Intervention de Annie David

Réunion du 10 mai 2011 à 14h30
Soins psychiatriques — Article 1er

Photo de Annie DavidAnnie David :

Le Conseil constitutionnel a considéré que le juge des libertés et de la détention devait impérativement intervenir dans le cas d’une hospitalisation à la demande d’un tiers. Il a pour cela posé une date limite, le 1er août de cette année, et nous contraint à légiférer dans l’urgence.

Or je constate que le Gouvernement s’est saisi de l’opportunité créée par cette décision, rendue à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité, ou QPC, pour insérer des dispositions qui n’ont aucun rapport avec le rôle du juge des libertés et de la détention.

Cette QPC, qu’a évoquée tout à l’heure M. Bertrand lors de son passage éclair au banc des ministres, ne sert en réalité que de prétexte puisque l’essentiel des mesures contenues dans ce projet de loi sont dédiées à l’organisation des soins sans consentement.

Sur ce texte, le Gouvernement nous donne l’impression d’avoir joué la montre. Connaissant le recours engagé par un justiciable, il n’a pas demandé son inscription à l’ordre du jour de l’une des deux assemblées, alors que son dépôt date tout de même du 10 mai 2010, il y a un an. Sans doute attendait-il, madame la secrétaire d'État, que les juges constitutionnels rendent leur décision pour imposer un examen en urgence et priver ainsi les parlementaires de toutes latitudes. Si telle n’était pas sa volonté, c’est en tout cas la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui.

Or, voyez-vous, l’intervention du juge des libertés et de la détention, si nous ne la contestons pas, nous semble trop tardive. De plus, les missions dévolues à ce dernier sont trop limitées, particulièrement au vu du rôle exorbitant que le projet de loi attribue aux préfets.

Enfin, le texte demeure étrangement silencieux pour ce qui est des moyens financiers nécessaires à son application ; Mme Hermange l’a d’ailleurs souligné voilà quelques instants. Lorsqu’on connaît la situation du ministère de la justice, on sait qu’il aura bien des peines, par exemple, à financer la télé-audience, pourtant prévue, au-delà même de ce que l’on peut penser de cette disposition, à laquelle, pour ma part, je suis fortement opposée, et pas seulement pour un problème financier.

On sait également que la mise en œuvre du projet de loi nécessiterait dans chaque établissement psychiatrique la mobilisation d’au moins deux professionnels.

Tout cela se faisant à coût constant, on devine que la première conséquence sera la réduction du nombre de soignants. Ce n’est pas ainsi, me semble-t-il, que l’on pourra répondre aux besoins de malades en grande difficulté.

Bref, mes chers collègues, tout porte à croire que le projet de loi sera au final inapplicable, exception faite, bien sûr, des mesures sécuritaires qu’il contient. Aussi, le seul moyen de se préserver d’une telle situation réside dans la suppression, un à un, des articles qui le composent. C’est ce que nous vous invitons à faire.

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