Intervention de Céline Brulin

Réunion du 28 novembre 2019 à 10h45
Loi de finances pour 2020 — Sport jeunesse et vie associative

Photo de Céline BrulinCéline Brulin :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le budget du sport, derrière une augmentation en trompe-l’œil principalement allouée aux dépenses des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 – et d’ailleurs insuffisante pour cet objectif –, traduit une dégradation continue du sport français qui inquiète ses acteurs.

Restera-t-il un ministère des sports dans quelques années, notamment après 2024 ? C’est la première question qu’on est en droit de se poser, non seulement en raison de la nouvelle suppression de 42 postes en son sein, mais aussi du fait de la menace, qui persiste, d’un détachement des CTS vers les fédérations sportives, tout cela dans un contexte où l’Agence nationale du sport prend de plus en plus la place du ministère.

Les crédits de l’ANS atteignent 284 millions d’euros, alors que l’on estime les besoins à 350 ou 400 millions d’euros. Au moment où le sport français est l’objet d’une réorganisation totale, il s’agit d’un très mauvais signal envoyé aux acteurs concernés, notamment aux collectivités, dont les finances sont déjà exsangues et qui gèrent pourtant 86 % des infrastructures sportives de notre pays.

Tandis que nous faisons face à un vieillissement des équipements sportifs, 42 % d’entre eux ayant près de quarante ans, il est impensable que leur renouvellement repose intégralement sur nos collectivités. C’est pourtant bien ce à quoi les budgets successifs du sport risquent de conduire.

Au-delà de la question des infrastructures, le développement concret du sport français, celui de tous les jours, celui des territoires, tient à la bonne volonté des bénévoles, après que les emplois aidés ont été supprimés.

On a donc : d’un côté, un sport de masse à qui l’on demande de faire toujours plus avec moins ; de l’autre, un monde sportif professionnel, en tout cas dans certaines disciplines, où l’argent est bel et bien présent, et même de plus en plus abondant du fait des paris sportifs ou des retransmissions audiovisuelles.

La logique autant que la nécessaire solidarité nationale et le souci d’efficacité voudraient qu’une véritable péréquation ait lieu entre ces deux mondes pour faire en sorte que le premier continue de se développer et d’alimenter le second.

Or, après que le Gouvernement a fait revoter l’Assemblée nationale sur le déplafonnement des taxes, il ne nous est pas même possible ici, au Sénat, d’aborder le sujet pourtant central qu’est celui du financement du sport. Les bénévoles, les élus et les adhérents des clubs sportifs français devraient donc accepter que l’argent provenant du sport ne leur profite plus, ne serait-ce même qu’un peu, alors que ceux-ci voient les conditions dans lesquelles se développe la pratique du sport se dégrader.

Par ailleurs, mon groupe constate l’ambivalence de la décision qui conduira à la rémunération directe des CTS par le ministère des sports. Pour notre part, nous refusons que ce rassemblement administratif contribue à faciliter un futur détachement de ces agents. Nous avons déjà abordé ce sujet à plusieurs reprises.

Si les perspectives que votre budget trace pour le sport français inquiètent, la situation de la vie associative n’a malheureusement pas grand-chose à lui envier.

Après la brutale suppression des emplois aidés, la politique fiscale injuste de votre gouvernement a enfoncé le clou : de la suppression de l’ISF à la hausse de la CSG, les dons des particuliers ont chuté drastiquement, d’au moins 20 % entre 2017 et 2018.

En parallèle, le désengagement public se poursuit avec une nouvelle baisse, et pas des moindres, des crédits affectés à cette ligne budgétaire. Tout cela dans un contexte où les associations sont davantage sollicitées par les citoyens ou les collectivités, bien souvent d’ailleurs, pour assumer les missions de service public que l’État abandonne.

À cet égard, la suppression de la réserve parlementaire, dont les crédits n’ont pas été intégralement transférés vers le Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) conduit à une perte nette pour les associations, à hauteur de 27 millions d’euros.

En outre, on observe une très forte inégalité en ce qui concerne la répartition des fonds, et ce au détriment des territoires ruraux, qui n’ont certainement pas besoin de cette nouvelle forme de discrimination. En la matière, la transparence n’est pas de mise.

Concernant la jeunesse, le service civique concentre toujours la plus grande partie des crédits, sans que le dispositif puisse être réformé pour toucher véritablement son cœur de cible, que ne constituent pas les étudiants diplômés du supérieur à la recherche d’expériences à valoriser, ou pour qu’un véritable contrôle visant à débusquer le salariat déguisé soit mis en place.

Enfin, le service national universel est censé favoriser l’engagement de la jeunesse – cette mission est également assumée par les associations, pourtant malmenées aujourd’hui – et aurait vocation à renforcer la cohésion au sein d’une même génération, dans un contexte où les inégalités s’accroissent, notamment en raison des réformes successives de l’éducation nationale, comme celle du lycée ou de Parcoursup. Nous aurons l’occasion de revenir sur cette question lors de nos débats, car il y a beaucoup à dire.

Sur ces trois thèmes centraux pour la cohésion nationale, vous comprendrez que notre groupe ne pourra que s’opposer à un budget insuffisant et incohérent !

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