Intervention de Philippe Dominati

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 12 novembre 2019 à 14h35
Projet de loi de finances pour 2020 — Mission « sécurités » - programmes « gendarmerie nationale » « police nationale » « sécurité et éducation routières » et cas « contrôle de la circulation et du stationnement routiers » et « sécurité civile » - examen des rapports spéciaux

Photo de Philippe DominatiPhilippe Dominati, rapporteur spécial (programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurités ») :

Je constate que c'est une triste journée dans la mesure où l'ensemble des rapporteurs spéciaux dressent en réalité le même constat. On s'aperçoit que tous les interlocuteurs ont relayé les inquiétudes du terrain. Ce constat est très largement partagé. Le problème de sous-investissement et de manque de dépenses de fonctionnement a des conséquences opérationnelles directes. En termes d'armement et de formation, il y a de réelles raisons d'être inquiets. Pendant de nombreuses années, les gendarmes bénéficiaient d'une dotation d'agrément, appelée dotation de fonctionnement des unités élémentaires, qui devait servir à acheter des équipements pour la vie de la caserne. Aujourd'hui, cette dernière est détournée de son usage, pour acheter des biens professionnels, comme des ordinateurs, faute de crédits suffisants. Sur l'externalisation du parc de véhicules ; il n'existe pas d'autres moyens aujourd'hui, mais cette solution peut être également utilisée pour éviter d'avoir à investir et masquer une certaine misère. Néanmoins, l'externalisation me paraît utile, surtout dans un contexte de vieillissement du parc et de dépenses contraintes. D'autres moyens de rajeunir le parc d'automobiles existent, comme l'attribution aux unités de véhicules saisis. Je regrette néanmoins que cela se développe lentement, en raison notamment du manque d'engagement des magistrats. En plus, cela a un coût, car les véhicules saisis ne rentrent pas toujours dans les standards du parc des deux forces. En réalité, ces voitures saisies ne sont utilisées que par des unités spécialisées, comme les BAC ou la police judiciaire, ou servent de véhicules de liaison. Ils demeurent toutefois assez difficiles à intégrer à la gestion courante des services de sécurité.

S'agissant des heures supplémentaires au sein de la police nationale ; elles ont toujours existé, mais elles ont connu un pic particulièrement important ces dernières années lié, notamment, à la mobilisation des forces dans le contexte terroriste et au maintien de l'ordre public. C'est la première fois qu'il y a un début de réponse de la part du ministère. La mission « Sécurités » comprend en effet des crédits visant à limiter le flux pour l'année prochaine, tandis que des mesures réglementaires vont être prises pour limiter le recours aux heures supplémentaires par les chefs de service. Il y a donc un début de perspective sur ce sujet. Ce problème est colossal, car les heures supplémentaires non remboursées sont compensées par des départs à la retraite anticipés, parfois de plusieurs mois, qui entrainent de véritables trous opérationnels.

J'attends de ce ministère des réformes de structure et notamment en Ile-de-France. Le développement des polices municipales fournit un point de comparaison parfois inquiétant, face à une police nationale qui n'a plus de moyens. À titre d'exemple, mes interlocuteurs m'ont indiqué que le fonctionnaire qui a abattu le terroriste lors de l'attentat à la préfecture de police de Paris sortait de formation, sinon il aurait eu du mal à le neutraliser, car les formations au tir sont très largement déficitaires, faute de crédits suffisants.

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