… prononcée en 1960 : « Tandis que le génie du siècle change notre pays, il change aussi les conditions de son action outre-mer. […] Il n’y a pas de politique qui vaille en dehors des réalités ! »
Je me réjouis donc, madame la ministre, de vous savoir prête à aller plus loin dans la différenciation territoriale et je partage votre conviction personnelle d’un article unique fusionnant les articles 73 et 74 de la Constitution. C’était du reste le sens de ma contribution à la journée d’étude « Réforme territoriale et différenciation(s) », organisé ici même en 2015, au cours de laquelle j’avais indiqué : « La différenciation territoriale met en lumière la dialectique de l’unité et de la diversité […] Pour l’outre-mer, la synthèse me semble réalisée par l’article 74 de la Constitution », c’est-à-dire un article unique, socle de statuts à la carte. Sa réécriture devrait permettre de mettre les institutions au service du développement des outre-mer et de faire en sorte que les politiques publiques prennent leur source dans leurs réalités, y compris pour une coconstruction efficace avec l’État. Là encore, à la notion d’adaptation, permettez-moi de préférer celle de pertinence.
Après ces considérations d’ordre général, je tiens à saluer de manière appuyée le travail considérable et de très grande qualité de mes collègues Guillaume Arnell, rapporteur coordinateur, Jean-François Rapin et Abdallah Hassani, rapporteurs, sur le second volet du rapport d’information sur les risques naturels majeurs dans les outre-mer conduit par la délégation sénatoriale aux outre-mer que j’ai l’honneur de présider.
Ce volet est, comme le précédent, le fruit d’une observation minutieuse de la situation de chacun des territoires et d’une écoute attentive des parties prenantes à la reconstruction et à la résilience de ces territoires. Nous espérons que le projet de loi fera l’objet d’une véritable coconstruction tenant compte de cette approche de terrain.
Je conclurai en évoquant Saint-Barthélemy, pour lever une ambiguïté qui a pu naître du projet d’évolution de l’organisation de la gestion et du financement de la sécurité sociale sur notre île.
En 2015, il a fallu le passage du Président de la République pour qu’un véritable service de gestion de la sécurité sociale soit mis en œuvre sur place, qui est désormais confié à la Mutualité sociale agricole Poitou. Parallèlement, alors que l’île est, disons sans entrer dans les détails, « contributeur net » avec un excédent moyen annuel de cotisations par rapport aux prestations d’environ 25 millions d’euros pour 9 000 habitants, toutes les avancées en matière de santé ont été le fait de la collectivité.
Il en est ainsi du scanner, du mammographe, de la table de coronographie ou de la construction de l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), tous ces investissements étant source d’économie pour la sécurité sociale. Toutefois, malgré ce contexte, aussi bien l’hôpital que l’Ehpad présentent des soldes déficitaires, conduisant d’ailleurs la collectivité à abonder le compte soins de ce dernier.
À Saint-Barthélemy, la biologie médicale a reculé de trente ans – il faut cinq jours minimum pour une glycémie – et la réorganisation des urgences entraîne une limite de capacité au-delà de deux évacuations sanitaires. Voilà deux exemples symboliques de la dégradation de la prise en charge des patients.
C’est dans ce contexte que le président de la collectivité a émis le souhait que la caisse de prévoyance sociale de Saint-Barthélemy soit dotée d’une véritable personnalité juridique, d’une part, que, par dérogation, elle se voit confier le versement des dotations aux établissements de santé de l’île, d’autre part. Saint-Barthélemy ne remet donc aucunement en cause son insertion dans le système de solidarité nationale, mais souhaite être impliquée dans un projet de santé local qui tienne précisément compte de sa réalité.