Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de budget pour 2020 des outre-mer était assez mal parti en octobre, la baisse des crédits envisagée agissant comme un signal en faisant craindre une récession économique aux territoires ultramarins.
Certes, ce projet de budget affiche 2, 5 milliards d’euros au compteur, mais il s’agit en fait de la reconduction depuis dix ans d’une enveloppe traditionnelle de 2 milliards d’euros, à laquelle s’ajoutent 500 millions d’euros de crédits correspondant à des recyclages problématiques décidés l’an dernier.
Nous avions aussitôt indiqué que les 170 millions d’euros de ponctions fiscales sur les ménages et les entreprises ultramarines pénaliseraient l’activité sur nos marchés économiques étroits.
Le Gouvernement s’était alors engagé à reverser le même montant sous forme de subventions. Toutefois, à supposer que cet engagement soit respecté dans le temps, chacun sait ce que cela implique en termes de procédures et de délais administratifs. Nous étions surtout inquiets des conséquences sur l’emploi de la bascule du CICE en allégements de charges, le manque à gagner de cette mesure ayant été évalué à un montant compris entre 66 millions et 180 millions d’euros.
Or que constate-t-on aujourd’hui ? Les organismes de sécurité sociale anticipent une baisse du recours aux allégements de charge. Cela signifie en clair que l’emploi risque de décliner et que les entreprises ne retrouvent pas dans les nouveaux allégements un dispositif aussi incitatif que le précédent.
À cela s’ajoute l’aggravation constante de la sous-consommation des crédits pour le logement, laquelle traduit une diminution de l’effort de construction et de réhabilitation. Loin de progresser vers l’objectif fixé à un niveau raisonnable dans la loi, on s’en éloigne.
Attention, les clignotants s’allument s’agissant de la baisse d’efficacité de la dépense publique. On assiste non pas au fameux effet multiplicateur keynésien, mais plutôt à un cercle vicieux : l’insuffisance des recyclages produit des effets récessifs, qui, à leur tour, réduisent la capacité des territoires à activer les crédits budgétaires.
Madame la ministre, il fallait absolument réagir tout de suite. J’ai plaidé en commission des affaires économiques pour un rattrapage immédiat dans ce budget des outre-mer. Je rappelle ici que les crédits des outre-mer sont largement déterminés par les mesures adoptées dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour paramétrer et le cibler les allégements de cotisations sociales sur certains secteurs économiques offensifs ou exposés.
Force est de reconnaître que le Gouvernement a accepté de redresser un peu la barre, grâce à une mesure adoptée à l’Assemblée nationale, dont le coût est estimé à 36 millions d’euros. Nous avons tenté ici, au Sénat, d’aller plus loin.
Nous devons poursuivre ce travail pour rendre les allégements de charges plus performants, car ils jouent un rôle essentiel dans la structuration économique et sociale de nos territoires. On ne peut pas, d’un côté, dire que c’est le manque d’ingénierie qui handicape la construction et, de l’autre, refuser d’en tirer les conséquences et d’aider les entreprises à retenir les talents ultramarins prêts à s’expatrier, le risque étant alors de voir ressurgir les tentations recentralisatrices.
Madame la ministre, mes chers collègues, le chômage mine nos territoires. Toute mon action, au sein de la Haute Assemblée, n’a qu’un seul but : favoriser le développement d’activités créatrices de valeur ajoutée et de lien social. Nous en avons tant besoin…
La commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Outre-mer ».