Intervention de Vincent Delahaye

Réunion du 30 novembre 2019 à 14h30
Financement de la sécurité sociale pour 2020 — Article 23 et annexe B

Photo de Vincent DelahayeVincent Delahaye, président :

Annexe B

Rapport décrivant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l’objectif national des dépenses d’assurance-maladie pour les quatre années à venir

La présente annexe décrit l’évolution des agrégats de dépenses, de recettes et de soldes du régime général, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse pour la période 2020-2023.

Par rapport aux prévisions du PLFSS pour 2019, le solde des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) s’est dégradé, dans le contexte des mesures d’urgence décidées à la fin de l’année 2018, ainsi que du fait d’une situation économique moins favorable qu’anticipée. En conséquence, il est nécessaire de revenir sur les mesures d’accélération du désendettement et de transfert de recettes au budget de l’État qui avaient été décidées l’an dernier, et de décaler la date de retour à l’équilibre tenant compte de ce contexte (I). Cette trajectoire tient compte de l’absence de hausse de prélèvement sur les ménages ou les entreprises, des efforts de maîtrise de la dépense, et du cadre renouvelé des relations financières entre l’État et la sécurité sociale (II). Ces efforts permettront à la branche Famille et la branche Accidents du travail et maladies professionnelles de dégager des excédents dès 2020 d’atteindre l’équilibre en 2023 (III).

I. – Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 tire les conséquences d’une situation économique moins favorable que prévue et des mesures d’urgence économiques et sociales de fin 2018.

Pour 2020, le Gouvernement retient des hypothèses de croissance du PIB de 1, 3 % en 2020 (après 1, 4 % en 2019) et de 2, 8 % de la masse salariale privée (après 3, 3 % en 2019) ainsi qu’une hypothèse d’inflation hors tabac (1, 0 %) stable par rapport à 2019.

Pour les années 2021 à 2023, le Gouvernement retient un scénario de croissance robuste et régulière sur l’ensemble de la trajectoire. L’inflation augmenterait progressivement avec un effet à la hausse sur les salaires nominaux conduisant à une accélération progressive de la masse salariale.

Le Haut Conseil des finances publiques a rendu le 27 septembre 2019 un avis sur ces prévisions macroéconomiques qu’il considère comme atteignables pour 2019 et plausibles pour 2020. Il estime ainsi que les prévisions d’inflation, d’emploi et de masse salariale retenues par le Gouvernement pour 2019 sont cohérentes avec les informations disponibles et raisonnables pour 2020.

Le tableau ci-dessous détaille les principaux éléments retenus pour l’élaboration des prévisions de recettes et objectifs de dépenses décrits dans la présente annexe.

PIB en volume

Masse salariale

Inflation hors tabac

ONDAM

L’amélioration de la conjoncture économique et la maîtrise des dépenses ont permis une réduction significative des déficits sociaux en 2018 prolongeant la trajectoire positive lors des sept années précédentes.

En 2019 les perspectives de croissance, moins favorables que prévu en raison notamment d’un environnement international moins porteur, reportent le retour à l’équilibre durable de l’ensemble des régimes de base, sans remettre toutefois en cause la stratégie du Gouvernement en matière de redressement des comptes sociaux, ni l’objectif de désendettement de la sécurité sociale.

En effet, le déficit du régime général serait réduit à -0, 3 milliard d’euros en 2023. À cette même date, le déficit du fonds de solidarité vieillesse (FSV) ne serait plus que de -0, 3 milliard d’euros ; le déficit consolidé régime général + FSV atteindrait ainsi +0, 1 milliard d’euros. L’équilibre des comptes des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et des organismes concourant à leur financement ne serait quant à lui pas atteint à cette même date, en raison de la trajectoire plus dégradée de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales. En 2023, le déficit global pour l’ensemble des régimes obligatoires atteindrait -1, 1 milliard d’euros.

En l’absence de retour à l’équilibre dès 2020 sur le champ du régime général, il n’est par ailleurs plus envisageable de prévoir des transferts de recettes à la CADES et à l’État. Par conséquent, pour les années 2020 à 2022, le PLFSS pour 2020 supprime les dispositions de la LFSS pour 2019 qui avaient prévu l’affectation à la CADES des ressources de CSG (1, 6 milliard d’euros en 2019, 1, 8 milliard d’euros l’année suivante, et 1, 5 milliard d’euros supplémentaires à compter de 2022) destinés à l’apurement de la dette qu’il était envisagé de lui transférer dans une limite de 15 milliards d’euros. Symétriquement, en l’absence d’excédent des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, la loi de finances prévoit la suppression de la réduction à due concurrence de la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale.

Le désendettement de la sécurité sociale se poursuivra néanmoins à un rythme élevé. La prévision d’amortissement de dette par la CADES est fixée à 16, 7 milliards d’euros, après 16 milliards d’euros prévus en 2019 et 15, 4 milliards d’euros constatés en 2018. Fin 2020, la CADES devrait avoir remboursé près de 190 milliards d’euros de dettes depuis sa création, confortant l’objectif de remboursement de la totalité des dettes transférées restantes, soit 105, 3 milliards d’euros d’ici 2025. Ces niveaux sont très supérieurs à celui du déficit courant prévu par la loi (-5, 6 milliards d’euros sur le champ des ROBSS + FSV en 2020), ce qui permet de constater un désendettement effectif au niveau de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale.

II. – Cette trajectoire s’inscrit dans un cadre de maîtrise de la dépense, d’absence de hausses de prélèvement et de simplification des relations entre l’État et la sécurité sociale.

L’année 2019 a été marquée par une importante évolution du financement de la sécurité sociale du fait de la mise en place de la réduction de 6 points de cotisations d’assurance maladie pour les rémunérations inférieures à 2, 5 fois le SMIC en substitution du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et du crédit d’impôt de taxe sur les salaires (CITS). En outre, depuis le 1er octobre (le 1er janvier pour certains secteurs), les allégements généraux de cotisations sociales ont été renforcés au niveau du SMIC afin d’encourager la création d’emploi. Ils portent désormais sur les contributions d’assurance chômage et de retraite complémentaire. Ainsi, au niveau du SMIC, plus aucune cotisation ou contribution sociale, payée habituellement par toutes les entreprises, n’est due, à la seule exception de la cotisation au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles pour la part correspondant à la sinistralité des entreprises. Le PLFSS pour 2020 ne revient pas sur ce schéma.

Le PLFSS ne prévoit par ailleurs aucune mesure significative de hausse des cotisations ou contributions dues par les employeurs ou les entreprises. Il est toutefois prévu de limiter l’effet favorable de la déduction forfaitaire spécifique (DFS), abattement d’assiette originellement représentatif des frais professionnels dans certains secteurs, sur la réduction générale de cotisations employeurs qui a été renforcée dans la LFSS 2018 et qui exonère, à compter du 1er octobre 2019, l’employeur de la totalité des cotisations patronales pour l’emploi d’un salarié au SMIC. Cet avantage sera plafonné à compter du 1er janvier 2020 par voie réglementaire à 130 % des allègements généraux de droit commun. Cette mesure permettra de limiter les interférences entre différents dispositifs d’exonérations et se traduira par un effet positif sur les recettes d’environ 0, 4 milliard d’euros sans impact sur la rémunération nette des salariés.

Le projet de loi de finances prévoit de limiter le bénéfice de l’exonération de cotisations sociales dont bénéficient les micro-entrepreneurs créateurs d’entreprise pour qu’elles n’excèdent pas celles dont bénéficient les autres travailleurs indépendants, et se limitent à une année blanche de cotisations sociales pour la création ou la reprise d’une entreprise. Le coût de cette exonération étant compensé par le budget de l’État, cette mesure n’a pas d’effet direct sur les ressources des branches.

Conformément, par ailleurs, aux recommandations du rapport remis au Parlement en 2018 sur les relations financières entre l’État et la sécurité sociale, et à l’exception des suppressions de taxes à faible rendement, les baisses de prélèvements obligatoires décidées depuis 2019 sont supportées par l’État ou la sécurité sociale, en fonction de l’affectation de ces derniers, sans qu’il soit nécessaire ensuite de procéder à des transferts de compensation dans un sens ou dans l’autre.

Aussi, en cohérence avec la LFSS pour 2019, le PLFSS pour 2020 prévoit donc par exception à l’article L.131-7 du code de la sécurité sociale que ne feront pas l’objet d’une compensation budgétaire par l’État les pertes de recettes correspondant à l’exonération de cotisations salariales au titre des heures supplémentaires réalisées du 1er janvier au 31 août 2019 du fait de la loi portant mesures d’urgence économiques et sociales ainsi que la révision à la baisse du taux de contribution sociale généralisée (CSG) applicable aux retraités ayant un revenu fiscal de référence inférieur à 22 580 € pour une personne seule (34 636 € pour un couple).

Les mesures en dépenses porteront l’essentiel de l’effort pour corriger l’évolution des soldes des branches prestataires par rapport à leur évolution tendancielle. En effet, en dehors des dispositions revenant sur les affectations de recettes à l’État et la CADES à compter de 2020 déjà mentionnés, qui sont sans effet du point de vue des redevables de prélèvements sociaux, l’ensemble des mesures nouvelles en recettes n’a un impact positif qu’à hauteur de 0, 2 milliard d’euros pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale.

L’effort sur la progression des dépenses sera réalisé en particulier sur les dépenses d’assurance maladie entrant dans le champ de l’ONDAM. Par ailleurs, la revalorisation maîtrisée et différenciée des prestations versées par les branches famille et vieillesse limitera la progression des dépenses des branches prestataires en permettant, par rapport à une mesure générale d’indexation sur l’inflation, une économie de 0, 5 milliard d’euros à l’échelle de l’ensemble des régimes.

III. – D’ici 2023, l’ensemble des branches, à l’exception de l’assurance vieillesse, reviendrait à l’équilibre sur la base des mesures proposées dans le PLFSS 2020.

S’agissant de la branche Maladie, depuis 2019, les ressources de la CNAM ont été profondément transformées, du fait de l’affectation d’une fraction supplémentaire de TVA à la CNAM en contrepartie de la suppression de 6 points de cotisations d’assurance maladie pour les salaires inférieurs à 2, 5 SMIC. Du fait de cette affectation supplémentaire, la fraction de TVA affectée à la CNAM s’élève à 41, 1 milliards d’euros en 2019 et les impôts et taxes représentent désormais 28 % des ressources de la branche.

Cette structure des ressources sera peu modifiée en 2020. Les mesures en recettes de la LFSS amélioreront les ressources de la CNAM du fait de la suppression des affectations de recettes à la CADES et à l’État (3, 1 milliards d’euros), excédant le coût de la baisse de la CSG sur les revenus de remplacement (1, 6 milliard d’euros). Les mesures de limitation des niches sociales, notamment la limitation des allègements généraux dont bénéficient les rémunérations sur lesquelles s’applique la déduction forfaitaire spécifique (DFS) pour frais professionnels permettront un gain de 0, 1 milliard d’euros pour la branche Maladie, légèrement compensée par la limitation de la compensation par l’État de l’exonération des jeunes entreprises innovantes (JEI).

Au global, les mesures en recettes permettront un accroissement de ses ressources de 1, 6 milliard d’euros environ à compter de 2020.

L’objectif national de dépense d’assurance maladie est révisé pour 2020 et sa progression est portée de 2, 3 % à 2, 45 % pour tirer les conséquences des annonces du Gouvernement pour le réinvestissement de l’hôpital public annoncé par le Premier ministre et la ministre des solidarités et de la santé le 20 novembre 2019. Des financements supplémentaires sont ainsi fléchés sur l’hôpital, à hauteur de 1, 5 milliard d’euros sur trois ans, dont 300 millions d’euros supplémentaires dès 2020, soit une révision de l’ONDAM pour 2020, dont la progression est portée de 2, 3 % à 2, 45 %.

Ces 300 millions d’euros supplémentaires se traduisent par un relèvement du sous-objectif « Dépenses relatives aux établissements de santé », dont l’évolution s’établira à 2, 4 %.

Les mesures de revalorisation des aides-soignants, décidées en cohérence avec les travaux en cours sur le grand âge et l’autonomie, bénéficieront aux personnels hospitaliers comme à ceux du secteur médico-social, d’où un relèvement, également, du sous-objectif « Contribution de l’assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées.

S’agissant de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles, aucune mesure n’est prévue par le PLFSS pour 2020 pour modifier les ressources de la branche en 2020.

Le PLFSS pour 2020 permettra à cette branche de réaliser 0, 1 milliard d’euros d’économies en dépenses, du fait de la revalorisation différenciée des prestations sociales et de la suppression de la possibilité d’opter pour un versement des rentes en capital.

Ces mesures permettront à la branche de dégager un excédent de 1, 1 milliard d’euros en 2019 et de 1, 4 milliard d’euros en 2020, ce niveau de solde étant par la suite conventionnellement stabilisé sur 2021-2023.

La branche Vieillesse du régime général serait à nouveau déficitaire de 2, 1 milliards d’euros en 2019, après trois années en excédent, malgré des dépenses modérées par la revalorisation des pensions limitée à 0, 3 %. Ce déficit s’accroîtrait à 2, 7 milliards d’euros en 2020. En revanche, l’évolution en 2020 sera favorable en prenant en compte l’amélioration du solde du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) de -2, 3 milliards d’euros à -1, 4 milliard d’euros. Cette évolution contrastée résulte principalement de la fin du financement du minimum contributif par le fonds.

Au niveau de l’ensemble des régimes vieillesse de base, en tenant compte du FSV, le solde resterait inchangé en 2020 par rapport à 2019 à -4, 6 milliards d’euros.

Le PLFSS pour 2020 ne prévoit pas de mesure affectant significativement les ressources de la branche Vieillesse, à l’exception de la disposition prévoyant l’absence de compensation à cette branche du coût de l’anticipation au 1er janvier 2019 de l’entrée en vigueur de l’exonération de cotisations sociales au titre des heures supplémentaires, disposition qui n’a pas d’effet au-delà de la seule année 2019. En effet, pour 2020, la LFSS pour 2019 avait déjà prévu de compenser à cette branche le coût de l’exonération des cotisations salariales au titre des heures supplémentaires et complémentaires et de préserver ses recettes. L’assurance vieillesse bénéficiera à ce titre à compter de 2020 de l’affectation de ressources aujourd’hui affectées à la branche Famille à hauteur de 2 milliards d’euros.

En 2020, ses recettes bénéficieront comme celles de la branche Maladie de l’effet de la réduction du coût de la DFS (voir supra) pour un gain de 0, 1 milliard d’euros.

Les dépenses de la branche évolueront à un rythme supérieur à celui des recettes jusqu’en 2023, en dépit de la mesure de revalorisation différenciée des dépenses de prestations en 2020 dont la branche Vieillesse est la principale bénéficiaire puisque cette disposition permettra une économie en 2020 de 0, 3 milliard d’euros pour la branche Vieillesse du régime général et 0, 4 milliard d’euros pour l’ensemble des régimes de retraite.

De 2021 à 2023, le déficit de la branche Vieillesse s’accroîtrait progressivement pour atteindre -6, 6 milliards d’euros en fin de période (ROBSS+FSV). L’hypothèse retenue de revalorisation des pensions des régimes de base est à compter de 2021 celle de la prévision d’inflation pour l’ensemble des retraités.

Pour la branche Famille, en 2020, les recettes seront principalement améliorées sous l’effet de la suppression des affectations de recettes à la CADES et à l’État auxquelles la branche devait contribuer à hauteur de 1, 2 milliard d’euros. En contrepartie elles seront réduites, en application des dispositions de la LFSS pour 2019, déjà prises en compte, à hauteur de 2, 0 milliards d’euros correspondant au coût pour la branche Vieillesse des exonérations de cotisations salariales sur les rémunérations perçues au titre des heures supplémentaires.

Les dépenses seront ralenties en 2020 du fait de la revalorisation différenciée et maîtrisée des prestations servies par la branche, qui permettra une économie de 0, 1 milliard d’euros après 0, 3 milliard d’euros en 2019. Les charges seront en contrepartie accrues par les coûts inhérents au dispositif d’intermédiation des pensions alimentaires ainsi que par la réduction des frais de gestion supportés par l’État au titre des prestations servies pour son compte par la branche (– 0, 1 milliard d’euros).

Le solde de la branche sera positif : 0, 7 milliard d’euros en 2020, après 0, 8 milliard d’euros en 2019.

À compter de 2021, l’hypothèse retenue de revalorisation des prestations familiales est celle de la prévision d’inflation. Le solde de la branche serait amélioré sur la période 2021-2023, y compris en tenant compte des rééquilibrages entre branches envisagés et atteindrait 1, 6 milliard d’euros en 2023.

Prévisions des recettes, dépenses et soldes du régime général, de lensemble des régimes de base et du FSV

Recettes, dépenses et soldes du régime général

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