Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les contraintes de l’ordre du jour nous obligent à examiner en une seule et même discussion les crédits de trois missions qui touchent à des sujets différents et dont les budgets additionnés s’élèvent à près de 200 milliards d’euros.
J’observe d’ailleurs que l’Assemblée nationale a retenu un découpage différent, ce qui témoigne de la porosité de cette discussion avec celle que nous venons d’avoir sur les crédits de la mission « Économie » et celle qui suivra sur le budget des administrations de Bercy et le patrimoine immobilier de l’État.
Voici, en résumé, ce qui caractérisera ces différentes missions en 2020 : une hausse marquée des restitutions d’impôts aux particuliers et aux entreprises dans la mission « Remboursements et dégrèvements », une baisse significative de la charge de la dette dans la mission « Engagements financiers de l’État », la poursuite du Grand plan d’investissement dans la mission « Investissements d’avenir ».
En 2020, la mission « Remboursements et dégrèvements » concernera, d’une part, les restitutions d’impôts d’État, à hauteur de 118 milliards d’euros, d’autre part, les restitutions d’impôts locaux, pour 23 milliards d’euros.
Bien qu’il ne s’agisse que de crédits évaluatifs, le montant total, de l’ordre de 141 milliards d’euros, est très important. Cela est d’autant plus étonnant que ce montant n’a pas toujours été retracé dans les documents de présentation du projet de loi de finances transmis au début du mois d’octobre, même s’il est vrai que ce n’est pas à proprement parler une politique publique.
Les remboursements et dégrèvements sont en hausse continue depuis plusieurs années ; l’année prochaine ne fera pas exception. Comment comprendre cette évolution ? Est-elle due à un nombre croissant d’erreurs dans le recouvrement de l’impôt ou bien à de mauvaises déclarations par les contribuables ?
Notons en particulier le montant des restitutions pour le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu : 10 à 15 milliards d’euros ! Les restitutions portant sur la taxe d’habitation connaissent quant à elles la plus forte hausse – 28 % –, ce qui a d’ailleurs été souligné dans les médias au mois de septembre dernier. Faut-il y voir une conséquence directe de la réforme de la taxe d’habitation ?
Enfin, je suis frappé par le montant des remboursements de crédits de TVA, qui représentent la majeure partie de ce budget. Il est vrai que la TVA est la plus importante ressource de l’État.
Ces remarques émises, je ne vois pas de raison de nous opposer à l’adoption de ces crédits, puisqu’ils ne sont qu’évaluatifs, mais je serais heureux de recevoir quelques éclaircissements sur les points que je viens d’évoquer. Je n’ai pas d’observations particulières à formuler sur les articles rattachés, qui prévoient simplement la remise de rapports.
En ce qui concerne la mission « Engagements financiers de l’État », la charge de la dette, portée par le programme 117, s’établit à 38, 1 milliards d’euros, soit 4 milliards d’euros de moins que l’an dernier. Le passage sous la barre symbolique des 40 milliards d’euros est une bonne nouvelle de ce projet de loi de finances, sinon la seule. On ne peut toutefois pas parler de cagnotte, dans la mesure où le budget reste en déficit, et ce malgré des besoins réels dans certains domaines.
Conséquence de la situation monétaire favorable, l’endettement se stabiliserait à 98, 7 % du PIB, comme en 2019. C’est la première fois depuis la crise de 2008 que l’on constate une stabilisation, même si le niveau d’endettement reste élevé.
Aussi, le besoin de financement de l’État progressera encore en 2020, mais davantage pour rembourser les intérêts de la dette passée que pour financer le déficit.
Voilà donc quelques éléments d’amélioration, dans ce qui reste néanmoins le deuxième ou troisième poste de dépense.
Parmi les autres budgets notables attachés à cette mission, je relève le fonds de soutien aux collectivités ayant contracté des emprunts toxiques, la participation au mécanisme européen de stabilité et les quelque 264 millions d’euros versés sur le compte d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » ; autant de dispositifs dont les effets mériteraient d’être éclaircis dans un contexte de taux d’intérêt négatifs.
Le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » sera marqué par les privatisations approuvées dans la loi Pacte, dont nous connaissons tous les enjeux. Après des cessions d’un montant de 8 à 10 milliards d’euros, le portefeuille de l’État actionnaire sera sensiblement réduit.
L’enjeu majeur est désormais le financement et le bon fonctionnement du fonds pour l’innovation de rupture, devenu fonds pour l’innovation et l’industrie. Placé sous l’autorité de Bpifrance, il doit apporter un soutien aux projets innovants, à hauteur de 250 millions d’euros par an. Continuer à investir tout en se désendettant, voilà l’équation difficile que doit résoudre le Gouvernement.
J’en viens justement à la mission « Investissements d’avenir ». Depuis le lancement du premier PIA, voilà une décennie, par la commission Juppé-Rocard, 46 milliards d’euros ont été investis et plus de 6 000 projets ont été soutenus. Il me semble pertinent de continuer à soutenir ce budget qui finance des projets innovants, d’autant que l’investissement représente globalement une part réduite du budget de l’État.
Il faut, en particulier, améliorer l’effet de levier du PIA 3, afin de le rapprocher de celui du Plan d’investissement pour l’Europe lancé par l’ancien président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, qui a obtenu des résultats très positifs.
J’ai formulé un certain nombre de remarques et d’interrogations au sujet desquelles je serais heureux d’obtenir des éclaircissements de la part du Gouvernement. Cela étant, en principe, mon groupe devrait approuver les crédits de ces différentes missions, à moins qu’ils ne soient profondément modifiés par l’adoption d’amendements.