Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les rapporteurs de branches, mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous retrouvons pour étudier en nouvelle lecture le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 dans un contexte singulier, comme vient de le rappeler Mme Buzyn.
Je ne reviendrai pas sur les différents événements de la première lecture. Je forme simplement le vœu que nous puissions engager des débats apaisés et constructifs pour enrichir ce projet de loi de financement.
Avant d’entrer dans le débat, il faut souligner que ce texte tient compte, comme vous le souhaitiez, des mesures exceptionnelles prises en faveur de l’hôpital la semaine dernière. Il en est ainsi du relèvement de l’Ondam pour 2020 de 0, 15 point, pour le porter de 2, 3 % à 2, 45 %, ce qui représente 300 millions d’euros supplémentaires et permet de porter l’Ondam hospitalier de 2, 1 % à 2, 4 %.
Concernant les équilibres généraux et les articles dits de « recettes », je ne reviendrai pas dans le détail sur toutes les mesures que nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer en première lecture.
Je veux néanmoins évoquer quelques points saillants du débat entre votre assemblée et le Gouvernement. À commencer par l’article 3 et les dispositions de non-compensation des mesures d’urgence économiques et sociales. Nous savons l’opposition renouvelée du Sénat et je préfère dire d’emblée – peut-être pour gagner du temps lors des explications de vote – que le Gouvernement restera sur sa position en émettant un avis défavorable sur les amendements adoptés par la commission des affaires sociales tendant à la suppression de cet article.
Nous avons longuement débattu de ce point en première lecture et je ne crois pas utile, à ce stade, de redéployer l’intégralité des arguments qui sous-tendent la position du Gouvernement. Je relèverai seulement un chiffre : sur les 17 milliards d’euros de mesures prises à la suite du grand débat, 14 milliards ont été financés par l’État.
Les échanges que nous avons eus cet automne soulignent la nécessité d’avoir prochainement un débat sur l’avenir des relations entre l’État et la sécurité sociale. Nous aurons l’occasion d’y revenir.
Je souhaite également insister sur l’article 7 et l’obligation pour une entreprise d’avoir conclu un accord d’intéressement pour pouvoir bénéficier de l’exonération de la prime exceptionnelle.
Cette mesure, qui s’inscrit en cohérence avec la politique du Gouvernement – notamment depuis la loi Pacte – de promouvoir l’intéressement et la participation dans les entreprises, permet de renforcer le pouvoir des salariés de manière pérenne durant toute la durée de l’accord d’intéressement et pas uniquement pour la seule année du versement de la prime exceptionnelle.
J’ai aussi en tête certaines mesures d’assouplissement – notamment celle qui concerne les établissements et services d’aide par le travail (ÉSAT) – reprises par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture. Nous aurons également l’occasion d’y revenir.
Le Gouvernement sera vigilant sur la question des niches sociales. Comme je l’avais souligné en première lecture, il sera défavorable aux amendements visant à proposer la création ou l’extension de niches déjà existantes. Il nous semble bien plus nécessaire de mener un travail d’évaluation et d’ajustement de ce type de dépenses sociales.
J’en viens maintenant aux équilibres financiers de ce texte que les mesures sur l’hôpital ne remettent pas fondamentalement en cause, puisque nous assumons des dépenses nouvelles de 3 milliards d’euros sur trois ans. Celles-ci doivent permettre d’offrir aux soignants des conditions de travail satisfaisantes en dégageant des moyens supplémentaires dans la durée. Elles permettront également aux établissements d’investir et de se transformer.
Ces dépenses supplémentaires seront intégrées à la trajectoire des finances publiques présentée dans la loi de programmation des finances publiques au premier semestre 2020. Ce texte précisera les orientations du Gouvernement en matière de recettes et de dépenses publiques pour les prochaines années.
Un mot, pour terminer, sur la reprise de dette des hôpitaux dont vous aurez à connaître dans un projet de loi qui sera déposé début 2020. L’allégement de la dette de 10 milliards d’euros en trois ans est d’abord un fait historique et une mesure exceptionnelle : cela va permettre de dégager des marges de manœuvre pour les hôpitaux afin qu’ils puissent réduire leur déficit et investir.
Au bout de trois ans, la reprise de dette va alléger la charge des hôpitaux de 800 millions à 1 milliard d’euros par an, en fonction de la dette reprise et des taux d’intérêt afférents. Il s’agit d’une bouffée d’oxygène bienvenue. Cette reprise de dette ne se traduira pas par une augmentation parallèle de la dette publique, dans la mesure où la dette des hôpitaux y est déjà comptabilisée, au regard des instances et de nos partenaires européens.
Nous serons vigilants, aux côtés des établissements, pour que les marges de manœuvre supplémentaires dégagées contribuent non pas à recréer de la dette, mais bien à accélérer la transformation de l’hôpital public que le plan Ma santé 2022 avait engagée et qui doit être mise en œuvre jusqu’à son terme.
Nous assumons ces choix budgétaires. Notre rythme d’ajustement budgétaire est certes différent de celui qui était envisagé en 2017, mais il tient compte à la fois du ralentissement économique mondial, des difficultés sociales que traverse notre pays et des priorités que nous assumons de financer.
Ce texte s’inscrit dans la continuité de la politique que nous menons depuis plus de deux ans, à la fois pour baisser les impôts et pour soutenir le pouvoir d’achat des Français. Il est en cohérence avec nos objectifs. Il nous permet d’aller plus loin et d’apporter des réponses à la crise longue que traverse l’hôpital public. Ces mesures exceptionnelles et nécessaires seront complétées par d’autres textes encore à venir, comme la loi de programmation ou le projet de loi spécifique à la reprise de la dette.