Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, née en 1949 d’initiatives aussi bien anglo-françaises qu’américaines, l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord a bien joué son rôle de défense de l’Europe occidentale face aux appétits soviétiques jusqu’en 1989. Toutefois, depuis la dissolution du Pacte de Varsovie, en 1991, ses objectifs n’ont jamais été redéfinis.
Les opérations conduites dans les Balkans – d’abord en Bosnie, puis au Kosovo – et celles menées en Afghanistan ont pu fournir, en apparence, de nouvelles raisons d’être à l’OTAN, et les provocations russes dans la mer Baltique ou dans l’Atlantique Nord, comme l’agression contre l’Ukraine, ont ressuscité la notion d’une menace extérieure, Poutine étant, de ce point de vue, une bénédiction pour les atlantistes qui essaient aujourd’hui de faire de la Russie une nouvelle Union soviétique, qu’il faudrait contenir.
En réalité, qu’en est-il ? Certes, la Russie mène une politique agressive aux portes de l’Europe, à coups de désinformation et d’opérations obliques. Elle essaie de déstabiliser les pays européens de l’intérieur, notamment en périodes électorales, mais pas seulement. Cependant, elle reste une puissance économique dont le PIB est à peine égal à celui de l’Espagne et dont le budget militaire s’élevait, en 2018, à 61 milliards de dollars, quand celui des membres de l’OTAN, hors États-Unis et Canada, s’établissait à 282 milliards de dollars.
Certes, l’annexion de la Crimée et l’ingérence russe dans le Donbass ukrainien ont semé l’effroi dans les pays voisins. À cet égard, l’OTAN a bien fait de lancer des manœuvres militaires dans les pays baltes. Avec leurs sanctions, les Occidentaux prennent le risque de pousser la Russie dans les bras de la Chine, mais nous ne saurions montrer la moindre faiblesse militaire face à Moscou. Pour résumer, oui, la Russie appelle la vigilance ; non, elle n’est pas une menace globale.
Après Moscou, regardons vers Washington, pour prendre en la mesure d’une évolution qui ne laisse pas d’inquiéter les Européens, habitués à voir l’OTAN comme une protection irremplaçable.
En effet, les Américains se sont lassés, au fil des années, du rôle de gendarme du monde. Fût-ce de manière plus courtoise, la question restera posée après Trump, puisque Barack Obama avait déjà commencé à exprimer cette lassitude.