Je ne reviendrai pas sur l’amendement de M. Montaugé, dans la mesure où M. le rapporteur a bien exposé les raisons pour lesquelles il ne nous semblait pas souhaitable d’inclure les moteurs de recherche dans le champ des plateformes concernées. Je répète que nous sommes d’accord sur le fond, mais que nous estimons qu’il existe un risque qu’une telle disposition soit déclarée contraire à la Constitution ou aux conventions internationales. Nous le regrettons, mais c’est la raison pour laquelle j’ai défendu l’amendement n° 57 au nom du Gouvernement.
Au sujet du CSA, monsieur Ouzoulias, vous serez d’accord avec moi pour reconnaître qu’il faut bien une autorité indépendante pour assurer la supervision des plateformes. S’agissant de contenus, en effet, il n’est pas souhaitable que le Gouvernement s’en occupe.
Il fallait opérer un choix entre diverses autorités indépendantes. Le CSA a une expérience certaine en matière de contenus, notamment à la télévision. Il est évident que les usages et les pratiques des Français évoluant, la compétence du CSA doit s’étendre au numérique. Il est normal qu’il s’adapte aux usages du temps. Cela représente un défi pour le CSA, notamment technologique, parce qu’il faut être capable de tout contrôler.
Cela étant, c’est un défi pour l’ensemble de la puissance publique : nous devons nous doter des compétences adéquates, parfois en payant le prix fort. Pour le dire plus clairement, il faut payer des personnes capables de discuter avec les ingénieurs de Facebook et de Google et de comprendre ce qui se passe. Il s’agit d’une nécessité pour la puissance publique si elle veut continuer à « faire son boulot », si je puis m’exprimer ainsi. C’est un défi pour le CSA, mais aussi pour l’Arcep, pour la CNIL, et pour le Gouvernement de manière générale.
Il est nécessaire d’adapter les outils et les pratiques aux usages, et il nous a semblé que, parmi les régulateurs et les autorités indépendantes, le choix du CSA était tout à fait justifié.
En ce qui concerne l’interopérabilité, je vais répéter ce que j’ai dit plus tôt : le Gouvernement français assume publiquement l’idée que l’interopérabilité est un outil auquel il faut avoir recours – parmi d’autres outils, bien sûr, qui peuvent aller jusqu’à l’adoption de mesures structurelles – pour réguler les très grandes plateformes. Il faut utiliser cet outil, notamment dans le cadre de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles, pour réduire l’empreinte d’acteurs qui, économiquement et démocratiquement, est devenue trop forte. Cependant, nous pensons qu’il faut d’abord agir au niveau européen.
Enfin, je continue de penser que votre approche pose un problème philosophique, car elle consiste à dire, si je la transpose dans le monde physique, qu’il ne faudrait pas réguler un marché sur lequel des individus vendent des choses dangereuses, mais créer un marché parallèle pour que les consommateurs puissent poursuivre leurs transactions. Cela pose un vrai problème philosophique : je pense que le rôle de l’État est précisément de contrôler l’ensemble des opérations sur un marché donné et d’empêcher que ne se produisent des choses illégales.
Une fois que l’on a dit cela, je suis totalement favorable à l’interopérabilité et je pense qu’il faudra avancer dans cette voie.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements de M. Ouzoulias.