Intervention de Jérôme Bertin

Commission d'enquête Incendie de l'usine Lubrizol — Réunion du 12 décembre 2019 à 9h00
Audition de Mm. Jérôme Bertin directeur général de france victimes et david delaunay directeur général de l'association d'aide aux victimes et d'information sur les problèmes pénaux avipp76

Jérôme Bertin, directeur général de France Victimes :

Merci d'avoir accédé à notre demande d'audition pour évoquer l'incendie de Lubrizol et apporter un éclairage différent à votre commission, sur un volet sans doute moins abordé lors des auditions précédentes. Nous ne nous sommes pas complètement substitués à l'État : les associations d'aide aux victimes travaillent de concert avec les autorités publiques. Mais il suffit qu'une personne passe à côté des dispositifs pour qu'on se dise que, collectivement, on aurait pu mieux faire.

Nous avons souhaité intervenir à deux voix, puisque ces dispositifs s'entendent aussi bien dans le cadre d'une coordination nationale que d'une intervention locale. Le réseau France Victimes est organisé ainsi depuis environ 40 ans. Au départ, sous l'impulsion de Robert Badinter, l'idée était d'avoir une association d'aide aux victimes conventionnée avec les autorités, et notamment avec le ministère de la justice, pour apporter au quotidien un soutien et un accompagnement à toute personne qui est, ou s'estime, victime.

Fédérées au sein du réseau France victimes, environ 132 associations maillent tout le territoire, avec au moins une association par ressort de tribunal qui, par son conventionnement avec la justice et par les textes, permet d'apporter une aide, une assistance et une prise en charge globale à toute victime. Cette prise en charge se fait par l'intermédiaire de nos 1 500 professionnels de terrain, juristes, psychologues, travailleurs sociaux essentiellement. Entre 300 000 à 320 000 nouvelles personnes sont aidées par notre réseau chaque année.

Cet accompagnement est quotidien, mais s'inscrit dans des dispositifs plus larges ou spécifiquement mis en place lorsqu'il s'agit d'événements collectifs. D'où notre demande d'audition. Des instructions et des décrets prévoient la mise en place de dispositifs d'accueil, de recensement et d'accompagnement des victimes, qui n'ont pas forcément été mis en place dans le bon calendrier pour permettre à toute personne impactée de bénéficier d'une proposition d'aide.

L'intervention se fait à deux niveaux. La fédération France Victimes joue son rôle en matière d'événements collectifs, d'abord parce qu'elle porte au quotidien le numéro d'aide aux victimes 116 006. Ce numéro, qui appartient au ministère de la justice, est actif toute l'année, de 9 heures à 19 heures, sept jours sur sept. En cas d'événements collectifs, il peut être diffusé auprès du grand public. Il peut éventuellement procéder à des appels sortants, pour aller au-devant de victimes répertoriées et leur faire une proposition d'aide.

La fédération joue aussi un rôle avec son réseau de coordination de la prise en charge des victimes puisque, par expérience, nous savons que lorsqu'un événement collectif survient, les victimes ou les proches des victimes ne sont pas forcément domiciliés sur le lieu de survenance de l'événement. Par conséquent, plusieurs associations de notre réseau peuvent se retrouver mobilisées pour accompagner des victimes. Le rôle de la fédération est de s'assurer qu'au même moment, toutes les victimes, quelle que soit leur domiciliation, aient accès à la même information et au même accompagnement, en temps réel. Ainsi, après l'attentat de Nice, 82 de nos associations ont suivi des proches ou des victimes directes de l'événement.

Dès les premiers instants, la fédération se met à disposition des autorités. Sur le plan local, les associations d'aide aux victimes sont conventionnées par les cours d'appel. À partir de 2020, elles auront un agrément administratif délivré par la justice. Elles peuvent être réquisitionnées par les autorités judiciaires pour aller au-devant des victimes. Un guide méthodologique de prise en charge des victimes d'événements collectifs a été réédité en novembre 2017 - il existe depuis 2004. De même, le guide Orsec, dans sa version G6, prévoit, dans le cas de nombreuses victimes, la mise en place de dispositifs et de structures d'accueil car les numéros de téléphone ne suffisent pas, il faut des structures physiques.

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