Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2020, nous arrivons à la discussion de l’ensemble de la mission « Cohésion des territoires ».
Pour ma part, je souhaite consacrer et concentrer mon intervention sur les crédits des programmes 112 et 162 relatifs à la question de l’aménagement du territoire.
Avant tout, je veux remercier notre collègue Louis-Jean de Nicolaÿ du travail effectué au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Pour avoir porté ce rapport pendant dix ans, je sais que la tâche n’est pas simple. Qui plus est, il est toujours désagréable pour un sénateur d’observer des diminutions de crédits consacrés à l’aménagement du territoire.
Vous me direz, monsieur le ministre, que les crédits ont augmenté cette fois-ci. C’est en effet le cas pour le Fonds national d’aménagement et de développement du territoire (FNADT). Il y a peut-être là une volonté de redynamiser le fonds – enfin, dirais-je, car je réclamais cette évolution depuis plusieurs années.
Cependant, l’augmentation ne concerne pas tous les outils inscrits dans les programmes précités.
Par exemple, les crédits alloués à la prime d’aménagement du territoire (PAT) vont de nouveau connaître une érosion, et celle-ci risque de lui être fatale.
Déjà divisés par quatre depuis 2013, les montants alloués dans ce PLF ne vont atteindre que 6 millions d’euros, contre 40 millions d’euros voilà encore quelques années. Aussi, monsieur le ministre, je m’interroge : souhaitez-vous la fin de la PAT, ce rabotage s’apparentant à une obsolescence programmée ?
Je tiens à rappeler deux choses concernant cette prime.
D’abord, c’est l’un des derniers leviers d’aide directe aux entreprises qui s’installent dans nos territoires. Sommes-nous en situation de plein emploi pour nous permettre autant de diminutions ? Je ne le crois pas !
Ensuite, l’étude commandée en 2017 par le Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET) au cabinet d’audit et de conseil Ernst & Young avait confirmé l’intérêt de la PAT comme outil de cohésion territoriale.
C’est un choix que je regrette fortement. C’est pourquoi je soutiendrai les amendements visant à rétablir le montant de l’année dernière, qui était beaucoup plus élevé.
Concernant l’Agence nationale de la cohésion des territoires, je m’interroge, non pas sur ses prérogatives, mais sur les moyens qui lui sont consacrés pour les exercer.
Il y a en effet un problème à cet égard. Avec seulement 49 millions d’euros de budget, comment peut-on prétendre que l’agence deviendra un vrai pôle de proximité, de soutien et d’expertise susceptible de répondre aux besoins des territoires ? Nous aurions souhaité plus de moyens pour que cette structure soit une véritable agence de revitalisation rurale, ce qui risque de ne pas être le cas.
J’en viens aux zones de revitalisation rurale (ZRR). Frédérique Espagnac, Bernard Delcros et moi-même avons récemment remis à Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, notre rapport sur le sujet. C’est un outil auquel nous croyons fortement ! Il s’agit de l’un des derniers éléments d’attractivité pour les territoires ruraux et de l’un des derniers moyens de résorption de leurs fragilités structurelles. En effet, la politique des pôles d’excellence rurale a été supprimée et le Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce (Fisac) a quasiment disparu, sans parler des contrats de ruralité, mis en place en 2017, et qui n’ont déjà plus de crédits alloués.
Dans ce contexte, les ZRR apparaissent comme les derniers phares dans la nuit de l’aménagement du territoire. À la croisée des chemins, il nous faut insuffler un nouvel élan au dispositif. C’est tout l’enjeu de notre rapport.
L’Assemblée nationale a voté un amendement prorogeant le dispositif jusqu’au 31 décembre 2020, soit pour six mois… Je ne pense pas que cela soit suffisant pour construire un zonage mieux ciblé et plus efficace pour la ruralité. C’est pourquoi nous proposons de proroger le classement actuel jusqu’au 31 décembre 2021, non pas pour le maintien d’un statu quo, mais bien pour prendre le temps de définir des critères plus adaptés afin de tenir compte des fragilités des territoires et d’améliorer le ciblage, ainsi que l’efficience des dispositifs associés au zonage.
Enfin, je souhaite conclure sur un point qui, je dois l’avouer, commence vraiment à nous excéder, les uns et les autres, même s’il sort du cadre des programmes en question. Il s’agit du fonctionnement opaque de la DETR.
Pour discuter de la cohésion des territoires, il me semble que nous avons besoin d’une cohésion des acteurs qui agissent dans et pour les territoires. Or le fonctionnement actuel de la DETR ne s’inscrit pas dans cette logique.
En tant que membre de la commission DETR de mon département, je peux vous affirmer que celle-ci n’a connaissance ni des arbitrages de la préfecture ni des critères ayant permis de donner un accord à un dossier, à un projet dont le montant de subvention est inférieur à 100 000 euros. D’ailleurs, nous n’avons la liste des dossiers retenus qu’avec un an de retard.
Au fond, j’observe que la réserve parlementaire était bien plus transparente que la DETR…