Intervention de Maryvonne Blondin

Réunion du 5 décembre 2019 à 14h30
Loi de finances pour 2020 — Culture

Photo de Maryvonne BlondinMaryvonne Blondin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que nous célébrons les soixante ans du ministère de la culture, il paraît opportun de rappeler l’ampleur de la mission assignée par son décret fondateur : « rendre accessibles les œuvres capitales de l’humanité, et d’abord de la France, au plus grand nombre possible de Français ; […] assurer la plus vaste audience à notre patrimoine culturel, et […] favoriser la création des œuvres de l’art et de l’esprit qui l’enrichissent ». Le présent budget est-il à la hauteur de ces enjeux primordiaux ?

Vous vous félicitez, monsieur le ministre, de nous présenter un budget ambitieux, en hausse de 73 millions d’euros, marquant la volonté du Gouvernement en matière de politique culturelle. Sa lecture appelle toutefois la prudence, tant les transferts et les rectifications intervenus en cours d’exercice par rapport aux crédits qui ont été votés pour 2019 peuvent en fausser l’analyse. En réalité, hors transfert et en crédits de paiement, seuls les crédits dédiés au programme 224, « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » sont en augmentation de 5 %.

Au sein du programme « Création » a été créée l’action n° 06, Soutien à l’emploi et structurations des professions, par transfert de l’action n° 08 du programme 224. Dotée de 38 millions d’euros, elle bénéficiera notamment au Fonpeps. Celui-ci a fait l’objet d’une refonte, mise en œuvre le 1er octobre dernier : une aide unique à l’embauche en CDI ou en CDD se substitue aux quatre premières mesures du fonds initial. Nous souhaitons que cette restructuration permette une plus grande lisibilité et une meilleure efficacité du dispositif.

En outre, nous saluons le maintien de la compensation de la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG), qui avait entraîné une baisse du pouvoir d’achat des artistes-auteurs. Nous resterons vigilants sur la mise en œuvre de la vaste réforme du statut social des professionnels du secteur.

Au sein du programme 224, l’action n° 01, Soutien aux établissements d’enseignement supérieur et insertion professionnelle, connaît cette année encore une baisse de 5 millions d’euros ; l’érosion des crédits de cette action se poursuit. Sans artiste, monsieur le ministre, pas de culture ! Un effort budgétaire plus important doit être consenti, afin de préserver la qualité des formations et de favoriser l’accompagnement des artistes vers la vie active : seuls 10 % des élèves diplômés parviennent à vivre exclusivement de leur pratique artistique ! De même, la révision du statut des professeurs des écoles d’art territoriales ne peut plus attendre.

L’action n° 02, qui finance le soutien à la démocratisation et à l’éducation artistique et culturelle, est en légère hausse ; elle est consacrée en réalité au pass culture, dont l’enveloppe est portée à 39 millions d’euros. L’expérimentation se poursuit, notamment dans ma région, où 18 000 jeunes sont inscrits.

Une mission d’évaluation est en cours et nous nous interrogeons au vu des premiers chiffres : le taux d’activation s’élève à 52 %, le taux d’utilisation parmi les jeunes ayant créé leur compte à 68 % et le taux de consommation à 60 %.

Lors de votre visite dans le Finistère, monsieur le ministre, les jeunes utilisateurs ont souligné des dysfonctionnements de l’application et l’insuffisance des offres locales, notamment dans les secteurs ruraux, dans lesquels la mobilité est une question cruciale.

Les professionnels s’inquiètent du manque de visibilité pour les petites structures. Nous demeurons vigilants à l’égard des déterminismes sociaux, géographiques et culturels, qui pourraient faire passer ce dispositif à côté de son objectif initial. La mise en œuvre d’une véritable médiation paraît plus que nécessaire.

Quant au mécénat, il a été évoqué à plusieurs reprises. Je n’y reviens pas.

Pour conclure, nous regrettons le peu de références aux droits culturels, introduits dans la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) et dans la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP). Ces droits culturels doivent pourtant constituer le fil directeur de l’ensemble des acteurs concourant aux politiques culturelles. Nous peinons également à dégager une cohérence d’ensemble aux politiques publiques soutenues par votre ministère. Ce dernier apparaît aujourd’hui comme affaibli, peinant à engager et piloter une politique culturelle structurée et structurante.

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