Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Vincent Éblé l’a dit, le montant des crédits de la mission « Culture » s’élèvera à près de 3 milliards d’euros en autorisations d’engagement en 2020 et à 2, 96 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une augmentation de près de 1 % par rapport à 2019. Soulignons d’ores et déjà qu’il s’agit d’un budget en hausse dans un contexte de maîtrise de la dépense publique. Il faut s’en féliciter.
Cette augmentation des crédits représente une majoration de la dotation budgétaire d’environ 60 millions d’euros.
Les crédits de la mission ne résument pas l’effort de l’État en direction de la culture. Il faut notamment y ajouter les crédits dédiés au livre et aux bibliothèques, ainsi que le compte de concours financiers à l’audiovisuel public et l’ensemble des taxes affectées et des dépenses fiscales ayant trait au champ culturel. L’effort de l’État s’élèverait plutôt à 14, 2 milliards d’euros, soit un peu moins de 4, 5 % du budget de l’État.
La mission « Culture » a des spécificités. Je rappelle que la gestion de la majeure partie de ses crédits est soit déconcentrée, soit directement assurée par des opérateurs. Les sommes directement versées aux opérateurs atteignent ainsi 44, 3 % du total, quand le taux de déconcentration des crédits de paiement de la mission devrait s’élever à 38, 5 % en 2020. Il ne reste donc que 17 % de crédits gérés au niveau central.
La mission est composée de trois programmes.
Le premier, le programme 131, « Création », est doté de 817 millions d’euros. Il traduit, en 2020, un soutien renouvelé aux œuvres et aux artistes.
J’insiste sur les crédits consacrés au soutien à l’emploi culturel.
La priorité accordée à ceux-ci se traduit par une hausse de 8 millions d’euros des crédits destinés au Fonpeps, le Fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle. Un débat a eu lieu à l’Assemblée nationale sur ce point, aboutissant à l’adoption d’un amendement minorant la dotation de ce fonds. Nous aurons de nouveau une discussion sur le sujet, puisque nous examinerons un amendement visant à rétablir ces crédits à leur niveau initial.
Le reste du programme ne laisse que peu de marges de manœuvre au niveau central. C’est une bonne chose du point de vue du Sénat que l’essentiel des crédits soient fléchés vers les territoires via les opérateurs ou les structures déconcentrées. Le projet de loi de finances table d’ailleurs sur une poursuite de cet effort de déconcentration, que nous ne pouvons que saluer. Il faut cependant noter que la marge de manœuvre au niveau central se réduit. Il faudra être vigilant à ce sujet dans les années à venir.
Autre point de vigilance que je veux soulever : les travaux, en particulier ceux qui concernent l’Opéra Bastille, le Centre national de la danse et la Cité du théâtre. La fin de la plupart de ces chantiers devrait intervenir en 2022 ou 2023. Là encore, la commission des finances suivra l’évolution des coûts face au risque d’inflation.
Au regard des montants en jeu – le coût du projet Bastille est évalué à 59 millions d’euros, celui de la Cité du théâtre à 86 millions d’euros –, il faudra la plus grande transparence en matière de choix de la maîtrise d’œuvre, de la maîtrise d’ouvrage et de la répartition des coûts entre acteurs publics.
La Cité du théâtre se situe dans le XVIIe arrondissement, mais n’est pas un projet parisien. Elle doit permettre de déployer les troupes en région, sur les territoires. L’idée est de multiplier les tournées pour que les grands théâtres nationaux puissent bénéficier des spectacles. Il s’agit d’un objectif que nous partageons tous.
J’en viens au deuxième programme, le programme 224, qui englobe des crédits transversaux, liés à ce que l’on appelle la démocratisation – l’accès à la culture, l’enseignement supérieur culture, la politique linguistique, la politique internationale –, et des crédits affectés aux fonctions de soutien.
Il s’agit donc d’un programme assez large, représentant 1, 27 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 1, 17 milliard d’euros en crédits de paiement.
Il appelle à ce stade deux réflexions, qui ont évidemment nourri nos débats.
Ma première remarque concerne le pass culture.
Les crédits qui lui sont dédiés progressent de 5 millions d’euros pour atteindre 39 millions d’euros en 2020, auxquels s’ajouteront les 10 millions d’euros non consommés en 2019. Cela traduit une montée en charge de cet outil d’émancipation culturelle, pour l’heure expérimental, qui s’adresse à 150 000 jeunes dans 14 départements.
Une campagne de communication renforcée sera lancée dans les territoires concernés, en lien avec les directions régionales des affaires culturelles (DRAC)
Il faudra ensuite évaluer le dispositif, au plan à la fois quantitatif et qualitatif, tant du point de vue des jeunes que de celui des offreurs, avant d’envisager la généralisation du dispositif à l’horizon de 2022.
Le Sénat, à travers sa commission de la culture, a tenu à souligner que l’essor du pass culture ne devait pas faire oublier le reste des actions propres à l’irrigation culturelle du territoire, notamment tout ce qui concerne le programme Objectif 100 % éducation artistique et culturelle, programme auquel la Haute Assemblée est très attachée et qui, bien sûr, devra lui aussi être évalué.
Ma seconde remarque porte sur les programmes de modernisation du système informatique du ministère de la culture et, surtout, sur la réduction du nombre des sites parisiens de ce dernier.
Ces évolutions participent d’un effort de rationalisation de la dépense publique, qu’il convient de saluer. Cela permet de compenser les coûts liés à la nécessaire revalorisation de la grille indemnitaire des agents du ministère de la culture – un très beau ministère, mais dont les équipes ne bénéficient pas toujours des mêmes primes que celles des autres ministères. Il faut donc renforcer son attractivité et éviter les vacances de poste, ce qui passe par la poursuite de cette revalorisation de grille indemnitaire.
C’est ainsi, mes chers collègues, qu’un programme d’économies, d’un côté, peut permettre d’assumer le renforcement de certaines dépenses, de l’autre, et ce afin que le ministère de la culture reste, en cette année anniversaire, un ministère vibrant et vivant au service des territoires.