Séance en hémicycle du 5 décembre 2019 à 10h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • d’outre-mer
  • logement
  • outre-mer
  • ultramarin

La séance

Source

La séance est ouverte à dix heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2020, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 139, rapport général n° 140, avis n° 141 à 146).

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Eblé

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous allons achever demain matin, avec la mission « Travail et emploi », l’examen des crédits des trente-deux missions budgétaires. Nous entamerons ensuite l’examen des amendements sur les articles non rattachés de la seconde partie du projet de loi de finances, qui sont au nombre de 650. Ce nombre est assurément élevé et constitue un record, en tout cas par rapport aux dernières années.

De ce fait, la commission des finances a souhaité que la séance soit ouverte samedi, le matin et l’après-midi, sans doute jusque vers dix-huit heures – nous préserverons la journée de dimanche ! –, afin de poursuivre l’examen de ces amendements. Nous reprendrions nos travaux lundi matin et achèverions l’examen du projet de loi de finances mardi après-midi, par un vote solennel à la tribune, comme cela était initialement envisagé.

J’invite donc chacun à prendre ses dispositions pour cette journée de samedi travaillée.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Afin d’organiser au mieux nos travaux, la commission des finances propose que nous siégions samedi, le matin et l’après-midi uniquement, afin d’aller plus avant dans l’examen des articles non rattachés de la seconde partie du projet de loi de finances.

Il n’y a pas d’observation ?…

Il en est ainsi décidé.

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

SECONDE PARTIE

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Outre-mer » (et article 76 quindecies).

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à vous présenter les excuses de mon collègue Nuihau Laurey, rapporteur spécial des crédits de la mission « Outre-mer » pour la commission des finances. Ne pouvant être présent aujourd’hui, il m’a demandé de le remplacer.

Les crédits de la mission « Outre-mer » s’élèvent à 2, 5 milliards d’euros en crédits de paiement. C’est l’une des plus petites missions du budget de l’État, mais ses crédits ne retracent que 12 % de l’effort total de l’État en faveur des outre-mer, estimés à 22, 05 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 21, 5 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), portés par 90 programmes relevant de 30 missions. Les dépenses fiscales étant estimées à 4, 5 milliards d’euros, l’effort total de l’État devrait s’élever à 26, 55 milliards d’euros en AE et à 26 milliards d’euros en CP en 2020.

Les principales missions concernées sont la mission « Enseignement scolaire », qui porte 24, 8 % de l’effort de l’État en faveur de l’outre-mer, la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », avec 15, 3 %, la mission « Outre-mer », avec 12 %, la mission « Relations avec les collectivités territoriales », avec 10 %, et la mission « Écologie, développement et mobilité durables », avec 8 %.

Hors dépenses de personnels, les missions « Enseignement scolaire » et « Écologie » connaissent les hausses les plus importantes en valeur absolue, tandis que la mission « Outre-mer » connaît la plus forte diminution, soit une baisse de 105, 5 millions d’euros entre 2019 et 2020. À périmètre constant, les crédits alloués à la mission sont en baisse de 1, 3 % en AE et de 3, 9 % en CP par rapport à 2019.

Cette baisse me paraît regrettable dans la mesure où la mission a vocation à favoriser le rattrapage des territoires ultramarins. La situation économique des outre-mer apparaît en effet bien plus défavorable qu’en métropole.

À cet égard, la situation en matière de chômage est révélatrice. Ainsi, en 2018, le taux de chômage était de 35 % à Mayotte, de 24 % à La Réunion et de 23 % en Guadeloupe : c’est toujours plus du double que dans l’Hexagone. L’Insee a récemment relevé que les cinq départements d’outre-mer (DOM) faisaient partie des 10 % des régions européennes les plus touchées par le chômage. Le taux de chômage à Mayotte, qui est donc supérieur à 30 %, est le plus élevé de toute l’Union européenne.

Le programme 138, « Emploi outre-mer », rassemble les crédits visant à lutter contre ces forts taux de chômage. Plus spécifiquement, il comporte les crédits visant à compenser aux organismes de sécurité sociale les exonérations spécifiques de cotisations patronales. En 2019, le dispositif d’allégements et d’exonérations de charges patronales dans les outre-mer a été modifié afin de répondre entièrement aux dispositions de l’article 86 de la loi de finances pour 2018, qui a acté la suppression du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) au 1er janvier 2019.

En 2019, cette réforme avait entraîné une augmentation de plus de 42 % des crédits affectés à la compensation de ces exonérations de charges. Ces crédits subissent en 2020 une diminution de 2, 3 %, mais il semblerait que cette baisse soit purement technique, liée à la fiabilisation en cours des prévisions de compensation par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale.

Sur le fond, je tiens à dire que les nouveaux paramètres du régime issu de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 n’ont pas permis de pleinement compenser les effets de la suppression du CICE. Au total, la perte nette pour les territoires ultramarins pourrait être de l’ordre de 60 millions d’euros pour l’année 2019, selon les estimations de la Fédération des entreprises d’outre-mer (Fedom).

Je relève toutefois que le Gouvernement s’est montré réactif lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) à l’Assemblée nationale. En effet, le secteur de la presse a été intégré dans le régime dit de « compétitivité renforcée » et les seuils d’entrée dans ce régime ont été modifiés. De même, dans le secteur aérien, les cotisations de retraite complémentaire seront prises en compte dans le calcul des allégements généraux. Ces mesures permettront de récupérer 35 millions d’euros, même si des progrès restent à faire, s’agissant notamment des entreprises guyanaises.

Le programme 138 finance également les crédits du service militaire adapté (SMA), qui constitue un dispositif efficace d’insertion socioprofessionnelle des jeunes ultramarins, puisque 82 % des 6 000 jeunes qui y ont été accueillis se sont retrouvés insérés à l’issue de leur parcours de formation.

L’année 2020 verra la mise en place du plan SMA 2025, qui vise à renforcer l’encadrement et à améliorer l’adéquation entre l’offre du SMA et les besoins géographiques, conformément aux préconisations que Nuihau Laurey et moi avions formulées à l’issue du contrôle budgétaire que nous avions réalisé en 2019. Ainsi, 135 équivalents temps plein (ETP) seront recrutés sur le quinquennat pour l’encadrement, dont 35 en 2020. L’objectif fixé par le Gouvernement est un taux d’encadrement de 16, 3 % en 2022, contre 15, 6 % en 2018, mais 22 % en 2010.

Dans le domaine du logement, nous indiquons chaque année que les moyens mis en œuvre restent largement inférieurs aux besoins exprimés par tous les acteurs, publics ou privés. Nous notons pour 2020 une baisse particulièrement importante des crédits alloués, de plus de 3 % en AE et de plus de 13 % en CP. Ces crédits, qui sont malheureusement en baisse chaque année depuis 2014, atteindront en 2020 leur plus bas niveau historique sur les dix dernières années, alors que le déficit de logements est de plus en plus criant dans tous les territoires.

En matière de relance de l’activité économique, nous notons avec satisfaction le maintien, en 2020, du fonds exceptionnel d’investissement (FEI) à hauteur de 110 millions d’euros en AE. Je rappelle qu’en 2019 le Gouvernement avait demandé la suppression de 170 millions d’euros de dépenses fiscales en outre-mer. En contrepartie, il s’était engagé à utiliser les gains budgétaires ainsi réalisés pour abonder ce fonds destiné à soutenir le développement économique. Ce choix était justifié par le caractère plus « pilotable » des dépenses budgétaires, qui permettent un meilleur ciblage que la dépense fiscale. Il n’offre cependant aucune garantie quant à leur pérennité.

Avant de conclure, je tiens à exprimer ma satisfaction concernant le maintien du prélèvement sur recettes (PSR), qui existe depuis 2017, au profit de la collectivité territoriale de Guyane (CTG). D’un montant de 27 millions d’euros, celui-ci a vocation à compenser les pertes de recettes résultant de la suppression de la part d’octroi de mer de la collectivité. Sa transformation en dotation budgétaire, dont le versement aurait été conditionné au respect d’une convention par la CTG, aurait pu mettre en danger les finances de cette collectivité.

Enfin, permettez-moi de relayer la préoccupation de mon collègue Nuihau Laurey s’agissant de la participation de l’État au financement du régime de solidarité de la Polynésie française (RSPF). Cette participation a été supprimée dans l’attente de la mise en œuvre de nouvelles mesures faisant suite à une mission diligentée par l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) en 2018-2019. Pouvez-vous nous éclairer, madame la ministre, sur l’avenir de ce régime et de son financement ?

Au final, la commission des finances, suivant l’avis de ses deux rapporteurs spéciaux, a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer ». Je vous proposerai donc de la suivre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de budget pour 2020 des outre-mer était assez mal parti en octobre, la baisse des crédits envisagée agissant comme un signal en faisant craindre une récession économique aux territoires ultramarins.

Certes, ce projet de budget affiche 2, 5 milliards d’euros au compteur, mais il s’agit en fait de la reconduction depuis dix ans d’une enveloppe traditionnelle de 2 milliards d’euros, à laquelle s’ajoutent 500 millions d’euros de crédits correspondant à des recyclages problématiques décidés l’an dernier.

Nous avions aussitôt indiqué que les 170 millions d’euros de ponctions fiscales sur les ménages et les entreprises ultramarines pénaliseraient l’activité sur nos marchés économiques étroits.

Le Gouvernement s’était alors engagé à reverser le même montant sous forme de subventions. Toutefois, à supposer que cet engagement soit respecté dans le temps, chacun sait ce que cela implique en termes de procédures et de délais administratifs. Nous étions surtout inquiets des conséquences sur l’emploi de la bascule du CICE en allégements de charges, le manque à gagner de cette mesure ayant été évalué à un montant compris entre 66 millions et 180 millions d’euros.

Or que constate-t-on aujourd’hui ? Les organismes de sécurité sociale anticipent une baisse du recours aux allégements de charge. Cela signifie en clair que l’emploi risque de décliner et que les entreprises ne retrouvent pas dans les nouveaux allégements un dispositif aussi incitatif que le précédent.

À cela s’ajoute l’aggravation constante de la sous-consommation des crédits pour le logement, laquelle traduit une diminution de l’effort de construction et de réhabilitation. Loin de progresser vers l’objectif fixé à un niveau raisonnable dans la loi, on s’en éloigne.

Attention, les clignotants s’allument s’agissant de la baisse d’efficacité de la dépense publique. On assiste non pas au fameux effet multiplicateur keynésien, mais plutôt à un cercle vicieux : l’insuffisance des recyclages produit des effets récessifs, qui, à leur tour, réduisent la capacité des territoires à activer les crédits budgétaires.

Madame la ministre, il fallait absolument réagir tout de suite. J’ai plaidé en commission des affaires économiques pour un rattrapage immédiat dans ce budget des outre-mer. Je rappelle ici que les crédits des outre-mer sont largement déterminés par les mesures adoptées dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour paramétrer et le cibler les allégements de cotisations sociales sur certains secteurs économiques offensifs ou exposés.

Force est de reconnaître que le Gouvernement a accepté de redresser un peu la barre, grâce à une mesure adoptée à l’Assemblée nationale, dont le coût est estimé à 36 millions d’euros. Nous avons tenté ici, au Sénat, d’aller plus loin.

Nous devons poursuivre ce travail pour rendre les allégements de charges plus performants, car ils jouent un rôle essentiel dans la structuration économique et sociale de nos territoires. On ne peut pas, d’un côté, dire que c’est le manque d’ingénierie qui handicape la construction et, de l’autre, refuser d’en tirer les conséquences et d’aider les entreprises à retenir les talents ultramarins prêts à s’expatrier, le risque étant alors de voir ressurgir les tentations recentralisatrices.

Madame la ministre, mes chers collègues, le chômage mine nos territoires. Toute mon action, au sein de la Haute Assemblée, n’a qu’un seul but : favoriser le développement d’activités créatrices de valeur ajoutée et de lien social. Nous en avons tant besoin…

La commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Outre-mer ».

Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, LaREM et SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, au nom de la commission des affaires sociales.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jocelyne Guidez

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’interviens en remplacement de ma collègue Nassimah Dindar, qui me prie de bien vouloir l’excuser.

Les crédits de la mission « Outre-mer » ne représentent qu’un peu plus d’un dixième de l’ensemble de l’effort budgétaire assumé par l’État à destination des territoires ultramarins.

La commission des affaires sociales est à la fois satisfaite du maintien du niveau des crédits de la mission au-dessus du seuil symbolique de 2, 5 milliards d’euros, et réservée sur la lisibilité et la répartition de ces crédits.

Le programme « Emploi outre-mer », qui concentre plus de la moitié des dépenses de la mission, soit 1, 47 milliard d’euros, retrace pour l’essentiel la compensation budgétaire des exonérations de cotisations sociales dites Lodéom, dont bénéficient les entreprises de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane, de La Réunion, ainsi que de Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

Par ailleurs, notre commission, qui a récemment réaffirmé son attachement au principe de la compensation intégrale par le budget de l’État des pertes de recettes pour la sécurité sociale, s’étonne de la baisse du montant affecté à cette compensation. Non seulement cette baisse suscite l’inquiétude légitime des acteurs économiques ultramarins, mais elle ne semble pas tenir compte des mesures incitatives nouvelles inscrites dans le PLFSS.

Le programme « Conditions de vie outre-mer » comprend principalement le financement du logement social. Cette ligne budgétaire unique mobilise en 2020 un peu plus de 215 millions d’euros en autorisations d’engagement, soit une baisse de 3, 15 % par rapport à 2019. Notre commission a de nouveau alerté avec force sur le niveau et le pilotage des crédits attribués à cet objectif spécifique.

Nous serons très attentifs aux orientations données par le ministère, qui entend désormais distinguer les opérations de construction et les opérations de réhabilitation, afin de déployer une politique du logement moins uniforme et plus attentive aux besoins spécifiques de chaque territoire.

Néanmoins, nous ne cachons pas notre inquiétude. La situation particulière de la Guyane et de Mayotte, où l’explosion démographique entretient de manière alarmante le phénomène des logements insalubres, au nombre de 50 000 dans ces deux territoires, appelle d’urgence la construction de logements neufs.

En outre, les budgets pour les domaines sanitaire et social prévus dans le cadre de la présente mission sont disparates et limités, mais ils demeurent des outils essentiels d’appui aux politiques menées par les différents ministères. À ce titre, ils doivent être préservés.

Sous ces réserves, et en renouvelant son souhait que les crédits sociaux fassent l’objet d’un pilotage plus fin et plus adéquat, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer ».

Applaudissements sur les travées des groupes UC et SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Notre collègue rapporteur ne dispose que de trois minutes pour s’exprimer : c’est trop peu !

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de budget pour l’outre-mer que nous propose le Gouvernement est en diminution par rapport à 2019, mais cette baisse s’explique. Elle est due en premier lieu à des mesures de périmètre. En deuxième lieu, le projet de budget ne prend pas en compte le produit de cessions qui viendront abonder la ligne budgétaire unique. Enfin, en troisième lieu, cette baisse s’explique par la sous-exécution récurrente du budget de la mission « Outre-mer ».

Il n’est pas acceptable, alors que nos territoires ultramarins souffrent de retards de développement, que, chaque année, des crédits soient rendus à l’État, faute de projets suffisamment aboutis pour les dépenser. Plusieurs mesures de soutien à l’ingénierie seront mises en place en 2020. J’espère qu’elles seront suffisantes pour que les crédits attribués soient pleinement consommés.

La mission « Outre-mer » ne représente par ailleurs qu’environ 10 % des crédits consacrés aux territoires ultramarins. En 2020, ceux-ci sont en augmentation de plus de 15 %.

Ces éléments ont conduit la commission des lois à émettre un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer ».

J’ai souhaité aborder plus précisément, à l’occasion de mon avis, l’action du budget de la mission consacrée à l’insertion des collectivités ultramarines dans leur environnement régional. Dans la mesure où cette thématique a fait l’objet de modifications législatives d’ampleur en 2016, il m’a semblé intéressant, trois ans après, d’en faire un bilan.

Une bonne insertion de ces territoires dans leur bassin géographique permet en effet aux collectivités à la fois d’affirmer leur potentiel économique, culturel, scientifique et technique, mais aussi de contribuer au rayonnement de la France dans toutes les zones du monde.

Le bilan diffère cependant selon les zones et, à l’intérieur de ces zones, suivant les collectivités. De manière générale toutefois, on constate plutôt une sous-utilisation par les collectivités de leurs compétences et des dispositifs de financement existants.

Afin d’encourager l’utilisation par les collectivités ultramarines de leurs compétences internationales, une politique de soutien a été mise en place par l’État : ambassadeurs délégués, conférences de coopérations régionales et, récemment, conseillers diplomatiques auprès des préfets permettent de favoriser l’insertion des collectivités dans leur bassin géographique. À mon sens, cette politique d’encouragement doit être renforcée, et certains blocages levés.

Il importe ainsi de favoriser les liens entre les habitants des différents territoires. Nous devons également travailler sur l’acceptation des actions de coopération décentralisée par les pays et territoires voisins. Enfin, la coopération décentralisée est pensée pour être réalisée entre collectivités de même taille et aux compétences équivalentes. Ce n’est toutefois pas toujours le cas, et l’État doit pouvoir prendre le relais des collectivités une fois les projets identifiés et lancés à l’échelon local.

Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur des travées du groupe UC. – M. le président de la commission des finances applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Esther Benbassa.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les territoires ultramarins souffrent de nombreux maux et les conditions de vie y deviennent de plus en plus difficiles pour nos concitoyennes et concitoyens.

L’économie locale tourne au ralenti, comme en attestent notamment les taux de chômage élevés. C’est ainsi qu’à Mayotte le taux de chômage atteint 30 %, ce qui en fait le département où le taux d’actifs sans emploi est le plus élevé de l’Union européenne. En conséquence, le pouvoir d’achat est évidemment en berne dans des territoires qui cumulent revenus faibles et prix particulièrement élevés, de 20 % à 30 % supérieurs à ceux de la métropole.

Il faut en outre savoir que les denrées achetées en outre-mer ne sont même pas d’une qualité équivalente à celle des produits que nous consommons dans l’Hexagone. Des conservateurs extrêmement nocifs pour la santé y sont ajoutés, afin qu’elles soient préservées lors de l’importation depuis la France métropolitaine. Ces additifs alimentaires sont particulièrement dangereux et entraînent une surreprésentation des cas d’hypertension artérielle et de diabète dans les territoires ultramarins. À titre de comparaison, seuls 5 % des Français sont diabétiques à l’échelle nationale, contre 14 % de la population réunionnaise.

Nos concitoyens d’outre-mer ne font pas face qu’à ces seuls problèmes de santé publique. Ils doivent également composer avec un climat tropical et des logements insalubres, propices à la prolifération de maladies et d’infections à transmission vectorielle.

Pour parfaire ce tableau problématique, il faut savoir que les territoires ultramarins ne bénéficient même pas d’infrastructures de soins adaptées pour accueillir les populations particulièrement touchées. Les hôpitaux y sont engorgés et ne disposent pas de moyens suffisants en matériels et en personnels. C’est d’ailleurs tout le tissu des services publics ultramarins qui est sinistré.

Sans dotations, et alors que l’État est en perpétuel recul dans ces territoires, les populations d’outre-mer sont les laissés-pour-compte de nos politiques publiques. La dématérialisation des services de l’État voulue par le Gouvernement aggrave encore davantage cette situation, dans des territoires où l’abonnement à internet coûte 40 % de plus qu’en métropole.

Madame la ministre, la colère monte dans les territoires d’outre-mer, à juste titre, mais peut-être êtes-vous indifférente à ces complaintes ? Peut-être l’exécutif s’estime-t-il trop éloigné pour entendre les souffrances qui sont exprimées ? §C’est en tout cas ce que nous pouvons déduire de l’examen en détail des crédits alloués à la mission « Outre-mer ».

Comment décemment justifier, malgré la situation insoutenable de nos compatriotes ultramarins, la réduction de 6, 45 % par rapport à l’an passé du budget des outre-mer, alors même que cette mission était déjà sous-dotée dans le PLF 2019 ?

Comment expliquer que, par un amendement déposé à la dernière minute, votre majorité à l’Assemblée nationale ait décidé de raboter encore de 10 millions d’euros ce budget, dont 8 millions d’euros sur le programme « Conditions de vie outre-mer » ?

La cure d’austérité se poursuit, et rien n’est fait pour doter les DROM-COM (départements et régions d’outre-mer et collectivités d’outre-mer) d’un véritable budget, de moyens d’action allant dans le sens de la justice sociale, de l’émancipation humaine et de la protection de la biodiversité.

Soumis au dogme libéral, l’exécutif estime que le progrès social dans ces territoires passera par une plus grande compétitivité du tissu économique local. Ainsi, le Gouvernement a fait le choix de réduire massivement les cotisations sociales des entreprises ultramarines, au détriment des dotations destinées aux services publics et au logement, lesquelles sont sous-budgétisées.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, comme les banlieues et les campagnes sur le territoire métropolitain, les outre-mer sont aujourd’hui laissés à l’abandon par les pouvoirs publics. Ne laissons pas les 2, 7 millions de Français ultramarins sans aides, avec un pouvoir d’achat très faible. Plus que jamais, ils ont besoin d’un retour de l’État pour redynamiser leur économie et redéployer des services publics là où ils sont inefficients.

Les habitants de Mamoudzou, Cayenne et Fort-de-France ont les mêmes droits que ceux de Paris, Lyon ou Strasbourg ! Ils ne sont pas des citoyens de seconde zone. Que le Gouvernement cesse de les traiter comme tels !

Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants. – Mmes Sylvie Vermeillet et Viviane Malet applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lagourgue

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous partageons tous le désir d’aider les outre-mer à relever les défis auxquels ils sont confrontés. Nous avons tous le devoir de parvenir à instaurer une égalité réelle entre tous les territoires, afin que chaque citoyen puisse vivre avec le sentiment d’appartenir à une seule et même communauté. C’est pourquoi le projet de budget pour l’outre-mer revêt, chaque année, un intérêt particulier.

Les crédits de la mission « Outre-mer » pour 2020, répartis en deux programmes, consacrés l’un à l’emploi outre-mer, l’autre aux conditions de vie outre-mer, sont en diminution. Ils s’élèvent à 2, 56 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 2, 41 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une réduction de respectivement 3, 96 % et 6, 45 % par rapport à la loi de finances pour 2019.

Cette diminution s’explique en partie par des mesures de périmètre et de transfert. Une fois celles-ci prises en compte, la baisse se limite à 1, 30 % en autorisations d’engagement et à 3, 88 % en crédits de paiement. Cette diminution est justifiée par le Gouvernement par une adaptation à la sous-exécution récurrente des crédits consacrés aux conditions de vie outre-mer.

Alors que le Président de la République a reconnu la nécessité de donner aux outre-mer les moyens de leur développement, il est regrettable de constater que, chaque année, des crédits ne sont pas engagés…

Debut de section - Permalien
Annick Girardin

Non : « pas consommés » !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lagourgue

… faute de projets à la solidité suffisante.

Il est important de le souligner, les crédits de la mission « Outre-mer » ne constituent néanmoins qu’un peu plus de 9 % de l’effort financier global de l’État en faveur des outre-mer. Celui-ci s’élève en 2020 à 26, 55 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 26 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une hausse de respectivement 15, 3 % et 17, 3 % par rapport à 2019. Cette forte augmentation vient compenser la baisse des crédits de la mission « Outre-mer » et démontre la prise en compte, par le Gouvernement, de la nécessité d’un effort important en faveur des territoires ultramarins.

Je voudrais aborder plus spécifiquement l’insertion des collectivités ultramarines dans leur environnement régional et la nécessité de l’encourager.

En effet, malgré des compétences larges et des politiques de soutien à l’insertion des collectivités ultramarines dans leur environnement régional, ces dernières ne se sont pas encore entièrement saisies des possibilités qui leur sont offertes. Il apparaît ainsi primordial de les inciter à faire usage des compétences dont elles disposent et à recourir aux nombreux instruments de financement existants.

Avant de conclure, madame la ministre, je voudrais m’arrêter sur la situation critique du logement.

Le logement ultramarin exige des mesures fortes ! Le logement est la base de la vie familiale. C’est aussi un facteur d’attractivité pour les étudiants. Le logement des seniors est également une préoccupation croissante, en particulier aux Antilles, qui connaissent un vieillissement démographique accéléré. Économiquement, le BTP est un secteur vital pour les outre-mer ; il s’écroule sur certains territoires, comme à La Réunion.

Le budget pour 2020 honore les engagements pris dans le cadre du Livre bleu des outre-mer, qui définit les priorités du quinquennat pour les territoires ultramarins, et des contrats de convergence et de transformation. Il est conforme aux perspectives du plan SMA 2025 et de la Trajectoire outre-mer 5.0.

Pour ces raisons, le groupe Les Indépendants votera les crédits de la mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2020.

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à défaut de pouvoir être aux côtés de ceux qui se battent ici ou chez moi contre la politique du Gouvernement, je serai ici, en solidarité, un militant.

Nous sommes prêts ici à discuter des 2, 5 milliards d’euros que porte en affichage cette mission et même à défendre des amendements pour tenter de l’améliorer. Le rituel est bien rodé ; vous nous opposerez sans aucun doute votre ardeur au travail et la pertinence de votre politique, madame la ministre.

À mon sens, il est inutile de se lancer dans des débats ésotériques ; je ne parlerai pas de chiffres. Après un temps d’observation, je préfère vous dire le fond de ma pensée sur cette nouvelle politique de l’État outre-mer.

Au fond, le débat ne porte pas sur l’existence ou non d’un réflexe outre-mer. Il existe bien : c’est celui de l’égalitarisme forcené. La solidarité nationale se mégote, forçant chacun à trouver son propre salut : en somme, l’individualisme dans toute sa splendeur. Docteure en soupe salée, vous infligez une purge qu’aucun gouvernement n’avait jusqu’alors osé entreprendre.

D’ailleurs, étrangement, cette politique n’est que très faiblement défendue par ceux qui sont censés l’incarner sur le terrain. Pourtant conscients qu’une telle politique ne passe pas, les marcheurs, tétanisés, spectateurs impuissants des mauvaisetés infligées, ne sont pas entendus lorsqu’ils font remonter l’état des opinions.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Ce ministère, bunkerisé dans ses certitudes et droit dans ses bottes, n’arrive donc plus à masquer sa solitude volontaire. Il n’est ni défendu, ni écouté, ni respecté. Chacun peut mesurer que, année après année, sans doute par résignation, le ministère perd tous ses arbitrages et s’isole davantage.

Mettez-vous à la place de vos partisans : tous les instruments de politique économique sont, au mieux, rognés, au pire, supprimés. Je pourrais évoquer les 100 millions d’euros de TVA non perçue récupérable (TVA NPR) récupérés, la réforme de l’abattement fiscal sur le revenu, le coup d’arrêt à la politique du logement, la surtaxation du rhum, la quasi-suppression des contrats aidés, l’atténuation du fonds d’investissement de proximité dans les départements d’outre-mer (FIP-DOM), hier la casse de la fonction publique et du système d’assurance chômage et demain votre réforme néolibérale des retraites ;…

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

… et j’en passe…

Des symboles disparaissent également : France Ô, la circonscription européenne, la Cité des outre-mer.

On vide donc des poches qui, vu d’ici, seraient trop pleines. On agite même tous les marronniers des gnomes de Bercy et on fait siennes leurs obsessions en menaçant les acquis sociaux : là, je pense singulièrement aux congés bonifiés ou à la majoration de vie chère.

Pour défense, le ministère choisit soit l’attaque, soit la défausse.

Ainsi, on attaque lorsque l’on prétend que le financement de notre développement est devenu trop coûteux. Alors, on ligote, on rabote, on coupe, on supprime… C’est l’autre nom du cartiérisme budgétaire.

Plus pernicieuse est en fait la défausse lorsque vous affirmez que l’incapacité subite des collectivités et des acteurs locaux, singulièrement de l’ingénierie locale, est la seule explication aux réductions budgétaires. Cet argument m’est parfaitement insupportable. Jamais donc l’État ne s’interroge sur sa propre responsabilité dans les sous-consommations, notamment le changement de paradigme, passant de la défiscalisation au crédit d’impôt non préfinancé.

Je l’affirme : l’État ne s’empresse pas pour accompagner l’avancement des dossiers et les bloque même parfois.

Alors, face à la désespérance et à la montée des insatisfactions, on ruse, on enrobe à grands coups de communication. On survalorise la moindre annonce, on lance des « trajectoires », on présente avantageusement des contrats de convergence sous-dotés, on prétend contre l’évidence faire le bonheur des gens par des paillettes et du strass, qui ne sont que de la poudre aux yeux. En cela, je dois vous reconnaître de la cohérence. Vous mettez bien en œuvre la pierre angulaire de votre politique annoncée en début de quinquennat : la frugalité !

Ce gouvernement a ainsi annihilé le sens d’une démarche que tous les élus ultramarins portent depuis des décennies. Cette démarche consistait à cranter petit à petit les avancées sociales et économiques obtenues de haute lutte.

Au final, j’en arrive à me dire que le ministère se réduit désormais à sa seule capacité à diriger ses préfectures. Quand tout n’est pas recentralisé à Paris, ce sont aux préfets, qui, pour certains, se prennent pour des proconsuls, que revient la tâche de tout régenter.

Mme Victoire Jasmin applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Madame la ministre, nous demandons de vraies concertations, une réelle différenciation et une véritable transparence sur la fongibilité des crédits entre collectivités, que vous avez seule engagée.

Je suis – il est vrai – amer, mais je suis tout de même prêt à saluer une nouvelle fois votre courage d’avoir assumé la responsabilité pleine et entière de l’État et des autres acteurs privés dans le scandale du chlordécone. Je salue également votre maxima mea culpa lorsque vous revenez, dans ce PLF, sur la suppression des allocations logement (AL) accession.

Nous restons ouverts et en attente. Néanmoins, vous l’aurez compris, le groupe socialiste votera résolument contre ce budget !

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

J’invite chaque orateur à essayer de respecter le temps de parole qui lui est imparti.

La parole est à M. Guillaume Arnell.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Arnell

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « Il n’y a pas un outre-mer, mais des outre-mer », écrivait l’ancien Premier ministre Lionel Jospin dans son ouvrage Le Temps de répondre.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Arnell

Ces mots prennent tout leur sens au moment où nous examinons les crédits de la mission qui regroupe une partie des politiques à destination des territoires ultramarins.

Il est en effet difficile de placer dans un même ensemble des territoires situés aux quatre coins du globe, qui ont comme point commun d’être des entités à part entière du territoire national, même si, en dépit de la loi pour l’égalité réelle outre-mer, certains de nos compatriotes persistent à croire que ce sont des entités entièrement à part. J’interprète cela comme un appel à faire encore davantage, madame la ministre.

À cette première complexité s’ajoute une difficulté plus grande encore : dissocier les crédits de la mission, d’une part, et le budget total alloué aux outre-mer, d’autre part. En effet, la politique outre-mer est transversale. Elle représente un total de 18, 5 milliards d’euros de crédits.

Or la mission que nous examinons aujourd’hui ne regroupe que deux programmes : le programme 138, « Emploi outre-mer », et le programme 123, « Conditions de vie outre-mer ». Ensemble, ils représentent environ un dixième du budget global dédié à l’outre-mer, avec 2, 5 milliards d’euros en autorisations d’engagement, en diminution de presque 4 % par rapport à l’année dernière, tandis que les crédits de paiement accusent une baisse de 6, 5 %, pour s’établir à 2, 4 milliards d’euros.

Il faut bien entendu examiner ces chiffres à périmètre constant, puisque certaines mesures concernant la Polynésie française sortent du périmètre de la mission, tandis que d’autres, comme celles qui concernent la Guyane, y entrent.

Une fois que ces éléments sont pris en compte, il en ressort que les autorisations d’engagement sont stables, tandis que les crédits de paiement subissent une baisse globale de 4 %, soit 100 millions d’euros. Comment ces chiffres s’articulent-ils au sein des deux programmes ?

Tout d’abord, le programme 138, « Emploi outre-mer », qui finance les actions visant à assurer le développement économique et la création d’emplois, connaît une légère baisse due à la diminution des crédits affectés au remboursement aux organismes sociaux des exonérations de cotisations de sécurité sociale spécifiques aux outre-mer.

Il est en effet important de le rappeler, près de 73 % des crédits de ce programme viennent couvrir la compensation des exonérations Lodéom en faveur des entreprises ultramarines, mais ce dispositif est indispensable pour leur vitalité.

L’année dernière, le Gouvernement s’était engagé à compenser la suppression de 170 millions d’euros de dépenses fiscales en outre-mer en orientant les gains budgétaires vers le fonds exceptionnel d’investissement (FEI) et les dépenses visant à favoriser le développement économique des territoires.

Le Gouvernement a tenu ses engagements sur ce point, puisque les crédits sont bien fléchés vers le FEI et vers une nouvelle action n° 04, Financement de l’économie.

Néanmoins, au sujet des compensations, permettez-moi, madame la ministre, de m’attarder quelques instants sur la situation de mon territoire, Saint-Martin.

Au mois de novembre 2017, le Premier ministre s’était engagé à ce que l’État verse entre 2018 et 2020 un appui annuel de 50 millions d’euros par an en fonctionnement, certes assorti de conditions, pour compenser les pertes éventuelles de recettes fiscales faisant suite au passage de l’ouragan Irma.

En fait, seuls 25 millions d’euros ont été versés en 2018. Pour 2019, la collectivité vient d’être avisée que l’enveloppe ne serait finalement que de 16, 1 millions d’euros, fléchés en investissement, et non plus en fonctionnement et à consommer avant le 31 décembre !

À supposer que la collectivité ait pu faire des erreurs de jugement ou de stratégie, cela ne justifie pas pour autant le changement brutal de règles, qui va avoir des conséquences sur la population saint-martinoise et ralentir la reprise de l’activité économique.

Madame la ministre, je vous propose de nous revoir rapidement pour trouver ensemble une voie médiane et sortir du conflit entre État et collectivité d’outre-mer, dont la seule victime est – je le répète – la population de Saint-Martin.

Le reste des crédits du programme 138 vient financer le service militaire adapté, qui est particulièrement performant, et l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité (Ladom). Ces deux outils en faveur de nos jeunes doivent être pérennisés.

Les crédits pour 2020 du programme 123, « Conditions de vie outre-mer », s’élèvent à près de 809 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 659 millions d’euros en crédits de paiement. L’instrument principal de ce programme est la ligne budgétaire unique (LBU), avec 215 millions d’euros en autorisations d’engagement et 190 millions d’euros en crédits de paiement en 2020, soit une baisse particulièrement forte, de l’ordre de 13 %. Ce niveau constitue le taux historiquement le plus bas de ces dix dernières années. Quand on connaît la situation dégradée du logement en outre-mer, ce choix budgétaire est difficilement compréhensible.

Je note enfin que l’action n° 04, Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports, rassemble un montant de 5, 6 millions d’euros de crédits, en diminution de 73, 6 %. Quelle est la véritable politique que souhaite mener le Gouvernement dans ces matières ? N’avons-nous pas les mêmes droits et le même accès au sport et à culture ?

Malgré les réserves que je viens d’exposer, je préfère voir le verre à moitié plein plutôt que le verre à moitié vide. Aussi, mes collègues du groupe RDSE et moi-même approuverons les crédits de la mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Karam

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme chaque année, nous voici réunis pour l’examen des crédits de la mission « Outre-mer ». Comme chaque année, il nous faut répondre à de grandes attentes dans nos territoires, à la hauteur des enjeux auxquels ils font face.

Avec 2, 5 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 2, 4 milliards d’euros en crédits de paiement, c’est un budget équilibré qui nous est présenté par le Gouvernement.

Il faut le rappeler, le budget total alloué aux outre-mer, à la hausse en 2020, s’élève, tous ministères confondus, à 26, 5 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 26 milliards d’euros en crédits de paiement.

Dans le détail, la mission « Outre-mer » bénéficie d’un budget résolument tourné vers l’emploi, car elle favorise la formation professionnelle et l’apprentissage et prolonge les engagements en matière de développement économique : exonérations de charges sociales, renforcement des zones franches d’activité, aides à la création d’entreprise.

Vous le savez, madame la ministre, le Sénat s’est fortement engagé depuis un an aux côtés des socioprofessionnels dans la réforme des exonérations de cotisations sociales. Dans le PLFSS 2020, nous avons, là encore, modifié les paramètres du dispositif.

Pour autant, nous devons reconnaître l’effort consenti par le Gouvernement, estimé à 36 millions d’euros, dans la clause de revoyure. De même, chers collègues, reconnaissons, chiffres du chômage à l’appui, l’intérêt d’une telle mesure pour nos territoires et nos entreprises.

On ne le dit peut-être pas suffisamment, mais, dans les secteurs renforcés, zéro charge jusqu’à deux SMIC, c’est en définitive 80 % des salaires qui seront entièrement exonérés de charges patronales.

Certains souhaiteraient que le dispositif permette le retour au pays de nos jeunes diplômés. Il peut y contribuer. Cependant, ne perdons pas de vue notre priorité commune : lutter contre le chômage.

En ce domaine, la tendance à la baisse qui se poursuit en 2019, sauf à Mayotte, semble nous dire que nous sommes sur la bonne voie. En Guyane, de 22 % en 2017, le taux de chômage est passé à 19 % un an plus tard.

Évidemment, personne ici ne peut s’en satisfaire. Nous pouvons et nous devons faire mieux.

Dans le cadre de la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer (Cnépéom), la députée Cécile Rilhac et moi-même avons remis un rapport d’évaluation sur la formation continue. Je veux insister sur l’une de ses recommandations : lutter contre l’illettrisme. Il s’agit désormais d’une priorité absolue, tant pour les jeunes que pour les adultes ; c’est une condition nécessaire à l’insertion économique et sociale. Nous devons nous y engager pleinement.

En cette matière, le SMA joue déjà un rôle fondamental. Aussi, l’on ne peut que se réjouir de voir l’encadrement développé pour améliorer et individualiser le suivi des stagiaires. Ainsi, 127 ETP supplémentaires seront recrutés durant le quinquennat, dont 35 en 2020. Là encore, nous préconisons un renforcement du SMA, au travers d’un meilleur accompagnement des jeunes filles et d’une coopération accrue avec les acteurs de la mobilité.

Plus globalement, madame la ministre, j’attire votre attention sur la nécessité d’évaluer les politiques publiques que nous déployons outre-mer, en particulier dans le domaine de l’emploi. La Cnépéom a le mérite d’exister, mais nous savons tous ici que les moyens dont elle dispose restent limités.

Ce budget comporte également le programme 123, « Conditions de vie outre-mer ». Je le dis sans détour : la loi pour l’égalité réelle outre-mer, qui avait éveillé de grands espoirs, a suscité de grandes déceptions au regard de l’objectif. Elle n’a fait que poser le juste constat d’un écart de développement particulièrement important entre l’Hexagone et l’outre-mer, sur la base de nombreux indicateurs, comme le PIB par habitant ou l’indice de développement humain.

Cette déception n’est d’ailleurs pas étrangère aux mouvements sociaux qui ont secoué certains de nos territoires ces deux dernières années. En Guyane, les manifestants, scandant tous en cœur : « la fusée décolle, mais la Guyane reste au sol », ont voulu faire savoir à l’État, mais aussi à toute la France qu’il ne pouvait y avoir sur un même territoire opulence et puissance, d’un côté, sentiment d’abandon et de soumission, de l’autre.

Pour ces raisons, un soutien fort et déterminé de l’État est indispensable aux collectivités territoriales d’outre-mer.

Les contrats de convergence et de transformation signés au mois de juillet dernier, dont les crédits augmentent de 5 %, joueront à leur mesure leur rôle.

Le FEI, qui est préservé à 110 millions d’euros, y contribue également en restant au service de projets du quotidien : un complexe aquatique, un stade, une opération d’assainissement ou d’électrification.

Soutenir les territoires, c’est aussi mieux accompagner nos collectivités territoriales. Il faut le dire, en révisant les critères de péréquation, ce budget reconnaît pour la première fois l’iniquité de traitement entre les collectivités locales d’outre-mer et celles de l’Hexagone. Cela se traduira à terme par une augmentation de 85 millions d’euros en faveur des outre-mer d’ici à cinq ans.

Dans le prolongement, il conviendra de tirer les enseignements de la mission de nos collègues Georges Patient et Jean-René Cazeneuve sur les finances locales.

En outre, dans le même esprit, notre groupe sera naturellement favorable à l’amendement de coordination du Gouvernement tendant à rétablir le prélèvement sur recettes relatif à la compensation des recettes d’octroi de mer au profit de la collectivité territoriale de Guyane. Il s’agit là d’une mesure indispensable à la bonne conduite des finances de la collectivité.

La question du logement méritera par ailleurs une attention toute particulière. En dépit de besoins criants, les crédits alloués sont malheureusement en baisse chaque année depuis 2014. Si nous convenons tous de leur insuffisance, ils restent fondés sur les capacités d’engagement constatées dans les territoires ces deux dernières années.

Cela étant dit, notre priorité est d’inverser la tendance.

À cet égard, le rétablissement de l’aide à l’accession à la propriété et à la rénovation de l’habitat est un signal positif. De même, avec 18 millions d’euros supplémentaires en 2020, les crédits des sociétés immobilières d’outre-mer (Sidom) sont au rendez-vous. C’est une bonne chose.

Pour rappel, l’État s’est engagé, à l’issue de la conférence du logement outre-mer, à maintenir les autorisations d’engagement de la ligne budgétaire unique au-delà de 200 millions d’euros annuels en 2020, 2021 et 2022. En parallèle, plusieurs actions de soutien à l’ingénierie seront mises en place dès 2020 pour répondre à la sous-consommation des crédits.

Une plateforme d’appui aux collectivités devrait d’abord voir le jour en Guyane. Des crédits de la ligne budgétaire unique seront aussi destinés à l’aide au montage de projets. Enfin, l’Agence française de développement (AFD) continuera sa mission d’accompagnement à la maîtrise d’ouvrage à Mayotte et à Saint-Martin.

Bien entendu, cela ne suffira pas. En matière de logement, de nombreuses opérations ont pris du retard, trop de retard. Face à ces urgences, il faudra que chacun assume ses responsabilités. Cela concerne, certes, l’État, mais aussi, comme toujours, les élus locaux.

Vous l’aurez compris, notre groupe votera ces crédits, en conscience, et animé de l’exigence que nous fassions toujours plus pour nos territoires et nos concitoyens.

Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et RDSE.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Poadja

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens avant tout à saluer le travail des rapporteurs sur cette mission. Je pense en particulier à mes collègues centristes Nassimah Dindar et Nuihau Laurey.

L’examen des crédits de la mission « Outre-mer » est un rendez-vous annuel qui nous permet à nous, parlementaires ultramarins, de nous prononcer sur la concrétisation budgétaire des engagements politiques du Gouvernement dans les outre-mer, à commencer par le Livre bleu des outre-mer et la Trajectoire 5.0. Il permet aussi d’actionner les leviers financiers et fiscaux pour faire face à des problèmes conjoncturels.

Nous en avons tous conscience, l’effort de l’État pour les outre-mer ne se réduit pas à cette mission, qui ne représente en réalité que 10 % de l’effort total de l’État.

Ce qui m’interpelle dans le budget des outre-mer, ce n’est pas tant le montant total des crédits budgétaires ; ce sont les contours des dispositifs fiscaux, des aides directes et des subventions économiques, sociales, d’équipements que ces crédits permettent de financer.

Ces dispositifs sont-ils toujours adaptés aux besoins de chacun de nos territoires ? Fonctionnent-ils ? Pour le service militaire adapté, je réponds « oui », et je salue le recrutement de 135 personnes en cinq ans, dont 35 en 2020, ainsi que la création d’une nouvelle compagnie à Bourail en Nouvelle-Calédonie. C’est un dispositif essentiel pour l’intégration de nos jeunes en décrochage scolaire et pour notre territoire en général.

Je salue également l’augmentation de 10 millions d’euros de la dotation relative au prêt de développement outre-mer, afin de l’étendre aux entreprises situées dans les collectivités du Pacifique.

En dépit de ces efforts budgétaires, ce sont les règles de fonctionnement des dispositifs qu’il faut revoir, afin de les rendre plus efficaces pour nos populations, nos entreprises et nos territoires.

Avec mes collègues, j’ai déposé plusieurs amendements visant à revoir certains dispositifs pour les rendre opérationnels.

Dans un contexte économique fortement dégradé, les aides et les dépenses fiscales pour les entreprises ultramarines sont indispensables. Or, non seulement leur montant a diminué sensiblement, mais les différences de régimes entre les territoires, les doctrines sévères des services fiscaux dans l’interprétation des règles et la longueur des procédures d’agrément découragent les investisseurs.

J’ai donc déposé un amendement sur les articles non rattachés afin que vous puissiez déléguer votre avis au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, madame la ministre

En effet, il faut plus de deux ans aujourd’hui pour que vos services et ceux de Bercy instruisent un dossier d’investissement défiscalisé dans le Pacifique, contre quelques mois dans les DOM. C’est décourageant, aussi bien pour les acteurs du développement économique que pour les entreprises.

Les investisseurs ne vont plus en Calédonie. La défiscalisation est au point mort, même si quelques grosses opérations, comme l’achat en 2017 de quatre avions Airbus par Aircalin, permettent d’afficher un niveau élevé de défiscalisation. Les délais de traitement des dossiers par votre administration ne suivent pas. Il faut y remédier !

De même, il faut compenser la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés (IS) en France par un crédit d’impôt, comme cela existe dans les DOM, pour ne pas plomber l’intérêt des entreprises métropolitaines à investir dans les entreprises des territoires du Pacifique, fiscalement autonomes.

Vous le savez, avec l’incertitude sur l’avenir institutionnel de notre archipel, les investisseurs se font rares. Les banques ne prêtent pas, les acteurs économiques n’investissent pas et mettent leurs économies à l’abri. Alors, si vous ne les encouragez pas, que reste-t-il ?

Il y a une vraie réflexion à mener par votre ministère et par Bercy sur ce sujet, afin de rendre claires, lisibles et stables les aides fiscales pour tous les outre-mer.

Pour les aides aux ménages, ce qui est en question, ce n’est pas l’enveloppe budgétaire globale ; ce sont les conditions d’attribution, et notamment les plafonds des revenus, qui ne sont pas adaptés à la vie chère sur certains territoires comme la Calédonie.

Cette année, 600 étudiants étaient exclus des bourses sur critères sociaux, donc de la prise en charge à 100 % d’un billet d’avion pour leurs études, alors que leurs familles n’ont qu’un faible reste à vivre. L’incidence budgétaire d’une telle évolution sera minime, mais cela va changer la vie des étudiants.

À l’Assemblée nationale, vous avez d’ailleurs assoupli les conditions pour bénéficier de la continuité funéraire et élargi la continuité territoriale à la mobilité au sein d’un même bassin géographique. Cela va dans le bon sens, celui de l’écoute des besoins des Ultramarins. Mais pourquoi ne pas commencer par appliquer la continuité territoriale aux liaisons inter-îles dans les archipels ? Pourquoi la restreindre à la mobilité régionale pour la formation professionnelle ? C’est ce que je propose dans l’amendement que j’ai déposé sur ce volet de la mission, pour répondre à une attente forte des habitants.

En dehors des contours de dispositifs à améliorer, il y a enfin les zones grises qui demeurent quand on parle des outre-mer, notamment des collectivités à statut particulier.

Les collectivités du Pacifique sont exclues à tort de certains dispositifs : des dispositifs fiscaux, mais aussi des fonds, comme le fonds vert ou le fonds de prévention des risques naturels. C’est le sens de deux amendements que je défendrai également.

Madame la ministre, j’espère que vous saurez entendre les appels pour les outre-mer que je formule aujourd’hui à l’occasion de l’examen des crédits de cette mission. Je vous remercie du soutien que vous apporterez à nos territoires.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Viviane Malet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2020 est l’occasion pour nous, élus ultramarins, d’insister sur les actions prioritaires à retenir pour nos territoires, et ce afin de réduire le retard persistant avec l’hexagone.

Mon intervention portera principalement sur le programme 123, « Conditions de vie outre-mer », et plus particulièrement le logement.

En préambule, madame la ministre, je tiens à saluer le travail que vous avez accompli sur cette thématique, qui a permis d’aboutir, au mois de juillet dernier, aux conclusions de la Conférence logement outre-mer. Les travaux menés lors de cette conférence ont défini quatre grands axes : mieux connaître les besoins et mieux planifier pour mieux construire ; adapter l’offre aux besoins des territoires ; maîtriser les coûts de construction ou de réhabilitation ; faciliter la mobilisation du foncier et les opérations d’aménagement.

Madame la ministre, comme vous le savez, mais nous aimons à le rappeler, les outre-mer, ce sont 2, 7 millions d’habitants, soit 4 % de la population française, une forte pression démographique, un foncier de plus en plus rare, un taux de chômage deux à quatre fois plus élevé, selon les territoires, que dans l’hexagone – les cinq DOM font partie des dix régions européennes les plus touchées par ce fléau – et de bas revenus. La conférence l’a confirmé : l’outre-mer, c’est surtout un besoin de 90 000 logements, ce sont 110 000 logements insalubres, soit 2 % du parc, un parc social vieillissant et 80 % des ménages éligibles au logement social.

Madame la ministre, je forme le vœu que les mesures énumérées dans ce rapport soient rapidement mises en place, car les besoins sont criants. Je salue particulièrement deux d’entre elles, issues de cette consultation et traduites dans la mission « Outre-mer » que nous examinons aujourd’hui : d’une part, la stabilisation de la ligne budgétaire unique (LBU) au-dessus de 200 millions d’euros de 2020 à 2022, d’autre part, la mise en place d’une aide à l’accession sociale et à la sortie de l’insalubrité spécifique à l’outre-mer. À cet égard, la suppression de l’APL accession il y a deux ans fut une erreur que je me réjouis de voir corrigée.

J’en arrive à l’examen des crédits de la mission pour 2020. Ils s’établissent à 2, 6 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 2, 4 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), soit, à périmètre constant, une baisse de 3, 9 % en CP et de 1, 3 % en AE par rapport à 2019.

Les rapporteurs spéciaux de la mission l’ont parfaitement décrit : « Les outre-mer connaissent une situation économique et sociale très défavorable par rapport à la métropole. Le rattrapage de cet écart persistant constitue le défi majeur de la mission “Outre-mer” du budget général de l’État. »

À l’examen du budget, force est de constater, madame la ministre, que certains chiffres ne sont pas bons. Les crédits destinés à l’action n° 01, Logement, du programme 123, « Conditions de vie outre-mer », qui s’élèvent à 809 millions d’euros en AE et 659 millions d’euros en CP, sont en diminution de 13 % en CP et atteignent leur niveau le plus bas depuis les dix dernières années. La ligne budgétaire unique est, quant à elle, en baisse de 30 millions d’euros. Le démarrage du plan logement outre-mer 2019-2022 est bien trop timide et l’objectif de construire ou de réhabiliter 10 000 logements par an risque d’être très difficile à atteindre.

Si une partie de la baisse des CP peut s’expliquer par une diminution de l’évaluation de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), à hauteur de 34 millions d’euros, il n’en demeure pas moins que tout le secteur du bâtiment se voit privé d’environ 66 millions d’euros qui manqueront aux entreprises et, naturellement, aux familles. Permettez-moi de vous rappeler, madame la ministre, que certaines d’entre elles attendent depuis trois ans et que de nombreuses sociétés de construction ont mis la clé sous la porte, alors même que nous bénéficiions d’un programme logement outre-mer (PLOM).

Madame la ministre, il faut éviter que cette situation ne se reproduise, car, si l’erreur est humaine, perseverare diabolicum. §Aussi permettez-moi de vous poser deux questions. Cette budgétisation à la baisse ne risque-t-elle pas de porter préjudice aux territoires qui ont vu de très nombreuses entreprises du bâtiment faire faillite ? La suppression de l’APL accession, que nous déplorions au mois de décembre 2017, n’explique-t-elle pas en partie cette sous-consommation des crédits ?

Nous connaissons tous le parcours incertain d’une demande de financement pour des logements sociaux. De la prise en considération dans les programmes à l’ordre de service autorisant les travaux, les embuches et les renoncements peuvent être nombreux et les délais inacceptables. Cela s’explique par le fait que chaque dossier est traité en « tuyau d’orgue » sans qu’un comité de pilotage, rassemblant l’État, les maîtres d’ouvrage et les collectivités, valide globalement l’avancée du stock en gestation et reprogramme d’autres opérations pour remplacer celles qui ne peuvent aboutir. La rigidité des règles de procédure n’aide pas. Il faut la simplifier et mettre de l’huile dans les rouages.

Madame la ministre, il y a urgence. Je suis d’accord avec vous pour mettre fin à cette sous-consommation des crédits, dans l’intérêt de nos concitoyens. La création d’un groupe de travail sur ce sujet va dans le bon sens. Les freins doivent être levés dans les meilleurs délais. Notre devoir est de relancer la machine et de redonner confiance aux familles, aux entreprises, aux investisseurs. L’avenir des outre-mer est en jeu.

Au cours des débats, je défendrai plusieurs amendements. Reprenant l’une des conclusions de la Conférence logement outre-mer, ils visent, d’une part, à développer l’offre locative sociale et intermédiaire, en portant à 25 % les logements locatifs sociaux livrés sur la base de la moyenne des trois dernières années, d’autre part, à consolider et rendre pérenne la nouvelle aide à l’accession logement en outre-mer en intégrant dans le code de la construction et de l’habitation les dispositions de l’article 72 du projet de loi de finances pour 2020.

Madame la ministre, dans une interview accordée à un site d’information, vous avez déclaré : « Ces chiffres n’ont de sens que si nous répondons aux problématiques du quotidien des Ultramarins. Mon passé d’ancienne adjointe aux affaires sociales et de vice-présidente d’une caisse centrale d’activités sociales (CCAS) m’incite à vous parler d’une problématique concrète : celle des blocs sanitaires. Nous en avons déjà parlé. La population ultramarine, celle de La Réunion en particulier, vieillit très rapidement. À Saint-Pierre de La Réunion, la CCAS a dû construire au cours des six dernières années près de 500 blocs sanitaires au domicile de personnes âgées ou handicapées pour un coût total de 3 millions d’euros, main d’œuvre comprise. Malgré cela, la demande reste forte, et cela n’est pas propre à la capitale du sud.

Madame la ministre, les CCAS et le département sont à votre disposition pour étudier les possibilités de financement de ces travaux d’adaptation au vieillissement de notre population.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

La parole est à M. Michel Magras. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Madame la ministre, eu égard à la mission de coordination et d’impulsion de votre ministère, il m’importe de souligner que les chiffres de cette mission, largement commentés et interprétés, traduisent en réalité une trajectoire de politique publique qui s’inscrit au-delà de ce seul cadre budgétaire.

Permettez-moi donc de m’y attarder pour dire d’emblée que mon impatience de voir les outre-mer entrer dans le cercle vertueux du développement et sortir de l’ornière du « mal-développement » est toujours aussi grande : elle ne faiblit pas. Nous devons prendre garde à ne pas nous habituer à des difficultés qui, année après année, changent plus de degré que de nature. Année après année en effet, les outre-mer pâtissent des ajustements des gouvernements successifs, générant une instabilité structurelle du cadre économique et fiscal. C’est le cas de la fiscalité de l’emploi, dont les seuils ont déjà été trop souvent révisés et, surtout, recentrés.

De fait, regardés isolément, les seuils d’exonération nouvellement établis correspondent bien à la répartition salariale des marchés ultramarins. Toutefois, mis en perspective, ils augurent des économies organisées essentiellement autour d’une ressource humaine peu qualifiée. Or le développement suppose de l’encadrement, donc des compétences ; concentrer les allégements sur les bas salaires revient en somme à faire intégralement supporter le coût de la qualification aux entreprises.

J’ai déjà eu l’occasion de vous alerter sur les économies d’aujourd’hui qui font les dépenses de demain. Il me semble qu’il est grand temps de mettre en place, non pas seulement un budget, mais une réelle politique publique impliquant tous les acteurs, nationaux et locaux, donnant réellement aux outre-mer les moyens de leur développement. Ce doit être une exigence soutenue, une ambition partagée et une concrétisation déclinée pour chacun des territoires.

Bien sûr, on peut noter avec satisfaction les plans de convergences et les investissements en infrastructures qu’ils apporteront dans les collectivités. Ils sont des conditions nécessaires, mais non suffisantes du développement. Peut-être me répondrez-vous par le fameux « réflexe outre-mer » que vous prônez. Permettez-moi de lui préférer la « culture des outre-mer », parce qu’il s’agit non pas seulement d’avoir le réflexe, mais plutôt de construire et de nourrir une relation qui s’inscrive dans le long terme. L’État ne devrait avoir besoin de rappel, qu’il soit extérieur ou systématique, pour penser aux outre-mer, ceux-ci devraient faire partie évidente de chacune des politiques publiques, comme ils sont partie intégrante de la République. Scientifiquement, le réflexe est une réaction automatique à un stimulus. L’emploi du terme « réflexe » signe bien l’aveu – au XXIe siècle ! – de l’absence d’une culture des outre-mer.

Du reste, quelles sont réellement les réactions dans les autres ministères ? Avant-hier soir encore, mes collègues débattaient en séance de la place de l’Office de développement de l’économie agricole d’outre-mer (Odéadom) et de la politique agricole dans les outre-mer… Bref, j’aurais sincèrement aimé quitter la Haute Assemblée sur le constat heureux que ce prérequis, revendiqué depuis trop longtemps, fût, à tout le moins, dépassé. Il y va du devenir de ces onze territoires et des attentes légitimes de leurs populations. Une réponse à leur incompréhension face aux retards et leur sentiment d’être parfois secondairement considérés doit être apportée. Il est temps !

Je ne peux davantage taire mon impatience alors qu’en 2019 l’État semble seulement prendre conscience des besoins en ingénierie dans les outre-mer, notamment pour l’élaboration des dossiers de financement du logement. Nous en revenons à mon propos précédent sur le financement des emplois qualifiés…

J’aime à citer cet extrait d’une intervention du général de Gaulle…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

… prononcée en 1960 : « Tandis que le génie du siècle change notre pays, il change aussi les conditions de son action outre-mer. […] Il n’y a pas de politique qui vaille en dehors des réalités ! »

Je me réjouis donc, madame la ministre, de vous savoir prête à aller plus loin dans la différenciation territoriale et je partage votre conviction personnelle d’un article unique fusionnant les articles 73 et 74 de la Constitution. C’était du reste le sens de ma contribution à la journée d’étude « Réforme territoriale et différenciation(s) », organisé ici même en 2015, au cours de laquelle j’avais indiqué : « La différenciation territoriale met en lumière la dialectique de l’unité et de la diversité […] Pour l’outre-mer, la synthèse me semble réalisée par l’article 74 de la Constitution », c’est-à-dire un article unique, socle de statuts à la carte. Sa réécriture devrait permettre de mettre les institutions au service du développement des outre-mer et de faire en sorte que les politiques publiques prennent leur source dans leurs réalités, y compris pour une coconstruction efficace avec l’État. Là encore, à la notion d’adaptation, permettez-moi de préférer celle de pertinence.

Après ces considérations d’ordre général, je tiens à saluer de manière appuyée le travail considérable et de très grande qualité de mes collègues Guillaume Arnell, rapporteur coordinateur, Jean-François Rapin et Abdallah Hassani, rapporteurs, sur le second volet du rapport d’information sur les risques naturels majeurs dans les outre-mer conduit par la délégation sénatoriale aux outre-mer que j’ai l’honneur de présider.

Ce volet est, comme le précédent, le fruit d’une observation minutieuse de la situation de chacun des territoires et d’une écoute attentive des parties prenantes à la reconstruction et à la résilience de ces territoires. Nous espérons que le projet de loi fera l’objet d’une véritable coconstruction tenant compte de cette approche de terrain.

Je conclurai en évoquant Saint-Barthélemy, pour lever une ambiguïté qui a pu naître du projet d’évolution de l’organisation de la gestion et du financement de la sécurité sociale sur notre île.

En 2015, il a fallu le passage du Président de la République pour qu’un véritable service de gestion de la sécurité sociale soit mis en œuvre sur place, qui est désormais confié à la Mutualité sociale agricole Poitou. Parallèlement, alors que l’île est, disons sans entrer dans les détails, « contributeur net » avec un excédent moyen annuel de cotisations par rapport aux prestations d’environ 25 millions d’euros pour 9 000 habitants, toutes les avancées en matière de santé ont été le fait de la collectivité.

Il en est ainsi du scanner, du mammographe, de la table de coronographie ou de la construction de l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), tous ces investissements étant source d’économie pour la sécurité sociale. Toutefois, malgré ce contexte, aussi bien l’hôpital que l’Ehpad présentent des soldes déficitaires, conduisant d’ailleurs la collectivité à abonder le compte soins de ce dernier.

À Saint-Barthélemy, la biologie médicale a reculé de trente ans – il faut cinq jours minimum pour une glycémie – et la réorganisation des urgences entraîne une limite de capacité au-delà de deux évacuations sanitaires. Voilà deux exemples symboliques de la dégradation de la prise en charge des patients.

C’est dans ce contexte que le président de la collectivité a émis le souhait que la caisse de prévoyance sociale de Saint-Barthélemy soit dotée d’une véritable personnalité juridique, d’une part, que, par dérogation, elle se voit confier le versement des dotations aux établissements de santé de l’île, d’autre part. Saint-Barthélemy ne remet donc aucunement en cause son insertion dans le système de solidarité nationale, mais souhaite être impliquée dans un projet de santé local qui tienne précisément compte de sa réalité.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne.

Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Conconne

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, voilà déjà trois années que j’interviens à la tribune sur le budget de la mission de ladite « Outre-mer ».

J’aurais pu, comme les deux années précédentes, décortiquer ligne après ligne, remarquer, que dis-je souligner, que dis-je dénoncer des lignes budgétaires en baisse sur des sujets regroupés au sein du programme au nom hautement éloquent et évocateur « Conditions de vie outre-mer ». La logique, avouez-le, voudrait que l’on baisse un budget quand les choses vont mieux. J’aurais pu, comme les deux années précédentes, noter que, même sur le programme « Emploi outre-mer », la baisse est au rendez-vous, tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement.

Un programme finance également, entre autres, l’épineux problème du logement, singularité propre – n’est-ce pas, madame la présidente de la commission des affaires économiques ? – à ces pays, singularité pour laquelle il convient tous les jours d’inventer de nouvelles solutions. À ce sujet d’ailleurs, l’an dernier, un très vertueux dispositif de défiscalisation – le gros mot que l’on n’aime pas ! –, dit 199 undecies, a été brutalement arrêté, laissant en panne sèche sur le bord de la route plus de 150 familles en Martinique, alors qu’il avait pu en financer 750 en cinq ans.

J’aurais pu évoquer cette fameuse mesure du fonds exceptionnel d’investissement (FEI), à la philosophie inacceptable, qui exige des populations de payer elles-mêmes leur propre sous-développement en lieu et place d’une obligation légitime de solidarité de la République !

J’aurais pu également évoquer le démontage, pièce par pièce, de tout le système de rééquilibrage équitable qui s’appelait TVA non perçue récupérable (TVA NPR) ou crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). L’an dernier, ces mesures hallucinantes ont démontré, s’il en était encore besoin, le prisme, le regard tronqué, l’angle mort avec lequel on nous regarde, cet angle mort de la République envers ces pays dits « de l’outre-mer ».

J’aurais pu poursuivre sur la baisse manifeste de la LBU, qui acte en budget la politique du logement outre-mer. Oui, les crédits de paiement ont enregistré une baisse. S’est-on posé la question du pourquoi et du comment ? S’est-on posé la question de la souffrance des opérateurs sociaux agréés, qui croulent sous les difficultés, certains ayant même préféré mettre la clé sous le paillasson ?

J’aurais pu aussi vous dire que nous sommes loin du compte en matière d’exonération de charges sociales, très loin de l’écart creusé, et non rattrapé, par la suppression des mesures énoncées plus haut.

Finalement, tout cela est vain. Tout cela et tous les discours n’auraient servi à rien. Un philosophe disait avec justesse que la qualité de la relation que vous entretenez avec un peuple dépend du regard que vous portez sur lui. Eh oui, hélas, c’est de cela qu’il s’agit !

Quand les différents gouvernements, tous, ceux qui vous ont précédé, le vôtre, mais également ceux qui suivront, considèreront-ils, enfin, que ces territoires ne sont pas simplement destinés à assurer gloire, puissance et splendeur maritime à la France, héritage d’un certain passé ?

Quand les différents gouvernements comprendront-ils, enfin, que nous sommes aussi des peuples, assoiffés de jours meilleurs, en quête permanente de conditions d’épanouissement qui riment avec « lutte acharnée contre les dépendances », tendant vers l’autosuffisance aussi bien énergétique qu’alimentaire ?

Mais tout cela, avec quels outils ? Avec quel regard ? Avec quelle détermination ? Avec quelle ambition ? Rien ! Alors, me voilà pour la troisième fois devant vous, avec l’impression d’être complètement « à côté de la plaque », d’être égarée sur une piste sans issue, dans un labyrinthe inextricable d’impuissance renouvelée et de perception voilée.

J’y mettrai un bémol tout de même. Il sera pour vous, très personnellement, madame la ministre. Comme mon collègue Lurel, je salue votre courage. La situation aurait pu être pire si vous n’étiez pas là et si vous ne montriez pas, tous les jours, cette détermination. Peut-être aussi nous direz-vous où sont passés les montants des ventes des sociétés immobilières d’outre-mer (Sidom), qui devaient venir également alimenter les budgets logement.

Philosophiquement, le refus de l’héritage dans le langage notarié s’appelle « abstention » dans le nôtre. C’est pour signifier mon refus au fond de cet héritage de longues années de décennies tronquées, héritage fait d’iniquité et d’injustices, héritage de trop d’années d’indifférence, héritage de trop d’années de sous-estimation, héritage de trop d’années de mauvais calibrage, héritage de trop d’années à ne voir en nous que splendeur de l’empire, héritage de variables d’ajustements permanentes et quotidiennes.

Pour toutes ces raisons, comme un enfant convoqué chez le notaire, je vais refuser l’héritage. Pour le dire autrement et rester dans le lexique parlementaire, je m’abstiendrai sur la mission « Outre-mer » !

Applaudissements sur des travées du groupe SOCR.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à onze heures cinquante, est reprise à onze heures cinquante-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

La séance est reprise.

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin

Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur spécial, madame, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, moi aussi, c’est la troisième fois que je viens devant vous défendre un projet de budget. C’est un exercice important puisqu’il caractérise les grandes orientations du ministère pour 2020. Permettez-moi de rendre un hommage tout particulier à Michel Magras, président de la délégation sénatoriale aux outre-mer, dont c’est, je crois, le dernier projet de loi de finances. Je tiens à le remercier chaleureusement de son engagement pour les outre-mer.

Applaudissements.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin

Mesdames, messieurs les sénateurs, vos interventions et vos amendements soulignent vos principales préoccupations pour l’année à venir. Je pense que nos orientations répondent à vos préoccupations, nous aurons l’occasion d’en parler lors de la discussion des amendements.

Ce projet de budget nous donne la capacité de faire encore mieux dans chacun des domaines prioritaires que sont l’emploi, la mobilité, le logement, l’éducation, les infrastructures de base. Je serai amenée à l’expliciter.

Le ministère des outre-mer disposera en 2020, à périmètre constant, hors exonérations de charges, de 2, 6 milliards d’euros en AE et de 2, 5 milliards d’euros en CP. Madame Benbassa, je vous rappelle qu’en 2019 le budget des outre-mer a augmenté de 20 % ; nous maintenons cet effort. C’est un engagement du Président de la République.

Je tiens à dire ici, comme je l’ai dit à l’Assemblée nationale : ne nous faites pas de faux procès ! Ne me dites pas que je suis hors-sol sur les problématiques des outre-mer. C’est faux ! Je ne suis pas dans l’observation, je suis dans l’action.

Monsieur Lurel, si vous n’utilisez pas les chiffres de 2019 et de 2020 – je répète que le budget a bien augmenté de 20 % l’an dernier et nous continuons dans cette voie -, c’est peut-être parce que ces chiffres ne viennent pas étayer votre discours, quand bien même nous pouvons nous rejoindre sur plusieurs points.

Conformément à l’engagement pris par le Président de la République, le 8 juillet 2019, rue Oudinot – vous étiez nombreux à être présents –, le ministère des outre-mer conserve l’intégralité de ses moyens d’action en AE, pour concrétiser le Livre bleu des outre-mer, mais aussi enclencher la Trajectoire 5.0. Le document de politique transversale témoigne également, vous l’avez dit, d’une préservation de l’ensemble des crédits dédiés aux outre-mer, soit 22 milliards d’euros au total, auxquels il convient d’ajouter une dépense fiscale de 4, 5 millions d’euros.

Madame Conconne, la baisse que connaît le programme 123 traduit un choix du Gouvernement opéré en accord avec le gouvernement polynésien, puisque 90 millions d’euros de dotation à la Polynésie française passent désormais par un autre dispositif budgétaire, pour devenir un prélèvement sur recettes et garantir une somme constante à la Polynésie. C’est le souhait qui a été formulé et que j’ai mis en œuvre.

Le document de politique transversale montre que l’effort à l’égard des outre-mer est maintenu. Plutôt que de parler d’effort, nous pourrions très certainement nous mettre d’accord pour parler d’investissement et affirmer que l’investissement de l’État en outre-mer est de 22 milliards d’euros.

Par ailleurs, les outre-mer bénéficient de 25 % des fonds structurels européens, soit 7 milliards d’euros, en prenant en compte le programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité (Poséi).

Nous avons donc des moyens. Nous avons également des projets, puisque nous engageons les crédits. Reste à se donner les moyens, collectivement, de concrétiser pleinement nos opérations dans les territoires. Les citoyens ne veulent pas entendre parler de projets, ils veulent en voir les réalisations – et cela se comprend ! Nous devons, ensemble, être bien plus efficients. Les citoyens nous demandent d’être plus performants : il nous faut l’être !

Oui, les crédits de paiement sont en baisse de 100 millions d’euros – 34 millions d’euros sont liés aux prévisions de l’Acoss sur les exonérations de charges, madame Malet.

Cependant, il n’y a aucun problème de disponibilité de crédits. C’est même l’inverse. L’État paie bien, même beaucoup plus vite que dans le passé : les retards de paiement se chiffraient alors parfois à 40 millions d’euros. L’an dernier, à la fin de l’exercice, seuls 20 millions d’euros n’avaient pas été payés.

Pour concrétiser nos projets, nous devons surtout apporter un certain nombre de réponses sur le terrain. C’est la raison d’être des plateformes mises en place à Mayotte et en Guyane : neuf cadres supplémentaires viendront ainsi renforcer l’ingénierie locale au service des territoires. Je ne dis pas que les compétences n’existent pas localement, mais elles ne sont pas mises à la disposition des collectivités.

C’est pourquoi j’ai souhaité que les crédits de soutien de l’Agence française de développement passent de 3 à 7 millions d’euros : les collectivités pourront ainsi s’appuyer sur des compétences d’ingénierie supplémentaires pour mener à bien leurs projets.

Je félicite le sénateur Georges Patient et le député Jean-René Cazeneuve pour leur travail et je salue la belle unanimité du Sénat sur ce point. Le travail parlementaire a permis d’enrichir le dispositif proposé par le Gouvernement, en intégrant Mayotte au mode de calcul et en adaptant les critères de répartition pour prendre en compte les charges de centralité de l’enjeu scolaire ainsi que les poches de pauvreté. La solidarité nationale abondera ainsi dès 2020 de 18, 7 millions d’euros les budgets locaux pour que les collectivités soient mieux accompagnées.

On doit aussi réfléchir au meilleur moyen de parvenir, conformément à la volonté du Président de la République, à une péréquation intercommunale, qui devrait atteindre 85 millions d’euros en 2024.

Certes, on peut juger que cette reconnaissance est tardive, mais elle arrive enfin, et c’est grâce à ce gouvernement. Encore une fois, je tiens à remercier les parlementaires qui travaillent sur ce sujet.

Oui, monsieur Lurel, j’ai l’habitude de reconnaître les difficultés qui peuvent se poser, et l’État a en effet sa part de responsabilité dans la sous-consommation des crédits de paiement outre-mer. Nous devons être au rendez-vous !

J’étais en Guyane la semaine dernière. Dès mon arrivée, j’ai tenu à réunir l’ensemble des chefs de service du territoire pour leur adresser un message clair : l’État doit accompagner les projets, et non les censurer. Informer les collectivités et les porteurs de projets, les aider à trouver les financements, c’est le rôle de l’État, et il doit le faire encore mieux qu’aujourd’hui.

Madame Malet, vous avez raison, j’ai demandé qu’une mission se penche sur la sous-consommation des crédits de paiement au ministère des outre-mer et je veux associer les parlementaires à cette mission. Nous nous rencontrerons dans les jours qui viennent pour aborder tous ces sujets.

L’année 2020 sera le premier exercice plein de mise en œuvre des contrats de convergence et de transformation signés avec sept ministres, le Premier ministre et le Président de la République au mois de juillet dernier. L’enveloppe consacrée à ces contrats est en augmentation de 7 %, ce qui témoigne d’une priorité accordée aux projets des territoires.

Au-delà de cet appui aux territoires, mes priorités structurantes et celles de mon ministère pour 2020 restent l’emploi et le quotidien des Ultramarins, avec un accent particulier sur la mobilité et le logement.

L’emploi, c’est le « zéro exclusion » de la Trajectoire 5.0, c’est la dignité des citoyens, le véritable levier pour lutter contre la vie chère. Nous sommes d’accord sur ce point, monsieur Magras.

Nous avons profondément réformé le dispositif d’exonération des cotisations sociales en 2019. Nous sommes allés encore plus loin cette année, en votant la clause de revoyure, comme je m’y étais engagée au Sénat. Ce sont 38 millions d’euros supplémentaires qui permettront d’exonérer totalement jusqu’à 2 SMIC les salaires des secteurs prioritaires pour nos territoires – tourisme, agrotransformation, innovation… Aujourd’hui, 80 % des salaires sont totalement exonérés de charges patronales dans les territoires d’outre-mer.

Cela s’ajoute à la prolongation de la défiscalisation jusqu’en 2025 – je le rappelle à M. Poadja –, à la création de zones franches d’activités de nouvelle génération, qui bénéficieront d’abattements d’impôt sur les sociétés (IS) renforcés, au déploiement d’outils d’aide au financement des entreprises – amélioration du dispositif Avance +, élargissement du prêt de développement outre-mer avec Bpifrance, soutien au microcrédit – et à l’augmentation des crédits de l’aide au fret.

Nous nous sommes engagés dans le processus de renotification à Bruxelles des différentiels d’octroi de mer. Je crois en effet au développement de filières de production locales, et nous devons les soutenir.

Aujourd’hui, une entreprise qui s’installe outre-mer bénéficie des meilleures conditions pour naître, grandir, investir et embaucher en France. Il ne suffit pas de faire des annonces et de mettre les outils à la disposition des entreprises ; il faut également créer une dynamique plus forte dans les territoires, avec l’aide des collectivités.

Ces efforts conjugués commencent à payer. Sur douze mois, 11 400 emplois ont été créés dans les DOM, soit une croissance de 3, 5 %. Dans le même temps, on constate une baisse significative de 2, 3 % du nombre de chômeurs outre-mer, soit 8 158 demandeurs d’emploi de moins, le niveau le plus bas atteint depuis le mois de février 2014. Bien sûr, rien n’est gagné, mais la tendance semble bonne, et il faut prolonger ensemble cet élan, notamment en tenant des discours plus positifs.

Monsieur Poadja, vous avez évoqué vos craintes sur la baisse de l’IS. Mon collègue Gérald Darmanin a pris l’engagement de rouvrir ce dossier dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021 si le Gouvernement constate une baisse des investissements.

L’insertion, c’est aussi le service militaire adapté (SMA), avec un renforcement considérable de l’encadrement pour améliorer et individualiser le suivi des stagiaires. Nous créerons 127 équivalents temps plein sur le quinquennat, 35 en 2020, principalement destinés à la nouvelle compagnie qui va s’installer en Nouvelle-Calédonie, à Bourail, conformément à l’annonce du Premier ministre.

À la suite des rencontres que j’ai faites avant-hier, lors des Assises de l’économie de la mer, à Montpellier, je souhaite également mener une réflexion sur la « maritimisation » des formations du SMA. Les entreprises du secteur maritime ont besoin de main-d’œuvre formée – je pense à l’entreprise Zéphyr & Borée, qui, à compter de 2022, transportera les éléments de la fusée Ariane au moyen d’un navire hybride à voiles et à moteur. Ils ont besoin de quarante jeunes guyanais. Les jeunes sont au rendez-vous, mais il faut que nous puissions les former. Le SMA doit aussi relever ce défi, en plus de faire venir des jeunes en métropole pour les former. Nous en reparlerons avec les parlementaires de Guyane très rapidement. Des projets de cette nature sont aussi à soutenir dans les autres territoires d’outre-mer.

L’emploi reste donc le meilleur moyen de changer le quotidien des Ultramarins et d’améliorer leurs conditions de vie. Ce n’est pas le seul enjeu, bien sûr, mais c’est une priorité du Gouvernement.

C’est aussi la raison d’être du fonds exceptionnel d’investissement, dont les crédits ont été intégralement préservés : 110 millions d’euros seront ainsi affectés au service de projets du quotidien – des stades, des électrifications, des aménagements portuaires ou encore des rénovations d’éléments du patrimoine… –, selon les choix des collectivités.

J’ai aussi souhaité que ces projets s’inscrivent dans la Trajectoire 5.0. En 2019, 70 % des projets financés par le Fonds européen d’investissement (FEI) répondaient à cette Trajectoire 5.0. Ce taux sera porté à 100 % en 2020.

Nous maintenons également 90 millions d’euros pour soutenir les constructions scolaires dans les territoires d’outre-mer, en plus de l’effort du ministère de l’éducation nationale. Oui, monsieur Karam, être accueilli dans de bonnes conditions à l’école, cela change la vie des enfants et celle des parents. En la matière, chacun ici le comprendra, deux territoires seront prioritaires : Mayotte et la Guyane.

Je viens de poser la première pierre d’un lycée à Maripasoula, en Guyane, avec vous, monsieur Patient, et d’annoncer la réalisation de la route qui désenclavera cette partie du territoire. J’ai vu et senti à quel point l’État était attendu sur la question des infrastructures du quotidien. Pour que chacun ait droit à la mobilité, j’ai pris l’engagement de mettre le projet en route dès le mois de janvier prochain. Depuis deux jours, je peux vous dire que tout le monde s’active dans le territoire.

La deuxième priorité du Gouvernement porte sur le logement. Nous y reviendrons dans le cadre de la discussion des amendements. La ligne budgétaire unique a été calibrée par rapport aux projets à venir dans les quinze prochains mois. Elle s’élève, pour 2020, à 215 millions d’euros, sans compter le produit de la cession des parts de l’État au sein des sociétés immobilières d’outre-mer, les Sidom. Vous m’avez interpellée sur ce point, madame Conconne : la vente des parts de Sidom aura lieu le 23 décembre prochain, elle rapportera 37 millions d’euros au total, qui seront versés en deux fois au budget des outre-mer. En 2020, 18, 5 millions d’euros seront donc attribués, mais – je vais être très honnête – ils ne figurent pas pour l’heure dans ce projet de loi de finances.

La ligne budgétaire unique n’est au demeurant pas le seul moyen mis à la disposition du logement dans les territoires d’outre-mer. Je rappelle que la défiscalisation dans le secteur du logement social outre-mer représente plus de 230 millions d’euros. Nous allons plus loin cette année, en élargissant la défiscalisation, d’une part, à la réhabilitation du parc social dans les quartiers de la politique de la ville, au-delà des zones ANRU – l’amendement a été adopté à l’Assemblée nationale –, d’autre part, aux opérations de démolition-reconstruction du parc social, sans limites de zonage. L’amendement a été déposé au Sénat et je compte donc sur votre vote positif dans quelques jours, mesdames, messieurs les sénateurs.

Ce sont ainsi 12 millions d’euros d’aides fiscales supplémentaires qui viendront alimenter la dynamique en faveur du logement.

Ce budget est aussi marqué par le retour indispensable dans les territoires d’outre-mer de l’APL accession. Je veux ici remercier tous ceux qui ont participé à ce projet, la suppression de ce dispositif étant sans doute partiellement responsable d’une moindre dynamique dans les territoires d’outre-mer.

Ces mesures font partie intégrante du plan logement outre-mer 2019-2022, que je viens de signer avec Julien Denormandie. Madame Malet, je tiens à vous remercier de votre forte implication dans le travail de concertation qui a été mené. Ce plan comprend 73 mesures précises, avec un calendrier de déploiement détaillé sur les trois prochaines années pour faire jouer tous les leviers, qu’ils soient financiers, réglementaires et opérationnels, en faveur du logement outre-mer.

Coconstruit avec les collectivités, ce plan sera décliné en fonction des spécificités et des problématiques de chaque territoire. Il comprend aussi, hors budget du ministère des outre-mer, l’engagement fort d’Action Logement de flécher une enveloppe de 1, 5 milliard d’euros dans son plan d’investissement volontaire outre-mer. Action Logement lancera un appel à manifestation d’intérêt dans chaque département ultramarin dans les toutes prochaines semaines.

Si l’on additionne ces crédits aux moyens mobilisés par CDC Habitat pour consolider les Sidom, nous disposerons, durant les trois prochaines années, d’une conjonction de moyens financiers très significatifs pour soutenir la politique du logement outre-mer et, bien évidemment, le secteur du BTP.

Autre politique du quotidien pour les Ultramarins : la mobilité. Ce sujet, largement abordé dans vos amendements, mesdames, messieurs les sénateurs, a aussi fait l’objet d’une grande discussion à l’Assemblée nationale.

Monsieur Poadja, la mobilité est l’une des préoccupations majeures de nos concitoyens. Ils l’ont notamment exprimée à travers les Assises des outre-mer, qui se sont tenues dans tous les territoires. Je ferai une réponse globale sur ces amendements, qui ont trait à la continuité intérieure, à l’aide au retour ou encore aux conditions d’éligibilité.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin

Ma priorité, c’est aussi la formation professionnelle en mobilité, pour les demandeurs d’emploi comme pour les jeunes. Nous allons la soutenir vigoureusement.

Me permettez-vous, monsieur le président, de répondre très rapidement à plusieurs interrogations ? Il me reste trois réponses à faire…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

MM. Guillaume Arnell et Philippe Dallier. Accordé !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Non, je suis désolé, madame la ministre, votre temps de parole est épuisé. Je ne souhaite pas créer un précédent. Vous pourrez reprendre la parole dans la discussion des amendements.

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Outre-mer », figurant à l’état B.

En euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Outre-mer

Emploi outre-mer

Dont titre 2

160 602 988

160 602 988

Conditions de vie outre-mer

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’amendement n° II-697, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

TOTAL

SOLDE

Vous avez la parole, madame la ministre. C’est peut-être l’occasion pour vous de finir votre intervention…

Sourires.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin

Il s’agit d’un amendement de coordination à la suite de l’adoption, en première partie, de l’amendement n° I-1198, qui rétablit le prélèvement sur recettes (PSR) relatif à la compensation des recettes d’octroi de mer au profit de la collectivité territoriale de Guyane.

La semaine dernière, j’ai signé un accord de méthode et d’accompagnement avec la collectivité de Guyane : en complément des 27 millions d’euros du PSR, 5 millions d’euros de subventions exceptionnelles seront accordés.

Nous sommes d’accord avec le président de la collectivité pour sortir de la spirale de l’urgence dans laquelle nous nous sommes installés depuis 2017. Cette modification est souhaitée par l’ensemble des élus de Guyane.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

La commission des finances émet un avis favorable sur cet amendement, qui tire les conséquences de la proposition que j’ai formulée lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances et qui a été adoptée.

Il faut rappeler que ce montant de 27 millions d’euros était déjà accordé à la collectivité territoriale de Guyane les années précédentes, sous la forme d’un PSR. Celui-ci devait être transformé en une dotation du ministère des outre-mer, mais cela nous semble contraire à l’engagement du Gouvernement d’assurer la pérennité de ce montant.

Nous demandons donc le maintien du PSR, ce que la commission des finances a accepté.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Je suis saisi de douze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Outre que certains d’entre eux présentent des incompatibilités de fond, ces amendements visent tous à prélever des crédits sur l’action n° 09 du programme 123, pour un montant cumulé très supérieur aux crédits de ce programme, doté de 39 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 26 millions d’euros en crédits de paiement. Si jamais les crédits inscrits à ce programme étaient épuisés après l’adoption de certains de ces amendements, les amendements suivants deviendraient alors sans objet.

L’amendement n° II-793 rectifié, présenté par Mme Conconne, M. Antiste, Mme Jasmin, M. Lurel, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin, Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Tissot, Montaugé, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

E n euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Catherine Conconne.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Conconne

Mme Catherine Conconne. Madame la ministre, vous ne manquez généralement pas de courage. Et comme je ne suis ni une flatteuse ni une menteuse, je ne doute pas que vous apprécierez à sa juste valeur ce compliment sincère !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Conconne

Vous avez courageusement avoué que le produit de la vente des Sidom, qui doit abonder le budget de la mission « Outre-mer », ne figurait pas dans le projet de loi de finances.

Madame la ministre, nous vous offrons une occasion extraordinaire de mettre votre gouvernement au pied du mur et d’inscrire dans le projet de loi de finances pour 2020 30 millions d’euros, dont 27 millions d’euros seront compensés par la vente des Sidom. Si cet amendement est approuvé par l’ensemble de nos collègues, avec un avis favorable de la commission et du Gouvernement, on ne viendra sans doute pas vous « piquer » ces crédits !

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’amendement n° II-795 rectifié, présenté par M. Lurel, Mme Conconne, M. Antiste, Mmes Jasmin et Artigalas, MM. M. Bourquin, Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Tissot, Montaugé, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

E n euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Victorin Lurel.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Cet amendement porte également sur la ligne budgétaire unique (LBU).

Il est bon de rappeler quelques chiffres.

Le nombre de logements neufs construits outre-mer a diminué de 8, 6 %.

En Guadeloupe, le nombre de logements sociaux neufs financés baisse de 42 % !

La construction de logements grâce aux AL accession est passée de 476 logements en 2017 à 94 logements en 2018.

Au total, il manquerait donc près de 2 300 logements sur les 10 000 prévus par le plan logement outre-mer 2019-2022. C’est une catastrophe !

Cet amendement vise donc à abonder l’action n° 01 du programme 123 de 10, 5 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 33 millions d’euros en crédits de paiement.

On nous dit que c’est à cause de l’incapacité des acteurs locaux à mobiliser les crédits que ceux-ci diminuent. Je rappelle que la consommation de la LBU s’échelonne sur sept ans. La défiscalisation ne nécessite pas de trésorerie, ce qui facilite la constitution des dossiers, alors que le crédit d’impôt n’est pas préfinancé par les banques.

Mme la ministre le conteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Le Gouvernement constitue des réserves de précaution, il gèle et surgèle les crédits, puis il finit par les annuler. Rien ne facilite le montage des dossiers. Quand j’étais ministre, le bureau des agréments et rescrits était autrement plus sévère qu’aujourd’hui !

Comment a-t-on pu perdre 55 millions d’euros sur la LBU depuis 2014 ? De 272 millions d’euros en 2012, nous sommes passés à 247 millions d’euros en 2017 et à 215 millions d’euros en autorisations d’engagement et 195 millions d’euros en crédits de paiement maintenant ! On ne peut expliquer un tel écart par la seule incapacité des acteurs locaux ! L’État doit également s’interroger sur ses responsabilités.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’amendement n° II-779, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds de soutien spécial au logement

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

E n euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

Fonds de soutien spécial au logement

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Au mois de septembre 2019, un sans-domicile fixe a été retrouvé mort dans les rues de Fort-de-France, en Martinique. Un mois plus tard, deux sans-abris décédaient à Papara, à Tahiti.

Rien que dans les rues de Papeete, 300 personnes vivent dehors, dans une extrême pauvreté, sans toit pour dormir. Ils sont plusieurs milliers à l’échelle de l’outre-mer.

Dans de telles conditions, nous pouvions espérer que le logement dans les territoires ultramarins serait l’une des priorités du Gouvernement pour ce projet de loi de finances pour 2020. Nous devons, hélas ! constater que ce n’est pas le cas. Par rapport au budget pour 2019, les crédits de l’action n° 01, Logement, du programme 123, « Conditions de vie outre-mer », ont baissé de 13 %. Depuis 2017, 32 millions d’euros ont été retirés de ce budget, alors même qu’ils auraient pu être très utiles, tant pour construire de nouveaux logements sociaux que pour rénover ceux qui existent déjà et qui sont bien souvent trop insalubres.

La situation est passablement catastrophique : le nombre de logements neufs construits outre-mer a baissé en 2019 de 8, 6 %.

C’est à l’État de donner l’impulsion et d’être à l’initiative de nouveaux projets immobiliers, qui doivent bénéficier aux Ultramarins les plus précaires. Ce n’est évidemment pas en baissant les crédits de l’action n° 01 que nous atteindrons ces objectifs !

Ainsi, cet amendement vise à créer un fonds spécial venant soutenir l’action en faveur du logement outre-mer. Ce fonds serait doté de 10, 5 millions d’euros. Loin d’être révolutionnaire, cette mesure viserait simplement à rétablir le budget de cette action à la hauteur de celui de 2019.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’amendement n° II-797 rectifié, présenté par M. Lurel, Mme Conconne, M. Antiste, Mmes Jasmin et Artigalas, MM. M. Bourquin, Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Tissot, Montaugé, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

E n euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Victorin Lurel.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à l’amendement n° II-795 rectifié, qui tend à n’abonder que les autorisations d’engagement, sans toucher aux crédits de paiement.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’amendement n° II-781, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds de lutte contre les maladies vectorielles

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

E n euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

Fonds de lutte contre les maladies vectorielles

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

La prise en compte des spécificités ultramarines est essentielle à une stratégie de santé publique cohérente dans les outre-mer.

Plusieurs facteurs sont à considérer : le contexte climatique tropical, dont découle une prévalence des maladies infectieuses et parasitaires, mais aussi la propagation des épidémies, favorisée par un déficit d’eau potable et un environnement souvent insalubre.

La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), dans son avis sur le droit à la protection de la santé dans ces territoires, a alerté sur la présence d’épidémies telles que la dengue, le chikungunya et le paludisme, notamment à Mayotte et en Guyane.

L’impact de ces maladies infectieuses dangereuses devrait être considéré comme une préoccupation majeure parmi les enjeux de santé publique en France.

Dans un contexte où la prise en charge médicale de la population ultramarine est largement carencée, les pouvoirs publics devraient prendre les mesures nécessaires à la prévention des risques sanitaires particuliers.

Cet amendement vise donc à créer un fonds de lutte contre les maladies vectorielles, doté de 10 millions d’euros prélevés sur l’action n° 09, Appui à l’accès aux financements bancaires.

Ce fonds devrait permettre d’embaucher du personnel médical spécialisé, de mener des campagnes de sensibilisation et de financer la recherche contre les maladies vectorielles.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’amendement n° II-780, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds de soutien au sanitaire, social, culture, jeunesse et sport

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

E n euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

Fonds de soutien au sanitaire, social, culture, jeunesse et sports

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Au sein du projet de loi de finances pour 2020, l’action n° 04, Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports, du programme 123 s’est vu infliger une baisse inique de 71, 16 % de son budget.

Alors que les outre-mer souffrent d’une véritable carence en termes d’investissements et de structures sanitaires, sociales et de loisirs, nous ne pouvons laisser se créer de tels écarts avec la France hexagonale.

Les dotations des collectivités et services publics étant en baisse, il nous semble judicieux d’injecter les financements étatiques dans des actions pouvant affecter positivement le quotidien des Ultramarins.

Ainsi, le présent amendement tend à créer un fonds de 10 millions d’euros ayant pour but de soutenir l’action n° 04, Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports. Cette mesure serait le fruit d’un redéploiement de crédits initialement accordés à l’appui à l’accès aux financements bancaires qui ne servent qu’à payer les intérêts des banques.

Un tel geste viendrait contrebalancer un budget fortement tourné vers l’investissement, afin de redynamiser économiquement les territoires ultramarins, où le chômage est élevé et l’emploi précaire. Le problème de la pauvreté ne peut être simplement résolu en donnant une activité professionnelle à tous. D’autres paramètres doivent également être pris en compte ; c’est le sens de cet amendement.

Un soutien accru à l’action n° 04 du programme 123, « Conditions de vie en outre-mer », pourrait se révéler salutaire pour des territoires dont les habitants souffrent au quotidien de manques sanitaires et sociaux, mais aussi de l’absence d’infrastructures éducatives, sportives et culturelles.

Nulle part sur le territoire de la République l’exécutif ne devrait abandonner ses administrés sujets aux inégalités sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’amendement n° II-794, présenté par Mme Conconne, M. Antiste, Mme Jasmin, M. Lurel, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin, Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Tissot, Montaugé, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme intitulé :

Fonds pour la mobilité retour

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

Fonds pour la mobilité retour

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Catherine Conconne.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Conconne

Cet amendement vise à revenir sur un sujet qui nous tient collectivement à cœur, en particulier en Guadeloupe et en Martinique. Nous vivons un véritable drame démographique, nos pays fondent comme neige au soleil.

En Guadeloupe et en Martinique, la population diminue chaque année de plusieurs milliers d’habitants. Comment voulez-vous construire des politiques publiques qui tiennent la route, alors que le nombre d’habitants baisse à une vitesse fulgurante ? Rien ne tient ! Que ce soit pour le développement économique, le logement, l’éducation ou la prise en charge des personnes âgées, aucune politique publique ne peut tenir dans un tel environnement. Aujourd’hui, des lycées peuvent être transformés en Ehpad ! Dans chaque commune, des écoles ferment !

Tout diminue. La consommation elle-même commence à afficher des chiffres profondément inquiétants. Comment faire pour juguler un tel mouvement ? Les initiatives locales sont évidemment essentielles, et je vous remercie, madame la ministre, d’avoir participé à l’effort collectif martiniquais qui a permis d’engager un certain nombre d’actions qui montrent déjà des signes encourageants. Mais il faut aussi des moyens !

Le ministère de l’outre-mer exerce la tutelle sur l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité (Ladom) qui est une sorte d’agence pour la migration… Cette instance finance le départ des jeunes en formation, les passeports mobilité, ou encore l’aide à la continuité territoriale. Je suis entièrement d’accord avec cet aspect des choses, mais l’Agence devrait aussi, comme cela était prévu à l’origine, contribuer au retour au pays de ceux qui le souhaitent. Elle doit contribuer à la continuité territoriale dans les deux sens ! Les billets d’avion sont fort onéreux, chacun le sait, et il manque souvent un peu d’argent aux gens pour rentrer.

C’est pourquoi je souhaiterais, madame la ministre, que le Gouvernement fasse un geste, même symbolique, en augmentant le budget de Ladom de 10 millions d’euros. Cette enveloppe permettrait d’accompagner le retour de nos populations. Pour la Guadeloupe et la Martinique, le besoin est vital, c’est une question de vie ou de mort !

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’amendement n° II-585 rectifié bis, présenté par MM. Poadja et Laurey, Mme Tetuanui, MM. Delcros, Détraigne et Henno, Mme Joissains, MM. Lagourgue, Le Nay, Longeot et Louault et Mme Doineau, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Gérard Poadja.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Poadja

En matière de prévention des risques naturels majeurs, les collectivités du Pacifique ne sont éligibles ni au fonds Barnier ni au Fonds vert pour le climat. Certes, elles bénéficient d’un équivalent du Fonds vert, mais ce n’est qu’une solution transitoire.

Comme vous l’avez dit, madame la ministre, nous devons mettre en place un fonds pérenne destiné à la prévention des risques naturels dans le Pacifique. Nos territoires subissent d’une manière forte, parfois dramatique, les effets du réchauffement climatique et de la montée des eaux. La délégation sénatoriale aux outre-mer appelle également de ses vœux la mise en place d’une solution pérenne dans son rapport sur les risques naturels majeurs.

En attendant la création d’un tel fonds, je propose d’augmenter les crédits alloués à l’équivalent du Fonds vert.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’amendement n° II-799 rectifié, présenté par M. Lurel, Mme Conconne, M. Antiste, Mmes Jasmin et Artigalas, MM. M. Bourquin, Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Tissot, Montaugé, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Victorin Lurel.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Le ministère a décidé de consacrer 7 millions d’euros à l’ingénierie. Ce besoin d’assistance technique serait lié à notre incompétence et à notre incapacité de mobiliser et de consommer les crédits… Nous proposons plus simplement d’augmenter les crédits de la LBU de 7 millions d’euros !

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’amendement n° II-894 rectifié ter, présenté par Mme Jasmin, M. Lurel, Mme Conconne, M. Antiste et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds d’urgence pour la préservation de biodiversité en outre-mer

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

Fonds d’urgence pour la préservation de biodiversité en outre-mer

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Debut de section - PermalienPhoto de Victoire Jasmin

Cet amendement a pour objet de prendre en compte les problématiques liées à la biodiversité en outre-mer.

Si tout le monde s’accorde sur l’urgence écologique et climatique, il demeure pourtant une absence de coordination des politiques publiques déclinées en outre-mer sur ce sujet. Il s’agit donc, par le fonds d’urgence visé, de décloisonner les initiatives existantes et de définir une politique globale et transversale, spécifique à chaque territoire, en tenant compte de la multiplicité des acteurs publics et privés concernés.

L’outre-mer est une réserve pour la biodiversité nationale et mondiale qu’il convient de préserver par une action coordonnée, et le pilotage doit être centralisé directement par le ministère des outre-mer.

Deuxième domaine maritime mondial, la France héberge 10 % de la biodiversité de la planète, dont la majeure partie en outre-mer. Par exemple, sur 19 424 espèces endémiques recensées, les quatre cinquièmes se trouvent dans les outre-mer et 90 % des nouvelles espèces découvertes en France – deux par jour en moyenne – le sont en outre-mer.

Le développement des échanges commerciaux et des transports ainsi que le réchauffement climatique ont de graves conséquences sur la biodiversité, en particulier pour les espèces marines. C’est aussi pourquoi nous devons valoriser la taxonomie – cette science est nécessaire, parce que de nombreuses espèces n’ont pas encore été identifiées.

Afin d’assurer la recevabilité du présent amendement, ce fonds serait créé par un redéploiement de crédits initialement accordés à l’appui à l’accès aux financements bancaires, mais face à l’urgence écologique et climatique, il est demandé au Gouvernement de l’alimenter avec les crédits nécessaires.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’amendement n° II-891 rectifié ter, présenté par Mme Jasmin, M. Lurel, Mme Conconne, M. Antiste et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Debut de section - PermalienPhoto de Victoire Jasmin

Mme la ministre a parlé de problèmes d’ingénierie. Pourtant, de plus en plus de jeunes d’outre-mer suivent des études supérieures, que ce soit en France ou à l’étranger. L’ingénierie existe donc, les cerveaux aussi !

Cependant, ces jeunes sont souvent en errance, parce qu’ils rencontrent de grandes difficultés de recrutement, y compris dans les services de l’État et même s’ils sont diplômés d’une grande école. Ces difficultés sont un véritable problème, madame la ministre, et elles touchent particulièrement ceux qui se trouvent déjà dans des situations précaires.

Dans ce contexte, cet amendement a pour objet de doubler l’aide au microcrédit pour ceux qui restent, ceux qui ont des petites entreprises, les indépendants, en un mot ceux qui peuvent encore contribuer au développement de nos territoires.

Afin d’assurer la recevabilité de cet amendement, il est proposé d’augmenter, en autorisations d’engagement et crédits de paiement, l’action n° 04 du programme 138 à hauteur de 2 millions d’euros par une diminution équivalente des crédits inscrits à l’action n° 09 du programme 123.

Les petites entreprises ont absolument besoin du microcrédit et d’un accompagnement adapté.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’amendement n° II-786, présenté par M. Antiste, Mmes Conconne et Jasmin, M. Lurel, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin, Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Tissot, Montaugé, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Maurice Antiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Antiste

La formation professionnelle des jeunes est censée être une priorité gouvernementale. L’action n° 02 du programme 138, « Emploi outre-mer », vise à favoriser l’insertion et la qualification professionnelle des jeunes d’outre-mer, notamment grâce à l’accompagnement du service militaire adapté (SMA). Ce dispositif qui rencontre un grand succès accueille plus de 6 000 jeunes qui sont souvent issus de milieux très défavorisés et de zones géographiques généralement éloignées des centres.

Malgré le grand intérêt que ces formations présentent, la pauvreté et les origines sociales et géographiques conduisent beaucoup de ces jeunes à les abandonner en cours de route. Pourtant, le régiment du SMA dispose de moyens logistiques qu’il pourrait, à peu de frais, mettre à disposition de ces jeunes, en effectuant des ramassages et transports vers les centres de formation. Là aussi, il manque quelques moyens.

Le présent amendement tend donc à amorcer un tel dispositif, pour un montant faible, je le répète, au profit des jeunes les plus éloignés et en difficulté, en augmentant les crédits de l’action n° 02 du programme 138.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Ces amendements ont des objets différents et présentent tous un intérêt certain pour les territoires concernés. Malheureusement, ils ont un point commun : ils visent à prélever des crédits sur l’action n° 02, Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle, du programme 138.

S’ils étaient adoptés, les crédits du service militaire adapté et des différents dispositifs d’aide à la mobilité financés par Ladom seraient diminués d’autant, et de manière importante. Le programme « Cadres de Mayotte », les chantiers de développement local pour la Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna et la Polynésie et le programme « Cadres pour Wallis-et-Futuna » verraient ainsi leurs crédits réduits. De même, les ambitions du plan SMA 2025, qui doit notamment permettre une amélioration du taux d’encadrement, s’en trouveraient très largement compromises.

La commission des finances a donc émis un avis défavorable à l’ensemble de ces amendements. Toutefois, à titre personnel, j’émets un avis de sagesse sur les amendements n° II-894 rectifié ter et II-891 rectifié ter de Mme Jasmin, ainsi que sur l’amendement n° II-786 de M. Antiste.

Debut de section - Permalien
Annick Girardin

Les amendements n° II-793 rectifié, II-795 rectifié, II-779, II-797 rectifié et II-799 rectifié concernent la question du logement.

J’ai détaillé la politique que mène le Gouvernement en la matière ; elle s’appuie évidemment sur la LBU, mais aussi sur d’autres missions ou dispositifs. La LBU qui dépend de la mission « Outre-mer » est aujourd’hui dotée de 115 millions d’euros, sans compter les Sidom.

Julien Denormandie, ministre chargé du logement, et moi-même venons de signer le nouveau plan Logement outre-mer qui prévoit notamment une enveloppe de 1, 5 milliard d’euros de la part d’Action Logement. Nous avons aussi rétabli l’aide à l’accession à la propriété pour les territoires d’outre-mer et nous avons élargi les dispositifs de défiscalisation. Les élus d’outre-mer se sont beaucoup battus en faveur de la réhabilitation et de la démolition-reconstruction du parc social dans les quartiers de la politique de la ville, et pas seulement dans ceux qui sont classés en zone ANRU – le montant de ces opérations est évalué à 12 millions d’euros.

Vous le voyez, les moyens sont au rendez-vous pour créer une nouvelle dynamique qui soit à la hauteur des besoins des outre-mer. Prenons l’exemple de La Réunion : le plan précédent prévoyait 10 000 logements par an, mais il n’a jamais été possible de dépasser le nombre de 5 000. Il y avait donc bien une question de dynamique et d’outils ; c’est pour cette raison que nous avons mis en place de nouveaux dispositifs pour améliorer la situation.

En ce qui concerne les Sidom, le produit de leur vente représentera 17, 5 millions d’euros pour l’année 2020. Ce montant complétera la LBU. La vente sera signée le 23 décembre prochain ; vous pouvez compter sur moi et sur l’ensemble du Gouvernement pour que ces crédits soient au rendez-vous de 2020. Je sais que vous serez tous très vigilants sur cette question, mais je vous demande de me faire confiance.

Vous l’avez compris, nous voulons créer une nouvelle dynamique en faveur du logement outre-mer. Cette stratégie a été coconstruite avec l’ensemble des acteurs dans les territoires.

Pour mémoire, je veux rappeler qu’en 2019 la LBU a été consommée à hauteur de 198 millions d’euros. Dire que nous avons besoin d’ingénierie n’est donc pas une vision de l’esprit ; cette assistance technique est nécessaire, si nous voulons dépasser ce montant.

Pour conclure, je demande le retrait des amendements relatifs au secteur du logement. À défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.

En ce qui concerne l’amendement n° II-781, vous avez raison, madame la sénatrice, l’accroissement des risques liés aux maladies vectorielles, notamment la dengue ou l’affection due au virus zika, va malheureusement se poursuivre avec le dérèglement climatique. À la fin de l’année 2017, La Réunion a connu une épidémie de dengue, et la Guadeloupe est passée depuis peu au stade épidémique.

Face à ces enjeux, le ministère des solidarités et de la santé – je rappelle que les questions de santé publique sont prises en charge par ce ministère, pas par celui des outre-mer – a inscrit la prévention des maladies vectorielles, tout particulièrement en outre-mer, comme une priorité de la stratégie nationale de santé 2018-2022.

Concernant précisément La Réunion, nous avons mené un combat acharné avec de nombreux partenaires – les services d’incendie et de secours, la Croix-Rouge, les régiments du SMA, etc. Six cents contrats aidés parcours emploi compétences ont été mobilisés. Cette union autour des agences régionales de santé et des préfectures a permis de mettre une place une stratégie qui s’est révélée efficace, puisque nous sommes passés de cinq cents cas par semaine à dix. Nous pouvons donc nous féliciter du travail collectif qui a été ainsi réalisé.

En tant que ministre des outre-mer, je suis évidemment très vigilante sur ce sujet et je peux vous assurer que la ministre des solidarités et de la santé l’est également. D’ailleurs, elle m’a demandé d’annoncer au président de la collectivité de Guyane, lors de mon passage sur place, une enveloppe d’un million d’euros pour soutenir ce territoire dans la lutte contre ce fléau.

Nous devons rester prudents. Dans certains territoires, notamment à La Réunion, l’été arrive. Nous avons évidemment des craintes de résurgence de l’une ou l’autre de ces maladies, mais nous sommes au rendez-vous.

Pour ces raisons, le Gouvernement demande là aussi le retrait de cet amendement.

Sur l’amendement n° II-780 qui concerne l’action sanitaire et sociale, le montant de 15 millions d’euros qui n’est plus inscrit à l’action n° 04 s’explique simplement par le fait que les opérations correspondantes sont terminées : l’une a été débasée ; une autre, de 2 millions d’euros, correspondait à un investissement en oncologie à Papeete ; la dernière, d’un montant de 12 millions d’euros, concerne le régime de solidarité de la Polynésie française (RSPF) qui sera traité d’une manière différente à l’avenir.

Je rappelle que, sur ces sujets, le ministère des outre-mer vient en complément des dispositifs qui existent à l’échelon national pour soutenir, à un moment donné, un projet particulier. J’insiste, le ministère dont j’ai la charge n’a pas vocation à intervenir sur les questions sanitaires de manière récurrente ou structurelle – c’est en tout cas la position que je défends depuis que je suis à sa tête.

Le rapporteur spécial de la commission des finances, Georges Patient, s’est inquiété de la disparition de cette enveloppe de 12 millions d’euros et je souhaite lui apporter des éléments de réponse. L’accord avec la Polynésie s’est terminé en 2018 et j’ai souhaité qu’un avenant soit prévu pour 2019, afin de verser ce montant une année supplémentaire – j’ai signé un accord allant dans ce sens avec le président de la collectivité Édouard Fritch. Pour 2020, je souhaite débattre avec la collectivité de l’inclusion de cet investissement de l’État dans le contrat de convergence et de transformation. C’est la raison pour laquelle l’enveloppe qui était jusque-là incluse dans le budget n’est pas prévue dans le projet de loi de finances pour 2020, mais nous serons bien aux côtés de la Polynésie.

En ce qui concerne la continuité territoriale et la mobilité, plusieurs amendements ont été déposés, en particulier l’amendement n° II-794. La mobilité est une préoccupation majeure de nos concitoyens et il nous faut y répondre.

En Martinique, il existe effectivement, madame la sénatrice Conconne, une question démographique et je comprends votre inquiétude. Elle se pose aussi en Guadeloupe, même si, pour l’instant, elle est un peu moins prégnante, à Wallis-et-Futuna et à Saint-Pierre-et-Miquelon. Cela soulève la question plus générale de l’attractivité de nos territoires.

Comment permettre le retour des jeunes en formation ou des demandeurs d’emploi ? Pour ceux qui sont en formation, le billet de retour est prévu à l’issue de leur formation. Faut-il prévoir un délai plus long pour prendre en compte le temps éventuel d’une expérience professionnelle en métropole ? Je suis assez favorable à une telle mesure et je pense que nous pouvons tous défendre cette position. Nous pourrons y travailler. En ce qui concerne les personnes qui suivent une formation professionnelle, il me semble que le billet de retour est valable cinq ans.

En tout cas, je crois qu’il est temps que nous travaillions ensemble sur une réforme de Ladom et des outils de la continuité territoriale. Un groupe de travail va d’ailleurs se mettre en place et une réunion aura lieu mardi matin au ministère. Vous le savez, je suis résolue à avancer sur ce sujet. Nous devons le faire avec les collectivités territoriales, puisque la formation fait partie de leurs compétences, et avec le service public de l’emploi. Il existe en la matière des recoupements de compétences, ce qui ne peut que perturber les personnes qui veulent se former – elles ne savent pas toujours à quelle porte frapper.

Je m’inquiète aussi de la détresse de certains étudiants qui viennent des outre-mer et qui n’ont pas de relais en métropole – des journaux se font l’écho de ces situations. Là aussi, nous devons y répondre tous ensemble dans les mois qui viennent.

Sur le Fonds vert pour le climat et l’amendement n° II-585 rectifié bis, vous savez combien je suis sensible à ces sujets.

Je n’ai pas besoin de rappeler que j’ai intensément participé à la préparation de la COP21 et que j’étais, en quelque sorte et au-delà des seuls outre-mer français, la voix des États insulaires. Je me suis battue pour que la communauté internationale s’engage à ce que le réchauffement ne dépasse pas 2 degrés et à ce que l’accord prenne correctement en compte l’incidence du réchauffement sur le niveau de la mer, car ce processus créera de véritables catastrophes. Il est évident que la montée du niveau des océans suscite des inquiétudes dans les territoires d’outre-mer, elles sont justifiées.

C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité travailler sur un projet de loi consacré aux risques majeurs outre-mer. Nous devrions présenter ce texte entre les mois de février et de juin de l’année prochaine. Le Premier ministre appuie cette démarche.

L’Agence française pour le développement (AFD) a mis en place un fonds vert doté de 42 millions d’euros qui, via la bonification de prêts, a déjà permis de financer des projets qui représentent un total de 700 millions d’euros.

Nous avons aussi lancé la Trajectoire outre-mer 5.0. Les présidents des collectivités et des régions ont signé cette charte et nous avons institué, au sein de l’AFD, un fonds spécifique de 15 millions d’euros qui interviendra dans tous les territoires d’outre-mer, sans exception. Enfin, je rappelle que le Fonds européen d’investissement (FEI) intervient également sur ces questions.

Je demande donc le retrait de l’amendement n° II-585 rectifié bis. À défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.

En ce qui concerne l’amendement n° II-894 rectifié ter, vous connaissez mon implication sur les questions de biodiversité. Le Président de la République a pris des engagements importants sur ce sujet, si bien que je demande le retrait de cet amendement.

Dans le cadre du Livre bleu, nous avons mis en place, avec le muséum national d’histoire naturelle, un compteur de la biodiversité. En outre, le ministère des outre-mer participe à l’initiative Pacifique pour le climat et la biodiversité qui est dotée de plus de 21 millions d’euros. Comme vous le savez, le chef de l’État a souhaité créer une alliance internationale pour la forêt.

Nous sommes donc pleinement investis sur ces sujets et, lors de sa visite aux îles Glorieuses, le Président de la République a rappelé l’importance de la recherche scientifique pour la biodiversité. C’est pourquoi, je le répète, je demande le retrait de l’amendement n° II-894 rectifié ter.

Au sujet de l’amendement n° II-891 rectifié ter, je voudrais d’abord dire ma satisfaction : sur mon initiative, le microcrédit a été mis en place dans tous les territoires d’outre-mer, notamment grâce au déploiement de l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE) – je l’en remercie.

J’ai fait en sorte que l’enveloppe dédiée à cette action augmente : elle passe de 63 millions d’euros à 82 millions d’euros. Dans le même esprit, le plafond d’intervention a été relevé de 3 000 euros pour les outre-mer ; il est passé de 12 000 euros à 15 000 euros, afin d’être davantage aux côtés de nos entreprises ultramarines et de répondre véritablement à leurs besoins. C’est l’une de mes priorités.

Je partage donc votre objectif, madame Jasmin, mais je vous demande simplement d’attendre une année pour que nous évaluions ensemble comment les choses se mettent concrètement en place dans nos territoires et je vous donne rendez-vous pour le budget pour 2021.

Pour cette raison, je demande le retrait de cet amendement.

Enfin, s’agissant de l’amendement n° II-786 qui concerne le SMA, j’ai bien conscience des difficultés en Martinique, notamment dans le nord. Il y a peu de transports et, quand il en existe, ils sont assez chers. Je m’engage à apporter une réponse à cette difficulté, sans changer le budget du ministère. Le régiment du SMA prendra contact avec la collectivité et le préfet mènera une réflexion. Nous devons accompagner les jeunes qui ont ces difficultés et qui perçoivent une très faible indemnité. Comptez sur moi pour apporter des réponses dans l’année !

C’est pourquoi je demande le retrait de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Philippe Dallier.