Intervention de Sophie Primas

Commission des affaires économiques — Réunion du 11 décembre 2019 à 9h30
Audition en application de l'article 13 de la constitution de M. Bertrand Munch candidat proposé à la fonction de directeur général de l'office national des forêts

Photo de Sophie PrimasSophie Primas, présidente :

Nous entendons ce matin, en application de l'article 13 de la Constitution, M. Bertrand Munch, aujourd'hui préfet en service détaché et directeur de l'information légale et administrative, dont le Président de la République propose la nomination aux fonctions de directeur général de l'Office national des forêts (ONF).

Je rappelle que cette nomination ne sera effective qu'en l'absence d'opposition des commissions parlementaires compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat dans les formes prévues par la Constitution. Si l'addition des votes négatifs de chaque commission représentait au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés, l'État ne pourrait pas proposer cette nomination. À l'issue de l'audition, nous procéderons immédiatement au vote, mais nous ne dépouillerons les résultats qu'à l'issue de votre audition par nos collègues députés, qui débutera cet après-midi à 15 heures. Les délégations de vote n'étant pas autorisées, j'invite chacun d'entre vous à rester jusqu'à la fin de l'audition pour participer au scrutin.

Monsieur le préfet, notre commission doit exprimer un avis sur l'adéquation entre un candidat et un poste. En l'occurrence, il s'agit de relever deux défis considérables.

Le premier est d'affronter les difficultés récurrentes de l'ONF. Je rappelle que cet établissement public industriel et commercial (ÉPIC) est né en 1964 avec la mission de redresser notre balance commerciale déficitaire en sciages résineux et avec l'objectif de financer la gestion des forêts publiques par les recettes tirées des ventes de bois. Or ce modèle n'a fonctionné que pendant deux ans, au plus fort de la crise pétrolière de 1974. Depuis les années 1980, malgré des efforts considérables, l'ONF est devenu structurellement déficitaire, avec des recettes de vente de bois qui stagnent, en dépit d'une exploitation plus intensive de la forêt publique, et de sévères compressions d'effectifs qui n'ont pas suffi à maîtriser une masse salariale gonflée par des facteurs exogènes. Il en résulte un cumul de tensions financières, économiques, sociales et territoriales, avec une gestion « multifonctionnelle » de la forêt qui, dans les faits, s'apparente parfois à une gestion des conflits d'objectifs.

Quelle stratégie de rééquilibrage proposez-vous pour résoudre la quadrature du cercle face à la tutelle de Bercy, qui souhaite des économies de fonctionnement et une trajectoire de désendettement, face aux 8 500 agents de l'ONF, qui évoluent dans un climat social peu propice à l'efficacité de l'établissement, face aux 11 000 communes forestières, qui souhaitent plus de présence sur le terrain, plus de transparence des coûts et plus de concertation et face à la filière bois et ses 420 000 emplois, qui s'inquiète de son approvisionnement en matière première et des résistances sociétales aux coupes de bois ?

Quelle est votre vision du statut de l'ONF ? Faut-il, selon vous, que l'ONF change de statut ou de modèle ? Que comprenez-vous des intentions du Gouvernement et des scénarios d'évolution envisagés dans les volumineux rapports d'inspection sur cet établissement ?

Le second défi porte sur le rôle de locomotive que doit jouer l'ONF pour permettre l'adaptation de l'ensemble de notre forêt. Les attaques d'insectes, qui dévastent certaines essences résineuses et menacent aussi les feuillus, sont le révélateur d'un affaiblissement global de nos peuplements forestiers qu'il faut très vite adapter aux nouvelles conditions climatiques. Face à ce risque de catastrophe forestière, tout le monde s'accorde à peu près sur la nécessité de procéder à la replantation, mais personne ne sait exactement quelles essences replanter. Comment, selon vous, l'ONF peut-il répondre aux acteurs de la forêt, qui vont se tourner vers vous pour avoir des points de repère et des soutiens ?

Par ailleurs, les insectes ne tiennent pas compte des distinctions entre forêts publiques et privées. C'est pourquoi le moment nous paraît propice pour mettre en oeuvre notre préconisation de décloisonnement et pour raisonner par massif. Quelles sont vos intentions à ce sujet ?

Enfin, nous souhaiterions éclaircir un mystère : alors que le Gouvernement a annoncé un plan de 16 millions d'euros sur trois ans pour la replantation, en prenant beaucoup de précautions juridiques pour ne pas contrarier les règles européennes, l'Allemagne prévoit de mobiliser 800 millions d'euros au total. Comment expliquez-vous ce décalage ?

Monsieur Bertrand Munch, je vous cède sans plus tarder la parole, puis mes collègues vous poseront directement leurs questions, chacun pour un temps de parole de deux minutes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion