Intervention de Christine Lavarde

Réunion du 2 décembre 2019 à 10h00
Loi de finances pour 2020 — Investissements d'avenir

Photo de Christine LavardeChristine Lavarde :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me fais le porte-parole de Jean Bizet, qui a pris ma suite comme rapporteur spécial pour les crédits de la mission « Investissements d’avenir ».

Je suis heureuse de constater que les crédits demandés pour 2020 s’élèvent à 2 milliards d’euros, soit près du double du montant qui a été voté l’année dernière. Cela témoigne incontestablement de la montée en puissance du troisième programme d’investissements d’avenir, le PIA 3. La nouvelle programmation triennale prévoit ensuite une stabilisation autour de 2 milliards d’euros en 2021 et 2022.

Au-delà de cette augmentation des crédits, nous pouvons affirmer qu’après un démarrage relativement poussif le PIA 3 est désormais pleinement mis en œuvre. Quatre chiffres en témoignent : 90 % des autorisations sont consommées, 26 conventions État-opérateurs ont été signées sur 27, 820 projets sont aujourd’hui en phase active, donnant lieu à un investissement de 1, 7 milliard d’euros.

Le PIA 3 est composé d’un nombre important d’actions qui permettent le financement de très nombreux projets. Il me sera donc impossible de les évoquer un par un. Je peux en revanche remarquer que la majorité des actions du PIA 3 ont pour objet de soutenir la recherche et de la valoriser.

Jean Bizet tenait à s’arrêter sur l’action « Programmes prioritaires de recherche », qui illustre bien les forces et les faiblesses du modèle des programmes d’investissements d’avenir. Dotée de 400 millions d’euros, cette action traduit bien l’esprit des PIA : l’État stratège fixe le cap en matière de recherche fondamentale, en définissant les principaux chantiers qui seront éligibles à un financement ; l’Agence nationale de la recherche (ANR) est l’opérateur chargé de mettre en œuvre cette ambition.

Nous nous félicitons que figure le chantier de l’intelligence artificielle. L’Europe et la France ont accumulé trop de retard dans ce domaine ; le concours de 75 millions d’euros apporté par le PIA 3 à la constitution des nouveaux instituts interdisciplinaires d’intelligence artificielle (3IA) n’est donc pas de trop. Une certaine dispersion – pour ne pas dire un saupoudrage – des fonds publics en faveur de l’intelligence artificielle peut toutefois être déplorée.

Nous sommes plus dubitatifs quant à la thématique « Recherche dans le domaine du sport de très haute performance », qui se voit dotée de 20 millions d’euros au sein de cette même action. Ce domaine ne semble pas parfaitement intégré aux objectifs du PIA.

Il en va de même, cette fois dans le domaine culturel, du projet, repoussé mais pas enterré, de financer la rénovation du Grand Palais par les crédits du PIA. La commission des finances est vivement opposée à ce type de détournements.

Il ne s’agit pas de remettre en cause le bien-fondé d’un soutien public à de telles initiatives ; nous constatons simplement que les actions du PIA 3 ne constituent pas l’instrument adapté. Rappelons que les PIA ont été instaurés de manière à accroître le potentiel de croissance de l’économie française en investissant dans des chantiers prioritaires définis par un État stratège, et non pour concourir au financement d’événements ponctuels ou à la rénovation de notre patrimoine.

L’année 2020 marquera le dixième anniversaire du premier PIA ; il est donc l’heure d’en tirer un premier bilan. Celui-ci nécessite une évaluation minutieuse et complexe.

En 2010, le PIA 1 avait été présenté comme une initiative exceptionnelle, un grand emprunt visant à investir dans l’avenir et à tourner la page de la crise. Dix ans et deux PIA plus tard, on pourrait craindre une certaine forme de banalisation de l’exceptionnel. Le secrétariat général pour l’investissement, ainsi que les opérateurs, tendent au contraire à considérer que c’est précisément cette stabilité qui fait la force du dispositif : elle contribue à faire du label PIA un repère que les agents économiques se sont approprié et qui tend à apporter de la crédibilité au soutien public à l’innovation de long terme. C’est ce débat qu’il faudra trancher.

En l’état, la commission vous propose d’adopter sans modification les crédits de cette mission.

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