Intervention de Sylvie Vermeillet

Réunion du 6 décembre 2019 à 9h30
Loi de finances pour 2020 — Travail et emploi

Photo de Sylvie VermeilletSylvie Vermeillet :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle aujourd’hui l’examen de la mission « Travail et emploi » ainsi que des articles rattachés 79 à 82.

Nous constatons que les crédits de paiement de la mission sont maintenus cette année à hauteur de 12, 7 milliards d’euros, avec même une légère hausse de 2, 58 %. Dans le détail, cela donne deux programmes en hausse et deux programmes en baisse.

D’abord, le programme 102, « Accès et retour à l’emploi », et le programme 155, « Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail », voient leurs crédits de paiement baisser.

Le programme 102 baisse de 1, 57 %. Malgré la hausse de 1, 75 % des crédits alloués à l’action Plan d’investissement des compétences, les deux autres actions du programme emportent une baisse globale de celui-ci.

Le programme 155 baisse de 2, 96 %. Seule l’action n° 13, Politique des ressources humaines, est en hausse, de 4 %.

Pour le reste, l’ensemble des actions baissent, avec notamment une diminution de 100 % de l’action Affaires immobilières.

Notons une baisse de 5, 77 % des crédits dédiés à l’action Personnels mettant en œuvre les politiques d’accès et de retour à l’emploi. Cela interroge !

Ensuite, le programme 103, « Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi », et le programme 111, « Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail », voient leurs crédits de paiement revus à la hausse.

Le programme 103 progresse de 8 %. Cette progression est principalement portée par les revalorisations de l’action Amélioration de l’insertion dans l’emploi par l’adaptation des qualifications et la reconnaissance des compétences, ainsi que de l’action Plan d’investissement des compétences. Toutefois, cela se fait au détriment de l’action Anticipation et accompagnement des conséquences des mutations économiques sur l’emploi, qui baisse de 24 %.

Cette réduction d’un quart de ce budget est inquiétante.

Le programme 111 progresse de 13 % en raison de la réévaluation de 36 % de l’action Dialogue social et démocratie sociale. Cela sera bénéfique. Nous espérons toutefois que ce sera de nature à compenser la baisse de 18 % des crédits alloués à l’action Qualité et effectivité du droit.

Madame la ministre, j’aborderai la question de l’apprentissage.

La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a réformé l’accompagnement de l’apprentissage en France : les régions ne financent plus les centres de formation d’apprentis (CFA) et le canal de financement passant par le compte d’affectation spéciale « Financement de la modernisation et du développement de l’apprentissage » (CAS FNDMA) n’a plus lieu d’être.

En effet, jusqu’en 2019, une fraction de 51 % du produit de la taxe d’apprentissage versée par les entreprises transitait par le CAS FNDMA et était redistribuée aux conseils régionaux sous forme de « ressource régionale pour l’apprentissage ».

L’ensemble de la taxe d’apprentissage sera désormais affectée à France compétences et aux opérateurs de compétences, qui financeront les CFA sur la base d’un financement « au contrat ».

Le projet de loi de finances pour 2020 prévoit donc la suppression du CAS FNDMA.

Par ailleurs, l’État avait mis en place plusieurs dispositifs d’aide à destination des apprentis et de leurs employeurs, ces aides pouvant prendre la forme d’aides directes, d’exonérations d’impôt ou de cotisations sociales et être financées par des crédits budgétaires ou par d’autres moyens – ressources fiscales affectées, dépense fiscale.

À compter du 1er janvier 2019, la loi a prévu le remplacement des quatre dispositifs d’aide aux employeurs d’apprentis par la nouvelle aide unique calculée dans le projet de loi de finances pour 2020 pour un montant de 662 millions d’euros. Celle-ci remplace des aides auparavant financées par les régions, ce qui explique l’augmentation de ce budget.

Concernant la compétence apprentissage, un financement complémentaire d’un montant de 218 millions d’euros sera versé aux régions en compensation de son transfert.

Ce financement est assuré par un prélèvement sur les recettes de l’État d’un montant de 72, 6 millions d’euros et est complété par une fraction de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), prévue par le projet de loi de finances pour 2020 à hauteur de 156, 9 millions d’euros.

Les régions seront également destinataires de deux enveloppes distinctes pour financer les dépenses de fonctionnement et d’investissement des CFA.

Je me permets toutefois de rappeler que l’ensemble de ces mesures d’accompagnement financier est jugé insuffisant par Régions de France, qui attendait 369 millions d’euros pour assurer la neutralité financière de la réforme de l’apprentissage et près de 250 millions d’euros pour participer au financement des CFA les plus fragiles.

De plus, il pourrait être intéressant que les enveloppes soient sanctuarisées de manière pluriannuelle pour que les régions gardent de la visibilité à moyen et long termes, et qu’elles puissent ainsi maintenir des politiques fortes et cohérentes en matière d’apprentissage.

Les ressources dédiées à l’apprentissage, sous réserve des décisions du conseil d’administration de France compétences, pourraient s’élever à 5 milliards d’euros.

Il convient de préciser que l’affectation des montants par dispositif se fait au terme d’une délibération annuelle du conseil d’administration dans les limites d’une fourchette réglementaire. Cette prévision englobe l’apprentissage, les contrats de professionnalisation, le financement des dépenses d’investissement et de fonctionnement des régions, ainsi que la péréquation.

Actuellement, les régions n’échangent pas sereinement avec France compétences. Il est toujours difficile d’obtenir une information, malgré la présence d’un représentant de l’association Régions de France au sein du conseil d’administration. La transition est donc compliquée par l’absence d’instance de dialogue.

Au-delà des calculs de compensation budgétaire, l’État devrait organiser les échanges afin de faciliter le transfert de la compétence apprentissage.

En espérant que ces points de vigilance concernant l’apprentissage auront retenu votre attention, le groupe Union Centriste votera, comme le proposent nos rapporteurs spéciaux et notre rapporteur pour avis, les crédits de cette mission.

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