Intervention de Marie-Pierre de La Gontrie

Réunion du 17 décembre 2019 à 14h30
Lutte contre les contenus haineux sur internet — Article 1er

Photo de Marie-Pierre de La GontrieMarie-Pierre de La Gontrie :

Voici donc l’article clé, celui qui a soulevé toutes les controverses. De fait, il donne la possibilité aux plateformes de retirer dans un délai très bref, inférieur à vingt-quatre heures, des contenus considérés comme manifestement illicites, car manifestement haineux. La possibilité, que dis-je ? Il s’agira d’une obligation.

Dans la discussion générale, nous avons exprimé notre inquiétude sur l’attitude de prévention qu’adopteront les plateformes : compte tenu de la sanction extraordinairement lourde prévue par ce texte, il est évident qu’elles préféreront retirer des contenus plutôt que d’encourir une condamnation.

Puisque nous savons, depuis que Mme la garde des sceaux s’est exprimée, que des contenus de presse pourront également être visés, que faire de l’intervention du juge, qui, seul, peut mettre un frein à la liberté d’expression ? C’est à cette question que le présent amendement vise à répondre.

Nous proposons de conserver le retrait dans un délai de vingt-quatre heures, mesure phare du dispositif, mais en prévoyant que, en cas de contestation, le juge des référés devra être immédiatement saisi par la plateforme, le retrait n’étant alors que provisoire. Le juge des référés se prononcera sous quarante-huit heures sur la pertinence du retrait.

Dès lors qu’une personne proteste, il importe qu’un juge judiciaire évalue si la plateforme a eu raison, ou non, de procéder au retrait, voire de censurer. Dès lors que Mme la garde des sceaux a précisé que le mécanisme s’appliquerait aussi à la presse, c’est bien le moins que, là où la loi de 1881 prévoit des protections considérables, mais justes, de la liberté d’expression de la presse, un juge des référés doive être saisi avant qu’on ne retire un contenu jugé illicite par une plateforme.

Le dispositif que nous proposons tient à égale distance la lutte contre les contenus haineux et la préservation de la liberté d’expression. Partant, il réalise le juste équilibre qui n’a pas été trouvé dans le texte initial, comme l’a souligné le rapporteur, mais qui, selon nous, n’est pas davantage assuré par la suppression pure et simple de l’article 1er.

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