Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je serai bien moins agréable que mes collègues. L’an dernier, dans l’attente de nos débats sur la loi Pacte, la commission des affaires économiques avait émis un avis de sagesse sur les crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ». De nombreuses interrogations avaient alors été exprimées, qui persistent toutefois. Dès lors, la commission a émis un avis défavorable sur les crédits de ce compte cette année. Deux raisons principales président à ce choix.
La première raison est de forme. L’information fournie au Parlement est toujours aussi lacunaire. Nous n’avons pas d’informations sur les moyens de fonctionnement de l’Agence des participations de l’État et d’importantes masses financières sans lien avec l’action de l’APE transitent par ce compte, comme la recapitalisation des banques multilatérales de développement.
Par ailleurs, les crédits qui figurent dans ce compte sont présentés de façon notionnelle, autrement dit fictive, pour des raisons de confidentialité. Si nous comprenons la nécessité de la confidentialité, nous souhaiterions tout de même que l’information du Parlement se fasse, d’une façon ou d’une autre.
La seconde raison est de fond. L’atrophie progressive du portefeuille de l’APE est inquiétante. L’État opère actuellement un recentrage de son portefeuille sur un nombre très réduit d’actifs : EDF représente aujourd’hui la moitié de la valeur de son portefeuille. Or cela prive l’État de marges de manœuvre dans le cas où des liquidités seraient requises de façon urgente pour protéger une entreprise fragile ou menacée.
Surtout, le fameux fonds pour l’innovation et l’industrie, qui est alimenté par le produit des cessions et doit générer un rendement de 250 millions d’euros par an, se révèle de plus en plus un tour de passe-passe budgétaire. Les 10 milliards d’euros résultant de ces cessions seront placés en bons du Trésor : les 250 millions d’euros en question seront donc, de fait, versés par l’État lui-même, à un taux bien supérieur à celui du marché, alors qu’il perd de l’autre côté les dividendes des entreprises privatisées.
En outre, M. le ministre de l’économie et des finances nous expliquait, au cours de nos débats sur la loi Pacte, que le financement de l’innovation serait ainsi plus stable que ne le permettrait un financement par les dividendes. Or il est maintenant prévu pour 2023 une clause de revoyure qui permettra de diminuer le rendement de ce fonds s’il se révèle supérieur à celui du marché, ce qui est plutôt de bonne gestion, mais ne manquera pas d’arriver. Même la stabilité du financement n’est donc à ce jour plus garantie.
Entre temps, le Parlement perd son pouvoir de contrôle, puisque les subventions budgétaires à l’innovation diminuent au profit de ce fonds, qui échappe pour sa part totalement à notre contrôle.
Telles sont, mes chers collègues, les raisons qui ont conduit la commission des affaires économiques à émettre un avis défavorable à l’approbation de ce compte.