Séance en hémicycle du 2 décembre 2019 à 21h45

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à vingt heures dix, est reprise à vingt et une heures quarante, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Mes chers collègues, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande le retrait de l’ordre du jour du projet de loi autorisant l’approbation de la convention d’entraide judiciaire en matière pénale et de la convention d’extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Burkina Faso, dont l’examen était prévu le mercredi 18 décembre, et l’inscription, le même jour, des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique.

Acte est donné de cette demande.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Nous reprenons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2020, des différentes missions.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Défense ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après l’émouvant hommage rendu cet après-midi à nos militaires, la discussion du budget de nos armées peut paraître en décalage avec l’émotion que nous avons vécue.

Ce budget traduit des moyens et sans doute une ambition, mais l’engagement de nos militaires, lui, est d’une tout autre nature et d’une tout autre essence : il relève d’une certaine forme de transcendance.

Je salue leur mémoire et je m’associe à la peine de leurs familles et de leurs compagnons.

Madame la ministre, alors que vous avez été ces dernières heures au plus proche de ceux qui sont dans la douleur, je vous adresse toute notre sympathie.

Parce que plus que jamais, notre devoir est de donner à nos troupes et au pays les moyens d’agir, abordons ce budget avec lucidité et objectivité. Le projet de budget pour les armées est conforme à la loi de programmation militaire (LPM) : il progresse de 1, 7 milliard d’euros en crédits de paiement, comme prévu, à quelques ajustements de périmètre près.

Les principales évolutions portent sur la contractualisation de nombreuses opérations d’armement, comme le système de combat aérien du futur (SCAF).

La diminution des crédits du programme 212, « Soutien de la politique de défense », s’explique quant à elle par la mise en œuvre d’une nouvelle organisation budgétaire qui se traduit par le transfert au programme 146, « Équipement des forces » des crédits de programmes majeurs d’infrastructures adossés au programme d’armement et au programme 178, « Préparation et emploi des forces » des crédits destinés aux infrastructures à caractère opérationnel.

À ce stade, mes chers collègues, d’un strict point de vue budgétaire, nous ne pouvons que nous féliciter du respect de la programmation.

Pour autant, ce procès ce budget traduit certaines limites et faiblesses.

Celles, d’abord, de la LPM sur deux points particuliers : les autorisations d’engagement de la mission connaissent une progression très significative, de près de 20 %. Cette forte progression est une bonne nouvelle, mais comme nous avions eu l’occasion de le souligner, elle illustre la fragilité de la LPM, qui renvoie ultérieurement à 2022, soit à une prochaine mandature, la progression la plus importante des crédits de paiement.

Nous ne pouvons que rappeler que nous aurions préféré une montée en puissance plus linéaire. Il s’ensuit que le ratio de couverture des autorisations d’engagement par les crédits de paiement se dégrade de 10 points.

Le maintien en condition opérationnelle (MCO) demeure un sujet de préoccupation, malgré la réforme de la direction de la maintenance aéronautique (DMAé) et la mise en place de contrats dits « verticalisés ».

Je voudrais attirer votre attention sur trois points.

Notre première préoccupation a trait à la remontée en puissance des effectifs, sous le double effet des difficultés de recrutement et de la fidélisation des personnels. La mise en place d’une nouvelle politique de rémunération et d’une réforme du ministère pour en améliorer la productivité n’épuise pas l’intégralité du sujet.

L’instauration de la prime de lien au service en 2019, portée à hauteur de 12 millions d’euros en 2020, constitue une innovation bienvenue. Cette prime a été spécifiquement créée pour faire face à ces difficultés, même si les premiers résultats peuvent paraître contrastés. La question de la fidélisation doit inévitablement être replacée dans un contexte plus large, celui de l’amélioration générale de la condition militaire. De ce point de vue, la revalorisation indiciaire comme la réforme du système de retraite restent devant nous.

Le deuxième point de vigilance porte sur la coopération européenne. Le système de combat aérien du futur repose sur la coopération franco-allemande. Or si la volonté politique semble au rendez-vous, le dossier est loin d’être bouclé sur le plan industriel. Le parlement allemand doit être consulté : nul doute qu’il veillera à la protection des intérêts économiques des entreprises nationales.

Tout retard dans le projet aurait des conséquences graves sur la régénération de nos matériels et décalerait d’autant certains programmes comme le porte-avions qui succédera au Charles-de-Gaulle. Par ailleurs, une approche exclusivement industrielle qui reposerait sur la seule exigence de servir les différents constructeurs conduirait à reproduire les déboires que nous avons connus avec certains hélicoptères ou l’A400M.

Évoquant la coopération européenne, je ne puis passer sous silence la question plus large de nos alliances. La France est fondée à faire des propositions, et je comprends que l’on puisse s’interroger sur le positionnement de l’OTAN eu égard à une carte géopolitique en pleine mutation. Très certainement, le moment est venu pour nos partenaires européens de prendre la mesure que l’OTAN, à elle seule, n’est plus l’assurance de leur sécurité. Mais je ne suis pas certain que l’évocation de la « mort cérébrale » de l’Alliance atlantique soit le meilleur le moyen de poser le problème et de susciter leur adhésion…

Enfin, le dernier point de vigilance concerne le service national universel, le SNU. Le budget ne prévoit pas l’inscription de crédits budgétaires spécifiques. Le ministère a formé des cadres en 2019 et continuera à le faire en 2020, notamment dans le cadre de la Journée défense et mémoire nationales. S’il semble que le financement du SNU pourrait ne pas dépasser l’épaisseur du trait – si vous m’autorisez l’expression – en 2020, comme cette année, la question se posera véritablement en 2021.

Pour finir, madame la ministre, je souhaite aborder un motif de désaccord ou d’incompréhension.

Nous sommes face à un paradoxe : sous le précédent gouvernement, nous avions un budget primitif totalement insincère, en raison notamment d’une sous-évaluation des opérations extérieures (OPEX), mais une fin de gestion qui corrigeait ces errements en mobilisant la solidarité interministérielle. Aujourd’hui, en revanche, nous avons un budget primitif apparemment sincère, avec une meilleure prise en compte des OPEX, mais une fin de gestion qui affecte l’exécution budgétaire.

La commission des finances et la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées – je salue son président – se sont battues ici pour inscrire le principe du recours à la solidarité interministérielle à l’article 4 de la loi de programmation militaire. L’an dernier, au mépris de cette exigence du Parlement, le ministère a dû supporter l’intégralité du surcoût des OPEX sur ses propres crédits.

Cette année, vous récidivez. Mieux encore, le ministère doit participer à hauteur de 70 millions d’euros aux mesures dites « gilets jaunes » annoncées il y a un an. Et nous sommes toujours dans l’attente d’un dégel de 340 millions d’euros, tandis que le ministère supportera de nouveau l’intégralité du surcoût lié aux OPEX.

Je terminerai par où j’ai commencé.

Parce que nous devons plus que jamais marquer notre soutien à nos armées, je vous invite, mes chers collègues, malgré les faiblesses et les réserves que j’ai pu émettre, à voter ce budget respectueux de la loi de programmation militaire.

Parce que, face au drame que nos armées viennent de vivre, je ne pourrai pas comprendre que la logique budgétaire prévale sur la satisfaction des indispensables besoins de nos armées, j’en appelle à l’arbitrage du Président de la République pour que les crédits encore gelés soient dégelés. Nous comptons sur vous, madame la ministre, pour mener ce combat. Vous le savez, nous sommes à vos côtés !

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et LaREM.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le programme 146 est structurant pour nos armées, puisqu’il concerne l’équipement des forces et que son budget représente 27 % des crédits du ministère pour 2020. Avec 12, 6 milliards d’euros, il s’agit aussi du premier budget d’investissement de l’État.

Le fait majeur de ce deuxième budget de la nouvelle loi de programmation militaire est naturellement la poursuite de la hausse des crédits, conformément à la trajectoire prévue par la LPM. Globalement, nous vous en donnons acte, madame la ministre.

En revanche, nous sommes déçus par la fin de gestion pour 2019. En effet, c’est une chose d’augmenter les crédits en loi de finances initiale ; c’en est une autre de tenir ses engagements en exécution.

D’une part, 70 millions d’euros de crédits ont été annulés. D’autre part, des transferts de crédits sont une fois de plus nécessaires pour financer le surcoût des OPEX, alors que nous avions inscrit le principe du financement interministériel dans la LPM. C’est ce principe, énoncé clairement dans l’article que le Sénat a adopté en juillet 2018, qui n’a pas été respecté. Nous le regrettons.

Pour ce qui concerne le programme 146, ce sont donc 167 millions d’euros qui sont consacrés au financement de ce surcoût. Ce fait nous préoccupe à l’approche de la révision de la LPM en 2021.

Je veux également évoquer la question des coopérations avec nos partenaires européens sur lesquelles repose pour partie l’équilibre de la loi de programmation militaire. Il semble que les projets ont bien avancé avec nos partenaires allemands notamment pour le MGCS, Main Ground Combat System, et le SCAF. Nous avons suivi les discussions sur la motorisation pour laquelle il semble qu’un accord soit enfin trouvé, ce que vous pourrez peut-être nous confirmer. Une première étape est donc franchie.

Cela étant, il faudra que ce partenariat, dans lequel vous vous êtes pleinement engagée, continue d’avoir le même soutien politique. Au-delà des personnes qui peuvent changer – c’est le cas de votre homologue allemande – et des majorités qui peuvent évoluer, madame la ministre, pensez-vous que l’engagement de l’Allemagne dans ces grands programmes capacitaires s’inscrive désormais résolument dans la durée ?

Par ailleurs, le troisième projet franco-allemand que vous aviez annoncé, le nouvel avion de patrouille maritime, semble avancer plutôt lentement. Pouvez-vous nous dire si ce dossier est sur de bons rails ?

Enfin, vous le savez, nous sommes également très attachés à notre coopération avec les Britanniques dans le cadre des accords de Lancaster House, dont nous fêterons les dix ans à la fin de l’année prochaine. De quelles pistes disposez-vous, madame la ministre, pour relancer ce partenariat et envisager un Lancaster House II ?

Dans la mesure où mon amendement tendant à demander la remise d’un rapport annuel sur la défense européenne a été jugé irrecevable par le Sénat, alors même qu’un amendement similaire a été débattu à l’Assemblée nationale, j’aimerais savoir si vous seriez prête à vous engager à faire un point d’étape sur la mise en place d’une défense européenne, qui a été annoncée aujourd’hui par le commissaire européen Thierry Breton. Il y va tant de l’avenir de notre industrie de défense nationale que de notre sécurité.

M. le président de la commission des affaires étrangères et M. le rapporteur spécial applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vais maintenant vous lire l’intervention de mon collègue Cédric Perrin, co-rapporteur pour avis du programme 146 « Équipement des forces » :

« Madame la ministre, la hausse des crédits du programme sera perceptible en 2020, au travers de livraisons importantes et du niveau très élevé des commandes. Cela explique que notre commission soit favorable à l’adoption des crédits de la mission.

« Au-delà de ces éléments très positifs, je veux revenir sur le dossier très sensible du drone MALE – Medium Altitude Long Endurance. L’idée des coopérations européennes en matière capacitaire est simple et connue : en mutualisant les coûts de développement, d’une part, et en augmentant le nombre d’exemplaires produits du fait des besoins cumulés des différents pays européens participant au programme, d’autre part, on espère obtenir un matériel de meilleure qualité à un coût moindre.

« Évidemment, ces objectifs louables contrastent avec les difficultés inhérentes à tout partage de décision entre plusieurs pays. Les écueils sont de deux natures.

« Le premier est le risque de « sur-spécification » : on finit par chercher à produire un mouton à cinq pattes.

« Le second écueil a trait à la logique industrielle, c’est-à-dire, pour parler crûment, l’absence de logique industrielle qui conduit d’abord, pour un pays, à réclamer la partie sur laquelle il est le moins compétent pour chercher à monter en gamme et acquérir une compétence. Ensuite, il y a la logique de retour géographique qui consiste à toujours réclamer pour son industrie une part au moins égale à son apport dans le financement du programme.

« Quand on combine ces deux écueils, on rencontre les difficultés qu’a connues l’A400M. S’agissant de l’Eurodrone, toute la question est donc de savoir s’il est parvenu à éviter ces obstacles. Au terme de nos auditions, nous ne sommes pas rassurés sur ce point. Pouvez-vous nous dire, madame la ministre, où nous en sommes exactement ?

« Il semble notamment que le prix constitue une difficulté majeure : il pourrait être surévalué de près de 30 %. Notre inquiétude est que, à ce prix-là, les États participant au programme n’achètent pas, ou pas dans les quantités promises, sans même parler des perspectives d’exportation, qui seraient compromises si le prix se révélait trop élevé.

« La tentation peut alors exister, même pour les pays qui ont participé à ce programme, d’acquérir un matériel non européen ou, du moins, d’acheter un vecteur sur étagère pour y greffer une charge nationale. La faisabilité d’une telle solution de repli reste évidemment à expertiser, mais la question du coût a pris aujourd’hui une acuité particulière.

« Il reste quinze jours aux industriels et à la direction générale de l’armement (DGA) pour se mettre d’accord. Il faut souhaiter que ce dossier puisse évoluer favorablement, car, rappelons-le, l’Eurodrone doit être l’une des composantes du SCAF. C’est pourquoi nous souhaitons vous faire part de notre préoccupation et recueillir votre analyse actuelle sur le sujet. »

M. le président de la commission des affaires étrangères et M. le rapporteur spécial applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Allizard

Les crédits du programme 144, « Environnement et prospective de la politique de défense », augmentent : nous vous en donnons acte, madame la ministre, et cette hausse explique que nous soyons favorables à l’adoption des crédits de la mission.

Malgré cette évolution positive, je voudrais apporter une nuance et exprimer une réserve.

La nuance, légère, concerne les crédits pour les études amont : certes, ceux-ci progresseront de 62, 5 millions d’euros pour s’établir à 821 millions d’euros, mais cette progression est légèrement inférieure à ce qui était prévu dans la loi de programmation militaire de 2018. On attendait en effet à l’époque 832 millions de crédits pour les études amont en 2020.

Vous vous souvenez, madame la ministre, que nous avions justement souhaité inscrire cette trajectoire dans la LPM. Cet écart n’est pas considérable, mais, à l’approche de la révision de la loi de programmation de 2021 et de marches de progression beaucoup plus ambitieuses, ce décalage retient notre attention. Je m’interroge sur notre capacité humaine et technique à dépenser.

Quant à la réserve que je veux exprimer sur ces crédits, au nom de la commission des affaires étrangères, elle concerne la situation de l’Office national d’études et de recherches aérospatiales (Onera). Cet établissement incarne une forme d’excellence française en matière aéronautique.

Nous appelions l’an passé à en reconsidérer les moyens. En début d’année, nous avons cru avoir été entendus, puisque vous aviez semblé envisager des perspectives favorables lors de votre visite à l’Onera. Malheureusement, nous ne retrouvons pas cette inflexion dans le projet de loi de finances.

D’une part, la subvention n’évolue pas favorablement – elle est quasi stable –, d’autre part, nous entendons dire que l’Onera, contrairement aux années précédentes, ne serait plus exempté de la mise en réserve de crédits, ce qui diminuerait encore son budget disponible de 2 millions d’euros.

Par ailleurs, en cette période de hausse des crédits, on constate que l’Onera perdra 12 équivalents temps plein (ETP) en 2020.

Cette cure prolongée d’austérité budgétaire a des conséquences importantes sur les ressources humaines de l’Office. Une étude montre que, si l’on voulait rémunérer les personnels de l’Onera au montant auquel ils seraient payés à la DGA, il faudrait 5 millions d’euros supplémentaires pour combler l’écart, ce qui pose des problèmes en termes de masse salariale et de niveau de rémunération.

Rappelons que, dans le même temps, le budget de l’équivalent allemand de l’Onera progresse régulièrement. Il est passé de 130 millions d’euros au début de la décennie à 180 millions d’euros en 2017. Madame la ministre, nous avons du mal à comprendre cette situation, d’autant plus quand on entend dire qu’une partie des études sur le SCAF pourraient être confiées au DLR allemand plutôt qu’à l’Onera. Entendez-vous revoir à la hausse la subvention de l’Office ? L’excellence technologique de l’Onera sera-t-elle reconnue dans l’attribution des études du SCAF ?

Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC. – M. le président de la commission des affaires étrangères applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Boutant

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le niveau des menaces n’a pas diminué, comme nous en avons fait le constat au début de la semaine dernière. Il justifie les efforts entrepris dans le domaine du renseignement. Les crédits inscrits aux programmes 144 et 212 pour la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD) concrétisent ce renforcement.

Je formulerai deux observations.

Première observation, le projet de loi de finances pour 2020 traduit le lancement de programmes d’investissements capacitaires : les crédits s’accroissent de 13 % pour la DGSE et de 49 % pour la DRSD en autorisations d’engagement.

Pour la DGSE, cette hausse concerne principalement les grands programmes interministériels et la cyberdéfense, qui font également l’objet, en cours d’exercice, de transferts de crédits complémentaires des services du Premier ministre et des armées.

En effet, la France ne s’est pas dotée d’un service technique de renseignement comme la National Security Agency (NSA) aux États-Unis ou le Government Communications Headquarters (GCHQ) en Grande-Bretagne. Les grands programmes sont développés par la direction technique de la DGSE au profit de l’ensemble de la communauté du renseignement, et certaines capacités cyber sont partagées avec les armées. Il est donc logique que le financement de ces programmes soit mutualisé.

Pour la DRSD, l’enjeu est de renforcer les capacités, tant pour la mise en œuvre des missions de contre-ingérence que pour la détection et la réduction des vulnérabilités dans le secteur de la défense.

Dans l’un et l’autre des services, l’accent est également mis sur les capacités en termes de cyberdéfense.

Seconde observation, les améliorations constatées en matière de gestion des ressources humaines doivent être soulignées.

Les effectifs de la DGSE comme de la DRSD progressent conformément aux prévisions de la loi de programmation militaire. Grâce aux dispositions prises, tant pour améliorer la communication et le recrutement que pour fidéliser certains agents, y compris à travers un assouplissement des règles de rémunération, en 2020, la DRSD devrait combler l’important retard accumulé par rapport à son schéma d’emplois.

Toutefois, dans les deux services, la baisse significative des personnels militaires, qui est due à la difficulté des armées à fournir les personnels nécessaires après des années de déflation et à la difficulté actuelle de remontée en puissance, reste préoccupante, surtout au niveau des sous-officiers. Tous les postes ne peuvent pas être occupés par des civils contractuels, en particulier dans certaines spécialités ou pour pourvoir certaines fonctions déployées à l’extérieur dans les zones de guerre. Faudrait-il créer une filière « renseignement » au sein des armées, madame la ministre ?

Enfin, les difficultés de recrutement et de fidélisation dans les spécialités où le vivier est limité demeurent. Au-delà des rémunérations, le problème a un aspect structurel dans un certain nombre de spécialités. Il me paraît nécessaire que des politiques d’orientation et d’incitation soient mises en œuvre pour promouvoir les filières de formation scientifique et linguistique, ce qui permettrait de réduire ces tensions. Où en êtes-vous, madame la ministre, du dialogue avec les universités et les grandes écoles ?

M. le président de la commission des affaires étrangères applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Prunaud

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il me revient de présenter les conclusions de notre collègue et ami Jean-Marie Bockel sur le programme 178, « Préparation et emploi des forces », en ce jour si particulier pour lui et sa famille :

« Le programme 178 voit ses crédits de paiement augmenter de 13, 8 % par rapport à 2019 pour s’établir à 10 milliards d’euros, soit 1, 21 milliard d’euros supplémentaires en crédits de paiement. Cette progression profite aux opérations extérieures, dont le financement croît de 250 millions d’euros pour atteindre 850 millions d’euros.

« La poursuite du « resoclage » budgétaire des surcoûts des OPEX devait s’accompagner d’une hausse à due proportion de l’enveloppe globale des crédits du programme. Or tel n’est pas le cas, et les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2020 pour les OPEX seront encore insuffisants.

« Dans ce contexte, la commission des affaires étrangères recommande vivement que cette disposition soit enfin appliquée en 2020. L’autre facteur d’explication de la hausse du budget du programme 178 est le transfert de crédits d’infrastructures depuis le programme 212, soit 879 millions d’euros. La mise à disposition de ces crédits s’inscrit dans le cadre de la réforme visant à responsabiliser les commandements, qui seront en mesure de prioriser leurs besoins.

« Cette réforme redonne globalement des leviers aux commandants des bases de défense et aux armées sans pour autant remettre en question les structures organisationnelles des soutiens dont la « militarité » est réaffirmée pour restaurer la cohérence organique des armées.

« La contraction des crédits alloués à l’entretien programmé du matériel pour 2020 est surprenante au vu des résultats décevants en termes de disponibilité technique opérationnelle.

« La verticalisation et la globalisation des marchés d’entretien des équipements aéronautiques constituent un changement de pratique qui ne fonctionnera que si la performance est au rendez-vous.

« Il conviendra également de veiller au maintien des compétences en régie de l’État et des possibilités de mise en concurrence ultérieure. »

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Prunaud

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’activité opérationnelle, gage de l’excellence et de la sécurité de nos militaires, reste inférieure de près de 10 % aux objectifs fixés.

La commission des affaires étrangères le déplore et s’inquiète, car la remontée tarde : les jeunes équipages de l’armée de l’air peinent à se qualifier, l’entraînement est un enjeu majeur de la marine, et l’opération Sentinelle pèse sur la capacité d’entraînement de l’armée de terre.

L’allongement de la durée de mise en œuvre des contrats opérationnels est non plus un risque, mais une réalité.

L’actualisation de 2021 doit être le grand rendez-vous de la préparation opérationnelle. Des objectifs annuels d’évolution devront être fixés selon l’article 7 de la loi de programmation militaire. Nous y serons très attentifs.

Enfin, la commission s’inquiète de la consolidation des services de soutien, éternels sacrifiés, subissant de plein fouet les réductions de personnel quand le nombre de soutenus s’accroît de nouveau.

Certes, la remontée des effectifs du service de santé des armées, que vous et nous avons longtemps appelé de nos vœux, madame la ministre, est enfin prévue, mais ce service reste très fragile. Pour preuve, il manque encore cent médecins.

Dans ce contexte, il faut soutenir la modification des décrets permettant la prise en compte de la spécificité des missions du service de santé des armées – je sais que vous défendez cette démarche –, notamment l’abaissement de deux ans à un an de l’ancienneté requise des infirmiers menant les entretiens préparant les dons du sang et l’aménagement des conditions de dépôt d’urgence du plasma lyophilisé universel.

La commission des affaires étrangères souhaite vivement être présente aux côtés des services de soutien.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Guerriau

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en tant que rapporteur pour avis des crédits du titre 2 du programme 212, « Soutien de la politique de la défense », je voudrais mettre l’accent sur deux préoccupations.

Première préoccupation, l’attractivité des forces armées est à l’origine des difficultés que nous avons connues pour consommer les crédits du titre 2 ces dernières années. Je rappelle que, en 2018, 155 millions d’euros de crédits n’avaient pu être dépensés, principalement en raison de la sous-réalisation des cibles d’effectifs liée à un nombre de départs plus important que prévu et à des difficultés de recrutement. Ces problèmes nous préoccupent, car ils compromettent l’effectivité de la remontée en puissance affichée par la loi de programmation militaire.

Pour corriger cette sous-consommation, des mesures d’ordre technique et organisationnel ont été prises. Ainsi, les modèles de valorisation des crédits de titre 2 ont été actualisés, afin de tendre vers des prévisions de dépenses plus faciles à atteindre. Par ailleurs, le directeur des ressources humaines du ministère des armées a été désigné comme seul responsable de programme, pour permettre un meilleur pilotage de la masse salariale.

Dans le même temps, l’attractivité mobilise tous les efforts de la politique des ressources humaines avec des mesures budgétaires, notamment la prime de lien au service, une attention portée au parcours professionnel et à l’intérêt du métier, la recherche d’une meilleure conciliation de la vie professionnelle et de la vie privée, en particulier à travers la mise en œuvre du plan Famille, sans oublier la politique de reconversion. Ces efforts doivent être poursuivis et amplifiés. C’est d’autant plus nécessaire que les projets de réforme de la nouvelle politique de rémunération des militaires et des retraites suscitent des inquiétudes.

La seconde préoccupation sur laquelle je souhaite insister concerne l’incidence du projet du service national universel sur le programme 212.

En 2019, les armées ont été sollicitées dans le cadre de l’expérimentation conduite dans treize départements au profit de 2 000 jeunes. Au titre de la phase 1, qui correspond à un séjour de cohésion de deux semaines en internat, elles ont fourni de l’appui et du conseil, aidé au recrutement des cadres, formé les directeurs de centres et les cadres de compagnie. Enfin, elles ont conçu et animé un module consacré à la défense et à la mémoire nationales. Elles ont aussi contribué à la phase 2, en proposant des missions d’intérêt général sur le modèle des préparations militaires.

Au total, en 2019, trois équivalents temps plein auront été mobilisés. Pour 2020, avec l’extension de l’expérimentation à 20 000 jeunes, l’impact sur les effectifs des armées est évalué à une vingtaine d’emplois. Si cet effort peut sembler raisonnable, il faut noter qu’aucun crédit supplémentaire n’est envisagé pour le financer, en contradiction avec ce que prévoit la loi de programmation.

Et nous sommes inquiets pour la suite. En effet, en cas de généralisation, la demande adressée aux armées pour la formation des cadres va mécaniquement augmenter. Qu’il s’agisse de la phase 1 ou de la phase 2, on peut craindre que les armées ne soient davantage sollicitées compte tenu de l’offre structurée qu’elles sont seules à même de produire, a fortiori en cas de défaillance des autres acteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Guerriau

Qu’il s’agisse du pilotage, du statut et de la qualité des cadres, de l’organisation, de la logistique et des capacités d’accueil, les échos que nous avons recueillis jusqu’à présent donnent le sentiment d’un dispositif qui avance à tâtons. Il est fragile et n’est pas taillé pour passer le cap de la généralisation. De plus, les prévisions budgétaires me paraissent sous-estimées.

Auparavant, il faudra qu’un bilan honnête soit tiré de cette expérimentation…

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Guerriau

M. Joël Guerriau, rapporteur pour avis. … et que le Parlement soit enfin consulté sur ce projet d’envergure, dont le coût annuel dépasse 1, 5 milliard d’euros.

MM. Emmanuel Capus et Olivier Cigolotti applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Roger

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je concentrerai mon propos sur la politique immobilière du ministère des armées.

Une augmentation des investissements en faveur de l’hébergement est prévue après des années de sous-investissement, ce qui est une bonne chose. Des interrogations demeurent cependant.

S’agissant du logement des familles, il faut évoquer l’enjeu de l’arrivée à expiration en 2020 de la concession de l’ex-Société nationale immobilière (SNI) sur les logements du ministère. Nous le savons bien, le parc est ancien et vétuste, et sa localisation ne correspond plus aux priorités en raison de la délocalisation des bases de défense. Madame la ministre, où en est la négociation avec l’ex-SNI ? Comment répondre aux besoins des familles ?

Ma seconde remarque porte sur les produits immobiliers du ministère des armées.

Le Sénat a précisé à l’article 3 de la loi de programmation miliaire que le ministère devait bénéficier de l’ensemble du produit de ses cessions immobilières et de ses redevances et loyers.

Nous suivrons deux développements.

Dans le cadre du plan Place au soleil, 2 000 hectares de terrain des armées seront mis à disposition pour la production d’électricité photovoltaïque. Comment le ministère bénéficiera-t-il, au sein du compte d’affectation spéciale, de droits de consommation équivalents aux produits perçus à ce titre ? En clair, percevra-t-il bien les redevances ?

S’agissant du Val-de-Grâce, l’ancien hôpital devrait être conservé jusqu’aux jeux Olympiques de 2024. Tant mieux, parce que plus de 500 militaires sont aujourd’hui hébergés sur ce site. Pour la suite, nous nous interrogeons.

Nous voulons que soit prise en compte la proposition des associations professionnelles de militaires qui défendent un projet pour le Val-de-Grâce, lequel mériterait d’être considéré.

Cela étant, le bâtiment pourrait être transféré à un autre ministère. Si tel est le cas, la cession devrait évidemment se faire moyennant une contrepartie versée au ministère des armées. Nous souhaiterions que ce point soit précisé, car nous gardons en mémoire la mauvaise expérience de la cession de la première fraction de l’îlot Saint-Germain, pour laquelle il n’y avait pas eu de juste retour pour le ministère de la défense ni en hébergements ni en recettes. Quelles assurances avez-vous, madame la ministre, qu’il en ira autrement pour le Val-de-Grâce ?

Comme je suis un élu de banlieue, je terminerai en disant que je préfère que les militaires soient logés dans Paris intra-muros plutôt que dans nos départements respectifs.

M. le président de la commission des affaires étrangères applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Olivier Cigolotti.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cigolotti

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le tragique accident survenu au Mali, le 25 novembre dernier, et l’hommage national que nous avons rendu aujourd’hui à nos soldats morts pour la France nous rappellent la cruauté du monde dans lequel nous vivons et l’adversité à laquelle doivent faire face nos militaires. Mon groupe s’incline devant le courage de ces hommes et face à la douleur des familles qui ont perdu un être cher.

Que ce soit dans la bande sahélo-saharienne, au Levant ou ailleurs, les crises se multiplient à l’échelle internationale, leur intensité va croissante et leur nature même évolue.

Madame la ministre, les échanges que nous avons eus à l’occasion du Forum de Dakar ont tous sans exception rappelé la nécessité de notre engagement au Mali, comme, plus généralement, en Afrique de l’Ouest. En outre, sur notre territoire, la menace terroriste demeure prégnante et ne saurait souffrir le moindre relâchement.

Dans ce contexte, le niveau d’engagement de nos armées est particulièrement soutenu depuis plusieurs années et ne devrait pas être amené à fléchir.

Répondant à ces besoins importants et croissants, fidèle à la trajectoire budgétaire tracée par la loi de programmation militaire, le budget que nous examinons aujourd’hui est au rendez-vous des engagements qui ont été pris, et nous ne pouvons, madame la ministre, que saluer votre détermination.

Ce budget prévoit, en effet, une augmentation de 1, 7 milliard d’euros des moyens accordés à la défense, avec des crédits de paiement en hausse de 4, 5 %, s’établissant à 37, 5 milliards d’euros. C’est pour nous une grande satisfaction !

Nous nous félicitons que ce budget de remontée en puissance et de modernisation permette tout d’abord de continuer le renouvellement des capacités opérationnelles de nos armées. Je pense à la livraison, prévue en 2020, d’un sous-marin d’attaque de nouvelle génération, le Suffren, de 128 blindés Griffon, de 4 blindés Jaguar, ou encore d’un avion ravitailleur MRTT supplémentaire.

Cette arrivée de matériels témoigne des efforts et des progrès effectués en termes d’innovation. Nous en avions besoin !

Cet accent mis sur l’innovation se traduit également par la prise en compte des nouveaux champs de conflictualité que sont le cyber, l’intelligence artificielle et le renseignement.

L’affectation dans ces domaines de 300 postes créés cette année et les 821 millions d’euros spécifiquement dédiés aux crédits d’études amont, afin de concevoir de nouvelles technologies adaptées aux conflits futurs, en attestent.

Par ailleurs, ce budget pour 2020 est tout particulièrement remarquable par son effort de sincérisation, qui se traduit par l’inscription, au titre des crédits alloués aux missions intérieures et aux opérations extérieures, d’un montant de 1, 1 milliard d’euros, contre 850 millions en 2019.

Cela permettra, notamment, une amélioration dans l’exécution des crédits votés, ainsi que des débats plus apaisés, nous l’espérons, sur la fin d’exécution budgétaire. Restons néanmoins vigilants, car le coût des OPEX pour les crédits du programme 178 demeure sous-évalué à ce jour. La question de la prise en charge de l’intégralité des surcoûts risque donc encore de se poser.

C’est pourquoi le maintien du principe de la solidarité financière interministérielle, inscrit dans la loi de programmation militaire sur l’initiative du Sénat, nous semble essentiel.

Vous aurez compris, madame la ministre, la satisfaction que nous ressentons à la lecture de ce budget. Mais, vous le savez, nous sommes d’éternels insatisfaits… J’attirerai donc votre attention sur quelques points de vigilance.

Le premier point concerne le maintien en condition opérationnelle des matériels et la préparation opérationnelle.

En effet, le niveau de sollicitation de certains équipements au cours de ces dernières années a été bien supérieur à ce que prévoyaient les contrats opérationnels. De plus, la technologie de nos équipements modernes nécessite une main-d’œuvre et des infrastructures bien plus coûteuses que celles de nos équipements précédents. En conséquence, la disponibilité technique opérationnelle et, plus encore, la disponibilité technique de nos matériels ont dangereusement chuté, et ce dans les trois armées.

Ce fait pose de lourds problèmes pour les entraînements ou les déploiements d’urgence, avec un risque de baisse de qualité de nos forces.

Nous nous inquiétons donc de voir les crédits alloués à l’entretien programmé des matériels diminuer de 3, 72 %. C’est pour le moins un mauvais signal !

Par ailleurs, nous nous inquiétons de la stagnation de la préparation opérationnelle depuis 2018.

La mobilisation induite par l’opération Sentinelle ainsi que le nombre important d’OPEX sont notamment à l’origine des difficultés de réalisation des formations ou exercices prévus.

Ces entraînements constituent un pilier des compétences, de l’efficacité et de la sécurité des personnels. Ils restent pourtant inférieurs, de près de 10 %, aux objectifs fixés.

Le maintien en condition opérationnelle et la préparation opérationnelle de nos forces sont trop importants pour que cette situation se pérennise.

Il nous semble primordial d’accorder davantage d’attention à ces sujets, afin de préserver la capacité de nos armées à répondre aux sollicitations futures, sur des théâtres d’opérations toujours plus nombreux.

Le deuxième point concerne la fidélisation de nos forces.

Plusieurs chantiers déterminants restent à achever, concernant la qualité du soutien santé, la politique de rémunération, ou encore la réforme des retraites. Le plan Famille, lancé voilà deux ans, dont les crédits représentent 80 millions d’euros pour l’année à venir, est également essentiel à cette démarche de fidélisation.

Si certaines de ces mesures sont perçues de façon très positive par les militaires – je pense au déploiement du wifi en garnison ou à la facilitation des démarches de déménagement –, des avis plus contrastés ont été exprimés sur la situation du logement et les conditions d’hébergement dans les enceintes militaires, dont l’amélioration se fait quelque peu attendre.

Le troisième point, enfin, concerne la coopération avec nos partenaires européens.

Alors qu’approche le dixième anniversaire des accords de Lancaster House, le contexte encore flou du Brexit chez nos voisins britanniques rend crucial le besoin de réaffirmer et d’entretenir une coopération bilatérale solide et une capacité à travailler en interopérabilité.

Le projet du SCAF conduit avec l’Allemagne connaît des avancées, mais il doit cependant toujours faire face à d’importants obstacles, notamment industriels. Des divergences essentielles existent à propos de la propriété intellectuelle, ou encore du choix des motoristes.

Au vu de l’importance d’une telle entreprise, espérons que ces obstacles seront rapidement surmontés.

Ces remarques se veulent constructives, madame la ministre. Elles ne sauraient remettre en cause le soutien que nous vous apportons sur ce budget pour 2020. Ainsi, en ce jour anniversaire de la bataille d’Austerlitz, le groupe Union Centriste votera unanimement les crédits de la mission « Défense ».

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Guérini.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Guérini

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, treize de nos soldats viennent de payer de leur vie leur engagement au service de la France. Comme tous les Français, je m’associe à l’hommage rendu à ces hommes, dont la disparation touche la communauté nationale.

Ces disparitions ont rappelé, ô combien cruellement, les dangers et les risques de l’engagement de nos forces militaires sur les théâtres extérieurs, dans une lutte de chaque instant contre le terrorisme.

Comme vous, j’ai entendu les voix discordantes de bonnes âmes qui s’interrogent sur la présence de la France au Mali. J’ose le dire aujourd’hui fermement : elles ne sont pas les bienvenues !

La France ne se bat pas simplement pour le Mali ; elle se bat pour la sécurité d’une région entière et, au-delà, pour celle de notre pays et de l’Europe. J’entends être clair : ce serait une étrange manière de lutter contre le terrorisme de vouloir aujourd’hui se retirer de ce territoire et d’offrir ainsi une base aux terroristes ! La sécurité des Français et des Européens, ce n’est pas de la poudre de perlimpinpin…

S’il me paraît difficile de remettre en cause l’opportunité stratégique de l’opération Barkhane, pour autant, la question d’une coordination européenne de la lutte contre le djihadisme en Afrique est plus que jamais d’actualité. C’est pourquoi, aujourd’hui, je souhaite mettre deux axes en exergue.

En premier lieu, il est nécessaire d’amener enfin les pays européens à s’engager à nos côtés, pour notre sécurité commune.

Nous entendons, de-ci de-là, bien des commentaires sur notre isolement au Mali. C’est, osons le dire, faire peu de cas des opérations de formation de l’armée malienne menées par l’Union européenne depuis 2013, ou encore du soutien américain en termes de renseignement grâce aux drones Reaper.

Reconnaissons néanmoins que, dans les opérations de combat, la France reste, hélas, le seul pays occidental qui se retrouve véritablement sur le terrain. Aussi, madame la ministre, nous vous encourageons à accentuer vos efforts pour bâtir une coalition des forces spéciales européennes.

En second lieu, pour coller à la discussion budgétaire qui nous réunit, il convient de s’interroger sur l’adaptation de notre armée sur le plan opérationnel au profil de l’ennemi qui nous préoccupe désormais, le combattant menant une guerre « asymétrique ».

Dans ce cadre, et pour l’armée de terre, nous attendons le plan stratégique qui devrait tirer les conséquences de l’évolution de ces interventions. J’ose espérer qu’il nous sera présenté l’année prochaine, conformément au calendrier annoncé !

Ce qui est certain, c’est que face à des organisations armées qui s’adaptent et font preuve d’une agressivité sans cesse renouvelée il faudra sans cesse nous réinventer.

L’intensité des interventions – je pense plus particulièrement aux OPEX – soulève moult questions, et je fais mienne cette formule, datant de 2017, du général François Lecointre, chef d’état-major des armées : « L’armée française avait été une armée de non-emploi pendant toute la guerre froide, elle est devenue une armée d’emploi, elle est même une armée extrêmement employée ». Trop peut-être, au regard des moyens dont elle disposait !

L’effort budgétaire consenti pour la défense doit être à la hauteur des enjeux stratégiques d’aujourd’hui.

C’est chose faite, puisque le budget pour 2020 de la mission « Défense » s’inscrit dans la trajectoire fixée par la dernière loi de programmation militaire, avec 1, 7 milliard d’euros de crédits supplémentaires par rapport à 2019.

Je salue la poursuite des commandes et livraisons qui devaient garantir la modernisation de notre armée : les blindés Griffon, très attendus, ou encore le sous-marin Suffren, un exemple d’excellence technologique.

Pour autant, j’ai souhaité reprendre quelques-unes des observations des rapporteurs.

Il s’agit, d’abord, de la baisse de 3, 72 % des crédits de paiement d’entretien programmé du matériel, associée à l’état vieillissant des flottes.

Il s’agit, ensuite, de l’A400M, pour lequel les progrès en termes de disponibilité ne sont pas assez rapides.

Il s’agit, enfin, des inquiétudes récurrentes sur les conditions de vie des militaires, malgré les efforts et l’attention toute particulière, madame la ministre, que vous portez aux familles.

Vous rappelez régulièrement que nous sommes face à un budget à hauteur d’homme, et près de 80 millions d’euros seront affectés au plan Famille, contre 57 millions d’euros en 2019.

Toutefois, ces efforts sont-ils à la hauteur des sacrifices que nous demandons à ces femmes et à ces hommes qui se battent pour nos valeurs, pour la démocratie, pour la France et pour l’Europe ?

Il importe, en ces temps de doute, d’incertitude et d’inquiétude, de ne pas relâcher l’effort sur la ressource humaine, qui, en l’occurrence, est le nerf de la guerre !

Si l’actualité démontre parfois avec gravité ce que signifie l’engagement, elle rappelle aussi, avec ces drames, le courage et le dévouement de celles et de ceux qui servent notre pays.

Ces réserves exprimées, madame la ministre, mes chers collègues, et parce que la mission va dans le bon sens, celui d’un accroissement constant des moyens accordés à nos armées, le groupe du RDSE approuve les crédits de la mission « Défense » pour 2020.

Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et Les Indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes amenés cette année à examiner les crédits de la mission « Défense » dans des conditions très singulières.

Aujourd’hui même, la Nation tout entière a rendu hommage à ses héros.

Treize soldats français morts pour la France, dans la lutte sans merci que notre patrie mène contre le terrorisme, au nom de la liberté et de la paix.

Treize familles meurtries, pour lesquelles nous ne cesserons d’avoir une pensée émue et parmi lesquelles se trouve celle de notre collègue Jean-Marie Bockel. Notre mémoire demeurera intacte.

Face au sacrifice et à l’abnégation de nos soldats, face à leur immense courage, aucun mot ne saurait exprimer la profonde reconnaissance qui est la nôtre. Nous leur devons le respect.

C’est au nom de ce sacrifice que nous, élus de la Nation, devons soutenir le combat qu’ils mènent sans relâche contre l’obscurantisme menaçant nos libertés et la paix.

Notre devoir est de relayer le sens de la mission Barkhane, de ce combat contre le terrorisme au Sahel que nous devons poursuivre.

Comme vous l’aviez affirmé, madame la ministre, ce combat « appartient au temps long ».

Le Mali et le Sahel, en général, sont la proche frontière du sud de l’Europe. Les groupes armés terroristes qui sévissent dans la région déstabilisent les États du Sahel, affaiblissent les autorités locales, usent de la propagande pour délégitimer les opérations militaires internationales sur place, s’en prennent aux militaires déployés et intimident les populations civiles. Dans cette région grande comme l’Europe, ils créent des zones de non-droit qui menacent notre propre sécurité.

Nous nous battons donc pour que le Sahel ne devienne jamais un sanctuaire terroriste à notre porte.

Avec les Britanniques, les Danois, les Espagnols, les Estoniens, les Belges, et bientôt les Tchèques, nous nous battons pour garantir la sécurité du territoire européen. Comme vous, madame la ministre, nous sommes convaincus qu’un sursaut de la part de nos autres partenaires européens est nécessaire, et qu’il est de leur intérêt d’unir nos forces au Sahel.

Ce sujet ne manquera pas d’être évoqué demain, à Londres, à l’occasion du sommet exceptionnel de l’OTAN.

Madame la ministre, devant la Haute Assemblée, vous avez appelé les pays européens à constituer, ensemble, un pilier au sein de cette organisation. Vous avez raison !

Nous vivons un moment crucial. La crise profonde que traverse l’OTAN entache la force de la solidarité et de l’unité entre alliés. Elle nous oblige à réfléchir ensemble sur le sens et l’avenir de l’Alliance atlantique, sur la force stratégique de nos engagements et, plus largement, sur l’architecture sécuritaire de notre continent.

Monsieur le président de la commission des affaires étrangères, vous avez eu les mots justes, vendredi dernier, lorsque vous avez présenté la photographie de l’état instable du monde d’aujourd’hui et évoqué le nécessaire « réveil stratégique de l’Europe, qui doit apprendre à se défendre seule ». Je reprends donc vos paroles, qui résument parfaitement les enjeux de ce sommet à Londres : « il faut utiliser le moment de crise que nous vivons pour aller vers une Europe plus forte dans une OTAN plus forte ».

Pour cela, il est urgent de travailler à la redynamisation des fondamentaux de l’Alliance atlantique et, simultanément, à l’autonomie stratégique européenne et au développement d’une véritable culture stratégique commune, tout en consolidant l’industrie de défense européenne.

Nous ne pouvons donc que soutenir l’action en ce sens du Président de la République, demain à Londres, où un autre dossier brûlant sera d’ailleurs discuté, celui de l’offensive turque dans le nord-est syrien. Cette offensive, qui est venue saper des années d’efforts en matière de lutte contre le terrorisme, a ébranlé, encore une fois, la maison otanienne.

Dans ce contexte géopolitique des plus tendus et des plus incertains, ce budget de la défense pour 2020 est, à la fois, équilibré et ambitieux. Il envoie un message de crédibilité politique à nos partenaires.

Il atteint 37, 5 milliards d’euros à périmètre constant, ce qui représente un effort national de défense de 1, 86 % du PIB et une hausse de 4, 5 % par rapport à 2019.

C’est un budget des engagements tenus, puisqu’il est en tout point conforme à la trajectoire établie lors de la loi de programmation militaire pour les années 2019 à 2025.

Dans cette deuxième année de mise en œuvre de cette loi, un effort particulier est consenti en faveur d’un modèle d’armée « à hauteur d’homme ».

Le renforcement des équipements d’accompagnement et de protection des soldats se poursuit, à travers le déploiement du programme Combattant 2020 et une hausse de 150 millions d’euros des crédits dédiés. Ainsi, en 2020, la totalité des militaires déployés en OPEX seront dotés du nouveau treillis et du gilet pare-balles nouvelle génération.

Le plan Famille lancé en 2018 se poursuivra aussi, et 80 millions d’euros lui seront consacrés. Plusieurs mesures d’action sociale et de reconversion sont prévues.

De plus, ce budget confirme la priorité accordée à la remise à niveau des hébergements au sein d’enceintes militaires, avec un plan Hébergement de 120 millions d’euros, ainsi que 540 millions d’euros pour la maintenance et l’entretien des infrastructures.

Alors que se prépare le chantier de la nouvelle politique de rémunération des militaires, ce budget consacre 40 millions d’euros à l’amélioration de la fidélisation des personnels et de l’attractivité des carrières du ministère. On y trouve notamment la nouvelle prime de lien au service.

Ensuite, avec 14, 7 milliards d’euros de crédits d’engagement et 6, 8 milliards d’euros de crédits de paiement, le budget en forte hausse alloué aux équipements se traduit par du matériel adapté aux besoins de nos armées et au meilleur niveau technologique, comme ce sera le cas avec la livraison du premier sous-marin nucléaire d’attaque, le Suffren, ou encore la poursuite du déploiement du programme Scorpion pour l’armée de terre.

Enfin, nous nous félicitons que, pour la première fois, la dotation initiale prévue au titre des OPEX passe à 1, 1 milliard d’euros, conformément à la loi de programmation militaire. Ce chiffre est à mettre en perspective avec les 450 millions d’euros des années précédentes.

Même si le coût des opérations extérieures est difficilement prévisible, cette réserve est désormais normalisée et plus proche de la réalité. C’est donc, pour ces OPEX, un financement rendu sincère et sécurisé.

Je conclurai en saluant, madame la ministre, votre engagement infaillible auprès de nos armées.

Parce que ce budget est ambitieux, qu’il prépare notre défense de demain et qu’il garantit notre autonomie stratégique, le groupe La République En Marche votera avec conviction les crédits de la mission « Défense ».

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Non, ce n’est pas le soleil d’Austerlitz que nous célébrerons aujourd’hui, cher Olivier Cigolotti ! Car nous vivons un jour d’une immense tristesse, un jour de compassion dont la mémoire collective gardera le souvenir.

La Nation, endeuillée, a pleuré aujourd’hui ses treize héros morts pour la France et, en cet instant, j’aurai, comme nous tous, madame la ministre, mes chers collègues, une pensée particulière pour ces hommes formidables, mais aussi pour leur famille, dévastée par la tristesse, et pour leurs camarades de combat et de régiment. Je pense tout spécialement à Jean-Marie Bockel, qui aurait dû être parmi nous ce soir et que nous avons accompagné, avec compassion, cet après-midi.

En ces instants, nous pensons aussi aux 30 000 hommes et femmes qui sont déployés en opération, sur le territoire national comme à l’extérieur.

J’aime cette pensée de Thucydide, rappelée par le général Lecointre : « La force de la cité ne réside ni dans ses remparts ni dans ses vaisseaux, mais dans le caractère de ses citoyens ». Nous mesurons pleinement aujourd’hui, par la dignité des familles et des frères d’armes endeuillés, la justesse d’une telle affirmation.

Oui, mes chers collègues, l’excellence de nos armées provient surtout de la qualité des femmes et des hommes qui les servent : aviateurs, marins, soldats, qui ont en partage les valeurs militaires de respect, d’abnégation, de solidarité, de courage, valeurs qui irriguent et fortifient l’ensemble de la Nation.

Dans un monde « ensauvagé » par des crises toujours plus nombreuses et plus violentes, pour voir clair dans le brouillard de la guerre, dans la poussière des conflits, des guérillas, face à la brutalité du terrorisme, nos forces armées sont un rempart et une boussole.

C’est pour elles que le Sénat a adopté, à une écrasante majorité, la loi de programmation militaire. C’est pour elles que, nous, sénateurs, nous sommes institués, en quelque sorte, en garants de l’exécution de ce texte.

Le présent projet de loi de finances nous met indiscutablement sur la trajectoire prévue par la loi de programmation militaire.

Les nouveaux matériels arrivent – les rapporteurs ont amplement détaillé ce point : MRTT Phénix, drones Reaper, blindés Griffon et, bientôt, Jaguar, sous-marin Barracuda, hélicoptères Caïman, satellite Musis, et bien d’autres !

L’effort sur la condition du personnel et les infrastructures se poursuit. Les problèmes d’attractivité et de fidélisation, bien que non entièrement résolus, sont pris en compte.

Tout n’est pas parfait, mais nous sommes vraiment sur une bonne trajectoire, et je veux à mon tour, madame la ministre, vous rendre hommage et saluer votre détermination sans faille et votre pugnacité pour obtenir ces résultats.

Nous aurions pu donner un quitus total au Gouvernement, si, bien sûr, les conditions de l’exécution budgétaire de 2019, après celles de 2018, ne posaient pas quelques questions et n’étaient pas venues assombrir un peu le tableau.

En effet, majorer les crédits en loi de finances initiale est une chose. Encore faut-il tenir cet engagement sur l’exécution !

Comme l’an passé, de ce point de vue, un bémol doit être apporté : 70 millions d’euros ont été annulés dans le collectif sur la mission « Défense ».

En outre, pour le financement du surcoût des OPEX, le Gouvernement a pratiqué la solidarité ministérielle inversée. Alors que le Sénat avait rétabli, dans la loi de programmation militaire, le principe d’un financement interministériel de ce surcoût, c’est l’inverse qui s’est produit : la défense a dû financer le surcoût des mesures liées à la crise des « gilets jaunes » et 284 millions d’euros sont passés à la trappe !

Vous me demanderez – et je ne suis pas loin de comprendre ce point de vue – si cela importe dans un budget de 37, 5 milliards d’euros, en hausse de 1, 7 milliard d’euros.

Ce n’est pas cette année qui nous inquiète, madame la ministre. Ce sont les années suivantes ! En 2019 et en 2020, si nous donnons quelques petits coups de canif dans le contrat, qu’en sera-t-il lorsque nous en serons à la seconde partie de la loi de programmation militaire, à partir de 2022, avec des marches aussi redoutables que 3 milliards d’euros d’augmentation de crédits chaque année ?

Nous serons vigilants sur ce point et, d’une certaine manière, c’est vous aider à maintenir le cap et à faire en sorte que les derniers arbitrages budgétaires de fin d’année ne portent pas atteinte à la sincérité des votes de notre assemblée.

Nous le savons tous, et nous en avons eu la preuve au cours des derniers jours, les militaires donnent beaucoup à la Nation : leur vie, parfois, et toujours leur engagement ; leur temps, aussi, au détriment de leurs familles. Ils le font avec enthousiasme ! Ils le font avec fierté ! Nous, les politiques, nous leur devons le respect de la parole donnée ! C’est une véritable question de confiance !

C’est pourquoi, encore une fois, nous souhaitons vous soutenir dans vos efforts pour maintenir le cap de ce budget, madame la ministre.

Au vu de toutes ces considérations, des efforts déjà accomplis par le Gouvernement, et malgré les éléments que j’ai souhaité rappeler, mon groupe votera ce budget.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE et Les Indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, tout d’abord, je souhaite à mon tour rendre hommage à tous nos soldats tombés en opération. Engagés pour notre sécurité et notre liberté, volontaires pour toutes les missions au service de la paix, ils font preuve d’un courage remarquable. Nous ne le dirons jamais assez, ils font la fierté des Français et l’honneur de la France.

J’ai, en cet instant, une pensée particulière pour notre collègue et ami, ancien ministre, Jean-Marie Bockel, lui-même membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Nous lui présentons, ainsi qu’à sa femme et à ses proches, nos plus sincères condoléances. Nous pensons à son fils et aux douze camarades de celui-ci, tous disparus au Mali. Nous pensons à eux, et à tous les autres !

Nos soldats sont de grands professionnels, formés au plus haut niveau et parfaitement encadrés. J’ai pu le mesurer dans mes précédentes fonctions, chaque fois que j’ai eu l’honneur de leur rendre visite. J’ai pu observer le travail quotidien d’entraînement, la constance de la pédagogie, la répétition inlassable des techniques, le savoir-faire incroyable dans les déploiements opérationnels, l’évaluation permanente des risques, l’apport décisif de nos renseignements… Toutes ces dispositions conduisent à des décisions d’engagement en conscience.

Je peux en témoigner : tout est mis en œuvre, afin que les femmes et les hommes composant nos armées prennent le moins de risque possible. Tout est mis en œuvre pour qu’ils puissent réaliser leur mission au service de la patrie.

Malheureusement, nous le mesurons comme eux-mêmes, toutes les missions qui leur sont confiées comportent leur part de risques. C’est en conscience que nos militaires s’engagent au péril de leur vie. Telle est la grandeur de leur service. Personne ne peut douter de leurs principes et de leurs valeurs. Nos soldats « serv[ent], sans se servir ni s’asservir », portant le devoir avant tout. Notre tristesse de les voir frappés dans leur chair n’en est que plus grande encore. Je veux adresser mes sincères pensées aux familles et aux proches des récents disparus.

Je pense aussi à nos blessés, dont le courage est quotidien et dont la force mentale est exceptionnelle, quand leurs forces physiques s’amenuisent. Ils se relèvent, appuyés par les personnels du service de santé des armées et de l’Institution nationale des Invalides. Ils se relèvent grâce à la présence, à leurs côtés, de leurs familles et de leurs camarades, qui ne laissent jamais personne derrière eux.

En pensant à nos soldats, nous admirons la solidarité et les liens de fraternité qui les unissent, des liens solides et durables, exemplaires pour l’ensemble de notre société.

La professionnalisation des armées a, de ce point de vue, largement renforcé cette unité en rapprochant encore plus les chefs de leurs troupes. J’ai pu m’en rendre compte à de nombreuses occasions, notamment lorsque j’ai eu à passer les fêtes de fin d’années à leurs côtés, ou au cours de mes échanges avec les différents chefs d’état-major.

Madame la ministre, nous examinons aujourd’hui les crédits de la mission « Défense », dans le cadre du projet de loi de finances pour l’année 2020. Je le dis sans ménager de suspens, mon groupe votera ces crédits, et nous vous aiderons pour qu’ils ne soient pas insincères, à l’inverse de ceux – si j’ai bien compris les propos de M. de Legge, rapporteur spécial de la commission des finances – qu’a présentés Jean-Yves Le Drian, sous le précédent gouvernement. Votre collègue ministre des affaires étrangères sera heureux de l’apprendre.

Nous saluons l’augmentation des crédits de 1, 6 milliard d’euros, portant le budget à plus de 37 milliards d’euros pour 2020. Cette hausse place l’effort à hauteur de 1, 86 % du PIB, et la trajectoire vers l’objectif de 2 % en 2025 semble respectée, telle qu’elle est précisée par la LPM. En matière de budget pour la défense, nous remarquons que le gouvernement actuel poursuit le travail engagé dès 2012, sous la présidence de François Hollande.

Ce budget comporte de véritables avancées en termes d’équipements, avec les livraisons attendues de 12 000 fusils HK416F, qui complètent le remplacement des Famas, de 128 Griffon, ou encore des hélicoptères NH90, des deux A400M Atlas ou des deux premiers Mirage 2000D rénovés. Entre autres avancées, figurent aussi le plan Famille, avec 80millions d’euros, et les 120 millions d’euros affectés à l’hébergement des militaires et de leurs familles. Nous pouvons aussi saluer le recrutement de 300 ETPT dans le renseignement et la cyberdéfense.

Néanmoins, si nous saluons de manière générale ce budget et si nous voterons en conséquence, nous souhaitons aussi vous faire part de nos nombreuses interrogations.

Pour ce qui concerne le recrutement et la fidélisation des personnels, nous sommes toujours en attente de la présentation d’un véritable plan de recrutement de hauts potentiels pour nos services de renseignement et de cyberdéfense.

De ce point de vue, le volume de recrutement est, à ce stade, la seule approche communiquée. Or nous savons que la qualité du recrutement constitue l’enjeu essentiel. Comment recruter les meilleurs et les fidéliser ? Ce questionnement, qui vaut pour l’ensemble de nos armées, concerne encore plus fortement ces métiers spécifiques, puisque la concurrence avec les géants du secteur privé est directe. Quels sont nos atouts face aux Gafam, face à leurs offres salariales et à leurs opportunités de développement de carrière ? Si nous élargissons le prisme, la question se pose aussi pour nos militaires du rang. Ces dernières années, à côté de l’exercice de leur métier traditionnel, un ensemble de tensions supplémentaires liées aux nombreuses opérations dans lesquelles ils sont engagés, notamment l’opération Sentinelle, est apparu.

Les formes de l’engagement ont changé pour nos jeunes soldats. Comment prendre ce fait en compte ? Quelles sont les perspectives au-delà de l’actuel plan Famille, qui, à bien des égards, est un plan de rattrapage, dans la continuité des rattrapages déjà effectués lors du précédent quinquennat ?

Enfin, madame la ministre, je vous disais nos doutes face à l’avenir incertain qui se présente à nous. Une grande partie de ces doutes semble partagée par de nombreux cadres de nos armées.

À l’heure où nous parlons, plus de 30 000 militaires sont engagés pour la défense de la France : parmi eux, 8 000 sont en OPEX, pour l’essentiel dans la bande sahélo-saharienne et au Levant ; 20 000 sont engagés sur le territoire national, dans le cadre des postures permanentes de sauvegarde maritime ou de sûreté aérienne, dans l’opération Sentinelle, au sein de nos forces de souveraineté dans nos collectivités d’outre-mer ; 3 700 sont prépositionnés comme forces de présence à l’étranger. Comme le dit le général Lecointre : « rapporté à nos effectifs aujourd’hui, ce niveau d’engagement soutenu depuis de nombreuses années est inédit et il ne devrait pas fléchir dans les années à venir ». Nous ne pouvons que partager le constat et les observations du chef d’état-major des armées.

Malheureusement, si ce budget est en augmentation et apparaît comme une réponse à court et peut-être moyen termes, il ne semble pas, ou pas encore, répondre aux enjeux à long terme. Vous paraissez en avoir conscience, madame la ministre, puisque vous avez posé peu ou prou le même constat, lors d’une conférence que vous avez donnée en septembre dernier. Les guerres de demain appellent des décisions aujourd’hui.

Alors, si nous nous inscrivons dans cette logique, les 300 nouveaux emplois dans le domaine de la cyberdéfense apparaissent ainsi bien maigres au regard des défis qui nous attendent ; voyez les déploiements d’autres pays comme la Chine ou la Russie, pour ne citer qu’eux. La compétition est déjà lancée. La France n’est pas complètement sortie du jeu, mais elle connaît des retards significatifs, dans un environnement sécuritaire où ses forces sont fortement mobilisées.

L’équation est certes complexe, mais, nous le savons, ce ne sont pas les effets d’annonce et de communication qui feront que notre pays pourra se défendre face à des attaques hybrides, multiples et parfois insaisissables.

Dans le domaine de la défense spatiale, une réorganisation a été annoncée et fortement commentée. Elle est en cours, mais quid des investissements réels et pérennes dans ce secteur encore largement inexploré ? Voilà un défi redoutable : gérer le quotidien de nos armées tout en les projetant vers l’avenir. L’Europe de la défense semble la seule hypothèse solide et durable, mais, là encore, nous notons des annonces régulières et largement partagées, mais peu d’avancées concrètes.

Nous avons conscience des difficultés de cette équation à plusieurs inconnues, dans un environnement mondial en permanente mutation. Nos concitoyens, et parmi eux nos soldats, attendent aussi des réponses concrètes sur le long terme.

Enfin, en leur nom, je tiens à dire que les sénatrices et sénateurs socialistes soutiendront toujours toute démarche visant à améliorer nos capacités de défense : elles constituent un investissement de la Nation pour assurer la sécurité et la liberté de tous.

Pour autant, cela ne nous empêche pas de constater et de relever tous les effets négatifs d’un mauvais projet de loi de finances pour l’année 2020, qui enrichira encore plus les très riches sans redistribuer réellement à celles et ceux de nos compatriotes qui en ont le plus besoin, dans un climat social terriblement effrayant pour la plupart des Français, qui s’inquiètent, quel que soit leur niveau au sein de notre société, des étudiants aux familles, des salariés aux entrepreneurs, de nos jeunes à nos anciens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

M. Jean-Marc Todeschini. Le groupe socialiste continuera à dire son opposition entière à la politique économique et sociale du gouvernement actuel ; cependant, il votera les crédits de la mission « Défense ». Nous le devons à nos militaires, à leurs familles et à nos concitoyens !

Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons le budget de la mission « Défense », dans un moment critique pour nos forces militaires, après la mort de treize soldats français tués au Mali. L’hommage national rendu aujourd’hui a honoré leur mémoire, et nous renouvelons notre soutien aux familles durement éprouvées, à notre collègue Jean-Marie Bockel, et à tous les compagnons d’armes de ces défunts soldats qui accomplissent leur mission dans des conditions chaque jour plus périlleuses.

Oui, chaque jour plus périlleuses, car plus de 40 militaires français ont trouvé la mort dans la région. Nous y déployons 4 500 militaires. Outre nos forces, des soldats maliens, burkinabés, nigérians subissent des pertes plus nombreuses encore. Dans la région, plus de 5 millions de personnes dépendent désormais, entièrement, de l’aide humanitaire.

Madame la ministre, vous venez vous-même de déclarer : « sur place, j’ai pu constater que la situation se dégradait ». Le bilan humain de cette guerre, que les populations de la région considèrent de moins en moins comme la leur, s’alourdit dramatiquement, sans que l’on voie poindre d’issue positive. Le risque d’enlisement et d’un rejet croissant des troupes françaises est maintenant manifeste.

Voilà qui conduit à s’interroger sur le budget que nous examinons. Le coût des OPEX augmente fortement. Au-delà des seules lignes budgétaires directement imputées à ces opérations, une part de plus en plus importante de nos crédits d’équipement, eux aussi en forte hausse, vise en fait à accroître notre capacité de projection extérieure. N’est-il pas temps de réévaluer le bilan de cette politique, aujourd’hui au Sahel, hier en Libye, ou ailleurs encore en Afrique ou au Moyen-Orient ?

Au Sahel, notre engagement est maximal ; la situation sociale, humanitaire et sanitaire se dégrade au rythme du délitement des États et de leurs politiques publiques, dû à des années d’ajustement structurel, de pillage économique, de corruption et d’interventionnisme militaire et politique. Les conflits internes, la violence, les trafics et le banditisme se répandent au fur et à mesure que grandissent la pauvreté et l’absence totale de perspective pour la jeunesse. La violence djihadiste, loin de reculer, embrase maintenant le Mali et les États voisins. Nos priorités ne doivent-elles pas être l’objet de questions et probablement être inversées ? La primauté donnée à l’action militaire s’avère désormais dangereuse pour l’Afrique, pour la France et pour nos militaires.

Les équilibres de notre politique extérieure en matière de développement, de diplomatie et d’action militaire doivent être revus. Quels sont-ils aujourd’hui ? Un budget militaire en hausse tourné vers l’opérabilité extérieure, une diplomatie aux moyens sans cesse rognés, et une aide au développement qui ne décolle pas malgré les promesses… Nous marchons sur la tête ! Remettre notre politique à l’endroit doit nous permettre de changer nos rapports politiques et de développement avec les États et les forces vives en Afrique. C’est le seul moyen d’éviter l’enlisement, dans une guerre qui devient chaque jour plus meurtrière.

Le premier de nos désaccords porte donc sur les opérations extérieures. Plus globalement, nous souhaiterions que l’augmentation des budgets consacrés à la modernisation de nos équipements soit revue à l’aune d’une révision stratégique d’ensemble. Nous ne visons pas là les conditions matérielles de nos soldats, marins et aviateurs, qui, eux aussi, ont subi de dures années d’austérité et méritent cette remise à niveau.

Nous visons, par exemple, l’intégration croissante dans les stratégies de l’OTAN de nos objectifs en matière de dépenses militaires et de nos concepts d’emploi des forces, alors même que l’Organisation est fortement remise en question. Quelles conclusions tirons-nous de ce qui vient de se passer en Syrie, avec le retournement de nos alliés ? Quel est le coût budgétaire de notre engagement dans le commandement intégré ? Depuis les propos du président Macron sur la « mort cérébrale » de l’Organisation, les déclarations gouvernementales censées les expliquer ne nous éclairent pas beaucoup sur notre vision d’avenir. Nous débattrons de l’OTAN dans cette enceinte le 12 décembre prochain, à la demande, acceptée par le Sénat, de mon groupe. Mais avec quels engagements et quelles conséquences budgétaires la France se rendra-t-elle au sommet de l’OTAN, à Londres, dès cette semaine ? Nous allons voter ce budget sans disposer de réponses claires à cette question pourtant essentielle.

Nous visons aussi les stratégies de nos industries de défense, qui s’imbriquent progressivement en Europe, sans que des doctrines d’emploi communes, à l’exception de celles de l’OTAN, ne soient mises au clair. L’Europe de la défense ne serait-elle pas, pour le moment, qu’une Europe des industriels de la défense, dictant les programmes à financer, plutôt qu’un projet politique commun à débattre et à arbitrer avec les parlements et les citoyens ? Ces industries de défense se tournent également toujours plus vers des stratégies agressives à l’export, nourrissant un commerce des armes florissant, devenu dans ce contexte géopolitique instable l’un des principaux facteurs de dangers, de conflits et de violences.

Voilà le dernier point aveugle de cette discussion budgétaire : alors qu’il nous est proposé d’adopter des dépenses militaires en forte hausse, dans un monde où reprend une fort dangereuse escalade, où sont les initiatives politiques de la France en faveur du désarmement, à l’aune pourtant d’une année qui sera marquée par la convention de révision du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires à l’ONU ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La Nation tout entière a droit à ce débat de fond. À cette fin, j’invite le Gouvernement à se saisir de cette question au cours de l’année 2020, en lien avec les échéances de l’ONU.

Pour toutes ces raisons, et parce que l’état du monde nous invite à une révision globale que rien n’annonce, le groupe CRCE votera contre les crédits de la mission « Défense ».

Debut de section - PermalienPhoto de Emmanuel Capus

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, plus de 30 000 militaires sont déployés dans le monde, pour défendre notre souveraineté, pour défendre notre liberté et pour défendre nos valeurs. Plusieurs milliers d’entre eux sont actuellement engagés dans les opérations extérieures, dont un millier dans l’opération Chammal, au Levant ; au Sahel, 4 500 militaires sont déployés dans le cadre de l’opération Barkhane.

Au moment où je monte à cette tribune, comme M. Cambon et comme mes prédécesseurs, sont présentes dans mon regard et ma mémoire les images fraîches de ces treize drapeaux couchés sur les cercueils de ces jeunes hommes, qui ont offert le sacrifice suprême. Surtout, comme vous-même, monsieur Cambon, c’est la dignité de ces familles qui me marque le plus, la dignité de ces veuves quittant les Invalides avec leurs enfants, laissant derrière elles le symbole de leur sacrifice.

À l’heure où nous les examinons, c’est peu de dire que les crédits de la mission « Défense »sont essentiels à l’action de la France. Ils définissent nos ressources en hommes et en machines. Nous saluons leur augmentation, conforme à la LPM, indispensable et nécessaire. Cela faisait trop longtemps, madame la ministre, que nous n’accordions pas les moyens nécessaires à notre défense.

Au moment où l’Europe est de plus en plus isolée pour assurer sa défense, la France, qui est l’un des piliers de cette défense, doit disposer d’une armée adéquate, surtout à l’heure où les Britanniques quittent l’Union européenne, même si des partenariats seront possibles. La situation sera cependant plus difficile. Le rôle de notre pays redevient encore plus central.

Alors que la France est isolée et que notre allié américain nous fait de plus en plus défaut, il est primordial que nous construisions l’Europe de la défense, et surtout une autonomie stratégique européenne. Voilà un combat de longue haleine, qui exige du temps et de la persévérance pour convaincre nos alliés. Certains d’entre eux n’attendent qu’une seule chose, le départ de Donald Trump pour mettre sous le tapis cette Europe de la défense que nous avons peut-être, dans les mois à venir, la possibilité de construire.

Des mutualisations existent déjà, je m’en félicite. Tous les programmes ont été rappelés par les orateurs précédents, tout comme les efforts réalisés avec nos partenaires européens – je pense évidemment à la frégate européenne multi-missions (Fremm), à l’hélicoptère Tigre et à nos missiles, que nous construisons grâce à notre coopération avec les Britanniques.

La mutualisation de la production a de nombreux avantages et renforce notre interdépendance. Mais elle présente l’inconvénient politique de devoir s’appuyer sur une Europe puissante, intégrée et politiquement forte. Nous ne pouvons, de ce point de vue, renoncer à l’exportation de nos armes. Construire des armes avec nos amis allemands ne doit pas nous faire renoncer à vendre nos SCAF, nos avions, nos outils et nos armes aux clients que nous souhaitons.

Tout comme mes prédécesseurs, je souhaite saluer la livraison en 2020 du programme Scorpion, qui permettra de mettre un grand coup de balai dans des générations d’armements aujourd’hui obsolètes, parfois conduits par des équipages plus jeunes qu’eux.

Debut de section - PermalienPhoto de Emmanuel Capus

Je pense au matériel roulant, et à nos Atlantique 2 de Bréguet, dont la première génération date des années soixante !

Je me félicite aussi de la livraison de la dernière génération du sous-marin nucléaire d’attaque, le Suffren, et de l’ensemble du programme Scorpion. Il faudrait sans doute prévoir la livraison de Rafale supplémentaires ; aucune n’a eu lieu depuis cinq ans.

J’en viens à la nécessité d’entretenir notre matériel. Il n’est pas normal que la disponibilité de nos aéronefs ne soit pas supérieure à 50 %. Il n’est pas normal que celle de nos A400M soit de 31 % et que nos hélicoptères ne volent pas sans difficultés.

Je pense également au moral de nos troupes. Derrière le matériel, il y a aussi des hommes. Je salue le plan Famille et l’ouverture de 300 postes, notamment dans les domaines du renseignement et de la cyberdéfense. Madame la ministre, vous avez devant vous un immense défi en termes de ressources humaines. Nos marins, nos aviateurs et les soldats de l’armée de terre nous le rappellent régulièrement. La sous-consommation des crédits doit vous conduire à vous interroger sur la politique que vous devez mener, pour attirer, au service de la défense de la France, les jeunes générations.

La France a su conserver une armée complète, entraînée et aguerrie, capable d’intervenir sur tous les terrains du monde, à l’heure où l’allié américain est de moins en moins fiable et où les Chinois produisent tous les quatre ans l’équivalent de notre marine nationale. Cette armée permet à la France d’occuper son rang de grande puissance. Surtout, elle garantit, mes chers collègues, notre souveraineté nationale et notre liberté. C’est la raison pour laquelle le groupe Les Indépendants votera les crédits de la mission « Défense ».

Applaudissements sur des travées du groupe UC. – M. Marc Laménie applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Le Gleut

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, tout d’abord, je veux rendre un hommage appuyé à nos treize héros morts pour la France. Je pense à leurs familles, aux treize orphelins, aux proches et aux frères d’armes des treize soldats tombés au combat, au Mali, lundi dernier. Au nom du groupe Les Républicains du Sénat, je veux redire à quel point nous saluons leur courage de chaque instant et leur professionnalisme. Aujourd’hui, mais pas seulement, nos pensées les accompagnent.

Face à leur engagement jusqu’au sacrifice ultime, nous devons les assurer de notre soutien indéfectible et de notre profonde compassion. La Nation doit être au rendez-vous et soudée derrière ses soldats et héros de la lutte mondiale contre le terrorisme, tant à l’étranger que sur le territoire national. Oui, la paix, ici et en Europe, se joue là-bas.

Madame la ministre, le budget que vous nous soumettez respecte la trajectoire tracée par la LPM, pour laquelle nous nous sommes tous beaucoup investis. C’est donc avec satisfaction que nous constatons que, en 2020, le budget de la défense atteindra 37, 6 milliards d’euros, ce qui représente une hausse de 1, 7 milliard d’euros. Ce budget comporte des avancées qu’il convient de souligner.

Concernant les équipements, les efforts en termes de matériel étaient très attendus. Il y va de la sécurité de nos soldats. Cette année est marquée par la poursuite de la modernisation des équipements conventionnels, avec une hausse de 1, 3 milliard d’euros, qui se traduit notamment par la livraison du premier sous-marin nucléaire d’attaque de nouvelle génération, le Suffren.

L’année 2020 verra également le déploiement du programme Scorpion, avec la livraison de blindés multi-rôles, tels que les Griffon. À cela s’ajoute la livraison d’un avion ravitailleur MRTT supplémentaire, permettant de renforcer nos capacités, jusque-là critiques, de ravitaillement en vol.

Cette modernisation se caractérise aussi par le lancement d’études sur le sous-marin nucléaire lanceur d’engins de troisième génération, et réaffirme la crédibilité de la dissuasion nucléaire française dans ses deux composantes. Ces efforts sont indispensables pour la France, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU et membre de l’OTAN.

Si la livraison de nouveaux matériels est importante, l’autre chantier relatif aux équipements est celui de la mise en place d’une politique de maintien en condition opérationnelle (MCO) rénovée, intégrant les spécificités de nos opérations extérieures. Le groupe Les Républicains est très attentif à la gestion du surcoût des OPEX, qui atteint 1, 1 milliard d’euros, en particulier du fait de la fin du financement interministériel. La prise en charge par la solidarité nationale a un sens ; c’est une participation à l’effort de sécurité. Le rappeler et l’expliquer est important.

Après le drame survenu lundi dernier, les citoyens doivent être informés et conscients du tribut payé par la défense pour leur sécurité. Si nous ne voulons pas nous retrouver dans la situation des Britanniques après leurs interventions simultanées et prolongées en Afghanistan et en Irak, l’amélioration de l’efficacité du maintien en condition opérationnelle n’est pas négociable.

Le rapport de Dominique de Legge relatif à la disponibilité des hélicoptères constituait un excellent exemple. La réforme engagée est un signe positif, mais la baisse de 3, 72 % des crédits dédiés à l’entretien programmé du matériel ne laisse plus aucune marge de manœuvre.

Il faut donc rester extrêmement vigilant, car les conséquences sur l’activité et l’entraînement des forces sont immédiates. Le nombre d’heures d’entraînement pour les personnels est un gage autant de professionnalisme que de sécurité.

Cependant, préserver nos capacités matérielles exige une politique soutenue en matière d’innovation. Les investissements en termes de recherche et développement sont le préalable indispensable à une base industrielle et technologique de défense solide et pérenne. Il importe de nous prémunir contre tout décrochage technologique, qui anéantirait les efforts consentis jusqu’à présent.

À ce titre, la part relative aux études amont, via le programme 144, représente un défi. Cela doit amorcer la montée en puissance de l’Agence de l’innovation de défense. Intelligence artificielle, informatique quantique, hypervélocité, cybersécurité, spatial et neurosciences sont des domaines totalement intégrés à toute politique de défense.

Néanmoins, chacun est conscient qu’il ne peut y avoir de défense sans les hommes et les femmes, des soldats qui ont des familles, dont nous devons aussi nous préoccuper. Dans ce cadre, le plan Famille est un élément essentiel. Il constitue un bon point de départ pour l’amélioration de la condition militaire ; nous devons cependant aller plus loin. Nous connaissons votre implication personnelle sur ce sujet, madame la ministre. Vous pourrez compter sur nous.

Cela me conduit à aborder la question des ressources humaines. La professionnalisation des armées a profondément affecté la structure même du ministère. La fidélisation est un défi qu’il faudra relever. Cela ne peut s’envisager sans une amélioration de la gestion des carrières, avec une vision à long terme. Cette tâche immense exige un alignement sur les rémunérations du domaine civil.

L’armée doit séduire et recruter auprès des jeunes, qui suivent un enseignement et des formations de qualité au sein de la défense. Il importe que la défense puisse avoir un retour sur cet investissement.

J’en viens au service national universel (SNU), qui peut potentiellement avoir un effet sur les recrutements. Les membres de la commission des affaires étrangères seront intraitables sur le financement, qui doit faire l’objet de ressources ad hoc. Il y va du respect de la loi de programmation militaire. Que l’armée prenne sa part, et seulement sa part.

À ce stade, le SNU n’a pas de conséquence sur les crédits de la défense. Cependant, la formation des éducateurs et animateurs est assurée par des personnels de la défense, ce qui joue sur la disponibilité des personnes.

Madame la ministre, le groupe Les Républicains votera les crédits de la mission « Défense ». Toutefois, ce vote favorable s’accompagne d’une extrême vigilance quant au strict respect de la loi de programmation militaire, gage du respect que nous devons à toutes les femmes et à tous les hommes engagés au service de la défense. Nous leur sommes quotidiennement reconnaissants.

Pour conclure, je vous livre cette citation du général de Gaulle, dans ses Mémoires de guerre : « Dans le mouvement incessant du monde, toutes les doctrines, toutes les écoles, toutes les révoltes, n’ont qu’un temps. […] Mais la France ne passera pas. »

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et Les Indépendants.

Debut de section - Permalien
Florence Parly

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous étions réunis aux Invalides voilà quelques heures pour rendre hommage à nos treize militaires morts pour la France au Mali et témoigner à leurs familles et leurs proches le soutien et la reconnaissance de la Nation tout entière. Ces treize cercueils drapés de bleu, blanc, rouge, ces treize vies consacrées à notre pays et à notre protection nous rappellent que celles et ceux qui choisissent de s’engager le font corps et âme, sans retenue ; ne l’oublions jamais. Et je tiens à vous remercier, mesdames, messieurs les sénateurs, de votre soutien indéfectible dans cette terrible épreuve.

En cette journée de deuil et d’hommage, la présente séance publique revêt une dimension particulière, parce que nous sommes au Sénat, parce que nous examinons les moyens alloués à nos armées, et parce que votre collègue et notre ami Jean-Marie Bockel aurait dû prendre la parole en tant que rapporteur pour avis sur le programme 178. Permettez-moi de lui adresser une pensée affectueuse et de lui exprimer tout notre soutien.

Nous sommes réunis ce soir pour examiner le deuxième projet de loi de finances de mise en œuvre de la loi de programmation militaire. Nous avons pris des engagements forts dans cette loi de programmation voulue par le Président de la République pour la remontée en puissance de nos armées, afin que, dans un environnement stratégique qui se dégrade chaque jour, jamais les armées ne faillissent à leur mission première : protéger les Français.

Les armées ont déjà connu par le passé des LPM devenues obsolètes à peine promulguées. Cette loi de programmation militaire voulue par le Président de la République n’est pas une promesse ; c’est un cap que nous avons fixé et que nous comptons bien tenir.

Pour la troisième année consécutive, le budget de la mission « Défense » est en hausse. Comme le prévoyait la loi précitée, en 2020, nous bénéficierons de 1, 7 milliard d’euros de crédits supplémentaires à périmètre constant, ce qui porte notre budget à 37, 5 milliards d’euros.

C’est une hausse de 4, 5 % par rapport à 2019, dans un contexte budgétaire contraint pour l’État. Elle marque la priorité donnée par le Gouvernement à la poursuite du renforcement des fonctions régaliennes, les armées au premier rang.

C’est aussi la marque du respect de l’engagement fort du Président de la République de porter l’effort national de défense à 2 % de la richesse nationale d’ici à 2025. Cet objectif n’est pas seulement symbolique. Il est indispensable pour réparer et préparer nos armées.

En outre, et c’est une chose à laquelle je tiens – je sais que vous aussi –, c’est un budget sincère. Il est constitué exclusivement de crédits budgétaires. La provision destinée à couvrir le surcoût des OPEX et des missions intérieures atteint désormais un niveau bien plus réaliste et sécurisé, avec 1, 1 milliard d’euros cette année, auxquels s’ajoutent 100 millions d’euros pour les opérations intérieures, soit 1, 2 milliard d’euros au total. Ce chiffre – 1, 2 milliard d’euros – est à comparer avec la prévision de surcoûts pour 2019, soit 1, 4 milliard d’euros. Cela réduira encore la traditionnelle tension de la fin de gestion, que l’on a constatée par le passé, comme en 2016 ou 2017, quand la provision s’élevait à 450 millions d’euros, laissant ainsi 1 milliard d’euros à trouver sur le budget de l’État.

J’en profite pour faire une incise sur les conditions de fin de gestion 2019 pour le ministère des armées, sujet auquel vous êtes, je le sais, attentifs et sur lequel nous aurons nécessairement l’occasion de revenir, car – c’est important – nous ne sommes pas encore tout à fait à la fin de l’année et la gestion n’est pas terminée.

Pour mémoire, le projet de loi de finances rectificative qui a été présenté voilà quelques semaines a prévu l’ouverture de 214 millions d’euros pour le financement des surcoûts liés aux opérations extérieures et aux missions intérieures, ainsi que des annulations à hauteur de 284 millions d’euros.

Ce schéma de fin de gestion de la mission « Défense » s’inscrit – cela a été rappelé – dans le contexte du financement des mesures en faveur du pouvoir d’achat décidées à la fin de l’année 2018, pour lequel le Premier ministre a demandé une réduction des dépenses de l’État de 1 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale.

Dans ce contexte, le ministère des armées compense en annulations en 2019 les ouvertures permettant de couvrir les surcoûts liés aux opérations extérieures et aux missions intérieures.

Par ailleurs, pour contribuer à l’effort collectif, j’ai décidé la restitution au budget général d’un montant de 70 millions d’euros résultant des gains sur les négociations des contrats d’armement et du paiement de pénalités de retard par les industriels, ce qui est donc sans conséquence sur l’exécution de la LPM.

Au total, les surcoûts liés aux opérations extérieures et aux missions intérieures d’un montant de 1, 4 milliard d’euros sont intégralement couverts, avec des conséquences que je qualifierais d’absorbables par le ministère. On peut se désespérer de tout, mais rappelons quand même que le montant des annulations s’élève à 284 millions d’euros, c’est-à-dire 0, 8 % du budget des armées, dans les conditions exceptionnelles que j’évoquais voilà un instant. L’année dernière, en gestion 2018, il fallait trouver 404 millions d’euros. En 2017, c’était un milliard d’euros. C’est aussi l’illustration de l’effort de « sincérisation » qu’a permis la hausse des provisions de 450 millions d’euros dans la précédente LPM à 1, 1 milliard d’euros en 2020.

La gestion 2019 n’est pas finie, notamment concernant la réserve de précaution, c’est-à-dire les crédits qui restent gelés. Cette réserve, après les annulations du collectif, était de 420 millions d’euros. J’ai d’ores et déjà obtenu 80 millions d’euros de dégel à la fin du mois de novembre. J’ai plus que bon espoir d’obtenir de nouveau 140 millions d’euros de dégel dès cette semaine.

Debut de section - Permalien
Florence Parly

Il restera 200 millions d’euros de crédits gelés, dont je demanderai le dégel intégral dès que les conditions d’atterrissage de la gestion de l’État seront confirmées, c’est-à-dire à la mi-décembre. Cela nous permettra de consolider les conditions de bonne exécution de la LPM.

Cela étant dit, regardons de plus près comment se décline l’ambition de ce budget pour 2020, selon les quatre axes de la loi de programmation militaire.

Vous le savez, j’ai souhaité mettre l’humain, les civils, les militaires et leurs familles au cœur du ministère, au cœur de nos armées, au cœur de notre action.

Le plan Famille, qui a été décidé au mois d’octobre 2017 – je tiens à rappeler que la moitié des mesures s’appliquent également aux personnels civils –, continue de se déployer partout en France ; je vous remercie de l’avoir noté. Il disposera d’un budget d’environ 80 millions d’euros en 2020, contre 57 millions d’euros en 2019. Ce sont par exemple de nouvelles places en crèches qui seront ouvertes à Mérignac ou à Calvi. C’est encore l’extension du déploiement du wifi en garnison et l’ouverture d’espaces Atlas pour simplifier la vie quotidienne de nos militaires.

Nous consacrons également 120 millions d’euros pour améliorer les conditions d’hébergement des militaires, notamment des militaires du rang de l’armée de terre, qui en ont parfois bien besoin. C’est pourquoi 540 millions d’euros iront à la maintenance et à l’entretien des bâtiments et des infrastructures. Je sais que vous êtes particulièrement vigilants sur ce sujet.

Ce projet de loi de finances n’oublie personne. Nous veillons également à améliorer les conditions de travail et de vie des agents civils du ministère des armées.

Au total, 300 emplois seront créés en net en 2020 pour renforcer les domaines prioritaires du ministère, à savoir le renseignement, la cyberdéfense et le numérique.

Ce projet de loi de finances n’oublie pas non plus les équipements du quotidien indispensables à nos forces. Par exemple, conformément à nos engagements, 100 % des militaires déployés en OPEX seront dotés en 2020 du nouveau treillis ignifugé, qui les protège mieux, et 12 000 nouveaux fusils HK416F seront distribués.

Les petits équipements du quotidien faisaient partie des promesses de la LPM ; nous tenons les engagements. Ce ne sont pas les seuls matériels vieillissants. Nous poursuivons cette année le renouvellement des capacités opérationnelles de nos armées.

Ce projet de loi de finances accélère la modernisation et le renouvellement de nos équipements. Je vous donne deux chiffres : en 2020, le montant des autorisations d’engagement inscrit dans le budget sera de 14, 6 milliards d’euros pour les programmes à effet majeur, soit une progression de près de 85 % en un an.

Il s’agit aussi d’un budget qui poursuit le vaste programme de renouvellement des capacités opérationnelles de nos armées. Beaucoup d’entre vous ont cité des exemples : l’arrivée des Griffon, 128 pour être exacte, la livraison des quatre premiers blindés Jaguar, du sous-marin Suffren, ou encore du troisième avion ravitailleur MRTT Phénix. J’ajouterai un autre chiffre parlant : sur la hausse de 1, 7 milliard d’euros, deux tiers seront consacrés aux programmes d’armement majeurs pour nos armées.

Comme vous pouvez le constater, chacune des armées pourra ressentir les effets de la remontée en puissance portée par cette LPM.

Ce budget pour la défense, c’est aussi la consolidation de notre autonomie stratégique et une contribution supplémentaire à celle de l’Europe.

Nous ne perdons pas de vue la préparation aux conflits du futur et l’innovation pour que nos forces aient toujours l’avantage sur le terrain, avec 821 millions d’euros spécifiquement consacrés à l’innovation à travers les contrats et études amont pour concevoir les technologies de demain. Il s’agit d’une hausse de 8 % par rapport à 2019. En outre, 448 millions d’euros seront consacrés à développer nos capacités spatiales et renouveler nos satellites. L’effort en matière de dissuasion se poursuivra, avec 185 millions d’euros de crédits d’études amont. Et de nouveaux cybercombattants vont rejoindre les rangs ; l’objectif est d’en recruter 1 000 d’ici à 2025.

Je ne répondrai pas à toutes les interpellations ou questions qui m’ont été adressées par les différents orateurs, car mon temps de parole est également compté ; je vous prie de bien vouloir m’en excuser. Je souhaite néanmoins répondre sur deux points particuliers qui ont été soulevés par les rapporteurs quant aux programmes structurants en cours de construction.

Je le rappelle, une étude d’architecture est d’ores et déjà engagée sur le SCAF. L’étape suivante est la réalisation de démonstrateurs technologiques. Je vous confirme les progrès dans les discussions qui ont lieu en ce moment entre Safran et MTU sur le moteur. Nous attendions une offre dans les prochains jours pour pouvoir notifier les contrats d’ici à la fin du mois de janvier ; je suis heureuse de vous annoncer que nous venons de la recevoir.

L’Eurodrone est un autre programme important. Cela a été dit, il appartient aux industriels de nous adresser une offre répondant aux attentes et aux besoins de nos armées tout en respectant l’enveloppe budgétaire fixée. Nous ne transigerons pas sur ces attentes de nature différente, mais qui sont néanmoins complémentaires. La souveraineté a un coût, mais pas n’importe lequel.

La responsabilité du ministère est de poursuivre sa transformation, de simplifier et d’améliorer la performance de ses processus. Vous le savez, c’est un sujet qui me tient particulièrement à cœur. Je m’assure continuellement que les chantiers de transformation et de modernisation du ministère avancent dans la bonne direction.

J’ai souhaité commencer par moderniser le ministère au plus près du terrain ; je vous remercie de l’avoir noté. Ainsi, les commandants de base de défense disposent aujourd’hui de plus de latitude et de moyens pour agir.

Mais il fallait aussi revoir l’organisation des états-majors, des directions et des services, pour les recentrer sur leurs missions stratégiques, les faire mieux travailler ensemble, les rendre plus efficaces, et dégager des effectifs pour les redéployer sur les fonctions prioritaires.

C’est en ayant cela à l’esprit que nous réduisons le nombre de strates hiérarchiques, que nous faisons en sorte de briser les silos et que nous délocalisons certains de nos services sur les territoires hors d’Île-de-France. Je suis particulièrement attachée à la qualité d’exécution des décisions que nous prenons. C’est bien sur le terrain que nos réformes prennent corps et que la loi de programmation militaire doit être mise en œuvre.

J’en arrive au terme de ce tour d’horizon du budget pour 2020 de la mission « Défense ». Pour résumer en quelques mots, c’est un budget au rendez-vous des engagements de la LPM 2019-2025, un budget qui accélère les investissements en matière d’équipements, qui appuie notre volonté de concevoir et déployer des mesures à hauteur d’homme et qui confirme nos ambitions.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Défense », figurant à l’état B.

En euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Défense

Environnement et prospective de la politique de défense

Préparation et emploi des forces

Soutien de la politique de la défense

Dont titre 2

20 659 130 456

20 659 130 456

Équipement des forces

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° II-517, présenté par M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Environnement et prospective de la politique de défense

Préparation et emploi des forces

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

Équipement des forces

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Pierre Laurent.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Nous proposons de déplacer environ 260 millions d’euros de crédits du programme 146, Équipement des forces, vers les programmes 178, Préparation et emploi des forces et 212, « Soutien de la politique de la défense ».

Certes, nous considérons que l’effort en matière de maintien de notre dissuasion nucléaire est indispensable. Mais, au-delà, la nécessité de faire un effort de modernisation s’accroît.

Nous suggérons donc de geler les crédits de la modernisation nucléaire à leur niveau de l’an dernier. Les crédits récupérés seraient consacrés à la préparation et à l’emploi des forces, ainsi qu’à un service qui nous tient particulièrement à cœur – certes, ce n’est pas le seul –, le service de santé des armées (SSA).

Le dernier rapport du Haut Comité d’évaluation et de la condition militaire, intitulé La mort, la blessure, la maladie, a mis en avant le haut niveau du service de santé des armées. Mais, nous le savons, les conditions de réalisation de la mission de ce dernier peuvent être fragilisées par un manque de moyens budgétaires et un sous-effectif moyen, qui se situe aux alentours de 9 %.

Les personnels du SSA ont de plus en plus recours à une délégation de mission auprès des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), qui sont par ailleurs extrêmement surchargés. Nous proposons donc de doter ces services de crédits supplémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Cet amendement vise à diminuer les crédits consacrés à la dissuasion nucléaire, à hauteur de 267 millions d’euros. Or la France a fait le choix de l’autonomie stratégique, ce qui implique de moderniser et de rénover la dissuasion nucléaire.

C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Florence Parly

Je connais la position de M. Laurent sur la dissuasion. Je ne crois pas que ce soit le bon cadre pour en discuter les fondements.

Je connais aussi, et je comprends, monsieur le sénateur, votre attachement à la politique de perfectionnement de l’hébergement de nos militaires, ainsi qu’à l’amélioration de la situation du service de santé des armées. C’est donc sur ces deux derniers points que je vous répondrai.

Nous avons parfaitement entendu votre appel – d’ailleurs, je crois que l’appel est général sur l’ensemble de ces travées – à répondre aux besoins de rénovation et de réhabilitation des conditions d’hébergement de nos militaires. C’est pourquoi nous avons décidé d’inscrire des crédits en progression de 74 % pour l’hébergement des militaires et de 24 % pour les logements familiaux dans le présent projet de loi de finances.

J’entends aussi votre préoccupation quant au service de santé des armées. Croyez bien que celui-ci est au cœur de mes priorités. Nous le savons, lorsque nous envoyons nos soldats sur des théâtres d’opérations extérieures, le SSA est leur assurance vie. Nous avons donc prévu de faire croître significativement les moyens de ce service, de 31 % par rapport à 2019 en crédits de paiement et de 43 % en autorisations d’engagement pour 2020, pour qu’il puisse accomplir ses missions et poursuivre la transformation dans laquelle il s’est engagé.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à Mme Christine Prunaud, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Prunaud

Madame la ministre, vous savez que nous sommes totalement d’accord avec vous sur l’importance du SSA.

Nous avons évoqué le traité de non-prolifération, et non le traité d’interdiction totale des armes nucléaires. Le représentant du Commissariat à l’énergie atomique que nous avons auditionné la semaine dernière en commission nous indiquait que la France tendait vers la réalisation des objectifs du traité de non-prolifération, puisque notre pays produisait 300 têtes nucléaires en moins cette année. Sont-elles moins puissantes ? Plus puissantes ? En tout cas, ces propos nous ont étonnés. En avez-vous eu connaissance, madame la ministre ? Nous aimerions avoir plus de précisions quant à la suppression de ces 300 têtes nucléaires.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Je le reprends, au nom de la commission des finances, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Je suis donc saisi d’un amendement n° II-819, présenté par M. de Legge, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Environnement et prospective de la politique de défense

Préparation et emploi des forces

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

Équipement des forces

TOTAL

SOLDE

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Nous reprenons l’amendement n° II-717, que son auteur, notre collègue Hervé Marseille, présentait comme un amendement d’appel.

Nous avions évoqué ici dès 2016 le devenir de l’Office national d’études et de recherches aéronautiques (Onera). Votre prédécesseur, madame la ministre, nous avait indiqué que certains terrains pourraient servir à financer cet organisme. Lorsque nous vous avions interrogée l’année dernière, vous nous aviez répondu qu’il s’agissait de l’une de vos préoccupations. Nous aimerions savoir où vous en êtes à cet égard.

Debut de section - Permalien
Florence Parly

Les auteurs de cet amendement souhaitent connaître le calendrier du transfert des activités de l’Onera des sites de Meudon et Châtillon vers celui de Palaiseau.

Une telle rationalisation des implantations franciliennes de l’Onera est l’un des objectifs majeurs de l’Office dans la période à venir. Elle a été intégrée dans les objectifs du contrat d’objectifs et de performance, qui prévoit, durant sa période d’exécution, les travaux pour rassembler les équipes et les installations de Meudon et Châtillon, avec une possibilité d’implantations supplémentaires à proximité directe d’un nouveau bâtiment de l’École polytechnique et de l’École nationale supérieure de techniques avancées (ENSTA) de Paris.

D’un montant global évalué à 160 millions d’euros pour une durée d’environ cinq ans, le projet a été autorisé en conseil d’administration extraordinaire à la fin de l’année 2018. Sa couverture financière est en effet assurée en grande partie par des produits de cessions immobilières sur les sites de Meudon et de Châtillon. D’ores et déjà, les communes ont fait part de leur intention de préempter les terrains, ce qui devrait faciliter et accélérer la procédure de cession.

Les ventes des emprises ne pouvant être réalisées qu’en fin d’opération, le besoin en trésorerie est important. Le financement sera assuré par une avance du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » dans l’attente de la récupération des produits de cession.

Un premier mouvement, qui concerne en particulier le bâtiment logistique, est prévu pour le second semestre 2021. Mais la grande majorité des mouvements devrait intervenir entre la fin de l’année 2023 et la fin de l’année 2024. À ce stade, la libération des sites de Meudon et de Châtillon est envisagée sur la période allant du mois d’octobre 2024 au mois de décembre 2024. Rien ne laisse donc penser pour l’instant qu’un financement supplémentaire – à vrai dire, je ne crois pas que vous souteniez forcément une telle option – sera nécessaire à la conduite de l’opération.

Je suis par conséquent défavorable à cet amendement, mais j’espère avoir répondu à vos interrogations

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Madame la ministre, je ne suis pas certain que vous ayez totalement répondu aux interrogations de M. Marseille, mais je ne suis pas le mieux placé pour le savoir.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Simplement, l’année dernière, vous aviez évoqué une échéance en 2022 ; j’ai le compte rendu de nos débats sous les yeux. À présent, vous parlez plutôt de 2024… Je crains donc que nous n’ayons le même amendement l’an prochain.

J’espère que vous pourrez maintenir la date de 2024 et que vous ne gagnerez pas deux nouvelles années supplémentaires. Compte tenu des échanges que nous venons d’avoir, je retire l’amendement n° II-819, en souhaitant vivement ne pas avoir besoin d’y revenir l’année prochaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° II-819 est retiré.

L’amendement n° II-674, présenté par MM. Todeschini, Kanner et Boutant, Mme Conway-Mouret, M. Devinaz, Mme G. Jourda, M. Mazuir, Mme Perol-Dumont, MM. Roger, Temal, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Environnement et prospective de la politique de défense

Préparation et emploi des forces

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

Équipement des forces

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Michel Boutant.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Boutant

J’avais demandé la parole avant d’apprendre le retrait de l’amendement précédent.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Il n’y a pas d’explication de vote sur un amendement retiré, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Boutant

Ce n’est pas une explication de vote, monsieur le président.

Je veux juste souligner, à la suite de Pascal Allizard, l’importance de l’Onera pour notre pays en termes de souveraineté.

Quand on se regarde, on se désole ; quand on se compare, on se console, dit l’adage.

Si nous comparons deux organismes similaires en France et en Allemagne, l’Onera et le DLR, nous nourrissons des inquiétudes à l’égard du programme SCAF. En effet, une partie des études seraient confiées – j’utilise à dessein le conditionnel, madame la ministre, en attendant d’éventuelles précisions de votre part – à l’équivalent allemand de l’Onera, quand bien même l’office français a pris une avance considérable dans ce domaine. Nous ne comprenons pas ce choix…

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Mon cher collègue, votre exposé sur l’Onera est sans doute très intéressant, mais il ne présente aucun lien avec l’amendement n° II-674.

Qui présente cet amendement au nom de votre groupe ?

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Avec votre permission, monsieur le président, je présenterai simultanément les amendements n° II-674 et II-675.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° II-675, présenté par MM. Todeschini, Kanner et Boutant, Mme Conway-Mouret, M. Devinaz, Mme G. Jourda, M. Mazuir, Mme Perol-Dumont, MM. Roger, Temal, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Environnement et prospective de la politique de défense

Préparation et emploi des forces

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

Équipement des forces

TOTAL

SOLDE

Vous avez la parole pour présenter les amendements n° II-674 et II-675, madame Conway-Mouret.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Madame la ministre, à travers ces amendements, je souhaite attirer une nouvelle fois votre attention sur la question de la dotation « carburants opérationnels », pour laquelle il est prévu 46 millions d’euros en 2020, sur la base d’un prix du baril de Brent qui diminuerait, passant de 63 dollars en 2019 à 59 dollars en 2020. Les coûts de carburant peuvent être importants pour les armées.

Lors de l’examen de la LPM, vous aviez accepté l’amendement du Sénat qui permet d’inscrire des crédits supplémentaires en construction budgétaire en cas d’incertitudes et de risques internationaux pouvant affecter le prix du pétrole. Ce mécanisme permet une sécurisation de ces crédits et leur réajustement annuel en loi de finances.

Nous souhaitons revenir sur ce sujet pour deux raisons liées à l’actualité.

Premièrement, la situation politique actuelle dans le golfe Persique, particulièrement instable, nécessite une attention toute particulière, en raison du fort risque de volatilité des cours.

Nous savons que vous êtes attentive à ce sujet, madame la ministre, et que le service des essences des armées veille tout particulièrement à ce que les contrats d’approvisionnement passés permettent d’atténuer les variations de cours et de couvrir les volumes nécessaires à la préparation et à l’activité opérationnelle des forces.

Nous pensons qu’il est nécessaire d’assurer une meilleure anticipation des coûts pour les armées alors que l’actualisation de l’enveloppe financière dédiée aux carburants opérationnels n’est prévue qu’en 2021, comme vous l’avez vous-même indiqué, en prenant en compte les évolutions constatées au cours des gestions 2019 et 2020.

Vous avez également indiqué qu’une extension du dispositif de couverture des risques était nécessaire au regard de la volatilité des cours. Peut-être pourrez-vous nous éclairer sur ce point.

Deuxièmement, début novembre, l’amiral Christophe Prazuck s’est inquiété des conséquences des nouvelles normes mondiales pour la marine de commerce civile applicables aux carburants raffinés sur le coût du carburant à destination des armées. L’amiral Prazuck a ainsi souligné que la marine nationale, tout comme ses homologues, allait se trouver en compétition avec la marine marchande sur le marché du raffinage.

Selon lui, « alors qu’auparavant, seules les marines de l’OTAN utilisaient exclusivement du diesel léger peu soufré, produit par des usines quasiment dédiées à notre seul usage, il va désormais nous falloir partager cette capacité de production avec la marine de commerce, qui utilise du diesel marine dont le taux de soufre, jusqu’ici toléré jusqu’à 1, 5 %, va devoir descendre à 0, 5 %, en application d’une norme internationale, ce qui entraînera une augmentation du coût du carburant ».

Cette avancée écologique est bienvenue, mais elle nous incite à être vigilants sur une augmentation possible des prix des carburants.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Les amendements n° II-674 et II-675 tendent à augmenter respectivement de 6, 5 % les dotations « carburants opérationnels » et « gazole ».

Je partage votre préoccupation sur les incertitudes liées au contexte géopolitique, ma chère collègue. Pour autant, j’ai cru comprendre dans vos propos qu’il s’agissait surtout d’amendements d’appel adressé au Gouvernement.

L’article 5 de la LPM dispose : « En cas de hausse du prix constaté des carburants opérationnels, la mission « Défense » bénéficiera de mesures financières de gestion et, si la hausse est durable, des crédits supplémentaires seront ouverts ».

Je demande plutôt le retrait de ces amendements, dans l’attente des explications de Mme la ministre.

Debut de section - Permalien
Florence Parly

Les crédits de carburant opérationnels sont évidemment essentiels pour l’activité des armées et ils font l’objet d’un pilotage spécifique par l’état-major des armées.

Pour 2020, la dotation pour les carburants s’élève à 446, 5 millions d’euros. Pour la dimensionner, le ministère des armées a pris en compte à la fois les volumes nécessaires à l’activité des forces et l’évolution du cours du baril de Brent, en retenant comme hypothèse de construction un cours de 60 dollars, comme en loi de finances pour 2019, et une parité de 1, 10 euro pour un dollar. À titre d’information, le cours du Brent était exactement de 60 dollars aujourd’hui même.

Par ailleurs, les contrats d’approvisionnement et les mécanismes de couverture qui sont mis en œuvre par le service des essences des armées permettent de lisser le prix d’acquisition sur une longue période et d’atténuer les variations du prix des carburants facturé aux armées.

Enfin, vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur spécial, l’article 5 de la LPM prévoit une clause de sauvegarde qui permet de garantir l’adéquation de l’adaptation des dépenses de carburant des forces armées.

Dès lors, et à ce stade, il ne me paraît pas nécessaire d’augmenter la ligne de crédits destinée à ces carburants. Mais nous aurons nécessairement l’occasion de reparler de ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Monsieur Todeschini, les amendements n° II-674 et II-675 sont-ils maintenus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Vous avez bien compris, madame la ministre, que nous sommes toujours prêts à vous aider, et que ces deux amendements témoignent de notre inquiétude, dans un contexte d’incertitude sur l’évolution du prix du baril de pétrole – l’Arabie Saoudite a d’ores et déjà annoncé que son prix augmenterait.

Comme vous l’avez rappelé, des clauses de garantie existent. Nous retirerons ces amendements, mais nous restons vigilants.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Les amendements n° II-674 et II-675 sont retirés.

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Défense », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Les crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

J’appelle en discussion l’article 75 ter ainsi que l’amendement tendant à insérer un article additionnel après l’article 75 ter, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Défense ».

Défense

Le I de l’article 39 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 est ainsi modifié :

1° À la fin de la dernière phrase du cinquième alinéa, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2024 » ;

2° La troisième phrase du sixième alinéa est complétée par les mots : «, sauf si le développement local de l’offre de logements ou si les orientations du projet d’aménagement ne justifient pas le maintien de l’usage de ces immeubles ou qu’aucun de ces organismes ne souhaite s’en porter acquéreur ».

L'article 75 ter est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° II-656, présenté par MM. Devinaz et Todeschini, Mme Perol-Dumont et M. Vallini, est ainsi libellé :

Après l’article 75 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement soumet à l’avis du Haut Conseil des finances publiques les projets de loi de programmation militaire ainsi que les projets de loi d’actualisation de la loi de programmation militaire.

La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert-Luc Devinaz

Par le biais de cet amendement, nous demandons au Gouvernement de soumettre la LPM et son actualisation à l’avis du Haut Conseil des finances publiques.

Cette mesure vise à renforcer le contrôle de l’action du Gouvernement, en soumettant la LPM à un avis non contraignant d’un organe indépendant.

Nous espérons ainsi une plus grande sincérité d’exécution de la LPM, et en particulier que le Gouvernement explique la sous-budgétisation chronique du coût des OPEX et améliore l’information des parlementaires dans le cadre du PLF.

L’adoption de cet amendement ne remettrait pas en cause la souplesse et l’adaptation de la LPM, qui est soumise à des aléas géopolitiques parfois imprévisibles. Il s’agit d’anticiper le plus en amont possible ces aléas, tout en assurant une exécution comptable fiable de la LPM.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

La commission est plus que réservée sur cet amendement, pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, il serait plus pertinent d’aborder cette question à l’occasion de la révision de la LPM que du vote du budget.

Ensuite, mon cher collègue, vous avancez l’argument de la sincérité du budget et de la difficulté à doter de façon adéquate les OPEX. Je note toutefois les efforts considérables de la LPM pour porter à son niveau le plus probable la provision pour les OPEX. Je m’étonne donc que l’on remette en cause la sincérité du budget l’année où la provision atteint 1, 1 milliard d’euros.

Je l’ai déjà dit, il faut faire crédit à ce gouvernement de présenter un budget primitif de la défense aussi sincère que possible. Nos réserves portent plus sur l’exécution que sur la programmation ou le budget primitif.

Enfin, on voit mal le Parlement contraindre ainsi le Gouvernement. Ce serait une injonction contraire à l’article 39 de la Constitution.

Pour ces trois raisons, l’avis de la commission est défavorable.

Debut de section - Permalien
Florence Parly

Même avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Il me semble de surcroît que la mission du Haut Conseil des finances publiques est définie par une loi organique. Mais cette référence apparaît de peu de poids à côté de l’article de la Constitution cité par l’excellent rapporteur spécial Dominique de Legge.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Madame la ministre, cet après-midi, la présidence finlandaise a proposé, pour le futur cadre financier européen 2021-2027, qui sera débattu lors du Conseil européen des 12 et 13 décembre, de diviser presque par deux les moyens du Fonds européen de la défense.

Au même moment, Thierry Breton, le commissaire européen français chargé de la mise en place de ce fonds, martelait pour sa part l’importance du développement d’une industrie européenne capable de disposer de technologies souveraines en matière de défense.

Dès lors, qui croire ?

Le Fonds européen de la défense, dont la création a été approuvée à une large majorité en avril dernier, est destiné à développer l’autonomie stratégique européenne que la France appelle de ses vœux, en finançant l’innovation stratégique dans le domaine militaire à laquelle les industriels français peuvent prétendre.

C’est la première fois que l’Europe investit en faveur de sa défense au-delà de la dimension capacitaire.

Si la proposition finlandaise était retenue – j’espère que tel ne sera pas le cas, et que la France va réagir –, le Fonds serait réduit de 5 milliards d’euros, passant de 11, 5 milliards d’euros à 6 milliards d’euros, contrairement aux engagements qui avaient été pris.

Madame la ministre, la LPM repose sur ce pari d’un développement rectiligne des coopérations européennes. On ne peut pas vous en vouloir d’être optimiste et ambitieuse pour la défense européenne. Nous le sommes aussi dans cette assemblée, sur toutes les travées, me semble-t-il.

Il nous paraît toutefois important, pour sa bonne réalisation, que la LPM puisse être évaluée de manière indépendante, comme le prévoit cet amendement, afin que les aléas puissent être anticipés.

J’entends toutefois les arguments du rapporteur spécial. Le risque d’inconstitutionnalité pose évidemment un vrai problème.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Défense ».

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 3 décembre 2019 :

À neuf heures trente :

Trente-cinq questions orales.

À quatorze heures trente et le soir :

Suite du projet de loi de finances pour 2020, adopté par l’Assemblée nationale (texte n° 139, 2019-2020) ;

Mission « Cohésion des territoires » et articles 73 à 75 ;

Mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » ;

Compte spécial « Développement agricole et rural » ;

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à minuit.