Je concentrerai mon propos sur la politique immobilière du ministère des Armées.
Au total, le budget 2020 consacré à l'infrastructure s'élève à 2 milliards d'euros en autorisation d'engagement et à 1,7 milliard d'euros en crédits de paiement. C'est dans la continuité du budget précédent. Le véritable bond en avant a eu lieu en loi de finances pour 2018, lorsque la politique immobilière a bénéficié de 400 millions d'euros de crédits supplémentaires. Cet effort est donc reconduit.
Tout d'abord, la gouvernance des crédits de politique immobilière a été modifiée. Les infrastructures rattachées aux programmes d'armement relèveront désormais du programme 146, donc du CEMA et du DGA. Les infrastructures liées à l'activité opérationnelle des forces, ainsi que les crédits de maintenance « locataire », déconcentrés aux bases de défense, sont transférés au programme 178. Le programme 212 ne regroupera donc plus que les crédits du logement, de l'hébergement, des locaux de travail et réseaux d'intérêt général.
En crédits de paiement, ce sont 320 millions d'euros qui partent vers le programme 146 et 880 millions d'euros vers le programme 178, dont plus de 300 millions d'euros au titre de la déconcentration de la gestion. Le programme 212 conserve 510 millions d'euros de crédits de politique immobilière.
Ce changement de gouvernance était souhaitable. Il responsabilise les bénéficiaires d'infrastructures et doit permettre un meilleur suivi de l'utilisation des crédits.
En isolant, au sein du programme 212, le financement de l'objectif d'une LPM « à hauteur d'homme », la réforme sanctuarise cet objectif. En clair, on ne pourra plus piocher dans les crédits destinés à l'amélioration des conditions de vie pour pourvoir aux surcoûts et aux priorités des programmes d'armement. Nous n'y voyons que des avantages.
S'agissant de l'amélioration des conditions de vie, que prévoit ce projet de loi de finances ? La Ministre a annoncé le 18 octobre dernier une augmentation significative des investissements dans le domaine de l'hébergement en enceinte militaire, avec un effort qui doit passer en moyenne de 100 millions d'euros à 140 millions d'euros par an. L'objectif est de réhabiliter 18 000 places et de créer 7 600 lits supplémentaires.
Les investissements dans le domaine du logement familial s'accentuent également, conformément au plan Familles. L'effort passe d'environ 120 millions à environ 150 millions d'euros en moyenne par an.
Il reste à espérer que les crédits de paiement puissent suivre, à l'avenir, la forte augmentation des autorisations d'engagement.
Un gros enjeu réside dans l'arrivée à expiration, en 2020, de la concession de l'ex-Société nationale immobilière (SNI) sur les logements domaniaux du ministère des Armées. La négociation d'un nouveau contrat de concession, dit CEGELOG, a été lancée. Le ministère souhaite une remise à niveau accélérée du parc domanial, notamment sur le plan énergétique, et la construction de 2 500 logements neufs. Le parc souffre de vétusté. Surtout, sa localisation ne correspond plus aux priorités des armées. Des besoins se font sentir en région parisienne et à proximité de Rennes, Bordeaux et Toulon, dans des zones tendues.
Cela me conduit à mon troisième point qui concerne les cessions et leurs contreparties attendues pour le ministère des Armées.
Vous vous souvenez que nous avions fait préciser, à l'article 3 de la LPM, que le ministère devait bénéficier de l'intégralité du produit de ses cessions immobilières et de ses redevances et loyers. Depuis 2017, pour compenser la raréfaction des recettes de cession, le champ du compte d'affectation spéciale, dit CAS 723, a été étendu, en recettes, aux loyers et redevances, et en dépenses, aux frais d'entretien du propriétaire. L'an dernier, les promesses de la LPM ont été concrétisées dans la loi de finances pour 2019. Le dispositif législatif est donc en place.
Mais nous suivrons de très près deux développements :
- S'agissant tout d'abord des loyers et redevances : Dans le cadre du plan « Place au soleil », le ministère des Armées a annoncé la mise à disposition, d'ici fin 2022, de 2 000 hectares de terrains pour y développer des projets de production d'électricité photovoltaïque. Au sein du CAS, les redevances et loyers du ministère des Armées représentent déjà 10 millions d'euros. Ce montant a vocation à s'accroître. Il faudra que le ministère puisse bénéficier de droits de consommation supplémentaires équivalents en retour.
- S'agissant ensuite du Val de Grâce : l'ancien hôpital sera conservé jusqu'aux JO 2024. Le site sert actuellement à l'hébergement d'environ 370 militaires de l'opération Sentinelle et d'une centaine de célibataires géographiques. Il y a donc un besoin. Ce besoin sera-t-il fondamentalement modifié après les J.O ? Il est permis d'en douter. Les APNM portent d'ailleurs un projet social et d'hébergement pour le Val de Grâce.
Mais le projet qui semble tenir la corde est celui porté par le ministère de la santé. On peut craindre, alors, que la soulte versée ne soit très inférieure à la valeur réelle du bien. Or la cession du Val-de-Grâce est la dernière cession d'ampleur prévue par le ministère après la vente récente de la partie fructifère de l'Ilot Saint-Germain.
Voilà les quelques points sur lesquels je souhaitais attirer votre attention. Pour le reste je suis plutôt favorable à ce budget.