Une autre mesure de bon sens consisterait à limiter dans le temps les dépenses de fonctionnement, pour lesquelles on ne fixe jamais de terme, avec pour résultat une addition sans fin des emprunts destinés à les couvrir.
Seule la diminution des emprunts de fonctionnement récurrents permettrait de réduire peu à peu le déficit. Il faudrait commencer tout de suite, mais on ne le fait pas, malgré les propositions que j’ai formulées en ce sens…
En revanche, comme l’a souligné M. le ministre, les emprunts nouveaux destinés à des investissements d’avenir sont absolument nécessaires afin d’accroître notre production de richesses.
Enfin, mes chers collègues, permettez-moi une dernière remarque, que personne n’a encore formulée.
Notre système capitaliste a montré ses limites en raison de la spéculation réalisée par les détenteurs d’actions de sociétés anonymes dépourvues de « noyau dur ». Ceux-ci ne se préoccupent que du prix des titres et les revendent immédiatement avec une plus-value ; ils n’ont pas le moindre souci de l’avenir de l’entreprise en cause.
Pour éviter ces va-et-vient destructeurs, il serait bon, me semble-t-il, d’obliger tout acquéreur d’actions à conserver celles-ci pendant au moins cinq ans. Une telle décision éviterait des mouvements spéculatifs qui sont fortement nuisibles et ne coûterait rien.
Il faut aussi remarquer – j’y insiste – que seules les actionnaires des sociétés familiales conservent leurs titres, sans se préoccuper des cours de la bourse, car ils veulent préserver le patrimoine familial.
Il faudrait donc soigner ces actionnaires familiaux, d'ailleurs de moins en moins nombreux, car ils sont des facteurs de stabilité économique, au lieu de les pénaliser par des impôts spécifiques qui les découragent et les poussent à s’expatrier, privant ainsi la France à la fois de leurs capitaux et de leurs talents.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà quelques-unes des propositions que je tenais à formuler devant vous.
Il faudrait aller encore plus loin dans la politique de réformes courageuses que le Président de la République a entreprise et que j’approuve, en prenant en compte, si possible, les quelques points que je viens d’indiquer.
Rien n’est simple dans ce domaine. Je connais les résistances multiples qui se manifestent en France à la moindre réforme, car notre pays est conservateur et prêt à se paralyser contre n’importe quelle tentative de changement. Cet état d’esprit ne facilite pas la tâche des gouvernements, qui tentent de faire des efforts mais se heurtent toujours à des grèves.
Rien ne pourra se faire sans le consensus de tous, me semble-t-il. Pour l’obtenir, il faudrait lancer une vaste opération d’explication en direction de l’opinion, pour que chacun prenne conscience de la gravité de la situation et pour faciliter les réformes.
Au lieu d’affirmer que tout va bien, que la situation n’est pas si grave et qu’elle va s’arranger, il faut souligner une fois pour toutes l’ampleur des difficultés qui se présentent à nous ! C’est d'ailleurs ce que nous faisons ici depuis plusieurs heures.
Les Canadiens ont mené cette réforme avec succès voilà quinze ans. Aujourd’hui, ils ont réussi ce miracle d’obtenir un budget équilibré, sinon excédentaire, mais aussi de réduire leur dette. Rien ne nous empêcherait de faire pareil !