Intervention de Michel Laugier

Réunion du 5 décembre 2019 à 14h30
Loi de finances pour 2020 — Compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public

Photo de Michel LaugierMichel Laugier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le secteur de la presse traverse deux crises existentielles : une crise financière, avec des revenus en chute libre, conséquence d’une transition numérique à laquelle les journaux n’ont, pour la plupart, pas su se préparer ; une crise morale, avec la remise en cause systématique, notamment sur les réseaux sociaux, d’une information traitée de manière professionnelle par des journalistes attachés aux faits.

Ces crises, monsieur le ministre, il fallait les traiter. Force est de reconnaître que, en 2019, le Sénat et vous-même avez été à la manœuvre, en menant à bien deux grandes réformes.

D’abord, celle des droits voisins, transposition de l’article 17 de la directive européenne. De cette réforme, le secteur de la presse attend légitimement beaucoup, mais l’attitude de Google est, pour l’instant, extrêmement frustrante ; elle appelle probablement une action européenne encore plus large.

Ensuite, la modernisation de la distribution, sur laquelle, monsieur le ministre, vous avez apprécié, je crois, la contribution du Sénat à l’enrichissement d’un texte qui semble maintenant emporter l’adhésion du plus grand nombre. Il ne résout cependant pas la situation toujours critique de Presstalis, dont on peine aujourd’hui encore, près de deux ans après la dernière alerte sur ses comptes, à percevoir le futur. Il en ira ainsi tant qu’on n’apportera pas une réponse industrielle à la question du périmètre de la société et une réponse financière à celle, jamais traitée, de ses fonds propres négatifs.

Sur ces deux sujets, que vous avez eu le courage d’aborder de front, nous vous invitons, monsieur le ministre, à ne pas laisser la situation se dégrader, tant l’hésitation et l’ambiguïté pourraient s’avérer mortelles. Nous sommes très désireux de savoir où en sont les négociations avec vos homologues européens sur les droits voisins, et si une solution claire apparaît enfin pour le futur de Presstalis.

Pour en revenir au sujet de cet après-midi, le budget que vous nous présentez est stable par rapport à l’année précédente, mais ne représente que 20 % d’un soutien public à la presse qui se maintient à un niveau élevé, d’environ 540 millions d’euros.

Il serait donc faux d’affirmer que la solidarité nationale ne s’exerce pas au bénéfice de la presse, même s’il pourrait être temps de réfléchir à une meilleure répartition des aides, pour mieux prendre en compte le numérique. Je note, par ailleurs, des inquiétudes sur la question de la publicité ciblée, dont nous aurons à reparler dans le cadre de la discussion de la future loi audiovisuelle : vos annonces d’ouverture ont inquiété la presse régionale, mais sont jugées encore insuffisantes par les chaînes de télévision, ce qui montre bien la complexité des équilibres en jeu…

Je conclurai sur une note positive, en évoquant la situation de l’Agence France Presse (AFP). L’année dernière, je m’étais inquiété d’un effet ciseaux mortifère, avec des dépenses en hausse et des revenus en baisse. L’impulsion donnée par le nouveau président de l’agence semble toutefois commencer à produire des résultats, comme en témoigne l’accompagnement de 17 millions d’euros que l’État a accepté d’accorder, dont 6 millions d’euros cette année.

Compte tenu de ces observations, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a émis un avis favorable sur les crédits du programme 180, « Presse et médias ».

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