Intervention de Delphine Batho

Commission d'enquête Incendie de l'usine Lubrizol — Réunion du 12 novembre 2019 à 9:5
Audition de Mme Delphine Batho ancienne ministre de l'écologie du développement durable et de l'énergie

Delphine Batho, ancienne ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie :

En 2018, 828 procès-verbaux ont été transmis à la justice par l'Inspection des installations classées, contre 740 en 2016 et 700 en 2014. Pour avoir personnellement cherché à connaître les suites judiciaires données à ces constatations d'infraction, je n'ai pas trouvé de renseignements.

On le voit avec la saisine du pôle « santé publique » du parquet et la nomination de juges d'instruction pour les questions techniques extrêmement pointues en lien direct avec la santé. Des problématiques similaires se posent pour les rejets dans l'environnement ; cela nécessite un parquet spécialisé. De façon générale, en France, une insuffisance de la police environnementale est insuffisante, tout comme les suites judiciaires données à toutes les infractions de nature environnementale. Les éminents spécialistes du droit de l'environnement que vous pourrez auditionner pourront vous parler de cette dimension, qui est absolument fondamentale.

On a tendance à concentrer nos débats sur l'amont, c'est-à-dire la règle, les dispositions de la loi, et on se préoccupe de façon très nettement insuffisante de la sanction. Le cas de Lubrizol le montre, avec une quasi-impunité : une amende de 4 000 euros est bien entendu dérisoire.

J'ai essayé de répondre à la question de savoir pourquoi on avait mis de côté les préconisations. Je veux y insister, personne n'a décidé de mettre ce rapport « au placard ». Mais n'a été retenue que la création de la force d'intervention rapide. J'avais alors annoncé un plan de mobilisation pour les risques technologiques, ainsi que la création de cette force d'intervention rapide, avant même la publication du rapport d'inspection. Vous pourrez le noter, l'instruction qui met en oeuvre cette force d'intervention a été publiée plus d'un an après la publication du rapport d'inspection. Les autres éléments ont été mis de côté par l'entonnoir des décisions étatiques et peut-être même par une autre dimension, le regard ou l'intérêt que notre société porte sur les sites Seveso. Les deux tiers des quelque deux millions d'habitants qui vivent à côté d'un site Seveso seuil haut résident dans des zones urbaines sensibles (ZUS).

Lorsque j'étais membre du gouvernement, ce sujet a avancé grâce à la mobilisation des parlementaires et des maires, notamment de l'association Amaris, mais avec un intérêt relatif pour le débat public national, par les médias, jusqu'à ce qu'un accident survienne.

Dans le cadre de la loi de finances pour 2013, nous nous sommes battus pour modifier le financement des travaux des habitations au regard des PPRT, mais le Conseil constitutionnel a censuré une de ces dispositions pour des raisons de forme, et cela n'a pas suscité un émoi particulier.

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