Intervention de André Gattolin

Réunion du 5 décembre 2019 à 14h30
Loi de finances pour 2020 — Compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le domaine qui nous intéresse aujourd’hui, le moins que l’on puisse dire, c’est que l’année 2019 s’achève sur un bilan riche et très positif. Elle a été marquée par l’adoption de plusieurs réformes majeures, comme celle du droit voisin au profit des agences et des éditeurs de presse, la réforme de la loi Bichet sur la distribution de la presse et la création du Centre national de la musique.

Marc Twain, ce grand écrivain américain, se plaisait à dire que les actes en disent souvent plus long que les mots. C’est une réflexion qu’il est toujours bon, en particulier pour nous, parlementaires, de méditer.

Chacun de vous connaît naturellement mon tempérament pondéré. §Aussi, je n’aurai pas ici l’outrecuidance de comparer ce bilan législatif d’une année avec celui du quinquennat précédent.

Pour en revenir aux actes, en particulier aux trois lois adoptées cette année dans le domaine des médias et des industries culturelles, je rappellerai deux faits.

Le premier est que deux de ces trois textes ont été étudiés en première lecture au Sénat. C’est un fait suffisamment rare pour être souligné et consigné. Cela témoigne de la considération que vous portez, monsieur le ministre, à notre Haute Assemblée. Je me crois autorisé à vous en remercier en son nom.

Le second fait, corollaire du premier, est que ces trois textes ont été très largement élaborés, en amont de leur adoption, en collaboration étroite avec les rapporteurs sénatoriaux en charge de ces textes.

Au final, le Gouvernement a fait évoluer ces secteurs sans jamais se départir des valeurs qui président à la conduite du ministère de la culture depuis soixante ans : un secteur public fort, permettant de soutenir l’activité culturelle dans toute sa diversité et donnant un accès à la culture et à une information de qualité à tous nos concitoyens.

Les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » pour 2020 sont guidés par ces mêmes objectifs.

Certes, de réels efforts budgétaires sont demandés au secteur de l’audiovisuel public. Ce n’est pas une surprise : les objectifs de réduction ont été fixés il y a deux ans et étalés sur une durée de trois années.

Des efforts de mutualisation ont notamment été demandés aux différentes sociétés de l’audiovisuel public, dans la perspective de rompre avec cette anomalie française qui veut que notre service public de l’audiovisuel soit représenté par pas moins de cinq sociétés, chacune ayant sa direction, ses fonctions support, et souvent, ses stratégies propres, pour ne pas dire personnelles, et ce à un moment où l’audiovisuel public doit faire face, non seulement à la concurrence de groupes français ou européens du privé toujours plus puissants, mais surtout, à deux grands opérateurs américains qui sont chaque jour plus présents sur le marché national.

Je suis toutefois conscient des craintes actuelles des salariés de Radio France quant à l’avenir de leur emploi. Mais je suis aussi conscient que le numérique modifie profondément nos comportements, nos usages et nos liens sociaux, notamment en matière de communication.

En un an, et en dépit des bonnes audiences de France Inter et de France Culture, le secteur radiophonique dans son ensemble a perdu plus d’un million d’auditeurs. Cette tendance ne peut aller qu’en s’accentuant.

Face à ce changement, la seule réponse possible est de s’adapter aux nouveaux modes d’écoute, aux nouvelles attentes du public, tout en préservant sa spécificité. Les métiers de la radio, comme ceux de la télévision et du journalisme, sont en mutation profonde. L’audience tend de plus en plus à se fragmenter et à se délinéariser.

Il y a une réalité assez cruelle, c’est que l’audience des médias tend à vieillir avec l’âge de ceux qui les font. La presse écrite, y compris la presse de qualité, a profondément renouvelé ses effectifs et ses modes de production au cours des dix dernières années, notamment pour s’adapter à la révolution numérique et à la transformation des usages.

Il n’est à mon sens pas envisageable que nos grandes entreprises de l’audiovisuel ne connaissent pas la même évolution qu’il nous faudra bien sûr accompagner. Il faut avoir le courage de le dire et de l’assumer : ces changements ne sont pas qu’affaire de budget, de moyens financiers et de hausses automatiques de la contribution à l’audiovisuel public, comme certains ici le laissent entendre.

Si tel était le cas, la très forte augmentation qu’a connue la CAP jusqu’en 2017 aurait dû conduire automatiquement à une consolidation des audiences et à un rajeunissement des publics des chaînes et des stations de l’audiovisuel public, ce qui n’a pas été le cas.

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