Nous les avons transformés pour qu’ils soient davantage au service des ceux qui en ont le plus besoin, de manière qu’ils ne remplissent pas simplement un service ponctuel, mais qu’ils aident les personnes titulaires à accéder durablement à l’emploi.
Ce sont 100 000 nouveaux parcours emploi compétences qui seront programmés en 2020. Comme vous le savez, depuis 2018, à la suite de la remise du rapport de M. Jean-Marc Borello, nous les avons recentrés pour qu’ils intègrent les notions d’accompagnement et de formation. Les premiers résultats sont là, puisque le taux d’insertion dans l’emploi durable à l’issue des contrats aidés parcours emploi compétences a progressé de 5 points dès la première année.
J’en viens aux emplois francs. Comme vous le savez, ces derniers ont été lancés, à titre expérimental, le 1er avril 2018, mais ils ont surtout été étendus le 1er avril 2019, notamment dans vos deux départements, madame, monsieur les rapporteurs spéciaux. L’expérimentation sera généralisée au début de l’année 2020 à l’ensemble des quartiers prioritaires de la politique de la ville du territoire. Le budget pour 2020 prévoit une enveloppe de 233, 6 millions d’euros en autorisations d’engagement et 40 000 personnes en contrat à la fin de l’année 2020.
Pour ce qui concerne les « Territoires zéro chômeur de longue durée », dont vous avez tous parlé, vous avez vu que l’expérimentation bénéficiera d’un budget en hausse de 28, 5 millions d’euros, en progression de 6 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2019. L’effort supplémentaire de l’État s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté et permettra la montée en charge du dispositif dans les territoires qui participent à l’expérimentation, conformément à la loi de 2016, avec 1 750 ETP financés l’année prochaine, contre 811 actuellement embauchés. Je rappelle que le ministère du travail est le principal et parfois l’unique financeur de cette expérimentation, avec une dotation de 17 342 euros par équivalent temps plein, à laquelle s’ajoute un soutien à l’amorçage de 5 000 euros par ETP.
Cette expérimentation est intéressante. Elle permet de tester des modalités innovantes et très mobilisatrices sur le terrain de lutte contre le chômage de longue durée. L’approche territoriale et la mobilisation des élus locaux constituent notamment un élément essentiel du dispositif.
Comme toute expérimentation, il est désormais important de prendre du recul pour l’évaluer. Les acteurs nous ont demandé d’avancer cette évaluation d’un an par rapport à la date qui était prévue dans la loi. Nous l’avons accepté. Ainsi, le 25 novembre dernier, j’ai réuni Laurent Grandguillaume, Louis Gallois et l’association qui porte l’expérimentation. Nous avons examiné trois rapports : un rapport de l’IGAS et de l’IGF, un rapport du comité scientifique et un rapport d’autoévaluation de l’association. Lors de cette réunion, chacun a pu faire part de ses conclusions, qui convergent pour une grande part, tant sur les fragilités que sur les points positifs. C’est pourquoi j’ai proposé au groupe de poursuivre le travail au sein d’un comité de suivi commun, de manière à parvenir à un diagnostic totalement partagé – il l’est déjà largement, mais je souhaiterais qu’il le soit intégralement –, afin que nous puissions, en janvier prochain, faire des annonces sur les suites que nous pensons pouvoir donner à cette expérimentation.
Monsieur le sénateur Lagourgue, vous avez évoqué la situation particulière de La Réunion, notamment sur le plan du chômage. Lors de la visite du Président de la République, nous avons lancé le plan Pétrel, en concertation avec les partenaires locaux. Ce plan est important, parce qu’il couvre les sujets de pauvreté, d’emploi et de formation. Je veux insister notamment sur trois points : 12 000 parcours emploi compétences durant les trois prochaines années, le doublement de l’insertion par l’activité économique en trois ans, avec plus de 7 000 embauches, et une généralisation des emplois francs, au-delà des personnes issues des quartiers prioritaires de la politique de la ville, aux bénéficiaires des dispositifs d’insertion comme la garantie jeunes, le RSMA et l’IAE. Enfin, des opérations pilotes seront menées dans le cadre du plan d’investissement dans les compétences pour aller chercher, par des approches innovantes, les « invisibles », à savoir ceux qui ne viennent ni dans les missions locales, ni à Pôle emploi, ni dans les maisons de l’emploi et de la formation.
Le deuxième grand axe de ce budget réside dans l’accompagnement des acteurs qui accompagnent les plus vulnérables.
Les missions locales sont des opérateurs essentiels de l’accompagnement et de l’insertion des jeunes. La hausse de leurs crédits s’établira à 21 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2019, pour un montant total de 371, 94 millions d’euros. Ces financements assurent la mise en œuvre de la stratégie pluriannuelle de performance des missions locales. Ils sont désormais globalisés en gestion et couvrent à la fois la CPO et l’accompagnement des jeunes qui bénéficient de la garantie jeunes. Ce montant intègre aussi le financement de la mise en œuvre de l’obligation de formation instaurée par la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, qui est en phase de lancement expérimental.
En ce qui concerne Pôle emploi, que vous avez largement évoqué, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget prévoit que la subvention pour charges de service public qui lui est versée s’élève à 1 235, 9 millions d’euros, soit une baisse de 136, 8 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2019. Toutefois, cette diminution est plus que compensée par l’augmentation de la contribution de l’Unédic, qui progresse sous l’effet conjugué du dynamisme de la masse salariale – l’Unédic bénéficie de la baisse du chômage, qui signifie plus de cotisations et moins de dépenses – et du passage de 10 % à 11 % des contributions salariales. Au total, Pôle emploi disposera de 624 millions d’euros de ressources supplémentaires en 2020, ce qui lui permettra de mettre en œuvre les évolutions issues de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel et, surtout, la transformation de l’accompagnement, fruit d’une large concertation entre l’opérateur et les partenaires sociaux, matérialisée dans la convention tripartite État-Unédic-Pôle emploi qui a été validée par le conseil d’administration de Pôle emploi le 8 octobre dernier et qui est en cours de signature.
Madame la sénatrice Puissat, vous avez évoqué ce sujet. Sans reprendre l’intégralité de mon argumentaire sur l’assurance chômage, je tiens à rappeler que nous en avions discuté lors de l’examen du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. J’ai également été auditionnée par la commission des affaires sociales, le 9 juillet dernier, ce qui m’a permis d’expliquer le triptyque qui est au fondement de cette réforme : un meilleur accompagnement des demandeurs d’emploi et des entreprises, la responsabilisation des employeurs quant à la précarité des contrats et l’adaptation des indemnisations au contexte actuel. Sans entrer dans le détail, je répète que le capital de droits est entièrement maintenu pour les demandeurs d’emploi en alternance de contrats courts, contrairement à ce qui peut parfois être dit.
Vous avez également évoqué le bonus-malus. Comme je l’ai déjà dit, on ne peut pas se satisfaire d’une situation où 87 % des embauches concernent des contrats courts et très courts, où 70 % des CDD durent moins d’un mois et où un tiers d’entre eux sont conclus pour un jour ou moins. Il me paraît normal de responsabiliser les employeurs en même temps que l’on renforce l’accompagnement. Tel est le sens de ce bonus-malus.
Je rappelle que les personnes en alternance de contrats courts, qui, aujourd’hui, bénéficient très difficilement des services de Pôle emploi, feront l’objet d’un accompagnement spécifique à partir du 1er janvier. Cet accompagnement sera extrêmement renforcé dès les deux premiers mois pour les demandeurs d’emploi nouveaux, avec deux demi-journées d’accompagnement, contre quarante-cinq minutes prévues jusqu’alors. Les entreprises qui ne trouvent pas de personnes à recruter bénéficieront, elles aussi, d’un accompagnement spécifique : au bout d’un mois, Pôle emploi viendra les aider à trouver une solution.
Je rappelle aussi, en cette période de session budgétaire, qu’il est de notre responsabilité à tous que le système soit robuste dans le temps. Le déficit de l’assurance chômage – garanti par l’État – est aujourd’hui de 37 milliards d’euros, contre 35 milliards d’euros l’année dernière. Par conséquent, notre objectif est de faire une réforme juste, efficace, mais aussi à même de pérenniser le système.
Il y a beaucoup de choses à dire sur les maisons de l’emploi. Je m’exprimerai à leur sujet au moment de l’examen des amendements les concernant.
En ce qui concerne le plan d’investissement dans les compétences, je poursuivrai sa montée en puissance, avec un nouvel engagement de près de 3 milliards d’euros, financé, pour moitié, par des crédits budgétaires et, pour moitié, par la contribution, via France compétences, des entreprises.
L’année 2020, dans la continuité de 2019, sera l’année du plein déploiement des actions, dans quatre directions : la mise en œuvre des parcours de formation déployés dans les pactes régionaux, conclus avec seize des dix-huit régions ayant contractualisé avec l’État – la coordination avec les régions est très forte sur le plan d’investissement dans les compétences – ; la consolidation du Pacea et de la garantie jeunes ; la recherche d’innovations pour atteindre les invisibles ; enfin, des expérimentations ciblées sur les plus vulnérables.
Pour terminer, je veux souligner que la mise en œuvre des réformes a été importante cette année. En effet, 2019 aura vu la mise en place de France compétences, qui est tout à fait opérationnel quelques mois après son existence, la création de onze opérateurs de compétences, eux aussi parfaitement opérationnels, la réforme de l’apprentissage, dont les résultats sont déjà importants. Ainsi, au premier semestre, le nombre d’apprentis a augmenté de 8, 4 %. Cette hausse est de 17 % pour les maisons familiales rurales, de 27 % pour les Compagnons du devoir et de 10 % dans l’industrie, où le nombre d’apprentis devrait doubler au cours des trois prochaines années. Ce nombre est également en augmentation dans les chambres de métiers et de l’artisanat. La transition se passe de façon rapide, mais efficace.
S’agissant des compensations aux régions, je rappelle l’engagement du Premier ministre, que l’on retrouve à la fois dans ce budget et dans les décisions de France compétences, de compenser à la fois la perte de la compétence apprentissage, pour les régions dont les ressources excédaient les dépenses d’apprentissage, conformément aux lois sur la décentralisation, et les dépenses de fonctionnement, que les régions pourront abonder à hauteur de 138 millions d’euros supplémentaires et de 180 millions d’euros, au titre des dépenses d’investissement. Au total, ce sont plus de 500 millions d’euros qui seront transférés aux régions, entre France compétences et le budget de l’État, pour accompagner cette transition.
Je note que certaines régions jouent parfaitement le jeu, dans l’intérêt des jeunes et des entreprises. En revanche, d’autres ont décidé brutalement de supprimer des financements de fin d’année à des CFA. Nous avons trouvé des solutions pour éviter que ces derniers ne se retrouvent en difficulté financière, mais j’avoue que cette décision, qui frappe les jeunes et les entreprises, me choque, alors que les régions ont encore la compétence et les financements.
En ce qui concerne les programmes 111 et 115, l’année 2020 sera importante, avec l’organisation de l’élection dans les TPE, ce qui explique la hausse des crédits.
Pour ce qui est de la réduction des effectifs, le cas de l’inspection du travail a été évoqué. Or, en France, il y aura un agent de contrôle pour 8 727 salariés, quand la recommandation du BIT est d’un agent au moins pour 10 000 salariés. Nous faisons donc mieux que cette recommandation, ce qui est une bonne chose. Les priorités sont au nombre de quatre : la lutte contre le travail illégal, la fraude au travail détaché, l’égalité entre les hommes et les femmes ainsi que la santé et la sécurité au travail.
Pour conclure, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite mettre en avant la cohérence de ce budget, qui porte deux grandes ambitions : l’intensification de l’effort d’inclusion et d’émancipation dans l’emploi et la stimulation de la création d’emplois, par la libération de l’alternance et de la formation professionnelle.