Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à titre personnel, je suis opposé à l’adoption des crédits de la mission sur laquelle vient de s’exprimer M. Claude Nougein, au nom de la commission des finances, même si la réorganisation des deux administrations de réseau est une nécessité, compte tenu des évolutions en cours. En effet, je ne partage pas la méthode employée par le Gouvernement. L’abandon en rase campagne, en 2000, de la réforme des administrations fiscales devrait inciter à la prudence : une réforme ne se fait pas sans l’appui des agents ou des nombreux élus locaux.
La mission « Action et transformation publiques », créée en 2018 et pour cinq ans, est censée constituer le vecteur budgétaire du Grand plan d’investissement et de la démarche de rationalisation engagée par le comité Action publique 2022. Nous estimons que, cette année encore, le risque de sous-exécution des crédits est criant. L’an dernier, le Gouvernement nous avait répondu que cette sous-exécution était due à la nouveauté de la mission et à la complexité des projets qu’elle met en œuvre. Nous espérions des progrès ; cela ne semble pas être le cas. Je suis surpris de constater qu’une mission qui est supposée aller vite et participer à la transformation de nos administrations mette autant de temps avant d’atteindre sa pleine vitesse d’exécution.
Claude Nougein et moi-même avons pu noter que les fonds prévus dans les différents programmes de la mission venaient, dans les faits, compenser l’insuffisance des crédits inscrits sur les programmes traditionnels. Cela explique que le critère de sélection des projets, fondé sur les économies attendues, ait été partiellement abandonné.
Par conséquent, sur cette mission, la commission des finances souhaite s’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée. Il nous semble, en effet, qu’elle relève davantage d’un affichage politique, d’une stratégie de communication que d’un réel effort budgétaire. J’en veux pour preuve le très fort risque de sous-exécution budgétaire en 2019, mais M. le secrétaire d’État pourra sans doute nous éclairer à ce sujet.
Passons maintenant au compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».
Ce patrimoine couvre 97 millions de mètres carrés, pour une valeur comptable estimée à 63 milliards d’euros. Il est pourtant mal géré et victime de la faiblesse de la direction immobilière de l’État (DIE) à l’échelon interministériel. Je rappelle que la DIE est sans pilote depuis l’été dernier. Ce CAS a vocation à financer les opérations structurantes et d’entretien lourd du patrimoine immobilier de l’État. Pourtant, en dépit de la situation peu satisfaisante de notre parc immobilier, les dépenses sont pour l’essentiel limitées aux recettes dont bénéficie le compte. Il en résulte un déficit répété et un défaut d’entretien, malgré un rebond attendu en 2019.
Pour toutes ces raisons, la commission des finances recommande depuis plusieurs années de diversifier les modes de valorisation du patrimoine immobilier de l’État. Une mission sur ce sujet, récemment prolongée, a été confiée à M. Délion, mais il semble que le Gouvernement soit très frileux à l’idée de basculer vers une nouvelle stratégie patrimoniale.
Là encore, M. le secrétaire d’État pourra sans doute nous éclairer. Nous considérons que les crédits consacrés par le CAS au Grand plan d’investissement relèvent de l’affichage. Les dépenses sont censées participer à la transition énergétique par la rénovation des bâtiments, mais nous n’avons aucun indicateur en la matière. Pire encore, l’administration n’est pas capable de définir avec précision le montant des crédits consacrés à ces travaux de performance énergétique ! Vous admettrez, monsieur le secrétaire d’État, que nous sommes encore loin du « budget vert ».
Nous regrettons enfin que les règles de gestion du CAS soient régulièrement contournées, que ce soit par le non-reversement de la moitié des produits de cession au CAS ou par l’octroi d’avances aux occupants. Ainsi, 100 millions d’euros ont été versés au ministère des affaires étrangères ou 6 millions d’euros versés à l’Élysée sur la promesse de cessions futures de bâtiments, le tout dans une information la plus déficiente.
Dans la mesure où nous constatons que l’État n’a pas de politique immobilière clairement affichée, la commission des finances a décidé de rejeter les crédits du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État », pour lancer un signal fort au Gouvernement
Je conclurai par la mission « Crédits non répartis ». Le programme 551, « Provision relative aux rémunérations publiques », fait de nouveau l’objet d’une ouverture de crédits, à hauteur de 16 millions d’euros pour 2020.
Il est satisfaisant de constater que les crédits correspondant à la revalorisation du barème de remboursement des frais de repas aient été répartis en seconde délibération à l’Assemblée nationale. En revanche, vous en conviendrez, monsieur le secrétaire d’État, il était surprenant que ces crédits fussent inscrits au titre 2 alors qu’ils concernaient des dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel. Quand aura lieu la répartition des crédits relatifs à la revalorisation du régime indemnitaire des agents de la filière sociale, prévus pour 2020, ainsi que celle des 24, 7 millions d’euros restés inscrits pour l’année 2019 ?
Les crédits du programme 552, « Dépenses accidentelles et imprévisibles », s’élèvent quant à eux à 124 millions d’euros, comme en 2018 et 2019.