Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le chiffre fait froid dans le dos : tous les deux jours, en France, un agriculteur met fin à ses jours. Derrière ce geste irréparable, il y a parfois, à l’évidence, des raisons personnelles, mais il y a toujours le malaise qui ronge depuis plusieurs années l’agriculture française.
Le monde paysan va mal ! Les difficultés financières et les problèmes de trésorerie touchent aujourd’hui toutes les filières, ou presque. Le revenu moyen des agriculteurs est nettement inférieur au SMIC, pour une moyenne de 54 heures travaillées par semaine. Et combien d’entre eux vivent au-dessous du seuil de pauvreté ?
Le suicide est souvent l’acte ultime d’un homme ou d’une femme qui a tout tenté pour sauver son exploitation, en vain. À ce sentiment d’échec peuvent s’ajouter l’isolement social, la surcharge de travail, mais aussi le phénomène de l’agri-bashing, véritable guerre d’usure psychologique contre le monde agricole.
Cette pression supplémentaire sur la profession est d’autant plus insupportable que certains médias semblent davantage prêter attention aux pratiques totalitaires de certaines associations qu’aux graves difficultés des agriculteurs.
Comment comprendre que, un jour de tempête de neige, ils soient considérés comme des héros pour, les premiers, avoir dégagé nos routes, et que, le lendemain, ils soient montrés du doigt, pour ne pas dire jetés en pâture, lorsqu’un problème sanitaire ou environnemental resurgit dans le débat public ?
Pourtant, quel autre secteur d’activité a réussi, en à peine vingt ans, à réaliser autant d’efforts et à bouleverser autant ses pratiques pour réduire son empreinte écologique ?
Si notre pays a une longue tradition agricole, il semble aujourd’hui avoir l’agriculture honteuse. Pourquoi n’entend-on jamais rappeler que l’agriculture représente 7 milliards d’euros d’excédents commerciaux, ou encore que les agriculteurs soutiennent l’économie locale et assurent l’entretien des espaces naturels, ce que personne ne pourrait faire à leur place ?
Si nombre d’agriculteurs sont aujourd’hui désespérés, c’est parce qu’ils se sentent abandonnés. Ils sont abandonnés par la Commission européenne, tout d’abord, qui envisage, avec l’accord implicite du Président de la République, de baisser de 15 % le budget de la PAC.