Intervention de Chantal Deseyne

Réunion du 11 décembre 2019 à 15h00
Usages dangereux du protoxyde d'azote — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Chantal DeseyneChantal Deseyne :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui la proposition de loi de notre collègue Valérie Létard visant à protéger les mineurs des usages dangereux du protoxyde d’azote.

Étant la dernière intervenante dans la discussion générale, je ne reviendrai pas sur les usages médicaux et culinaires du protoxyde d’azote. Je centrerai mon propos sur ses usages détournés en raison de son effet euphorisant.

Ces usages détournés sont observés de manière discontinue depuis 1999. Jusqu’ici, ils se cantonnaient aux milieux festifs alternatifs, tels que les free-parties et les teknivals.

À partir de 2015, son usage se répand et se banalise. Il est extrait de bonbonnes industrielles et conditionné dans des ballons de baudruche vendus pour une somme modique de 1 à 2 euros l’unité. Si le protoxyde d’azote est apprécié pour ses effets fugaces et euphorisants, il est aussi utilisé pour potentialiser ou moduler les effets d’autres produits consommés. Facilement accessible sur internet, il est aussi proposé et vendu dans des bars et des établissements de nuit.

À partir de 2017, la visibilité du protoxyde d’azote dans l’espace public augmente considérablement. À la fin de 2018, l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies a publié un rapport soulignant la visibilité du protoxyde d’azote dans l’espace public de la métropole lilloise.

Différents profils de consommateurs ont été identifiés. Il s’agit d’habitués des free-parties consommant le protoxyde d’azote en association avec d’autres produits, des collégiens et lycéens avides d’expérimentations dans un cadre collectif et « convivial », des jeunes impliqués dans le trafic de drogue et des prostituées qui l’utilisent pour mieux supporter leur condition.

L’augmentation de la consommation de protoxyde d’azote semble essentiellement le fait d’une population jeune, voire très jeune. C’est d’autant plus grave que les dangers du gaz ne sont pas suffisamment connus.

Plusieurs études ont fait état d’un risque de séquelles neurologiques liées à un usage détourné du gaz pouvant entraîner une atteinte de la moelle épinière – il s’agit là d’une complication grave et peu connue –, mais également des troubles graves du rythme cardiaque pouvant aller jusqu’à la mort.

L’intervention du législateur est donc nécessaire. La protection de la population constitue notre priorité. Je pense notamment à la protection des mineurs, qui sont plus vulnérables.

La proposition de loi de Valérie Létard vise à interdire la vente de protoxyde d’azote aux mineurs, dans les commerces comme en ligne. Elle punit l’incitation des mineurs à consommer ce gaz et oblige les intermédiaires numériques à en informer leurs abonnés. Son article 2 pénalise l’incitation d’un mineur à faire un usage détourné d’un produit de consommation courante pour en obtenir des effets psychoactifs. Il couvre ainsi le protoxyde d’azote et élargit opportunément son champ à d’autres substances.

Ce texte contribue à l’information de nos concitoyens en obligeant les industriels à indiquer sur l’emballage la dangerosité du produit et accompagne la politique de prévention menée à l’école. Il a le mérite de présenter un dispositif équilibré, conjuguant protection des mineurs et responsabilisation des industriels face à l’usage détourné du protoxyde d’azote. Mais l’interdiction de la vente aux mineurs ne suffira malheureusement pas. Afin de compléter le travail des sénateurs, je profite de l’examen de cette proposition de loi pour appeler le Gouvernement à lancer une campagne d’information destinée aux usagers, notamment les plus jeunes, sur la dangerosité du protoxyde d’azote.

Le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi.

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