Intervention de Yannick Botrel

Réunion du 2 décembre 2019 à 10h00
Loi de finances pour 2020 — Investissements d'avenir

Photo de Yannick BotrelYannick Botrel :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de faire une observation liminaire sur la mission « Remboursements et dégrèvements ». Ses crédits s’élèvent à 141 milliards d’euros, soit une augmentation de plus de 5 milliards d’euros par rapport à l’année précédente. La tendance haussière se poursuit donc depuis 2010.

J’en viens maintenant aux crédits des trois missions.

Les crédits du programme 200, « Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État », augmentent de 1, 5 milliard d’euros. Cette hausse globale de 1, 68 % recouvre des variations, dont les causes sont diverses. Vos explications seraient les bienvenues à cet égard, monsieur le ministre.

Toutefois, les indicateurs peuvent être questionnés. La cible, concernant les demandes de remboursements de crédits de TVA et de restitutions de trop-versé d’impôt sur les sociétés, est fixée à 80 %. Or cette cible, qui était de 89, 9 % en 2017 et de 88, 3 % en 2018, est en nette diminution. On peut donc s’interroger sur la validité du taux retenu, sur un sujet qui pourrait entraîner des tensions sur la trésorerie des entreprises.

Par ailleurs, les crédits du programme 201, « Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux », augmentent une nouvelle fois de près de 3, 2 milliards d’euros, ce qui représente une progression de plus de 16 %. Les remboursements et dégrèvements liés à la taxe d’habitation, qui s’élèvent désormais à 14, 7 milliards d’euros, constituent la majeure partie de la dépense, manifestement du fait de la réforme de la taxe d’habitation.

Ainsi, ces remboursements et dégrèvements devraient représenter un tiers environ des recettes fiscales brutes correspondantes. Cette proportion, en constante augmentation, met en évidence que la politique fiscale repose essentiellement sur des décisions de nature à grever les ressources de l’État et à entraver ses marges d’action. Un réexamen des choix politiques qui sous-tendent ces évolutions nous semble d’évidence justifié.

Au regard de ces éléments globaux et malgré les réticences que je viens d’exprimer concernant notamment les orientations politiques du Gouvernement, le groupe socialiste et républicain votera en faveur de l’adoption des crédits de cette mission.

Les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État » diminuent de 9, 36 %, passant de 42, 3 milliards à 38, 3 milliards d’euros. Le programme 117, « Charge de la dette et trésorerie de l’État », représente 99, 5 % des crédits à lui seul, avec un total de 38 145 milliards d’euros pour 2020, soit une baisse de 9, 3 %. Cette situation s’explique mécaniquement par la baisse des taux d’intérêt et par les taux négatifs, qui allègent la charge de la dette pour l’année 2020.

Bien qu’il y ait évidemment lieu de se réjouir de cet état de fait positif pour les finances publiques, nous ne devons pas nous laisser gagner par une euphorie anesthésiante ! Vous le savez, mes chers collègues, la faiblesse actuelle des taux est atypique et nul ne peut raisonnablement prédire combien de temps elle durera.

Les engagements hors bilan et les engagements implicites de l’État présentent également des risques. Les premiers ont été multipliés par trois ces quinze dernières années. Les moyens de contrôle du Parlement sur ces engagements sont très limités. Le Gouvernement doit donc fournir les informations nécessaires au Parlement afin de lui permettre d’apprécier pleinement la situation, s’agissant en particulier de la dette de l’État. J’ai d’ailleurs interrogé à ce sujet le rapporteur général de la commission des finances du Sénat.

Pour autant, le groupe socialiste et républicain votera les crédits de cette mission.

La mission « Investissements d’avenir » retrace les crédits du troisième programme d’investissement (PIA 3), adopté en 2017 et doté de 10 milliards d’euros pour la période 2018-2022.

Pour 2020, les crédits demandés s’élèvent à 2, 18 milliards d’euros, alors que le montant initialement inscrit était de 1, 88 milliard d’euros. Le Gouvernement s’écarte donc de la trajectoire budgétaire du PIA 3, puisqu’il dépasse le plafond de 4 milliards d’euros prévu sur la période triennale 2018-2020.

D’une part, le programme 421, « Soutien des progrès de l’enseignement et de la recherche », est doté de 435 millions d’euros de crédits de paiement pour 2020. D’autre part, le programme 422, « Valorisation de la recherche », est doté de 620 millions d’euros en crédits de paiement.

En dépit d’une hausse apparente de plus de 43 % du programme, les crédits de paiement à destination des opérateurs de l’État sont néanmoins en baisse. En effet, l’Agence nationale de la recherche a reçu 185 millions d’euros en 2019, alors que 115 millions d’euros sont prévus pour 2020. L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) est également affectée, le projet de loi de finances pour 2020 prévoyant de lui accorder 37 millions d’euros en crédits de paiement, contre 40 millions d’euros antérieurement.

Les deux opérateurs chargés d’atteindre les deux objectifs du programme – faciliter l’approche de l’innovation et soutenir les investissements concourant au renforcement de la performance environnementale dans le parc industriel – voient leurs moyens diminuer par rapport à l’exercice antérieur. Nous regrettons fortement ces baisses sans justification apparente, alors que les enjeux sont particulièrement stratégiques.

Compte tenu de ces éléments, le groupe socialiste et républicain s’abstiendra sur les crédits de cette mission.

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