Intervention de Patricia Morhet-Richaud

Réunion du 2 décembre 2019 à 10h00
Loi de finances pour 2020 — Compte de concours financiers : prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

Photo de Patricia Morhet-RichaudPatricia Morhet-Richaud :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, en cette journée d’hommage national, je voudrais d’abord évoquer la mémoire des treize militaires morts au Mali, dont quatre soldats du quatrième régiment de chasseurs à Gap.

Permettez-moi à présent de saluer le travail des différents rapporteurs des crédits de la mission « Économie » du projet de loi de finances pour 2020. Il s’agit d’un sujet auquel je suis très sensible en tant que membre de la commission des affaires économiques et de la délégation sénatoriale aux entreprises.

Mais c’est surtout la représentante d’un territoire rural et de montagne qui s’exprime devant vous aujourd’hui, car l’économie des territoires est abandonnée par l’État.

Bien entendu, sur le papier, l’économie relève désormais de la compétence des régions. Mais, dans nos communes, dans nos vallées et dans nos campagnes, l’artisanat et les petits commerces sont à la peine, car les régions aident prioritairement des secteurs d’activité stratégiques.

Qui d’autre que l’État peut être garant d’une équité territoriale ?

Selon que vous habitez dans telle ou telle commune, selon que vous êtes en Auvergne-Rhône-Alpes ou en région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur, vous n’aurez pas les mêmes aides et vous ne bénéficierez pas du même dispositif d’accompagnement.

C’est pourquoi il est important que l’État ne se désengage pas de l’économie des territoires au profit des seules régions. Je pourrais aussi évoquer les collectivités « XXL », qui sont plus préoccupées par les métropoles et par les grandes agglomérations et qui doivent être plus attractives pour les investisseurs et plus compétitives pour rivaliser, notamment, avec leurs voisines européennes.

Je ne peux me résoudre à la diminution des crédits du Fisac, que j’avais déjà dénoncée l’an dernier. Le programme Action cœur de ville ne saurait remplacer à lui seul ce fonds d’intervention, qui a permis de sauver de nombreux commerces de proximité et de maintenir un semblant de vie économique dans nos campagnes.

En effet, le programme Action cœur de ville ne concerne que 222 villes et ne cible pas les mêmes opérations. Il concerne des villes, certes « petites » – ce sont d’ailleurs souvent des sous-préfectures –, mais qui ne sont pas confrontées avec la même intensité aux problématiques de désertification commerciale que les petites communes rurales. Ces dernières cumulent les handicaps.

Je voudrais également dénoncer la baisse significative des crédits alloués aux métiers d’art. Alors que nous devons reconstruire Notre-Dame de Paris et qu’une souscription nationale a été lancée, la dotation budgétaire de l’Institut national des métiers d’art (INMA) et de l’Institut supérieur des métiers (ISM) est nulle en 2020. Cette incohérence entre les annonces et les actes doit être soulignée et corrigée.

En effet, au-delà d’un patrimoine immatériel faisant partie de notre culture, les 281 métiers recensés actuellement doivent être encouragés et tout doit être mis en œuvre pour qu’ils puissent recruter de nouveaux talents. Alors que nous avons besoin des savoir-faire et de l’excellence française dans de nombreux domaines d’activité, il n’est pas envisageable de faire des économies au détriment des métiers d’art.

En tant que sénatrice d’un département de 140 000 habitants, je souhaite également évoquer les chambres de commerce et d’industrie, notamment pour tirer la sonnette d’alarme sur l’avenir des CCI hyper-rurales.

La loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, a entraîné une transformation du modèle économique des CCI consistant désormais à déployer une démarche commerciale. Mais la baisse de financement ne pourra être que partiellement compensée par le développement de prestations tarifées.

En effet, les entreprises ayant besoin d’un accompagnement ne pouvant pas s’offrir des prestations trop onéreuses, les CCI ne pourront donc proposer que des tarifs peu élevés. Ceux-ci seront insuffisants pour compenser la baisse de taxe pour frais de chambre (TFC).

Dans ce contexte, alors que les TPE et PME sont redevables de la TFC, elles devront désormais payer pour des services qui étaient auparavant gratuits. Certaines entreprises se retrouveront même en concurrence avec les CCI sur des secteurs d’activité, alors qu’elles financent ces CCI par la TFC et que ces dernières pourront proposer des prix plus avantageux. Le réseau ne pourra donc plus remplir ses missions de service public de proximité complet et permanent, rôle essentiel pour le tissu économique local.

Si j’ajoute à tout cela la trop faible part de crédits alloués au plan France Très haut débit, je considère qu’en l’état ce budget ne répond pas aux attentes des entreprises, des artisans et des territoires ruraux.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion