un idéal que nous ne pouvons pas compromettre. Au sein de cet hémicycle, et malgré nos divergences, il existe un attachement commun aux principes qui ont été institués dans ce pays à partir de 1945, date de création de la sécurité sociale.

Aussi, nous soutiendrons la suppression à l’article 3 des dispositions permettant à l’État de ne pas compenser le coût des mesures d’urgence économiques et sociales. Il s’agit pour nous, d’une part, de se mettre en cohérence avec la loi Veil, d’autre part, de réaffirmer le rôle du législateur en matière de compensation du budget de la sécurité sociale.

Les mouvements sociaux que le monde de la santé et du médico-social de notre pays connaît ces derniers mois sont assez inédits. Ils traduisent des situations alarmantes qui ne sauraient être minimisées et reportées au lendemain.

Je veux ici parler des Ehpad et des personnels qui sont à bout. Bien que les projecteurs se soient détournés du quotidien des soignants, la situation ne s’est pas arrangée et la question de la refonte du modèle du « tout Ehpad » demeure.

Je souhaite également parler de la situation de nos hôpitaux. Comment peut-on tolérer que, dans la France de 2019, les médecins ne puissent plus opérer à partir d’une certaine heure de la journée, faute de matériel suffisant ? Je ne reviendrai pas non plus sur l’épisode des tentes qui ont fait office de salles d’opération dans le département de la Guadeloupe, scène surréaliste qui rappelle plus les conflits auxquels sont confrontés certains pays du tiers-monde qu’un hôpital de la République française.

Je rappellerai une nouvelle fois la situation de nos territoires, ruraux ou non, en matière d’accès aux soins. Dire que la situation est difficile est un euphémisme ! À terme, nous ne serons plus dans une problématique d’accès aux soins à plusieurs vitesses, mais dans celle de l’accès aux soins, tout court !

La stratégie « Ma santé 2022 » était attendue avec beaucoup d’espérance par l’ensemble des acteurs du monde de la santé. Les récentes mobilisations de ces mêmes acteurs nous laissent à penser que le compte n’y est pas. Lors de l’examen du projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé, nous vous avions alertée sur la faiblesse des mesures proposées, mais vous aviez rejeté l’essentiel des solutions pragmatiques proposées par l’ensemble des sénateurs. Il a fallu une commission mixte paritaire engagée pour que votre majorité daigne accepter une solution consensuelle répondant à l’urgence du manque de médecins dans nos territoires ruraux.

Plus que le désaccord politique qui nous sépare, je regrette la méthode qui est employée et qui consiste à considérer les propositions sénatoriales comme des coups politiques inapplicables et, de l’avis du Gouvernement, inacceptables. Je vous le redis, madame la ministre, nous sommes là pour vous aider, mais il faudrait nous écouter. §La santé est un sujet bien trop sérieux pour se laisser aller à des affrontements stériles, dont les premiers perdants seraient les Français eux-mêmes.

Notre système de santé est fragile, il tient à un fil, notamment grâce à tous les professionnels de santé qui prennent en charge les patients au quotidien, mais sous prétexte qu’ils ne sont pas dans une maison de santé pluriprofessionnelle ou dans une communauté professionnelle territoriale de santé, ils n’apparaissent plus dans vos radars. Attention à ne pas les décourager !

Le projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire et le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique sont de bons exemples de textes législatifs qui ont vu le Gouvernement et le Sénat travailler afin de parvenir à des solutions équilibrées et pragmatiques. Aussi, je forme le vœu que, lors des futures discussions au sein de cet hémicycle – je pense en particulier au projet de loi Grand âge et autonomie, dont ce PLFSS ne porte pas la trace –, le Gouvernement écoute la voix des territoires que nous représentons ici. L’expérience de terrain des sénateurs est un bien précieux qui ne sera jamais remplacé par une quelconque administration.

Pour revenir à la thématique du projet de loi Grand âge et autonomie, la question du financement va être essentielle et permettez-moi de douter de la capacité du Gouvernement à dégager une enveloppe budgétaire suffisamment importante pour répondre à l’un des grands enjeux de demain.

La question de la réforme des retraites est régulièrement évoquée et je ne reviendrai pas ici sur l’ensemble des modalités techniques de la branche vieillesse du PLFSS 2020 – mon collègue René-Paul Savary l’a déjà très bien fait.

Cependant, je tiens à souligner l’hypocrisie avec laquelle l’exécutif s’entête à promettre à nos concitoyens que le système de demain sera meilleur en termes de droits sans pour autant que les devoirs de chacun soient accrus. Il suffit de rappeler le quasi-gel des pensions de retraite de plus de 2 000 euros, quasi-gel qui s’applique également aux prestations sociales. De manière pragmatique, le groupe Les Républicains défendra un recul de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans. Bien que peu populaire, cette mesure est nécessaire et s’inscrit dans un contexte de rallongement constant de l’espérance de vie dans notre pays.

En revanche, nous ne pouvons que saluer la volonté du Gouvernement de mieux accompagner les proches aidants, en proposant la création d’un congé indemnisé de trois mois pour les personnes qui soutiennent un proche âgé, malade ou handicapé. Le financement de cette mesure reste cependant plus qu’incertain. Comme il faut toujours rendre à César ce qui appartient à César, je tiens à saluer le travail de notre collègue Jocelyne Guidez qui a été avant-gardiste sur ce sujet, en étant l’auteure d’une proposition de loi visant à favoriser la reconnaissance des proches aidants, texte déposé au Sénat dès juin 2018.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Sur la question des hôpitaux de proximité, des doutes persistent concernant le modèle de fonctionnement et de financement de ces établissements. Il ne s’agirait pas de créer aujourd’hui des structures qui, demain, rappelleraient les villes fantômes de la côte Ouest américaine. L’hôpital est déjà une des variables d’ajustement du budget de la sécurité sociale depuis des années. Il ne faudrait pas que la santé devienne la variable d’ajustement de l’exécutif.

Reste la question de la viabilité de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, car il n’est pas exclu que, compte tenu de vos annonces prochaines sur le thème de l’hôpital, le texte qui sera voté au Sénat soit obsolète dès le lendemain du vote…

Pour finir, j’aimerais mettre en perspective ce PLFSS avec l’actualité récente. Des mouvements de protestation ont lieu dans le monde entier. Comme je l’ai rappelé au début de mon propos, le mouvement inédit des « gilets jaunes » a été un cataclysme pour l’ensemble des observateurs politiques, alors même que le Sénat avait tiré la sonnette d’alarme et voté une réévaluation des pensions de retraite au niveau de l’inflation lors de l’examen du PLFSS 2019. À ce propos, il serait présomptueux de considérer que ce mouvement et ces revendications sont complètement derrière nous.

Avec ces exemples, je tiens à vous dire, madame la ministre, que ce PLFSS 2020 n’est pas uniquement un texte budgétaire relatif au financement de la sécurité sociale. Comme tous ses prédécesseurs, il participe à la consolidation ou, au contraire, à la détérioration de l’équilibre de notre modèle de société. Il ne s’agit pas que de santé, il s’agit aussi de la France, de son histoire, de son idéal, de ce qu’elle entend laisser aux générations futures. Nous ne savons pas toujours ce que nous voulons, mais nous savons ce que nous ne voulons pas !

Alors, je vous le dis avec gravité, le modèle de financement vers lequel vous souhaitez nous emmener, nous n’en voulons pas ! Et comme nous le constatons à l’étranger, il suffit parfois d’une étincelle pour faire vaciller tout un peuple et compromettre un modèle économique et sociétal tout entier.

Je suis consciente que vous essayez, madame la ministre, de desserrer l’étau budgétaire qui bride notre système de santé et le groupe Les Républicains espère que vous pourrez faire mieux, à défaut de pouvoir faire bien. Vous pouvez également compter sur nous !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Artano

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le 12 juin dernier, le Premier ministre s’est engagé à déposer un projet de loi qui définira une stratégie et la programmation des moyens nécessaires pour prendre en charge la dépendance. Le Gouvernement a ainsi affiché son ambition de faire de la réforme Grand âge et autonomie l’un des marqueurs sociaux importants du quinquennat.

Depuis toujours, j’affirme la nécessité de mieux accompagner les personnes âgées et celles en situation de handicap, qu’elles soient en établissement ou à domicile, à travers des mesures concrètes et immédiates.

À la lecture de ce PLFSS, il semble que les moyens financiers ne soient pas à la hauteur de l’urgence sociale. Je souhaite que le projet de loi Grand âge et autonomie apporte des réponses concrètes pour l’accompagnement des personnes âgées et que son financement soit réellement prévu.

Il y a urgence ! Si l’on peut se réjouir de vivre de plus en plus longtemps, force est de constater que l’allongement de la durée de la vie s’accompagne très souvent, malheureusement, d’une perte d’autonomie.

Les personnes âgées sont parfois accueillies de façon indigne dans des établissements où les personnels soignants travaillent dans des conditions déplorables – un drame humain auquel s’ajoute parfois un sacrifice financier pour de nombreuses familles.

Nous sommes donc confrontés à un véritable enjeu de société : comment accompagner au mieux nos aînés et leur permettre de vivre dans le respect et la dignité ?

Par ailleurs, je ne peux que saluer la poursuite de la convergence tarifaire qui doit notamment permettre la création de nouveaux postes de soins en établissement, ainsi que celle du déploiement des infirmières de nuit et des dispositifs d’accompagnement des personnes âgées afin d’éviter les hospitalisations. Cependant, je regrette encore une fois que le secteur des aides à domicile ne soit pas mieux pris en compte.

On ne peut nier le fait que ce secteur est à bout de souffle depuis des années et une simple enveloppe de 50 millions d’euros ne permettra pas une refonte globale de l’accompagnement des personnes âgées à domicile. Il semble donc nécessaire de revoir en profondeur le financement et la tarification des services d’aide à domicile.

Vous l’aurez compris, je souhaite que le PLFSS 2020 soit suivi d’un projet de loi Grand âge et autonomie ambitieux et doté de mesures concrètes. Ainsi, se limiter au budget actuel, c’est nier l’évolution démographique de notre société et ses conséquences.

Pour conclure sur ce sujet, ce projet de loi ne comporte pas vraiment de levier significatif, malgré l’urgence de la revalorisation des salaires de l’ensemble des professionnels, en particulier – j’insiste – dans le secteur de l’aide à domicile. S’agissant des établissements, les mesures prévues manquent de perspectives à long terme et ne suffiront pas à faire face à l’évolution démographique avérée. Je partage donc l’inquiétude des acteurs associatifs, ainsi que les fortes préoccupations des professionnels de santé, mais aussi des personnes accompagnées et de leur famille.

En ce qui concerne la branche AT-MP, je ne peux, à la lecture de ce PLFSS 2020, qu’exprimer mon insatisfaction concernant l’indemnisation des travailleurs victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.

Loin de voir s’amorcer une grande amélioration de leur indemnisation, ces travailleurs n’ont désormais plus la possibilité de racheter leur rente AT-MP. Même si cette possibilité semble relativement peu utilisée, il ne faut pas oublier que les victimes sont souvent confrontées à des difficultés d’accès au crédit bancaire du fait essentiellement de leur état de santé.

Ainsi, la possibilité de racheter leur rente reste souvent la seule possibilité pour eux de réaliser leurs projets professionnels ou personnels. Je ne peux que regretter le retrait, dans l’article 54, de cette possibilité de bénéficier d’un apport en capital qui peut être intéressante pour les personnes concernées. Les arguments développés pour justifier cette mesure tiennent essentiellement à des considérations administratives, d’organisation et de complexité, sans jamais prendre en compte la situation des personnes et l’intérêt que revêt pour elles cette possibilité.

En tant qu’auteur, avec ma collègue Pascale Gruny, d’un rapport d’information Pour un service universel de santé au travail, je me réjouis bien évidemment des mesures visant à limiter et prévenir la désinsertion professionnelle. Ainsi, l’expérimentation d’une plateforme départementale pluridisciplinaire, coordonnée par l’assurance maladie, devrait permettre, je l’espère, d’identifier plus rapidement les salariés en risque de désinsertion et leur proposer de ce fait un accompagnement adapté. Dans le même sens, je ne peux que soutenir l’assouplissement des conditions d’accès au travail « léger » qui consiste à aménager le poste pour le retour à l’emploi du salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.

Pour conclure, je me permettrai de citer Simone Veil : « La sécurité sociale […], c’est d’abord un immense progrès social et le plus puissant facteur de cohésion sociale qui existe en France ; nous avons le devoir de la préserver pour les générations futures. » C’est dans cet esprit, je l’espère, que nous débattrons tout au long de cette semaine.

Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et Les Indépendants, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jocelyne Guidez

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, tout d’abord, sur les grandes lignes du financement et sur la nécessité d’aboutir à un équilibre budgétaire, je ne peux que partager les analyses du rapporteur général et de mon collègue Olivier Henno.

Les mesures d’urgence du mois de décembre 2018 ont permis de démontrer que l’État avait la capacité de débloquer des moyens dans certaines circonstances. Aussi, nous nous étonnons que cette même volonté n’ait pas été déployée par le Gouvernement pour des mesures tout aussi importantes, voire vitales, et souvent mises en avant par le Parlement.

Les défis à relever sont encore immenses : depuis longtemps, nos services d’urgence sont à bout de souffle et certains métiers nécessitent une revalorisation des conditions de travail. Et que dire de nos Ehpad ? Dans certains départements, il arrive qu’un seul directeur soit en charge de plusieurs établissements.

Plus généralement, depuis quelques mois, la France connaît une crise majeure. Notre système de santé tient, pour l’instant, grâce à l’abnégation de l’ensemble des professionnels. Je profite de ma présence à la tribune du Sénat pour leur rendre un hommage appuyé.

Ce PLFSS procède à quelques évolutions. Un célèbre chef d’entreprise le rappelait lui-même : « Il n’y a pas d’évolution sans liberté d’essayer. » Nous saluons donc ces quelques apports. Toutefois, comme l’a précisé notre rapporteure Catherine Deroche, il est dommageable que le plan sur l’hôpital qui est très attendu soit présenté postérieurement à l’examen du PLFSS. Cela pose tout de même question ! En l’absence de précisions substantielles d’ici à l’examen de l’article 59, nous voterons sa suppression.

Il m’est impossible de détailler l’ensemble des articles.

Nous nous joignons à la demande formulée par la commission de soutenir les dispositions incitatives en faveur de l’installation rapide de jeunes médecins dans les zones sous-dotées.

Concernant les Ehpad, et plus précisément les métiers du grand âge, l’ambition affichée semble en deçà des enjeux. Des annonces budgétaires ont été faites, nous en prenons acte, mais nous devons aussi regarder tout cela dans le détail. Les 15 millions d’euros annoncés pour la revalorisation de la prime d’assistant de soins en gérontologie représenteront finalement, ou devrais-je dire seulement, 150 000 euros par département… Est-ce bien suffisant ?

Ce constat est malheureusement le même pour les aides à domicile : les 50 millions d’euros budgétés ne sont pas suffisants. Le projet de loi Grand âge et autonomie devra être à la hauteur, mais pour les financements, il faudra attendre octobre de l’an prochain. Et nous nous interrogeons sur l’origine des recettes.

Nous voterons également le forfait pour un parcours global post-traitement du cancer. Concrètement, les intéressés pourront bénéficier d’un bilan d’activité physique, de consultations psychologiques et de suivi nutritionnel. C’est une belle avancée, il faut le souligner.

Je profite de ce point pour évoquer la question des maladies graves ou rares. Il nous faut aller encore plus loin. La France, sans oublier l’Europe, doit être à la hauteur des enjeux. Pour ce faire, il est urgent d’adapter nos normes et notre système pour permettre le développement de thérapies innovantes. Or nous nous interrogeons sérieusement sur la portée de l’article 30 qui restreint le nombre ouvert d’autorisations temporaires d’utilisation nominatives. L’ambition de vaincre la maladie doit, plus que jamais, nous mobiliser.

De plus, le renforcement des missions des caisses d’allocations familiales pour le recouvrement et le versement des pensions alimentaires va dans le bon sens. Trop de familles sont confrontées au comportement irresponsable de certains parents qui, se soustrayant à leurs obligations légales, voire humaines, ne paient pas les pensions alimentaires dues.

Toujours sur la branche famille, le fractionnement du congé de présence parentale est une bonne nouvelle pour les parents d’un enfant malade. Toutefois, je proposerai un amendement qui vise à compléter ce qui a été adopté à l’Assemblée nationale afin que les agents des fonctions publiques puissent en bénéficier. Et je ne doute pas de trouver le soutien du Gouvernement dans ma démarche.

Nous notons aussi la volonté du Gouvernement de mettre en œuvre l’engagement du Premier ministre de créer un service unique d’information des familles en 2020 pour connaître en temps réel les places de crèches et d’assistants maternels disponibles.

Adapter notre système à l’air du temps est une bonne chose. Toutefois, la rédaction de l’article 49 ne nous satisfait pas totalement. C’est pourquoi nous soutiendrons également l’amendement de Mme Doineau, rapporteure pour la famille, afin que l’agrément ne soit pas suspendu en cas de manquement aux obligations de déclaration.

De la même manière, il ne faudrait pas non plus pénaliser les assistantes maternelles qui pourraient avoir des difficultés avec l’outil informatique. Dans une perspective d’égalité des chances, j’avais déposé deux amendements – ils ont malheureusement été déclarés irrecevables. J’espère cependant que le Gouvernement sera attentif à la situation.

Je terminerai par la question du handicap : 200 millions d’euros de mesures nouvelles sont annoncés. Ces mesures s’inscrivent dans la continuité des plans engagés.

Nous saluons aussi l’amendement déposé par le Gouvernement à l’Assemblée nationale qui exclut le dédommagement perçu par un aidant familial dans le cadre de la prestation de compensation du handicap de l’assiette de la CSG, de la CRDS et de l’impôt sur le revenu. Pour moi, c’est une mesure phare.

Sur ce sujet, un enjeu demeure en ce qui concerne la formation. Et cela s’applique aussi pour les Ehpad. Ma question est simple : comment mieux encourager les personnes à opter pour ces formations professionnelles ?

Enfin, vous connaissez mon engagement en faveur des proches aidants et il m’est impossible de ne pas parler de l’article 45. Oui, madame la ministre, l’allocation journalière de proche aidant est une première étape encourageante. Elle reprend de manière très différente et partielle ce qui figurait initialement dans ma proposition de loi que le Sénat a adoptée à l’unanimité. Je voterai bien évidemment cet article. Cependant, et j’aurai l’occasion d’y revenir lors de son examen, une indemnisation sur soixante-six jours n’est pas suffisante. Surtout, le financement envisagé avec la CNSA pose de sérieux doutes, à la fois sur la sincérité budgétaire de la mesure et sur sa pérennité.

Je terminerai sur un dernier point majeur, celui du répit. Il manque énormément de structures et, surtout, du personnel. Nous le voyons, les familles sont épuisées. Je souhaite que les pouvoirs publics se mobilisent à ce sujet.

Pour conclure, madame la ministre, permettez-moi d’avoir un peu d’humour – cela fait souvent du bien… Je dirai que le virage social du quinquennat ressemble plus à la promenade des Anglais qu’à un lacet du col du Tourmalet. Je l’ai dit en introduction, loin d’être à la hauteur, ce PLFSS présente néanmoins des avancées. Le groupe Union Centriste votera le texte issu de nos travaux.

Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Rapin.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Rapin

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, construire l’État-providence du XXIe siècle serait l’objectif visé par le Gouvernement à travers ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020. La reconstruction du système de protection sociale est un vaste chantier, et le groupe Les Républicains espère avoir l’occasion, durant ces débats, d’ajouter sa pierre à l’édifice.

Je ne reviendrai pas sur l’équilibre financier du texte, qui a déjà été évoqué par ma collègue Corinne Imbert. À mon sens, il est dommageable de creuser le déficit de la sécurité sociale en raison de la non-compensation de la perte de recettes. La quasi-totalité des orateurs l’a rappelé. Comme a pu le souligner la Cour des comptes, un retour durable à l’équilibre financier ne peut être assuré par un simple décalage de quelques années.

Tout d’abord, je voudrais saluer les mesures proposées par le Gouvernement s’agissant des proches aidants et des personnes en situation de handicap, même si un doute persiste sur leur financement. S’y ajoutent l’intensification des recrutements dans les Ehpad, le forfait transport et mobilité pour les femmes enceintes habitant à plus de quarante-cinq minutes d’une maternité ou encore la création d’une agence de recouvrement des impayés des pensions alimentaires. Néanmoins, bien qu’essentielles, ces mesurettes ne sont pas suffisantes pour repenser durablement notre système de santé.

En effet, comme souligné plus tôt, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale a provoqué davantage de déception que de soulagement. Je pense notamment aux membres du personnel hospitalier, aux retraités, aux acteurs de la chaîne du médicament, aux employeurs et aux salariés, ainsi qu’aux patients ne pouvant se procurer les produits prescrits par un professionnel de santé.

À cet égard, je souhaite évoquer devant vous l’article 34 du texte relatif à la pénurie de médicaments. J’en profite pour saluer les travaux de mes collègues Jean-Pierre Decool et Yves Daudigny sur le sujet. Madame la ministre, je m’adresse à vous en votre qualité de membre du Gouvernement, mais également en pensant à votre carrière de médecin. Comment pouvez-vous imaginer qu’en sanctionnant les industries de santé vous répondrez durablement aux tensions d’approvisionnement ?

En mai dernier, je vous ai ici même alertée sur la pénurie de cortisone. Mme Dubos m’avait répondu que « le retour à une disponibilité normale de ces médicaments dans les pharmacies d’officine ou hospitalières [était] attendu d’ici à la fin du mois de juin ». Nous sommes le 12 novembre ! Les patients, qui vont finir par cesser de l’être, si je puis me permettre cette boutade, sont parfois contraints d’aller en Belgique pour se procurer leur traitement. C’est ce qui se passe dans ma région, en tout cas.

Plutôt que de renforcer les sanctions à l’égard des industries de santé, il faut repenser la position des acteurs de la chaîne du médicament. Ces derniers dénoncent des coûts trop bas, ce qui les incite à cibler prioritairement le marché international. Il faut également revoir les contrôles de qualité, qui imposent des exigences auxquelles les industries n’ont pas les moyens humains et financiers de répondre.

En septembre dernier, vous posiez les thèmes principaux de votre plan de lutte contre la pénurie en indiquant que le résultat des premières mesures serait évalué en janvier prochain, date à laquelle prendront effet les sanctions à l’encontre des industriels. Permettez-moi de trouver confus le calendrier que vous déroulez. Mieux vaudrait apporter une réponse à l’urgence.

Par ailleurs, voilà un an, le Gouvernement était contraint de prendre des mesures d’urgence pour répondre à la crise des « gilets jaunes ». Certes, je me réjouis que vous vous soyez inspirée des initiatives sénatoriales portées par plusieurs de mes collègues, dont Olivier Paccaud, et un peu moi-même, mais aussi par le député Olivier Dassault. Cependant, je regrette que cette prime ne soit pas pérenne. En effet, aujourd’hui, vous proposez de reconduire cette mesure en faveur du pouvoir d’achat, alors que ses modalités d’application désincitent plus qu’elles n’encouragent les employeurs à valoriser le travail de leurs salariés.

Vous souhaitiez de la simplification – je pense notamment à la création de France Recouvrement. Pourtant, vous imposez aux employeurs la mise en place d’un accord d’intéressement pour permettre l’exonération de la prime exceptionnelle. Un devoir de sincérité s’impose : on ne peut pas se vanter de mesures en faveur du pouvoir d’achat tout en se cachant pour faire des économies. J’ai donc déposé, avec mes collègues du groupe Les Républicains, un amendement visant à supprimer cette condition d’accord d’intéressement. Il me tarde de pouvoir en débattre avec vous dans cet hémicycle.

Enfin, ma qualité de rapporteur spécial des crédits alloués à la recherche m’incite à m’intéresser à l’innovation thérapeutique.

Madame la ministre, vous déclariez devant mes collègues députés vouloir affirmer la présence de l’État social à chaque étape de la vie, ce sur quoi je suis pleinement d’accord avec vous. Participer à un programme thérapeutique innovant me semble être une étape de la vie non négligeable, étape qui peut paraître sombre, mais qui est aussi, convenez-en, une source d’espoir. Or l’article 30 du PLFSS prévoit un durcissement notoire de l’octroi d’une autorisation temporaire d’utilisation nominative. Par cette disposition, la France perd davantage en compétitivité sur ses voisins européens.

Ce constat m’invite à citer une étude menée par le Collège de France et démontrant que, pour 1 milliard de dollars investis, nous sommes passés de dix médicaments mis sur le marché en 1970 à un seul au début des années 2000. C’est la conséquence de la complexité croissante des procédures de mise sur le marché. En appliquant les dispositions de l’article 30, la situation risque de s’aggraver. Il ne faudrait pas que la sécurisation à l’excès empêche l’innovation thérapeutique en France.

Pour conclure mes propos, en faisant écho à ceux de ma collègue Catherine Deroche, je dirai que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale n’est pas à la hauteur des enjeux rencontrés par les acteurs de santé et les ayants droit. Les mesures qui le composent s’interprètent politiquement et semblent être bridées par des considérations davantage économiques que sociales et médicales.

J’espère que, à travers ce temps d’échange qui s’ouvre, nous aurons l’occasion d’engager un véritable dialogue, comme nous avons pu déjà le faire lors de l’examen du projet de loi Engagement et proximité. Nous souhaiterions être mieux entendus par le Gouvernement, qui semble parfois hermétique aux propositions concrètes de notre chambre sur le système social.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, depuis quelque temps, une question me taraude : quelles innovations l’autoproclamé nouveau monde a-t-il engagées ?

La gauche créa beaucoup pour répondre à l’évolution de notre société et obéir aux valeurs qu’elle porte : le RMI, la garantie jeunes, le mariage pour tous, la CMU, la PUMa, l’APA, le PACS, la prise en charge des pensions alimentaires par la CAF, et tant d’autres initiatives originales et justes. Qu’a apporté ce nouveau monde, qui promettait tant et méprisait l’ancien ? Rien, seulement des dégradations de l’existant : précarisation de l’emploi, licenciements facilités, chômeurs précarisés, augmentation des inégalités, de la pauvreté, retraités et handicapés lésés, fermetures de maternités, recentralisation.

En revanche, les mots sont nouveaux : de la novlangue qui, sous des aspects modernes et humanistes, cache de plus en plus mal les effets destructeurs de vos mesures et le désespoir qui saisit les catégories les moins favorisées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Interrogés par Ipsos en septembre dernier, 62 % des enfants de 8 à 14 ans de ce pays craignent, un jour, de sombrer dans une situation précaire. Peut-on imaginer tableau plus sombre ?

Votre projet de loi de financement de la sécurité sociale n’échappe pas à cette rage destructrice : nouvelle désindexation des prestations familiales après une réduction du périmètre et du montant de la PAJE ; revalorisation en trompe-l’œil de l’AAH, comme nous le verrons dans le PLF – la supercherie finit par se voir et le mécontentement gronde – ; recul sur les crèches, alors qu’il en faudrait davantage dans les quartiers populaires et dans les territoires ruraux, qui ont des moyens trop limités pour faire face aux charges de fonctionnement.

L’argent si généreusement distribué aux plus riches vous conduit à rechercher, avec un certain cynisme, des ressources sur le dos des plus démunis. Il en est ainsi de la suppression de l’abondement des indemnités journalières aux parents de familles nombreuses.

Vous puisez aussi allègrement dans les ressources de la sécurité sociale pour tenter de réduire artificiellement le déficit du budget de l’État, signant ainsi un échec sur toutes les lignes. C’est une trahison inacceptable des valeurs portées par les créateurs de la sécurité sociale ou par ceux qui ont voté la loi Veil de 1994. Ainsi, les cotisations d’assurance payées pour se garantir santé et avenir sont détournées pour masquer la gestion inconséquente du budget de la Nation.

Le déficit de la sécurité sociale est dû en partie, selon la Cour des comptes… et vous, à une surestimation de la masse salariale. Pourtant, vous clamez urbi et orbi avoir relancé les créations d’emplois. Là encore, la distance est grande entre le discours et les actes. Ainsi, après des évolutions positives continues, l’année 2017 a été particulièrement faste, avec la création de 328 000 emplois, dont les deux tiers au cours du premier semestre – vous n’étiez pas encore au pouvoir ! Puis, il y a eu une chute brutale en 2018, avec 168 000 emplois, ce qui explique la baisse des recettes. Or là, vous étiez au pouvoir !

Quelles audaces pouvons-nous porter à votre actif en matière de politique de l’enfance et de la famille ? L’amélioration du dispositif existant sur les pensions alimentaires ? L’accompagnement des proches aidants après avoir refusé une proposition de loi, plus juste, de Mme Guidez, pourtant adoptée à l’unanimité ? Tout cela est bien mince au regard des réalités relevées par Yves Daudigny.

Vous nous parlerez, un peu plus tard, de votre plan de lutte contre la pauvreté, avec les mots du triomphe sûrement. Pourtant, 150 misérables millions au budget 2019 pour éradiquer une pauvreté qui ne cesse, avec vous, d’augmenter, n’est-ce pas leurrer tout le monde ? Mais vous en supprimez, fort opportunément, l’Observatoire. Les départements, eux, en supporteront la charge.

Votre projet paraît bien insuffisant quand la France est championne du monde du déterminisme social, quand l’OCDE constate qu’il faut cent cinquante ans à un petit Français né en milieu défavorisé pour atteindre le salaire moyen. Comment s’étonner, dès lors, qu’augmentent la violence gratuite, les votes extrêmes, les « gilets jaunes » ? Quand l’amertume et la révolte habitent ceux qui sont promis, dès leur naissance et irrémédiablement, à un sombre destin, il ne leur reste que le geste.

Face à la terrible perspective qui se dessine pour notre monde, votre projet semble n’être qu’indifférence, préoccupé essentiellement par la recherche d’économies au détriment des plus vulnérables.

Je voterai contre votre projet, parce qu’il est en lévitation, flottant au-dessus des réalités. Je voterai contre pour cause de vide.

Pour terminer, j’emprunterai quelques mots d’une étude récente de deux sociologues britanniques, Wilkinson et Pickett, intitulée Pour vivre heureux vivons égaux : « Il faut par ailleurs souligner que, dans les sociétés inégalitaires, les pauvres ne sont pas les seuls à souffrir : l’immense majorité de la population est frappée par des taux de violence plus élevés et des indicateurs de santé dégradés. » À méditer, n’est-ce pas ?

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Feret

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le Gouvernement nous propose d’examiner un projet de loi, non pas de financement, mais de sous-financement, et même d’affaiblissement de la sécurité sociale Il y a de quoi être inquiet. Le budget de la sécurité sociale ne saurait être une variable d’ajustement de celui de l’État.

Tout naturellement, par voie de conséquence, ce PLFSS est, sur de nombreux points, loin d’être à la hauteur des attentes et des besoins. Cette semaine, nous évoquerons bien évidemment la situation, très critique, de l’hôpital et de ses urgences. Je souhaite pour ma part m’attarder sur le secteur médico-social et, particulièrement, sur l’aide à domicile. Une somme de 50 millions d’euros, seulement, lui est consacrée dans le PLFSS pour 2020. De nos jours, pour les personnes en perte d’autonomie, l’option privilégiée, parce qu’elle est aussi la plus abordable financièrement, reste le maintien à domicile. C’est le choix que font neuf Français sur dix.

Environ 830 000 personnes travaillent auprès des personnes âgées. Du fait de la seule évolution démographique, ce nombre devrait augmenter d’environ 20 % d’ici à 2030, sans tenir compte des hausses des effectifs qui seront nécessaires pour améliorer la qualité des prises en charge.

Il faut bien avouer que ces métiers de l’aide à domicile sont difficiles, compte tenu des publics à accompagner et des kilomètres à parcourir, notamment dans les territoires ruraux. Ils souffrent d’un déficit d’attractivité qui rend le recrutement particulièrement compliqué. De même, le manque de reconnaissance aggrave l’absentéisme et le taux de renouvellement du personnel. Dans le Calvados, mon département, où j’ai notamment reçu des représentants du réseau de l’ADMR, les professionnels du secteur sont confrontés à une inquiétante pénurie de personnel ; ils sont même parfois contraints de refuser des interventions.

La situation est très préoccupante et pose un véritable problème de société, pointé d’ailleurs dans le rapport de Dominique Libault, président du Haut Conseil du financement de la protection sociale, remis en mars dernier. Celui-ci plaide pour un virage domiciliaire, préconisant un soutien financier de 550 millions d’euros pour les services d’aide et d’accompagnement à domicile, afin d’améliorer le service rendu aux personnes âgées et de revaloriser les salaires des professionnels.

Plus récemment encore, l’ancienne ministre Myriam El Khomri, dans son rapport ciblé sur l’attractivité des métiers du grand âge et de l’autonomie, dressait une série de constats partagés par tous les professionnels du secteur, notamment le morcellement des métiers, l’incapacité à recruter et le défaut de vocations. Elle y fixe, entre autres objectifs, celui de créer 18 500 postes supplémentaires par an d’ici à la fin de 2024, avec, in fine, des propositions qui s’élèvent à 825 millions d’euros par an.

Au regard de ce PLFSS pour 2020, on ne voit pas très bien comment vous trouverez ces moyens.

Votre projet de budget consacre le retour d’un trou de la sécurité sociale, avec 5, 4 milliards d’euros de déficit cette année au lieu des 700 millions d’euros d’excédent prévus voilà un an. Cela assombrit considérablement les perspectives d’avenir, alors que nous sommes dans l’attente de votre grande loi sur la prise en charge de la dépendance, bien évidemment conscients des coûts qu’elle engendrera. Le chef de l’État lui-même avait annoncé que cette loi serait discutée avant la fin de 2019. Il n’en sera rien, malheureusement. Il y a pourtant urgence, d’autant que les conseils départementaux, qui, bien souvent, versent les aides permettant de financer ces emplois et ces activités dans les territoires, sont exsangues et n’ont plus de levier fiscal.

Ce PLFSS pour 2020 pourrait permettre d’amorcer la prise en compte des enjeux du vieillissement et la prise en charge de l’épineuse question de la dépendance. Il devrait engager une transformation en profondeur de notre système, dont le domicile deviendrait le pivot. Or cet aspect est encore et toujours le parent pauvre de votre budget. Cela n’est plus tenable. Les prestataires de santé à domicile réclament non seulement un vrai statut, pour être enfin pleinement reconnus par leurs homologues professionnels de santé, mais aussi un soutien financier. À l’opposé de ce qu’il conviendrait de faire, ce budget offre pourtant la perspective d’un quasi-statu quo.

Madame la ministre, en juin dernier, dans sa déclaration de politique générale devant la Haute Assemblée, le Premier ministre, Édouard Philippe, avait annoncé que ce PLFSS serait la première étape d’une grande réforme de la prise en charge du grand âge, elle-même le grand marqueur social du quinquennat. Pour le moment, vous refusez d’aborder véritablement ces questions, sous prétexte qu’un projet de loi serait en préparation. Je préférerais pour ma part que nous profitions de ce texte pour faire avancer les choses. Sinon, dans les semaines et mois qui viennent, qu’allez-vous nous demander, si ce n’est de débattre d’un plan, d’une loi sur le grand âge et l’autonomie dont les dispositions ne seront pas financées ? Cela n’aurait pas de sens.

Nous ressentons tous l’urgence qu’il y a à répondre à la détresse de celles et ceux qui perdent leur autonomie et aux inquiétudes de leurs proches. Nous devons apporter des solutions, et ce dès ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt

Je vais essayer d’apporter quelques éléments de réponse aux différentes interventions, notamment sur les questions de compensation financière, de relations financières entre l’État et la sécurité sociale, ainsi que sur les questions d’endettement, avant que Mme la ministre ne revienne sur ce qui est le cœur du PLFSS, à savoir les prestations servies à nos concitoyens et l’amélioration du système de protection sociale.

Concernant les compensations – je sais que nous aurons de nouveau ce débat à l’article 3 –, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne marque pas une rupture. Nombreux sont celles et ceux qui ont évoqué la loi Veil, en rappelant le principe de compensation des exonérations accordées par l’État. Ce principe n’a pas toujours été respecté, c’est le moins que l’on puisse dire, puisque, année après année, sur une période longue, quasiment depuis le vote de cette loi, de nombreuses mesures n’ont pas été compensées. Avec la loi de programmation et le PLFSS de l’an dernier, nous avons fait en sorte de revenir à ce principe, que l’on qualifie parfois, de manière un peu familière, de « chacun chez soi ».

Pour faire écho à l’intervention de Mme Cohen lors de la défense de la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité, je souligne qu’il ne faudrait pas laisser penser – je ne pense pas que tel soit votre objectif, madame la sénatrice – que l’État ne compenserait absolument aucune exonération. Certes, le train de mesures est évalué à 2, 8 milliards d’euros, mais d’autres mesures d’allégement font l’objet d’une compensation intégrale. Les allégements généraux, que vous avez cités à plusieurs reprises et qui représentent plus de 51 milliards d’euros, font, eux, l’objet d’une compensation intégrale par l’État grâce à un transfert de TVA.

Vous avez été nombreux à pointer que le contexte a changé. En 2019, nous avons constaté un déficit de 5, 4 milliards d’euros, dont 2, 8 milliards d’euros liés aux mesures d’urgence économiques et sociales. Reste que, pour une part non négligeable, à savoir un peu plus de la moitié, ce déficit est lié à une dégradation des hypothèses macroéconomiques. Nous en tenons compte dans ce PLFSS. Ainsi, nous supprimons les transferts qui avaient été prévus vers la Cades et vers l’État à compter de 2020. Il s’agit donc de 3 milliards d’euros qui vont rester dans les caisses de la sécurité sociale pour tenir compte de ce contexte et participer au redressement des comptes sociaux.

Je voudrais souligner que les mesures prises au titre de l’urgence économique et sociale bénéficient principalement à ceux de nos concitoyens qui en ont le plus besoin. Je pense notamment à l’exonération fiscale et sociale sur les heures supplémentaires, qui se traduit par un gain moyen de pouvoir d’achat de 450 euros par an. Il faut avoir en tête que les deux tiers des ouvriers et 46 % des employés réalisent des heures supplémentaires, contre seulement, si je puis dire, 20 % des cadres. Je vous rappelle que cette mesure a aussi été étendue aux agents publics, qu’ils soient titulaires ou contractuels.

Nous avons pris la décision de réindexer les pensions de moins de 2 000 euros sur l’inflation. Concrètement, un retraité qui perçoit une pension de 1 500 euros par mois retrouve ainsi 338 euros de pouvoir d’achat ; un retraité qui perçoit une pension de 1 900 euros retrouve, lui, un pouvoir d’achat de 428 euros.

Au total, je l’ai dit, ces mesures représentent un peu moins de 17 milliards d’euros. Le budget de l’État en porte plus de 14 milliards, et, effectivement, 2, 8 milliards sont portés par la sécurité sociale. Nous avons souhaité ainsi répartir l’effort en fonction de la nature des mesures, en ayant en tête, aussi, que le budget de l’État présente un déficit qui tangente les 100 milliards d’euros. Nous serons, pour l’année 2019, à environ 97 milliards d’euros, annonce faite la semaine dernière en commission des finances à l’occasion du premier examen de la loi de finances rectificative. Pour la sécurité sociale, nous avons une prévision à 5, 1 milliards d’euros, soit un peu moins que le niveau constaté en 2017.

Vous avez également soulevé trois interrogations auxquelles je souhaite répondre.

Les principes d’autonomie financière de la sécurité sociale et d’affectation de recettes spécifiques, à savoir les cotisations, à la sécurité sociale sont la base du système d’assurance collective et solidaire.

Le premier principe est respecté. Le budget autonome de la sécurité sociale est examiné dans un seul et même texte, distinct du budget de l’État : le PLFSS dont nous débattons à partir de ce jour. Si, effectivement, il y a eu un certain nombre de débats pour évoquer la fusion de ces deux textes, il n’est en plus question. Les choses sont claires : le PLFSS détermine le budget de la sécurité sociale et a vocation à continuer à le faire.

S’agissant du second principe, c’est-à-dire les ressources affectées à la sécurité sociale, permettez-moi de souligner, peut-être pour relativiser ou nuancer les affirmations que j’ai pu entendre, qu’il n’est plus respecté depuis plusieurs années pour une part non négligeable des recettes. Cela étant, j’ai déjà évoqué les 50 milliards d’euros de compensation des allégements généraux, auxquels il faut y ajouter non seulement 5 milliards d’euros de crédits budgétaires compensant des exonérations ciblées, mais aussi quelques milliards de fiscalité affectés à la sécurité sociale au titre de tel ou tel dispositif.

Je termine par les deux autres questions.

S’agissant de la dette sociale, que M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales a évoquée en commission et aujourd’hui, en séance publique, je voudrais rappeler que les deux tiers ont été à ce jour apurés, alors que la dette publique se stabilise autour de 98 %. Il importe de le souligner, car cela garantit, à terme, la soutenabilité de notre système de protection sociale.

La résorption de la dette sociale est une priorité, car nous refusons de léguer aux générations futures un système déséquilibré. À court terme, j’y insiste, il n’y a pas de difficulté pour la gestion de la dette par l’Acoss. Elle a été financée en 2018, avec un taux moyen annuel négatif de 0, 65 %, et nos perspectives pour 2019, comme pour 2020, sont favorables, puisque nous anticipons encore des taux légèrement négatifs, ce qui est rassurant, car de nature à garantir à l’Acoss un traitement tout à fait soutenable de cette dette. Le plafond maximal d’emprunt de cet organisme n’augmenterait que de 1 milliard d’euros en 2020, malgré un déficit de plus de 5 milliards d’euros, grâce à l’optimisation de la gestion de trésorerie.

Par ailleurs, la Cades aura remboursé 16 milliards d’euros de dette en 2019 et 16, 7 milliards d’euros en 2020, alors que le déficit est prévu à hauteur de 5 milliards d’euros sur les deux années. Il y a donc un effort de désendettement trois fois plus important que les déficits. Nous pouvons nous en féliciter, car c’est un gage de respect de sa trajectoire d’apurement.

Je me retrouve dans les affirmations d’un certain nombre d’entre vous, à savoir que la dette de l’Acoss devrait s’élever, d’ici à 2022, à 40 milliards d’euros. Je le répète, elle est soutenable, mais nous devons la financer et veiller à son apurement. Pour ce faire, nous pourrions envisager son transfert à la Cades, comme c’est parfois préconisé, mais il ne pourra se faire que par une disposition de loi organique. Nous pourrions aussi, et c’est une option que le ministère de l’action et des comptes publics porte évidemment en priorité, faire en sorte de travailler à des économies pour permettre le financement et la résorption de cette dette.

Nous allons avoir ce débat, que nous devons faire en sorte d’articuler avec les nouvelles perspectives que le Conseil d’orientation des retraites devra nous donner. En effet, vous le savez, le Gouvernement a saisi ce conseil pour qu’il puisse travailler sur différentes hypothèses et, ainsi, nous accompagner dans la préparation de la réforme systémique qui a été évoquée à plusieurs reprises.

Veuillez me pardonner, mesdames, messieurs les sénateurs, le caractère un peu décousu de mes propos, mais je veux terminer par une précision à l’attention de M. le rapporteur Joyandet et d’autres sénatrices et sénateurs. À plusieurs reprises a été évoquée la question des niches sociales. Nous sommes évidemment ouverts à un travail d’optimisation, d’amélioration et d’évaluation de l’efficacité des niches sociales. Nous aurons l’occasion de nous exprimer à ce sujet pendant le débat.

J’ai entendu dans la bouche de plusieurs d’entre vous le montant de 90 milliards d’euros. J’appelle votre attention sur le fait que cette somme correspond à l’estimation que fait la Cour des comptes du total des niches sociales, qui comprend les taux réduits de CSG. Or je pense que personne ici n’a pour objectif de revenir sur ce dispositif. Si nous défalquons le montant correspondant aux taux réduits de la CSG des niches sociales identifiées par la Cour des comptes, nous sommes non pas à 90 milliards d’euros, mais à un peu plus de 60 milliards d’euros. Certes, c’est une somme considérable, mais il faut la ramener à sa juste mesure par rapport à la somme communément avancée par les uns et par les autres.

Debut de section - Permalien
Agnès Buzyn

Beaucoup d’entre vous ont évoqué l’Ondam, la crise que traversent l’hôpital public et les soignants qui y travaillent. Nous aurons l’occasion d’aborder lors du débat les mesures inscrites dans les différentes branches, mais je souhaite concentrer mon propos sur cette crise exceptionnelle.

Je l’ai dit dans mon discours introductif, je comprends et j’entends vos attentes. Il faut que la réponse du Gouvernement soit à la hauteur de l’enjeu. Tous conscients que cette crise est profonde, je crois que nous pouvons partager l’objectif de restauration de la confiance dans le fonctionnement, le financement de notre système de santé et y travailler ensemble, indépendamment de nos travaux sur le PLFSS, qui sont déjà engagés.

Vos propos ont à plusieurs reprises donné à penser que les décisions sont prises. Ce n’est pas vrai ! Ce que vous présentez comme des annonces figurant dans un article de presse n’ont pas été confirmées, car ce n’étaient pas des annonces. Si vous voulez dire que différentes pistes sont sur la table et que nous en débattons, c’est vrai. J’emploie mon temps à chercher des solutions en discutant avec les différents acteurs du système de santé, mais ces arbitrages sont très complexes, comme vous pouvez le comprendre, car nous n’avons pas le droit à l’erreur.

Vous souhaitez attendre les annonces et mentionnez la date du 20 novembre. Certaines annonces devront en effet être intégrées dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale lorsqu’elles relèvent du domaine législatif. Elles pourront l’être en nouvelle lecture, ce qui ne privera pas le Parlement d’un débat. Faut-il pour autant bloquer la discussion de tout le reste du projet de loi de financement de la sécurité sociale ? Je sais que beaucoup des mesures inscrites dans ce texte vous intéressent, en particulier celles qui émanent du Sénat, comme les dispositions relatives au fonds d’indemnisation des victimes de pesticides. Je crois que ces débats doivent avoir lieu avant le 20 novembre, date fixée dans un article de presse mais qui ne correspond à aucune annonce précise.

Le projet de loi est insincère, dites-vous. Je ne le crois pas. L’insincérité consiste à vouloir fausser les grandes lignes de l’équilibre budgétaire. Nous en discutons encore, il est tard, c’est vrai, mais c’est justement par souci de transparence. Les annonces seront faites avant la nouvelle lecture afin que les textes financiers puissent, si besoin, en tenir compte.

Vous semblez dire que les droits du Parlement ne seraient pas respectés. Notre politique tend à l’inverse ! Le Parlement décide souverainement du niveau de l’Ondam, sur proposition du Gouvernement. Il vote l’ensemble des nombreuses mesures de la loi de financement de la sécurité sociale. Le Parlement exerce donc pleinement ses prérogatives. Nous associons les parlementaires à l’ensemble des mesures, même lorsqu’elles ne sont pas législatives, comme cela arrive très souvent. L’hôpital ne déroge pas à cette règle, qui est essentielle et constitue pour moi une préoccupation de premier ordre.

Enfin, certains d’entre vous ont dit que le débat ne servirait à rien ou serait faussé, ce qui le rendrait inutile. C’est précisément pour débattre, y compris des moyens, que nous nous réunissons dans cet hémicycle. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale mérite cette discussion. L’hôpital la mérite aussi.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Je suis saisie, par M. Milon, au nom de la commission des affaires sociales, d’une motion n° 936.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu’il y a lieu de renvoyer à la commission le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en première lecture, de financement de la sécurité sociale pour 2020 (98, 2019-2020).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 7, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales, pour la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

La commission des affaires sociales a examiné, lors de sa réunion du 6 novembre, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020. Malgré un important travail des rapporteurs, elle n’a pu se prononcer de façon éclairée sur ce texte. En effet, de grandes incertitudes entourent le niveau réel des moyens financiers que le Gouvernement entend consacrer à la santé et, plus particulièrement, au secteur hospitalier.

Ainsi, alors que s’ouvre l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale au Sénat, le Gouvernement n’a déposé aucun amendement, ni transmis à notre assemblée le moindre élément d’information tendant à modifier l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’Ondam, inscrit à l’article 59 de ce texte. Pourtant, beaucoup d’orateurs y ont fait allusion, et vous aussi, madame la ministre, un grand journal a annoncé avant-hier que vous aviez remporté d’importants arbitrages budgétaires de nature à améliorer de manière significative la situation financière des hôpitaux et la rémunération des personnels. Si cela est vrai, tant mieux !

Cette situation n’est pas acceptable pour le Parlement. Elle compromet la sincérité de l’ensemble de nos débats. Elle contrevient clairement à l’esprit, voire à la lettre de l’article L.O. 111-3 du code de sécurité sociale, aux termes duquel la quatrième partie de la loi de financement de la sécurité sociale « fixe l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que ses sous-objectifs ». C’est la raison pour laquelle la commission proposera le rejet de l’article 59 de ce texte en l’état. Il vaut mieux d’ailleurs ne pas le voter, permettant ainsi de le laisser ouvert afin de pouvoir mieux travailler dans le cadre d’une nouvelle lecture proposée par Mme la ministre.

C’est également la raison pour laquelle la commission propose au Sénat de lui renvoyer le texte : le brouillard qui entoure l’Ondam est susceptible de fausser l’ensemble de la discussion, y compris le niveau des recettes adéquat des régimes de sécurité sociale. En procédant de la sorte, la commission sera en mesure de demander au Gouvernement de lui indiquer enfin avec précision ses intentions en vue de réviser le niveau de l’Ondam et de répondre à la crise hospitalière. Il le fera dans le cadre de cette première lecture et non dans le cadre d’une nouvelle lecture, car il nous semble disposer d’éléments suffisants pour pouvoir travailler et discuter valablement sur ce sujet.

La commission des affaires sociales souhaite que cette motion tendant au renvoi à la commission soit votée par notre assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Y a-t-il un orateur contre la motion ?…

Quel est l’avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt

Le Gouvernement, vous l’imaginez, ne peut être favorable à une motion de renvoi à la commission. Mme la ministre vient de l’indiquer, le projet de loi de financement de la sécurité sociale a fait l’objet de nombreux échanges ; il apporte des réponses à des sujets de préoccupation du Sénat et fait écho aux attentes de nos concitoyens.

Par ailleurs, et au risque de paraître enfermé dans une procédure que ni les uns ni les autres n’avons véritablement définie, nous avons toutes et tous en tête que la loi organique prévoit qu’il doit s’écouler quinze jours entre la transmission du projet de loi de financement de la sécurité sociale au Sénat et son adoption. À défaut, passé ces quinze jours, le texte est renvoyé à l’Assemblée nationale en l’état, avec, le cas échéant, les seuls amendements qui auraient eu le temps d’être adoptés.

Je l’ai dit dans mon propos liminaire, le Gouvernement, tout en respectant les décisions que prendra votre assemblée, forme le vœu que la discussion sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale puisse s’engager et se continuer dans les heures et les jours qui viennent. Nous avons à débattre de points importants.

Nous aurons effectivement, dans les prochains jours et semaines, à répondre à un certain nombre de problématiques évoquées par Mme la ministre. Nous veillerons à associer les parlementaires. Nous veillerons à traduire de la manière la plus opérationnelle possible les engagements pris. Comme vous pouvez l’imaginer, tant que les décisions ne sont pas tout à fait arrêtées, il est difficile d’en donner une traduction législative ou même comptable, si vous me permettez cette expression.

Pour toutes ces raisons, l’avis est défavorable sur cette motion de renvoi à la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Mon groupe va voter cette motion. Je regrette cependant que le Sénat n’ait pas adopté notre motion d’irrecevabilité constitutionnelle. Je l’ai déjà souligné, la non-compensation des exonérations massives porte un coup terrible à notre système de sécurité sociale. Certes, monsieur le secrétaire d’État, nous avons déjà connu cela dans le passé, mais pas avec une telle ampleur. D’ailleurs, ce n’est pas le seul groupe communiste républicain citoyen et écologiste qui le dénonce : des collègues siégeant sur d’autres travées l’ont dit eux aussi et les magistrats de la Cour des comptes ont montré l’ampleur de ces exonérations. Il y a donc une rupture vraiment importante.

Nous allons voter cette motion de renvoi, d’abord en raison des problèmes évoqués, à propos desquels Mme la ministre affirme un certain nombre de choses. Je ne doute pas de sa volonté de régler les questions qui ont trait à l’hôpital, sauf qu’on est dans un brouillard, que je pourrais qualifier d’artistique si l’adjectif n’avait pas une connotation si sympathique. On est dans un brouillard à couper au couteau, c’est-à-dire qu’on ne sait rien !

Vous nous avez dit, madame la ministre, et on peut le lire dans la presse, que vous allez sans doute augmenter l’Ondam. Allez-vous l’augmenter à hauteur de 4, 5 %, comme tous les professionnels et les fédérations hospitalières le demandent ? Allez-vous aussi débloquer d’autres financements et changer votre politique d’exonérations massives ? À toutes ces questions, nous n’avons pas de réponse.

Alors, oui, nous allons voter cette motion de renvoi pour marquer le coup, même si notre groupe trouve que c’est quand même une mascarade. C’est en quelque sorte un coup d’épée dans l’eau. Son adoption va simplement retarder nos débats de quelques heures. Je préférerais que nous nous retrouvions après le 20 novembre, quand Mme la ministre aura enfin daigné nous donner vraiment la réalité du budget qu’elle porte.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Depuis le début de cet après-midi, vous entendez notre attachement viscéral au financement de la sécurité sociale. Vous entendez aussi l’attachement viscéral de mon groupe à sa pérennité.

En ce qui nous concerne, les craintes que nous ressentons maintenant portent non sur l’insincérité des recettes de la sécurité sociale, de l’assurance maladie mais sur vos réponses, madame la ministre.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale a été présenté à la fin du mois de septembre. Ses orientations ont été soumises au débat public. Il y a deux mois déjà, vous affichiez votre ambition de répondre à l’urgence économique et sociale – l’« urgence » au singulier.

Quant aux services d’urgences hospitalières, alors qu’ils étaient déjà en grève, vous aviez prévu un pacte pour leur refondation doté de 750 millions d’euros sur quatre ans et de 600 millions d’euros dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Pourtant, la mobilisation des soignantes et des soignants de l’hôpital ne faiblit pas, et vous voilà sommée de revoir votre copie.

Le collectif Inter-Urgences, que la commission des affaires sociales a reçu ici, nous a éclairés sur ce que dissimule votre volonté de modération de la dépense. Ce sont des patients vulnérables – personnes âgées et personnes handicapées – qui sont en danger. Ce sont des effectifs en sursis.

Vous dites, dans Le Journal du dimanche – où vous exprimez non des annonces mais des intentions –, que vous allez éventuellement augmenter l’Ondam, éventuellement augmenter les primes, les investissements et les revalorisations. Mais nous sommes d’ores et déjà prêts à jouer notre rôle de parlementaire et à nous conformer à notre agenda, qui prévoit d’examiner cette semaine le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Les socialistes proposent l’augmentation de l’Ondam, un plan d’investissement et une véritable programmation de l’hôpital public pour les cinq ans à venir.

Quelle est la vraie copie de ce gouvernement en ce qui concerne le projet de loi de financement de la sécurité sociale ? Faut-il attendre jeudi prochain ? Ou bien pensez-vous au 20 novembre, date, qui, après vous avoir écoutée, madame la ministre, ne semble plus être forcément la bonne ?

Pour toutes ces raisons d’incertitude, nous pensons que les bonnes bases de la discussion ne sont pas posées en ce qui concerne l’hôpital. Nous soutiendrons donc la motion de renvoi à la commission présentée par M. Milon.

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Amiel

Ma voix sera bien sûr minoritaire par rapport à cette motion tendant au renvoi à la commission, que nous ne voterons pas.

Je peux comprendre un mouvement d’humeur tel que celui qui est porté par M. Milon. En effet, nous aurions tous préféré que certaines incertitudes soient levées. Faut-il pour autant remettre en question tout un texte et un certain nombre de mesures, comme cela a été dit ? Je ne le crois pas.

En tout état de cause, c’est moins une question de forme que de fond. Oui, madame la ministre, bien entendu, comme tous les parlementaires, nous attendons les mesures fortes qui semblent devoir être annoncées la semaine prochaine. Pour autant, nous ne considérons pas que cela doive remettre en question le vote et, plus exactement, le débat qui doit avoir lieu dans les heures et les jours prochains concernant le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Je mets aux voix la motion n° 936, tendant au renvoi à la commission.

La motion est adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

En conséquence, le renvoi du projet de loi de financement de la sécurité sociale à la commission est ordonné.

Monsieur le secrétaire d’État, aux termes de l’article 44, alinéa 5, du règlement, lorsqu’il s’agit d’un texte inscrit par priorité à l’ordre du jour sur décision du Gouvernement, la commission doit présenter ses conclusions au cours de la même séance, sauf accord du Gouvernement. Je consulte donc le Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt

Pour les raisons évoquées précédemment, le Gouvernement est attaché à une application stricte de l’article 44. Il souhaite donc que le rapport soit présenté au cours de la même séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La séance va donc être suspendue pour permettre à la commission de se réunir.

Je consulte la commission sur la durée de la suspension qu’elle estime nécessaire pour présenter ses conclusions.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Nous pourrions reprendre vers vingt et une heures trente, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Mes chers collègues, nous allons donc maintenant interrompre nos travaux.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt-deux heures quinze, sous la présidence de M. Jean-Marc Gabouty.