Intervention de André Lardeux

Réunion du 30 janvier 2007 à 21h30
Droit opposable au logement — Discussion générale suite

Photo de André LardeuxAndré Lardeux :

Aussi, je ne voterai pas le texte proposé, malgré les intentions affichées, les éminentes qualités de notre rapporteur et le remarquable travail que ce dernier a réalisé dans des conditions fort difficiles.

Tout d'abord, je ne crois pas que l'article 7 soit une bonne solution ; je ne crois pas que cette mesure, qui risque d'amener l'extension et la pérennisation de l'exportation du minimum vieillesse, soit conforme à l'équité et soit dans les moyens de la France. Il serait d'ailleurs souhaitable de connaître le coût exact de cette exportation pour les décennies à venir, d'autant que nos déficits sociaux sont loin d'être comblés !

Pour ce qui est du logement, comme tous ici, je suis convaincu que chacun a droit à un logement convenable et qu'il n'est pas très glorieux pour notre modèle social, dont c'est l'un des grands échecs, que le logement soit difficile d'accès pour un nombre trop grand des habitants de ce pays.

Cependant, je ne voterai pas le droit opposable au logement, car, à mon sens, nous n'avons ni les moyens techniques ni les moyens financiers. De plus, je ne pense pas qu'il soit bon de donner des espoirs, lesquels risquent d'être suivis de grandes frustrations.

Si je reconnais qu'il y a essai d'actions sur les effets, à mon sens il n'y en a pas assez sur les causes du problème. Ce que l'on nous propose risque de ne pas résister à l'usure du temps.

Je pose trois séries de questions, parmi d'autres, pour étayer ces craintes.

Premièrement, les entreprises du bâtiment ont-elles la capacité d'assurer la construction des logements nécessaires ? C'est peu probable. Elles peinent déjà beaucoup et se heurtent au goulot d'étranglement de la main-d'oeuvre. Elles devront donc recourir à une main-d'oeuvre extérieure. Cette situation va tirer les salaires vers le haut, ce qui, dans les professions concernées, est fort heureux, mais va augmenter le coût des réalisations et créer ainsi des difficultés d'accès nouvelles pour de nombreux demandeurs.

Deuxièmement, que pourrons-nous dire à tous ceux qui sont en attente d'un logement depuis plusieurs années, notamment les jeunes et les jeunes ménages, et à qui l'on va faire savoir qu'ils doivent attendre 2012, ou plus, car il y a des personnes plus prioritaires qu'eux ?

Troisièmement, que se passera-t-il si les bénéficiaires éventuels refusent les logements ? Que se passera-t-il si les maires des communes d'accueil font part de leur réserve, voire de leur opposition, à l'arrivée de cas sociaux supplémentaires sur leur territoire ? Est-on prêt à user des moyens de coercition nécessaires pour assurer l'effectivité de ce droit ?

Si l'on veut que ce droit soit vraiment effectif, est-ce bien à l'État qu'il faut le rendre opposable plutôt qu'à d'autres collectivités ?

En outre, il eût été bon de prévoir des dispositions en faveur des propriétaires privés, pour que ceux-ci soient mieux considérés qu'ils ne le sont actuellement. Ainsi, il faudrait éviter que le fisc ne les pourchasse dans le cas où ils louent un logement à un prix raisonnablement inférieur à celui du marché à des personnes défavorisées, membres de leur famille ou non. Il y a là une incohérence certaine dans l'action de l'État.

Dans ces conditions et par honnêteté intellectuelle, il ne m'est pas possible de considérer que les propositions qui nous sont présentées seront efficaces et que, si elles étaient adoptées, tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Aussi, je m'abstiendrai, tout en soulignant que je n'ai pas entendu la moindre proposition d'une solution de remplacement crédible.

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