Intervention de Frédérique Vidal

Commission spéciale sur la bioéthique — Réunion du 18 décembre 2019 à 16h30
Audition de mmes nicole belloubet garde des sceaux ministre de la justice et frédérique vidal ministre de l'enseignement supérieur de la recherche et de l'innovation et de M. Adrien Taquet secrétaire d'état auprès de la ministre des solidarités et de la santé

Frédérique Vidal, ministre :

S'agissant du dépistage préconceptionnel, celui-ci est d'ores et déjà autorisé en France dans le cadre d'une prise en charge médicale spécialisée et d'un conseil génétique. L'élargir à toute personne ou à tout couple fragiliserait nos principes et nos valeurs. La question se pose, notamment, de la définition de la liste de pathologies. Faut-il la définir par rapport à la gravité d'une maladie, alors même que les thérapies évoluent ? Par ailleurs, certaines pathologies ne sont pas causées par un seul gène défectueux. Partant, la revendication du droit à un enfant sain impliquerait de demander un séquençage complet du génome. Il faut également veiller à ne pas stigmatiser des couples qui souhaiteraient ne pas savoir, ou encore les personnes atteintes de ces maladies.

Pour toutes ces questions, qui heurtent nos valeurs éthiques, nous ne disposons pas de réponses précises, rassurantes et rationnelles. Voilà pourquoi nous n'avons pas souhaité étendre le dépistage préconceptionnel à des cas non prévus actuellement.

Pour ce qui concerne la révision des lois de bioéthique, tout d'abord, il est toujours possible de les modifier sans pour autant opérer une révision globale. Le Gouvernement souhaitait initialement une révision tous les 7 ans, mais l'Assemblée nationale a préféré retenir un délai de 5 ans, et nous l'avons suivie.

Madame Blondin, la phagothérapie n'a pas sa place dans une loi de bioéthique, les phages, les virus et les bactériophages n'étant pas des produits du corps humain. Je donnerai un exemple extrême : de même qu'il n'est pas besoin de prendre une loi de bioéthique pour procéder à une amputation, on peut recourir à la phagothérapie à la seule condition que ces actes soient contrôlés ; les autorisations sont d'ailleurs données au coup par coup et non de façon générale. Ces protocoles seront inclus dans le programme prioritaire de recherche sur la résistance aux antibiotiques.

Les recherches sur les anomalies du développement génital et sur les maladies rares ne relèvent pas davantage de la loi de bioéthique.

Monsieur Daudigny, le statut particulier de l'embryon est toujours reconnu dans ce projet de loi, comme il l'est dans les conventions signées par la France, dont la plus importante est la convention d'Oviedo. Pour être autorisée, la recherche sur un embryon doit respecter quatre critères : la pertinence scientifique ; l'inscription dans une finalité médicale ; l'utilisation exclusive de matériel humain, qu'il s'agisse d'embryons ou de cellules souches embryonnaires ; le respect de règles d'éthique, lesquelles sont de niveau international.

Le respect de ces critères conditionne également la publication des études afférentes à ces recherches dans les revues internationales, puisqu'il faut produire le numéro d'agrément pour pouvoir publier.

Pour ce qui concerne la durée d'observation, il est d'ores et déjà possible d'observer des embryons au-delà de 14 jours, mais nous proposons d'inscrire dans la loi une durée maximale. Ce faisant, nous nous référons non pas à ce que la science sait faire, mais à ce qui nous paraît souhaitable en termes de délai.

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