Intervention de Christian Cambon

Réunion du 2 décembre 2019 à 21h45
Loi de finances pour 2020 — Défense

Photo de Christian CambonChristian Cambon :

Non, ce n’est pas le soleil d’Austerlitz que nous célébrerons aujourd’hui, cher Olivier Cigolotti ! Car nous vivons un jour d’une immense tristesse, un jour de compassion dont la mémoire collective gardera le souvenir.

La Nation, endeuillée, a pleuré aujourd’hui ses treize héros morts pour la France et, en cet instant, j’aurai, comme nous tous, madame la ministre, mes chers collègues, une pensée particulière pour ces hommes formidables, mais aussi pour leur famille, dévastée par la tristesse, et pour leurs camarades de combat et de régiment. Je pense tout spécialement à Jean-Marie Bockel, qui aurait dû être parmi nous ce soir et que nous avons accompagné, avec compassion, cet après-midi.

En ces instants, nous pensons aussi aux 30 000 hommes et femmes qui sont déployés en opération, sur le territoire national comme à l’extérieur.

J’aime cette pensée de Thucydide, rappelée par le général Lecointre : « La force de la cité ne réside ni dans ses remparts ni dans ses vaisseaux, mais dans le caractère de ses citoyens ». Nous mesurons pleinement aujourd’hui, par la dignité des familles et des frères d’armes endeuillés, la justesse d’une telle affirmation.

Oui, mes chers collègues, l’excellence de nos armées provient surtout de la qualité des femmes et des hommes qui les servent : aviateurs, marins, soldats, qui ont en partage les valeurs militaires de respect, d’abnégation, de solidarité, de courage, valeurs qui irriguent et fortifient l’ensemble de la Nation.

Dans un monde « ensauvagé » par des crises toujours plus nombreuses et plus violentes, pour voir clair dans le brouillard de la guerre, dans la poussière des conflits, des guérillas, face à la brutalité du terrorisme, nos forces armées sont un rempart et une boussole.

C’est pour elles que le Sénat a adopté, à une écrasante majorité, la loi de programmation militaire. C’est pour elles que, nous, sénateurs, nous sommes institués, en quelque sorte, en garants de l’exécution de ce texte.

Le présent projet de loi de finances nous met indiscutablement sur la trajectoire prévue par la loi de programmation militaire.

Les nouveaux matériels arrivent – les rapporteurs ont amplement détaillé ce point : MRTT Phénix, drones Reaper, blindés Griffon et, bientôt, Jaguar, sous-marin Barracuda, hélicoptères Caïman, satellite Musis, et bien d’autres !

L’effort sur la condition du personnel et les infrastructures se poursuit. Les problèmes d’attractivité et de fidélisation, bien que non entièrement résolus, sont pris en compte.

Tout n’est pas parfait, mais nous sommes vraiment sur une bonne trajectoire, et je veux à mon tour, madame la ministre, vous rendre hommage et saluer votre détermination sans faille et votre pugnacité pour obtenir ces résultats.

Nous aurions pu donner un quitus total au Gouvernement, si, bien sûr, les conditions de l’exécution budgétaire de 2019, après celles de 2018, ne posaient pas quelques questions et n’étaient pas venues assombrir un peu le tableau.

En effet, majorer les crédits en loi de finances initiale est une chose. Encore faut-il tenir cet engagement sur l’exécution !

Comme l’an passé, de ce point de vue, un bémol doit être apporté : 70 millions d’euros ont été annulés dans le collectif sur la mission « Défense ».

En outre, pour le financement du surcoût des OPEX, le Gouvernement a pratiqué la solidarité ministérielle inversée. Alors que le Sénat avait rétabli, dans la loi de programmation militaire, le principe d’un financement interministériel de ce surcoût, c’est l’inverse qui s’est produit : la défense a dû financer le surcoût des mesures liées à la crise des « gilets jaunes » et 284 millions d’euros sont passés à la trappe !

Vous me demanderez – et je ne suis pas loin de comprendre ce point de vue – si cela importe dans un budget de 37, 5 milliards d’euros, en hausse de 1, 7 milliard d’euros.

Ce n’est pas cette année qui nous inquiète, madame la ministre. Ce sont les années suivantes ! En 2019 et en 2020, si nous donnons quelques petits coups de canif dans le contrat, qu’en sera-t-il lorsque nous en serons à la seconde partie de la loi de programmation militaire, à partir de 2022, avec des marches aussi redoutables que 3 milliards d’euros d’augmentation de crédits chaque année ?

Nous serons vigilants sur ce point et, d’une certaine manière, c’est vous aider à maintenir le cap et à faire en sorte que les derniers arbitrages budgétaires de fin d’année ne portent pas atteinte à la sincérité des votes de notre assemblée.

Nous le savons tous, et nous en avons eu la preuve au cours des derniers jours, les militaires donnent beaucoup à la Nation : leur vie, parfois, et toujours leur engagement ; leur temps, aussi, au détriment de leurs familles. Ils le font avec enthousiasme ! Ils le font avec fierté ! Nous, les politiques, nous leur devons le respect de la parole donnée ! C’est une véritable question de confiance !

C’est pourquoi, encore une fois, nous souhaitons vous soutenir dans vos efforts pour maintenir le cap de ce budget, madame la ministre.

Au vu de toutes ces considérations, des efforts déjà accomplis par le Gouvernement, et malgré les éléments que j’ai souhaité rappeler, mon groupe votera ce budget.

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