Je dois effectivement intervenir à 17 heures 30 dans l'hémicycle pour les conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à agir contre les violences au sein de la famille.
Le projet de loi instituant l'AMP avec un tiers donneur pour les couples de femmes, il convenait d'en tirer les conséquences sur la filiation, ce à quoi procède l'article 4, qui a suscité de nombreuses interrogations légitimes. Plusieurs hypothèses ont été soumises par le Gouvernement au Conseil d'État, différentes options étant envisageables : l'extension du dispositif de droit commun, la création d'un régime ad hoc applicable à tous les couples réalisant une AMP avec un tiers donneur et la création d'un dispositif réservé aux couples de femmes. Les débats ont été intenses entre les tenants des différentes solutions, chacune présentant des avantages et des inconvénients, relevés par les avis et les rapports préparatoires au projet de loi qui ont opté pour l'une ou l'autre option. Les pays étrangers qui ont ouvert l'AMP aux couples de femmes ont également retenu des solutions diverses, signe de la complexité du sujet.
Plusieurs principes et objectifs se sont imposés à la décision du Gouvernement. Les quatre principes retenus sont simples : offrir les mêmes droits aux enfants concernés - le Gouvernement a affirmé le choix de l'égalité -, apporter une sécurité juridique aux deux mères et à leurs enfants - évolution forte et juste, la filiation n'est pas établie sur la vraisemblance biologique, mais sur un engagement commun -, créer une procédure simple, sans démarche supplémentaire pour les couples de femmes, éviter, enfin, de modifier le droit applicable aux couples hétérosexuels en matière de filiation. Dès lors, le Gouvernement a opté pour la création d'un régime spécifique aux couples de femmes faisant appel à un tiers donneur dans le cadre d'une AMP.
Le débat sur l'article 4 a été intense à l'Assemblée nationale, en commission comme en séance publique, et a permis d'enrichir le texte. L'article comporte trois éléments. D'abord, les deux femmes devront consentir devant notaire (comme les couples hétérosexuels) à réaliser une AMP avec un tiers donneur et s'engager à cette occasion à devenir les mères de l'enfant. Ensuite, cette reconnaissance conjointe devra être produite, avec le certificat d'accouchement, à l'officier d'état civil, afin de permettre l'établissement de la filiation. Enfin, l'acte de naissance devra faire mention de la reconnaissance conjointe.
Le dispositif a évolué à l'Assemblée nationale, sans que soient remis en cause ses objectifs. La place du nouveau régime dans le code civil a ainsi été modifiée : initialement, le projet de loi créait un nouveau titre VII bis au sein du titre Ier du code civil ; finalement un nouveau chapitre V sur le régime ad hoc relatif à l'AMP avec tiers donneur a été intégré au titre VII. Ce choix permet de mieux rendre compte du socle commun aux différents modes de filiation, sans bouleverser le droit de la filiation puisque les quatre premiers chapitres du titre premier concernant la filiation établie sur la vraisemblance biologique ne sont pas modifiés. En outre, les députés ont précisé la notion de reconnaissance conjointe. Initialement, il s'agissait d'une déclaration anticipée de volonté (DAV), mais le dispositif a fait l'objet de critiques quant à son caractère stigmatisant pour les couples de femmes. À la différence de la reconnaissance figurant à l'article 316 du code civil, qui intervient pendant la grossesse, voire après la naissance de l'enfant, la reconnaissance conjointe est réalisée avant la conception et ne concerne que les couples de femmes. Il ne peut y avoir de confusion possible entre les deux régimes.
Le Gouvernement a privilégié la voie de l'équité avec une solution juridique sûre et porteuse d'égalité. L'article 4 tire les conséquences indispensables à l'ouverture de l'AMP aux couples de femmes, afin de sécuriser la filiation, notamment à l'égard de la femme qui n'accouche pas. Le dispositif fait ainsi obstacle à l'éventuelle reconnaissance de l'enfant par un tiers. Il est simple et sécurisant pour les mères, comme pour les enfants.